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Citations de Sawako Ariyoshi (133)


Dors, mon enfant, dors
Tu feras merveille
Habillons de soie rouge l’enfant qui dort
Habillons de coton rayé l’enfant qui veille.

C’est la fille d’un paysan de Musota, qu’on avait fait venir pour garder le
nouveau-né, qui chantait ainsi. Fumio lui avait interdit de porter trop
souvent Akihiko dans ses bras pour qu’il n’en prenne pas l’habitude. Aussi
la jeune fille, désœuvrée, chantait-elle pour passer le temps. Dans cette
maison qu’elle connaissait mal elle ne pouvait, malgré son envie, aider les
domestiques qui s’affairaient autour d’elle.
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Hana pensait à la situation très particulière de sa petite-fille
qui observait le Japon avec les yeux d’une étrangère découvrant sans cesse
des choses nouvelles, comme la nuance de la verdure, la couleur du fleuve,
les fleurs du pêcher ou du cerisier. Et pourtant ce n’était certainement pas
une étrangère, simplement une Japonaise déracinée.
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Keisaku ne pouvait ignorer au fond de lui-même que c’étaient la confiance
et les encouragements de Hana qui l’avaient mené là où il était. Il avait vécu
une vie sans remous, comme porté par une barque qui descend le fleuve, le
vent en poupe. Il n’avait pu le faire que grâce à sa femme, toujours à ses
côtés, qui n’avait jamais montré ses propres souffrances et l’avait protégé
par la perfection de sa présence.
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Hana, en silence, s’inclina devant sa belle-sœur pour la remercier de ses
compliments. Elle se sentait comblée car, seule, la femme qui avait réussi à
se faire aimer par sa belle-mère pouvait se vanter d’avoir conquis sa
famille. C’était un exploit dont une femme pouvait être fière.
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Pour ne pas se laisser influencer par Hana, Kôsaku avait rompu tous les
liens avec la maison Matani dès le lendemain de son mariage. Fumio
s’apprêtait à son tour à la quitter pour pouvoir respirer librement. Ils
savaient tous les deux, au fond d’eux-mêmes, que dans le voisinage de
Hana ils auraient été incapables de ne pas se conformer à ses désirs. Fumio
qui exprimait sa révolte chez son oncle se transformait chez elle en fille
obéissante. La personnalité de Hana suffisait à imposer le respect.
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— Sais-tu ce que c’est que la vitalité ? demanda-t-il. Pour être fort il faut
en avoir. Quand on en est dépourvu, on est faible. Ta mère appartient à la
race des forts. On peut la comparer au Ki. Ses eaux bleues, au courant
majestueux, donnent l’impression d’être paisibles et tendres mais elles n’en
engloutissent pas moins les rivières plus faibles qui coulent dans la même
direction. Elles ont aussi une puissance et une obstination qui les poussent à se joindre à un fleuve qui paraît plein de promesses. Autrefois, le Ki avait
son embouchure plus au nord, vers Kinomoto. Mais, au sud, il y avait un
cours d’eau plus puissant et le Ki a changé de direction pour le rejoindre et
mêler ses eaux aux siennes.
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Certains dans l’entourage de Hana pensaient que Yasu aurait dû s’abstenir
de la déranger alors qu’elle était si occupée. Fumio, elle, s’en prenait à sa
mère :
— C’est entièrement la faute de ma mère, disait-elle. Elle ne sait dire que
« oui ». Elle gâte beaucoup trop grand-mère qui abuse de ce qu’elle est
aveugle. Ma mère est tellement persuadée que se mettre au service de sa
belle-mère c’est être un modèle de vertu féminine qu’elle devient l’esclave
de la maison.
Le spectacle de Hana passant du noir sur les dents de Yasu à côté du
brasero dans la salle de séjour apparaissait à Fumio comme une caricature
du rôle des femmes et de la vie de famille.
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Les « fleurs de mochi » étaient des sortes de cocons en pâte de riz fixés
sur des branches de saule, comme des chatons. La pâte en était colorée en
rouge ou en jaune, et les branches contribuaient à la décoration de
l’intérieur de la maison pendant la période du nouvel an. Les enfants, tentés
par les rameaux qui ornaient chaque pièce, voulaient toujours les décrocher dès le premier jour de l’an mais les parents s’y opposaient pendant les sept premiers jours. Seiichirô, cependant, savait que personne de sa famille ne s’opposerait au vœu de son oncle et il en profitait. Keisaku, regardant avec affection son fils en train de sucer une des fleurs de mochi encore accrochée à la branche, l’imaginait déjà adulte, devenu quelqu’un de remarquable. Hana, au contraire, observait avec appréhension ce fils qui n’était même pas capable de mordre carrément dans la pâte de riz, comme il se devait pour un vrai garçon.
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Le père de Fumio se montrait peu affectueux avec l’enfant : ce n’était
qu’une fille, n’est-ce pas ! C’était heureux pour elle qu’elle ait un oncle
aussi attentionné.
Sans doute Kôsaku souffrait-il de sa solitude car, à présent, il venait faire
de nombreuses visites. Il disait que Fumio lui manquait et il s’occupait
beaucoup d’elle. Très adroit de ses mains, il allait jusqu’à lui changer lui-
même ses langes.
— Fille ou garçon, j’aurais toujours aimé votre deuxième enfant. Un
garçon aurait été encore plus à plaindre que moi. Comme vous n’avez plus
de montagnes, il aurait été obligé de se faire adopter par la famille d’une
fille riche. Fumio, tu as de la chance d’être une fille !
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Hana fut profondément affectée par le rapprochement entre tous ces
destins et celui de Kôsaku. Les aînés étaient exemptés de tout service
militaire : tous les jeunes gens logés chez les Matani étaient des cadets de
familles paysannes. Instruits par la guerre sino-japonaise, dix ans
auparavant, ils savaient que beaucoup d’entre eux allaient à la mort. Hana
ne put s’empêcher de penser au sort qui attendait l’enfant qu’elle portait, un
enfant qui naîtrait dans une famille Matani appauvrie par la perte des
montagnes et qui pourrait être plus amer encore que Kôsaku.
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Hana ne conserva des événements qui suivirent le départ des Kita que des
lambeaux de souvenirs. Étant donné l’éducation qu’elle avait reçue, le fait
qu’elle se trouvait pour la première fois seule avec une personne du sexe
opposé était déjà une situation traumatisante. Serrée dans les bras de
Keisaku, le corps figé, elle ne pensa même pas à l’estampe d’Utamaro où
l’on voyait des personnages dans des postures bizarres, que sa grand-mère
avait glissée dans son porte-mouchoirs en précisant qu’il s’agissait d’un
talisman. Pour résister à la douleur, elle pressa sa nuque sur son oreiller de
bois, prenant bien soin de ne pas déranger l’ordonnance de sa coiffure.
Même en pareille circonstance, son éducation lui imposait de préserver les
apparences.
Quant à Keisaku il avait, à vingt-six ans, trop peu l’expérience des
femmes pour tenir compte de la réaction de Hana, dont la beauté virginale
le bouleversait.
— Je t’ai attendue si longtemps !
Ce fut la seule phrase que put saisir Hana sur les lèvres de Keisaku quand,
le souffle court, il eut apaisé sa passion. Elle-même n’avait droit qu’au
silence pour exprimer sa gêne ou son plaisir : c’était le lot des femmes. Les
yeux clos dans les ténèbres, elle s’étonna que son angoisse ne se fût pas
clairement manifestée.
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Ces paroles choquèrent les Kimoto qui, depuis un moment déjà,
s’irritaient du manque de tenue des Matani. Nobutaka était indigné. Les
Matani, chez lesquels il s’était présenté en grande pompe, étaient aussi
éloignés des Suda que la fange l’est de la voûte du ciel. Tahei, le père de
Keisaku, les cheveux relevés en un chignon, les yeux étirés par l’ivresse,
souriait nonchalamment. Pour Nobutaka, Tahei n’était qu’un rustre attaché
à la glèbe. De tout temps, les propriétaires des terres de montagne avaient
regardé avec dédain ceux des terres à riz, et Nobutaka ne faisait pas
exception à la règle. Il se dit que, si Toyono qui tenait tellement à ce qu’on
respectât les convenances avait assisté à ce banquet, elle aurait sûrement
regretté d’avoir accepté un tel parti. Nobutaka pensa que, puisque Toyono
devait venir le lendemain faire visite à la mariée, elle aurait mieux fait de
les accompagner. Pour la première fois de sa vie il éprouva quelque
ressentiment à l’égard de sa mère qui avait pris sa décision sans tenir
compte de son avis. Mais il était trop tard maintenant.
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Mme Kaseda ne manifestant pas l’envie de poursuivre la conversation,
Hana se rappela que, pendant son voyage de noces, la mariée ne devait pas
se montrer trop loquace et n’insista pas. La famille Kaseda avait beau ne
pas être d’un rang vraiment inférieur au sien, les femmes n’y avaient pas le
goût de se cultiver comme chez les Kimoto. Hana pensa qu’il serait
prétentieux de sa part d’expliquer à Mme Kaseda les raisons de sa question
en lui citant les poèmes d’où la légende des montagnes Frère et Sœur était
tirée. Dans sa déception, sa séparation d’avec Toyono prit une douloureuse
réalité.
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Accomplir quelque chose par elle-même au lieu de tenir son pouvoir du fait qu’elle était l’ombre de son mari lui paraissait aller contre toutes ces vertus féminines auxquelles elle croyait si fermement. Il lui semblait inconcevable qu’elle pût, alors qu’elle était veuve, devenir quelqu’un d’important dans des groupes de femmes. D’après elle une femme, même forte et intelligente, qui n’avait pas d’homme au côté duquel se tenir, était inévitablement condamnée.
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Elle-même n’avait droit qu’au silence pour exprimer sa gêne ou son plaisir : c’était le lot des femmes.
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Elle se souvient d'une expérience faite sur deux rats : on avait donné manger à l'un tout en l'empêchant de dormir, tandis qu'on laissait l'autre dormir sans lui donner à manger. Celui qui n'avait pas pu dormir était mort rapidement. Akiko était convaincue qu'elle aussi mourrait la première si elle n'avait pas son compte de sommeil.
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Elle avait entendu parler du remariage de sa mère, mais il était difficile à son esprit d’enfant de six ans d’imaginer les répercussions que cela pourrait avoir sur sa vie à elle. Ce qui la réjouissait le plus dans cette histoire de mariage, c’était que sa mère lui donnait généreusement des bouts d’étoffe bien plus jolis qu’auparavant, grâce auxquels elle avait enfin pu confectionner le luxueux ensemble de lit dont elle rêvait depuis longtemps pour sa poupée. Elle décida de coudre l’oreiller le lendemain, posa au bout de la couette le petit sachet rempli de haricots secs avec lequel elle jouait à la balle, et posa doucement la tête de la poupée dessus.
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Seule la jalousie expliquait qu’une veuve trouve tant à redire au remariage d’une autre veuve, voilà le reproche que la fille venait de faire à sa mère !
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Non, personne ne s'inquiète pour moi. Vous savez, nous les vieux, on gêne plus qu'autre chose : ils attendent tous que je meure. Moi non plus je ne demandais pas à vivre si longtemps mais, si je me suicide, on aura du mal à marier mes petits-enfants... Il faut nous entraider pour déranger les jeunes le moins possible... Si l'on ne fait pas assez d'exercices, physiques et mentaux, le corps s'affaiblit et l'on devient vite sénile. p.134
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Le septième jour, les gens du quartier vinrent nombreux rendre hommage à la défunte. Akiko pensa avec gratitude que le dicton populaire "un bon voisin vaut mieux qu'un parent éloigné" était bien vrai. p.97
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