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Citations de Rosa Montero (678)


L'androïde prit une douche de vapeur beaucoup plus courte que ce qu'elle aurait voulu, car son coupon d'eau était presque terminé. Il faudrait qu'elle passe au supermarché pour acheter une nouvelle carte.
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(car Soledad a l'habitude d'entretenir d'intenses conversations avec le monde, parfois intérieures et aussi à l'occasion à haute voix, en d'autres termes elle parle toute seule)
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Il faut faire quelque chose avec tout ça pour que ça ne nous détruise pas, avec ce grondement de désespoir, avec ce gâchis interminable, avec ce furieux mal de vivre quand la vie est cruelle. Les êtres humains se défendent de la douleur insensée en l'ornant de la sagesse de la beauté. Nous écrasons du charbon à mains nues et nous réussissions parfois à faire ressembler ça à des diamants.
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La créativité est précisément ça : une tentative alchimique de transmuer la souffrance en beauté. L'art en général et la littérature en particulier, sont des armes puissantes conte le Mal et la Douleur. Les romans ne les vainquent pas, mais ils nous conseillent de l'effroi. En premier lieu, parce qu'ils nous unissent au reste de l'humanité : la littérature fait de nous une partie du tout et, dans le tout, la douleur individuelle semble faire un peu moins mal.
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Et elle se serra contre lui jusqu'à réussir à lui frôler le coeur et à tuer la mort.
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Les gens croient aux conspirations parce que c'est une façon de croire que, dans le fond, l'horreur répond à un ordre et possède un sens, même lorsqu'il s'agit d'un sens malveillant. Nous ne supportons pas le chaos, mais le fait est que la vie est une pure folie
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Parler de mémoire avec un rep, c'était comme mentionner quelque chose d'obscur et de sale, quelque chose d'indicible qui, quand on l'étalait en plein jour, se révélait presque pornographique.
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Il était déprimé par cette heure du petit matin, sale, délavée, où la nuit mourait et le jour nouveau ne pointait pas encore. Cette heure si nue qu'il n'y avait pas moyen de déguiser l'absurdité du monde.
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« L'androïde se leva et quitta la chambre de Gabi fâchée contre elle-même. Quand cette colère sèche l'envahissait, c'était comme si elle était habitée par une autre personne, comme si à l'intérieur d'elle avait grandi cet enfant qu'elle ne pourrait jamais engendrer (elle n'avait même pas de menstruation : c'était une complication organique inutile pour une techno) et qu'il s'agissait d'un embryon empoisonné. Alors, dans la colère, son corps se tendait, ses traits se durcissaient et ses poumons semblaient perdre la moitié de leur capacité. La pierre de la colère pesait dans sa poitrine. »
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« D'abord, c'est parce que la seule chose qui donne du sens à la vie, c'est la connaissance, l'art, la beauté. Mais, surtout, c'est parce que ça revient au même d'apprendre la chanson dix ans ou dix minutes avant de mourir, car ce sera toujours un apprentissage face au néant, une construction fragile et éphémère. Nous sommes des êtres fugaces et nous le sommes tous, très chère. Les technos, les humains, les extraterrestres. »
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« Et elle éclata de rire. C'était la première fois que Bruna Husky riait après son compte à rebours. Elle se sentait si légère qu'elle aurait été capable de s'envoler. C'était prodigieux de constater à quel point un coeur heureux pesait peu. »
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Un passage un peu long, une histoire dans l'histoire, de celles dont je raffole... :

– Ah, Matias, Matias, mon ami, je te vois mal en point. Je te dirai une chose : je sais ce que c’est. Je sais que parfois la vie nous écrase tellement qu’elle ne nous laisse plus de place pour respirer. Alors, je bois. Et mes poumons respirent de l’alcool, au lieu de respirer de l’oxygène. Mais ce n’est pas de ça dont j’allais te parler, parce que je sais que, toi, tu n’aimes pas trop la boisson. Il y a d’autres trucs valables contre le désespoir, et tous consistent à sortir de soi-même. Du trou de sa peine à soi. Boire te sort aussi de toi-même parce que ça t’anesthésie. C’est comme le malade qui est anesthésié dans un bloc opératoire : on peut lui couper la jambe et il ne s’en rend pas compte, parce que d’une certaine façon il n’est pas là. Mais nous avons déjà dit que tu n’étais pas partisan de l’alcool. Bon, il y a d’autres façons de sortir de soi-même, comme, par exemple, penser à l’infiniment grand… Qu’est-ce que c’est, ta douleur d’aujourd’hui, de cette minute, de cette heure, de ce jour, et même de toute ta minuscule vie, comparée aux quatre milliards cinq d’années que la Terre existe ? Mais ça marche encore mieux de penser au très petit. Par exemple, aux atomes. Tu sais que tout ce qui existe dans l’univers est composé d’atomes. Ils sont partout. Ils sont dans l’air transparent, dans les pierres rugueuses, dans notre chair tendre. Et il y a tant et tant d’atomes dans l’univers que leur nombre est inimaginable. Ce sont des chiffres inhumains qui n’ont pas assez de place dans nos têtes. Les atomes se regroupent en molécules ; deux ou plusieurs atomes unis d’une manière plus ou moins stable forment une molécule. Et pour que tu te fasses une idée, je te dirai que dans un centimètre cube d’air, qui est le volume occupé par l’un de ces dés avec lesquels tes amis chauffeurs de taxi sont en train de jouer à cette table, il y a quarante-cinq mille millions de millions de molécules. À présent regarde autour de toi et essaie d’imaginer la quantité exorbitante d’atomes qu’il y a partout. Et qui plus est, les atomes, en plus d’être très nombreux, sont pratiquement éternels. Ils durent et durent un temps incalculable. Si bien que cette chose si minuscule est immense en nombre et en persistance. Les atomes passent leurs très longues vies à se déplacer à droite à gauche et à faire et défaire des molécules. Une partie des atomes qu’il y a dans notre corps provient sans aucun doute du cœur incandescent d’un soleil lointain. Tu le sais bien, nous sommes de la poussière d’étoiles. Et pas seulement ça : statistiquement, il est plus que probable que nous ayons des millions d’atomes de n’importe lequel des personnages historiques que tu pourrais nommer. Des millions d’atomes de Cervantès. Et de Marie Curie. Des millions de Platon et d’autres millions de Cléopâtre. Les atomes mettent un certain temps à se recycler ; il faut donc que s’écoulent suffisamment de décennies après la mort de quelqu’un pour que ses atomes puissent rentrer à nouveau dans le circuit. Mais on peut dire que tous les êtres humains qui ont existé sur la Terre vivent en moi, et que je vivrai dans tous ceux qui viendront plus tard. Et dans un brin d’herbe brûlé par le soleil ou dans le corps cuirassé d’un scarabée.
C’était ce que Cerveau pensa qu’il serait bon de dire, et sans doute s’agissait-il de quelque chose d’encourageant et de beau. Malheureusement, à ce stade du petit matin la vieille femme se trouvait déjà trop pompette et avait peur de ne pas contrôler assez bien sa diction. Elle craignait de siffler sur les s, redoubler les r et trébucher irrémissiblement sur les dentales. Elle craignait de bafouiller et d’avoir l’air ivre, ce qui l’épouvantait, car, malgré la dureté de sa vie et les humiliations qu’elle avait dû subir, Cerveau avait réussi à garder sa fierté et demeurait accrochée à son sens de la dignité comme un naufragé qui coule accroché au pavillon de son navire."
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Octave Auguste est devenu le premier empereur romain parce que la République lui avait octroyé d’immenses pouvoirs. Et pourquoi la République avait-elle fait ça ? Pourquoi s’est-elle suicidée pour céder la place à l’Empire ? Tacite l’explique ainsi : Cuncta fessa. Ce qui veut dire : Tout le monde est fatigué. La fatigue face à l’insécurité politique et sociale est ce qui a conduit Rome à perdre ses droits et ses libertés. La peur provoque une faim d’autoritarisme chez les gens. C’est un très mauvais conseiller, la peur. Et maintenant regarde autour de nous, Bruna : tout le monde est effrayé. Nous vivons des moments critiques. Peut-être que notre système démocratique est lui aussi sur le point de se suicider. Parfois les peuples décident de se jeter dans l’abîme.
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Nopal n’avait pas choisi d’être comme ça. Il n’avait pas opté volontairement pour le chemin de l’illégalité, de même que le marginal social ne choisit pas la marginalité, mais se retrouve exilé de l’autre côté de la ligne de tout ce qui est normal. Le destin avait été injuste avec le mémoriste, le destin s’était acharné contre lui, et il avait dû apprendre à se défendre et à répondre à la violence par la violence. Le véritable survivant est celui qui n’hésite pas à faire ce qui sera nécessaire pour survivre, et Nopal n’hésitait pas. Souvent il s’étonnait lui-même, il se contemplait avec une curiosité non dénuée de surprise, parce qu’il n’arrivait pas à comprendre comment, aimant si peu la vie, il pouvait être capable de s’y accrocher avec autant de ténacité, avec une telle férocité. Peut-être qu’il faisait ça par orgueil, à cause de la ferme décision de ne plus jamais se laisser humilier. Ou peut-être qu’il s’agissait d’un automatisme des cellules, de l’acharnement de la chair à continuer d’être, de cette fébrile soif de vivre qui fait que certains malades en phase terminale, malgré la douleur et la détérioration, se battaient jusqu’à leur dernier souffle pour prolonger une existence pourtant pénible. Oui, la métaphore du malade n’était pas mauvaise, pensa le mémoriste : quelque part, Nopal avait toujours ressenti qu’il y avait quelque chose de pathologique chez lui, quelque chose de douloureux. La vie était une saloperie de maladie qui finissait par vous tuer.
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Entre ces deux axes, la somme ascendante de la mémoire et celle descendante de la vie , s'ouvrait le grand gouffre des terreurs, l'insupportable non-sens. (il y a comment quelque chose de Borges )
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J’ai oublié mon enfance. Toute mon enfance. Je ne me rappelais rien avant mes huit ou neuf ans. Je me suis mis à reconstruire le temps perdu avec les vidéos de mon enfance, avec ce que ma famille me racontait. Et puis, très vite, les souvenirs ont commencé à venir, des tas de souvenirs qui remplissaient les lacunes de ma tête. Mais j’ai alors découvert que toutes ces réminiscences étaient fausses. Des preuves documentées m’ont démontré à plusieurs reprises que mes soi-disant souvenirs étaient en réalité des constructions imaginaires, des contes que mon cerveau blessé inventait activement pour reboucher le trou, pour remplir l’insupportable vide. Car le cerveau humain est un magicien, un prestidigitateur, un narrateur incontinent qui réécrit constamment la réalité, qui nous la traduit et la réinvente.
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Les bons sentiments envers les autres n’étaient souvent qu’une manière de prendre soin de soi-même.
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La vie est pleine de zones d’ombre, n’est-ce pas ? Il y a tant de choses que nous préférons ne pas savoir… Tant de choses que nous désirons oublier. Nous choisissons ce que nous voulons voir, et notre monde n’est qu’une traduction très réduite du monde.
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Les humains, avec leurs existences terriblement longues et leurs vieillesses interminables, avaient coutume de glorifier pompeusement les avantages de l’apprentissage. Même des mauvaises expériences, affirmaient-ils, on pouvait tirer quelque chose
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J'ai toujours pensé qu'on devenait écrivain à partir de la perte. De la douleur de perdre naît l’œuvre. Je viens de lire un sombre auteur d'il y a environ deux siècles, un certain Scott Fitzgerald, et il dit quelque chose dans le genre. Il dit : "Trois mois avant ma naissance, ma mère a perdu ses deux filles. Je crois que j'ai commencé à être un écrivain à ce moment-là".

(P130)
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