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Citations de Santiago H. Amigorena (374)


Il ignorait que dans le ghetto les nazis tuaient les Juifs, « simplement » si l’on peut dire, en laissant se propager des épidémies de typhus et de tuberculose, et en les affamant. Plus tard, il saurait. Il saurait que fin 1941 un Juif du ghetto mangeait en moyenne 180 calories par jour, c’est-à-dire 15% du minimum vital, comme il saurait qu’une sortie du ghetto, qui quelques mois plus tôt était passible d’une amende de mille zlotys et de trois mois de prison, était sanctionnée déjà par la peine de mort.
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On est différents de tout, on est différents de tous. On est différents de quoi que ce soit. C’est la seule chose qui compte. On est le seul peuple sans armée, sans État. Et on a été élus, mais on n’a jamais vraiment su pourquoi on avait été élus. On a été élus seulement pour se poser la question de pourquoi on a été élus ! C’est ça ! On est juifs. Je suis juif. Mais on ne sait pas ce que c’est. On ne sait absolument pas ce que c’est. Et le plus beau et le plus triste à la fois, c’est qu’on n’arrêtera jamais de se le demander, et qu’on ne le saura jamais.
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Peut-on avoir aimé ou n'y a-t-il (de même qu'il y aun seul océan, de même qu'il y a une seule nuit pour tous les enfants, de même qu'il ya un seul ciel pour tous les êtres qui lèvent leur regard vers le firmament) qu'un seul amour, qu'un seul amour qui nous emporte, qui nous déborde, plein de vagues, de remous, d'étoiles et de trous noirs - un seul amour qui déferle, nous submerge, et qui s'apaise furieusement, et qui sagement se déchaîne ?
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J'aurais pu vivre à tes côtés pendant des années sans comprendre cette chose si simple : tu es plus belle que toutes les autres parce que tu es plus vraie.
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ça va faire trois ans que nous nous aimons et que nous luttons pour cet amour. Pour et contre cet amour. Contre et pour cet amour. Trois ans sans victoire, sans trêve, sans repos. la bataille est si furieuse, si désordonnée, si confuse, si incertaine, et nos si inextricablement entortillés, et nos corps si indémêlablement enchevêtrés, que dans cette lutte acharnée, nous savons à peine qui est qui.
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Même en dehors des ghettos, les nazis faisaient disparaître tous ceux qui représentaient un danger pour le régime. À partit de décembre 1941, nombreux étaient les prisonniers dont on ne gardait aucune trace, ni de la capture, ni de l’exécution. Encore une idée simple, inventée par les Allemands, reprise par leurs collaborateurs français, mise en application en Indochine et en Algérie par les Paras et la Légion étrangère, puis théorisée officiellement par l’armée française, enseignée aux tortionnaires latino-américains à l’école des Amériques et finalement intégrée dans un plan officiel conçu par la CIA et Henry « Asesino » Kissinger : le Plan Condor.
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Les hommes pêchaient des requins ; les femmes fabriquaient des colliers avec leurs vertèbres. La pauvreté était grande, profonde, mais la misère lui était étrangère. La misère n’existait presque pas en Uruguay. Avant les années 1980, partout dans le monde, la misère n’existait que là où les machines avaient rendu les hommes des machines, là où la terre était elle-même misérable, et là où l’histoire coloniale avait réussi, et réussissait encore, à ruiner des peuples. Sauf dans quelques lieux très précis, la misère – partout – est le résultat d’un vol.
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La torture peut être terriblement efficace : non seulement elle sert à obtenir des renseignements, mais tout autour elle répand une douleur glacée qui avilit les hommes, qui, en brisant leurs rêves, les diminue, les dégrade.
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Peu à peu, cela deviendrait normal de voir des amis de mes parents se faire arrêter ou leurs enfants adolescents quitter leur foyer pour entrer dans la clandestinité. Comme cela deviendrait normal, peu après, de continuer de vivre aux côtés d’amis dont le père, la mère, le frère ou la sœur étaient torturés ou avaient disparu. Oui, peu à peu, comme l’obscurité, mes rêves allaient cesser de me terrifier. Ils allaient cesser de me terrifier parce que la réalité, on l’oublie souvent, peut être plus terrifiante que les pires cauchemars.
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Pardonner est nécessaire. Aux communautés, comme aux individus. Mais les individus n’ont pas toujours, en toute occasion, en toutes circonstances, besoin d’absoudre, d’acquitter, d’éprouver de la compassion, de la miséricorde, de faire preuve de charité ou de verser l’aumône - pour survivre au passé, les individus ont besoin de pardonner seulement pour oublier. Et même si oublier, comme disait Borges, est le seul pardon et la seule vengeance, pour y arriver, parfois, il faut aussi se battre.
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Le silence peut être monstrueux, il peut devenir une source intarissable de souffrance ; le silence peut provoquer de la méfiance, il peut être ressenti comme de la froideur, de l’indifférence, du mépris ; mais il peut aussi être interprété d’une tout autre manière. On fait dire au silence ce que l’on veut ;
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 Certains trouveront mon destin digne de mes mémoires — ce n’est pas pour eux que j’écris. Certains trouveront sans doute qu’avoir grandi dans les rues de Montevideo avant de fouler tous les Champs Élysées d’Europe mérite d’être couché sur quelques pages — ce n’est pas pour eux que j’écris. Certains sans doute qu’être arrivé à Paris nu-pieds, qu’avoir été l’enfant le plus pauvre et le plus méprisé du parc Monceau avant d’y faire grandir mes propres enfants comme de petits princes (ou de petits Marcel) est digne d’être narré — ce n’est pas pour eux que j’écris. Comme vous le savez ô, mes lecteurs supposés ! Mes pages sont destinées, comme toutes les pages, mais avec un acharnement supplémentaire, à notre commun oubli. J’écris pour moi-même et pour mes amis.
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Préservé de la honte du succès, comme disait mon ami Hugo, j’ai toujours vu d’un œil un peu réprobateur les efforts des écrivains en vogue pour s’éloigner des grandes œuvres du passé et s’approcher de leur lecteur contemporain.
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Trois mois après notre installation à Montevideo, nous sommes retournés à Buenos Aires pour quelques jours. El abuelo Zeide, mon arrière-grand-père maternel, avait appelé lui-même ma mère pour la prévenir qu’il allait mourir.
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D'une part l'enseignement prodigué à L’École des Amériques s'inspirait directement des théories militaires élaborées par les officiers de l'armée française en Indochine et en Algérie. D'autre part, d'abord officieusement à Paris, à l’École supérieure de guerre des Invalide, sous les règnes du général de Gaulle puis de ce gros nounours de Pompidou, ensuite officiellement sur place, grâce à ce doux amateur d’accordéon qu'était Valéry Giscard d'Estaing, par des officiers détachés à la Mission militaire permanente de Buenos Aires, les généraux latino-américains qui allaient écrire les heures les plus sanglantes de la sanglante histoire de ce lointain continent furent éduqués, si l'on peut dire, à combattre leurs concitoyens par les enlèvements et la torture le plus explicitement du monde par un pays qui, en même temps, pouvait s'offusquer de l'assassinat de Salvador Allende.
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Ayant eu vent de notre amitié, ma mère décida d'inviter Abu à dormir à la maison. Dès qu'il le vit arriver, Sebastián, mon frère, mon seul et grand frère, âgé déjà de huit ans, éclata en sanglots. Il n'avait jamais vu un Noir de sa vie. La soirée s'annonçait dramatique : elle fut tragique. Ma mère réussit à calmer les pleurs de mon frère – qui, peu après, refusa de s'asseoir à table avec mon ami pour le dîner. Puis, après que nous avons dîné dans des pièces séparées, comme Sebastián s'opposait, quelles que fussent les conditions, à dormir sous le même toit que lui, ma mère, pétrie de honte et de chagrin, se résigna à appeler les parents diplomates d'Abu afin qu'ils vinssent chercher leur sombre progéniture.
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« La Shoah fait partie de notre histoire générale : elle définit d’une manière intolérable le concept de l'humain. Pendant des années, j’ai connu cette his- toire de loin : j'ai vu des films et des photos, j’ai lu des études et des récits, j’ai été horrifié, je me suis posé des questions sans réponse. Puis j’ai compris que mon arrière-grand-mère était morte là-bas et que cette histoire était aussi mon histoire : l’histoire de mon sang. »
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Mais il est indéniable que les Nazis ne tuaient pas les Juifs parce qu'ils étaient polonais, vieux, inutiles, blonds, mariés, célibataires, boiteux ou parce qu'ils avaient mauvaise haleine: ils les tuaient parce qu'ils étaient juifs.
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L’économie ne nous rend pas seulement bêtes, elle nous rend aussi aveugles. Nous sommes devenus si pauvres que nous ne cessons de nous exploiter nous-mêmes.
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A partir de ce triste mois de mars 1941, Vicente allait éprouver une double haine de lui-même : il allait se détester parce qu'il s'était senti polonais et il allait se détester davantage encore parce qu'il avait voulu être allemand. Il allait éprouver une double haine de lui-même que jamais le fait de se sentir juif n'allait soulager.
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