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Citations de Roland Barthes (722)


Roland Barthes
Le fascisme, ce n'est pas d'empêcher de dire, c'est d'obliger à dire.
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Chaque mot poétique est ainsi un objet inattendu, une boîte de Pandore d'où s'envolent toutes les virtualités du langage ; il est donc produit et consommé avec une curiosité particulière, une sorte de gourmandise sacrée. Cette Faim du Mot, commune à toute la poésie moderne, fait de la parole poétique une parole terrible et inhumaine. Elle institue un discours plein de trous et plein de lumières, plein d'absences et de signes surnourissants, sans prévision ni permanence d'intention et par là si opposé à la fonction sociale du langage, que le simple recours à une parole discontinue ouvre la voie de toutes les Surnatures.
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Roland Barthes
Les pratiques sexuelles sont banales, pauvres, vouées à la répétition et cette pauvreté est disproportionnée à l’émerveillement du plaisir qu'elles procurent.
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Écrire dans le plaisir m'assure-t-il - moi, écrivain - du plaisir de mon lecteur ? Nullement.
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L'écriture, c'est ce neutre, ce composite, cet oblique où fuit notre sujet, le noir-et-blanc où vient se perdre toute identité, à commencer par celle-là même du corps qui écrit.
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Un jour, il y a bien longtemps, je tombai sur une photographie du dernier frère de Napoléon, Jérôme (1852). Je me dis alors, avec un étonnement que je n'ai jamais pu réduire : "Je vois les yeux qui ont vu l'Empereur." Je parlais parfois de cet étonnement mais comme personne ne semblait le partager, ni même le comprendre (la vie est ainsi faite à coups de petites solitudes), je l'oubliai.
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Solitude = n'avoir personne chez soi à qui pouvoir dire : je rentrerai à telle heure ou à qui pouvoir téléphoner (dire) : voilà, je suis rentré.
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Cacher
Imposer à ma passion le masque de la discrétion ( de l'impassabilité) : c'est là une valeur proprement héroique " il est indigne des grandes âmes de répandre autour d'elles le trouble qu'elles ressentent" ( Clothilde de Vaux ).
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L'EFFRACTION DU SENS

Le haïku a cette propriété quelque peu fantasmagorique, que l'on s'imagine toujours pouvoir en faire soi-même facilement. On se dit : quoi de plus accessible à l'écriture spontanée que ceci (de Buson) :

C'est le soir, l'automne,
Je pense seulement
A mes parents.

Le haïku fait envie : combien de lecteurs occidentaux n'ont pas rêvé de se promener dans la vie, un carnet à la main, notant ici et là des "impressions", dont la brièveté garantirait la perfection, dont la simplicité attesterait la profondeur (en vertu d'un double mythe, l'un classique, qui fait de la concision une preuve d'art, l'autre romantique, qui attribue une prime de vérité à l'improvisation).
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"Le bifteck et les frites".

Le bifteck participe à la même mythologie sanguine que le vin. C'est le cœur de la viande, c'est la viande à l'état pur, et quiconque en prend, s'assimile la force taurine. De toute évidence, le prestige du bifteck tient à sa quasi-crudité : le sang y est visible, naturel, dense, compact et sécable à la fois ; on imagine bien l'ambroisie antique sous cette espèce de matière lourde qui diminue sous la dent de façon à bien faire sentir dans le même temps sa force d'origine et sa plasticité à s’épancher dans le sang même de l'homme. Le sanguin est la raison d'être du bifteck : les degrés de sa cuisson sont exprimés, non pas en unités caloriques, mais en images de sang; le bifteck est saignant (rappelant alors le flot artériel de l'animal égorgé), ou bleu (c'est le sang lourd, le sang pléthorique des veines qui est ici suggéré par le violine, état superlatif du rouge). La cuisson, même modérée, ne peut s'exprimer franchement; à cet état contre nature, il faut un euphémisme : on dit que le bifteck est à point, ce qui est à vrai dire donné plus comme une limite que comme une perfection.

Manger le bifteck saignant représente donc à la fois une nature et une morale. Tous les tempéraments sont censés y trouver leur compte, les sanguins par identité, les nerveux et les lymphatiques par complément. Et de même que le vin devient pour bon nombre d'intellectuels une substance médiumnique qui les conduit vers la force originelle de la nature, de même le bifteck est pour eux un aliment de rachat, grâce auquel ils prosaïsent leur cérébralité et conjurent par le sang et la pulpe molle la sécheresse stérile dont sans cesse on les accuse. La vogue du steak tartare, par exemple, est une opération d'exorcisme contre l'association romantique de la sensibilité et de la maladivité : il y a dans cette préparation tous les états germinants de la matière: la purée sanguine et le glaireux de l'œuf, tout un concert de substances molles et vives, une sorte de compendium significatif des images de la préparturition.

Comme le vin, le bifteck est, en France, élément de base, nationalisé plus encore que socialisé ; il figure dans tous les décors de la vie alimentaire : plat, bordé de jaune, semelloïde, dans les restaurants bon marché; épais, juteux, dans les bistrots spécialisés ; cubique, le cœur tout humecté sous une légère croûte carbonisée, dans la haute cuisine ; il participe à tous les rythmes, au confortable repas bourgeois et au casse- croûte bohème du célibataire ; c'est la nourriture à la fois expéditive et dense; il accomplit le meilleur rapport possible entre l'économie et l'efficacité, la mythologie et la plasticité de sa consommation.

De plus, c'est un bien français (circonscrit, il est vrai, aujourd'hui par l'invasion des steaks américains). Comme pour le vin, pas de contrainte alimentaire qui ne fasse rêver le Français de bifteck. À peine à l'étranger, la nostalgie s'en déclare, le bifteck est ici paré d'une vertu supplémentaire d'élégance, car dans la complication apparente des cuisines exotiques, c'est une nourriture qui joint, pense-t-on, la succulence à la simplicité. National, il suit la cote des valeurs patriotiques : il les renfloue en temps de guerre, il est la chair même du combattant français, le bien inaliénable qui ne peut passer à l'ennemi que par trahison. Dans un film ancien (Deuxième Bureau contre Kommandantur), la bonne du curé patriote offre à manger à l'espion boche déguisé en clan- destin français : « Ah, c'est vous, Laurent ! Je vais vous donner de mon bifteck. » Et puis, quand l'espion est démasqué: « Et moi qui lui ai donné de mon bifteck ! » Suprême abus de confiance.
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L'affaire Minou Drouet s’est présentée pendant longtemps comme une énigme policière : est-ce elle ou n’est-ce pas elle ? On a appliqué à ce mystère les techniques habituelles de la police (moins la torture, et encore !) : l’enquête, la séquestration, la graphologie, la psychotechnique et l’analyse interne des documents. Si la société a mobilisé un appareil quasi judiciaire pour tenter de résoudre une énigme « poétique », on se doute que ce n’est pas par simple goût de la poésie ; c’est parce que l’image d’une enfant-poète lui est à la fois surprenante et nécessaire : c’est une image qu’il faut authentifier d’une façon aussi scientifique que possible dans la mesure où elle régit le mythe central de l’art bourgeois : celui de l’irresponsabilité (dont le génie, l’enfant et le poète ne sont que des figures sublimées).
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Dans le champ amoureux, les blessures les plus vives viennent davantage de ce que l'on voit que de ce que l'on sait.
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rien ne dit que ce même texte nous plaira une seconde fois;c'est un plaisir friable, délité par l'humeur, l'habitude, la circonstance, c'est un plaisir précaire ( obtenu par une prière silencieuse adressée à l'Envie de se sentir bien, et que cette envie peut révoquer);
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Roland Barthes
Qu'est-ce donc qu'un visage, sinon une citation ?
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Tout le monde suppute - je le sens - le degré d'intensité d'un deuil. Mais impossible (signes dérisoires, contradictoires) de mesurer combien tel est atteint.
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INSUPPORTABLE : Le sentiment d’accumulation des souffrances amoureuses explose dans ce cri : « Ça ne peut pas continuer ». Opposition entre le sentiment raisonnable (« tout s’arrange, rien ne dure ») et le sentiment amoureux (« rien ne s’arrange, pourtant ça dure »). Lorsque je constate l’insupportable, en moi s’installe le théâtre martial de 1° La décision 2° L’action 3° L’issue. Quand l’exaltation est tombée, j’en suis réduit à la philosophie la plus simple : celle de l’endurance. « Telle est la vie. Tomber sept fois. Et se relever huit ».
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SANS PAROLES

La masse bruissante d'une langue inconnue constitue une protection délicieuse, enveloppe l'étranger (pour peu que le pays ne lui soit pas hostile) d'une pellicule sonore qui arrête à ses oreilles toutes les aliénations de la langue maternelle : l'origine, régionale et sociale, de qui la parle, son degré de culture, d'intelligence, de goût l'image à travers laquelle il se constitue comme personne et qu'il vous demande de reconnaître.
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La vie est ainsi faite à coups de petites solitudes.
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La gare, vaste organisme où se logent à la fois les grands trains, les trains urbains, le métro, un grand magasin et tout un commerce souterrain, la gare donne au quartier ce repère, qui, au dire de certains urbanistes, permet à la ville de signifier, d'être lue. La gare japonaise est traversée de mille trajets fonctionnels, du voyage à l'achat, du vêtement à la nourriture : un train peut déboucher dans un rayon de chaussures.
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Qu'est-ce donc notre visage, sinon une citation ?
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