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Critiques de Sofia Aouine (168)
Rhapsodie des oubliés

« Ma rue raconte l’histoire du monde avec une odeur de poubelles. »



Sa rue, la rue Léon.

Son quartier, Barbes, Goutte-d ’Or, Paris XVIII.

Une ville dans la ville. Un monde à part. Une autre planète.

Un quartier à dimension universelle pour mieux contraster avec l’individualité qui y règne. Ici, les générations se succèdent sans se rencontrer, on y entasse les êtres, on additionne les vies. « Les âmes sont suspendues les unes aux autres mais ne semblent jamais se croiser. »

Des habitants isolés les uns des autres quand le quartier est isolé du reste du monde ; aux frontières hermétiques, quant à l’intérieur, tout y est poreux :

La rue Léon, c’est l’animation, le brouhaha, qui se communique d’un foyer à l’autre, contraste saisissant avec le silence, religion dans le foyer. Quand le père s’exprime uniquement par les coups, quand la mère se tait, le bruit de la rue lui confère une dimension parentale. Elle gouverne, elle materne.



Alors Abad comble le silence extérieur et éteint les hurlements intérieurs.

Il chante la rhapsodie des oubliés; ceux ignorés par⠀leur père, par la société, par leur mère, par l’amour, par la vie. Ceux qui n’ont plus que la rue comme foyer.

Il psalmodie des incantations contre l’oubli, convoquant les souvenirs, ceux qui vous hantent et vous consument, ceux que l’on veut oublier, ceux que l’on ne peut oublier, tatouant à jamais les mémoires qui « traversent silencieusement la peau des familles ».



Abad est la voix de ceux qui n’ont en pas. La mémoire de ceux qui n’en ont plus.

Sofia Aouine s’en fait l’écho, par une écriture puissante, rythmée et vivante. Ses mots crus, acides, contemporains sont le symbole de la richesse d’une langue en constante évolution. Une langue qui appartient à peuple ; un peuple auquel il appartient de la faire vivre.

L’argot qu’elle emploie, vocabulaire propre à un milieu fermé emprunte le même voyage vers l’universalité de la langue commune que le récit dont la construction narrative interroge les personnages et leur milieu par une dialectique intérieur / extérieur.

Ainsi Abad, narrateur et personnage principal, entame une odyssée introspective à mesure que son quartier et ses habitants prennent une dimension universelle.

Sofia Aouine atteint elle l’exposition d’une grande autrice.
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Rhapsodie des oubliés

De prime abord, j’ai été happée par ce roman et surtout, par l’écriture de Sofia Aouine mêlant le langage cru de l’adolescence révoltée à une mélancolie presque poétique. C’est percutant et souvent poignant.



En amoureuse de la littérature, j’ai aimé ses clins d’œil à Zola ou Romain Gary. A Bashung, aussi.



Le personnage d’Abad est intéressant : un adolescent sensible, plus intelligent qu’il ne s’en donne l’air, quelque peu obnubilé par le sexe [messieurs, rassurez-moi sur le fait que l’autrice a largement exagéré cet aspect des choses !] et qui ne sait comment faire sortir la colère qui semble le dévorer. Peinant à trouver sa place, il participe aux bêtises adolescentes basées sur l’ignorance et la quête d’une certaine mise en valeur, tout en suivant ses impulsions qui l’incitent à aller vers les opprimé·es.



Mais, en refermant le roman, j’ai soudain été fâchée. J’avais cette impression de m’être laissée entrainer dans une histoire magnifiquement bien écrite mais qui multiplie les clichés. Tout ce que Paris compte de plus sordide semble évoluer dans l’entourage d’Abad : les apprentis djihadistes et leurs petites sœurs transformées en Batman [sic], les mères de famille dévalisant quotidiennement les rayonnages de chez Tati pour oublier l’étroitesse de leur vie, les prostituées venant de tout le continent africain et exploitées par des proxénètes sans scrupules… jusqu’à la psy juive installée sur les hauteurs de Montmartre et dont les parents se sont faits déporter en 42. Et si, sur le moment, j’ai su apprécier cette lecture et les personnages qu’elle nous présente, je n’ai pas pu m’empêcher, finalement de trouver que c’était trop. De me dire que ce n’était pas crédible que ce gamin de 13 ans, en l’espace de quelques mois, soit confronté à toutes ces horreurs [et encore, je ne vous ai pas tout dit]. Je crois que c’est le dernier chapitre qui a fait déborder le vase et a ôté toute crédibilité à cette histoire. Du moins, à mes yeux. Cela m’attriste d’autant plus que, prises indépendamment les unes des autres, ces histoires sont criantes de justesse dans la manière dont elles sont décrites par l’autrice. La détresse ressentie par ces oublié·es ne peut que vous prendre aux tripes.



Je suis donc déçue car je pense que j’aurais réellement pu adorer ce roman avec quelques drames en moins. Ou alors, si ces différentes histoires avaient été écrites sous la forme de nouvelles, prenant place dans le quartier mais sans, nécessairement, que les personnages soient en contact direct avec Abad. Je ne sais pas.



Néanmoins, je suivrai ce que proposera encore Sofia Aouine car j’ai beaucoup aimé sa plume.
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Rhapsodie des oubliés

Abad, le narrateur, adolescent libanais exilé, vit dans le XVIIIème arrondissement parisien, à Barbès. Plutôt précoce, il observe avec acuité tous les habitants de ce quartier populaire, les laissés pour compte, les putes, les cassos, les clodos, il les connait tous, plus ou moins intimement.

Et puis il y a Odette une dame âgée qui le prend sous son aile...

Il livre au lecteur l'histoire de sa rue à l'odeur de poubelle, sans concession mais avec une certaine philosophie ainsi que sa propre histoire et ses péripéties et émotions d'adolescent.



Ce roman présente une série de portraits décrivant parfaitement ces personnes, venues en France à la recherche d'un Eldorado, qui survivent dans des conditions précaires, voire dramatiques, ignorées de la société, tant qu'elles ne posent aucun problème...

Un premier roman à la fois tendre et amer sur les illusions perdues au style fluide et vivant, aux propos lucides et crus, à l'image du quartier qu'il campe.

Pas mal.
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Rhapsodie des oubliés

"La vie est définitivement une sale pute"

Abad, 13 ans, a toutes les raisons dans sa vie de s'exprimer ainsi. Il crache les mots de la souffrance, de la misère, de la solitude. Parfois avec violence, mais souvent avec la tendresse et la poésie de l'enfant qu'il est encore.

Abad c'est la langue de Barbès, la langue de la rue, du quartier, la langue orale d'un enfant de l'immigration, la rue Léon- personnage à part entière du roman.

Abad est de ces enfants devenus trop vite des grands, à qui on ne tient pas la main, que personne ne soutient. L'absence d'une tendresse familiale qu'on va chercher chez les autres quand ils veulent bien en donner. car la rue est peuplée d'isolés- occasion d'une galerie de portraits d'hommes et de femmes rencontrés par Abad: Ethel la psy, Gervaise la prostituée, Djovan le moldave, Slobodan le djihadiste, Odette l'irremplaçable... des vies...toutes abîmées.

Sous l'écriture dynamique de Sofia Aouine c'est un monde à la Zola au XXIème siècle qui défile sous nos yeux: les laisser pour compte, les isolés, les oubliés.

"Cette ville nous entasse les uns sur les autres comme dans un grand bain d'amour mais personne ne se parle"- Abad rêve d'amour au cœur d'une vie étouffante. Mais il est aussi tout feu tout flamme, il est l'incarnation d'une pulsion de vie très forte, ne cesse de se battre, malgré tout. Il rend ce récit lumineux par ses mots vrais et par ses instants de liberté volés à son quotidien désespérant.

Ce texte a tout en effet d'une rhapsodie. Il y souffle un vent de liberté dans l'écriture vive et réaliste de Sofia Aouine en osmose avec le désir profond d'Abad d'échapper à son destin funeste.

Un hommage criant et répété à la littérature, une langue qui claque, qui bouscule (un peu)- une langue rythmée qui bouge et offre une voix à ceux qu'on n'écoute pas.

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Rhapsodie des oubliés

Abad, qui regarde avec les yeux d'un jeune ado la vie de sa banlieue, y aborde, avec le vocabulaire qui est le sien, le proxénétisme, le terrorisme, l'islam, l'exclusion, et ses galères chez le juge des enfants...



Pour ma part, j'ai trouvé cette lecture intéressante et sympa, voire quelque peu "cocasse". Intéressante à lire car on y découvre le monde des banlieues de l'intérieur, et à travers les yeux d'un enfant.

Et cocasse car on emprunte les mots, le regard, les valeurs et le jugement de Abad, qui est fougueux, rebelle et éternellement optimiste.



Mais malgré tout, je n'ai pas été transportée ni bluffée. Le roman manquait selon moi de profondeur ; il restait beaucoup trop en surface au vu du sujet abordé, et sectionnait les expériences de vie de chaque personnage et les différentes problématiques qui se posent dans les banlieues. Au risque de perdre une vue d'ensemble, et l'attention du lecteur ...
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Rhapsodie des oubliés

Lorsque je referme un livre et que mon cerveau s'active en mode pause, out, no signal, plus de batterie, non disponible, comme si je planais et que je ne savais pas à quel moment je serais en mesure de redescendre - enfin bref vous voyez le contexte - cela signifie que j'ai passé un sacré moment littéraire ! Durant cette lecture, c'est toute une playlist musicale, des titres de films - chers à mon coeur - celle de mon enfance, une partie de mon adolescence qui se sont mis à tourner en boucle dans ma tête. La culture hip-hop, soul qui a influencée l'auteure et qui ressort de ce roman, cela me parle tout simplement ! Et puis je connais... le cynisme mélangé à la vigueur colorée qui sont quelques souvenirs du bitume passé.



La Goutte d'or, Paris XVIIIe, Abad treize ans nous embarque en virée de tous les instants dans son quartier, à Barbès, qu'il nous retranscrit comme maudit. Il y a de la noirceur qui teint les murs en laissant les traces meurtries, il y a des âmes perdues qui n'attendent plus, des anges déchus ayant atterri avec tant d'espoir dans les bras de la divine patrie. Cette espérance qui réapparaît le temps de moments égarés.



Abad sait... mais cette fierté, elle ronge, cette peur elle dévore, ces questions sans réponses elles vous laissent sur le côté, parce qu'il n'y a pas forcément d'exemple et quand le modèle manque alors on s'en va chercher ailleurs et ce n'est peut-être pas ce qu'il y a de meilleur. Penser l'idéale un peu, pas longtemps, ou alors c'est trop loin lorsque le mot "délaissé" résonne froidement à longueur de journée.



Ce roman sonne comme du rap conscient posé sur su un sample de musique classique. Toutes les vérités que cet adolescent déverse « la rage d'amour » au ventre... c'est du texte brut que Sofia Aouine distille tout au long des pages. C'est une plume sans complaisance dont toutes les lettres, les phrases vous marquent à l'encre poétique. Chaque chapitre est un hommage consciencieux et concentré en une multitude d'émotions. La parole est donnée à travers des personnages au portrait réel de la société. C'est une actualité qui s'enchaîne, qui s'interroge et dénonce les faits.



Un bouquin qui nous invite à nous intéresser, à essayer de comprendre et de se rendre compte de ce qu'il peut en être. Une ouverture d'esprit de citoyen à citoyen. Une profonde et intense humanité. de l'attention en demande et à donner.



Ce joyau de la collection rubis n'est pas comme je pourrais l'écrire habituellement « mon coup de coeur » non ! Pour ce livre - et peu importe si c'est la même chose - je le ressens plus en vous disant que... c'est mon COUP DE FOUDRE !


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Rhapsodie des oubliés

RÉSUMÉ



" Ma rue raconte l'histoire du monde avec une odeur de poubelles. Elle s'appelle rue Léon, un nom de bon Franc¸ais avec que des métèques et des visages bruns dedans. "

Abad, treize ans, vit dans le quartier de Barbès, la Goutte d'Or, Paris XVIIIe. C'est l'âge des possibles : la sève coule, le cœur est plein de ronces, l'amour et le sexe torturent la tête. Pour arracher ses désirs au destin, Abad devra briser les règles. À la manière d'un Antoine Doinel, qui veut réaliser ses 400 coups à lui.

Rhapsodie des oubliés raconte sans concession le quotidien d'un quartier et l'odyssée de ses habitants. Derrière les clichés, le crack, les putes, la violence, le désir de vie, l'amour et l'enfance ne sont jamais loin.

Dans une langue explosive, influencée par le roman noir, la littérature naturaliste, le hip-hop et la soul music, Sofia Aouine nous livre un premier roman éblouissant.



MON AVIS



Un premier roman remarquable dans lequel l’auteure écrit comme parlerait chacun de ses personnages et notamment Abad, ce jeune garçon issu de la Goutte d’Or. C’est justement par sa manière d’écrire que Sofia Aouine m’a conquise. Langage cru et parfois abrupt, phrases longues, phrase courtes… Tout est là pour vous embarquer dans une lecture au rythme saccadé, effréné. Vous ne lâchez plus le livre avant la fin. Elle alterne aussi parfaitement les registres de langue selon qu’elle prend le point de vue de l’un ou l’autre de ses personnages. 



Sofia Aouine nous emmène donc dans ce roman à suivre le quotidien d'Abad, un adolescent d'origine libanaise de 13 ans qui vit dans le quartier de la Goutte d’Or au coeur du Paris populaire mais aussi à une sinistre réputation. Le lecteur vit et vibre avec ce quotidien pour le jeune Abad.



Immersion totale



En racontant cette histoire avec le personnage d’Abad, elle nous plonge directement dans ce quartier, au milieu de ses habitants, de ses habitués, de ses habitudes... On y plonge d’autant mieux qu’elle utilise une narration avec le vocabulaire d’Abad. On est Abad en lisant les chapitres de son point de vue. On le comprend, on ressent les émotions qu’il éprouve... Tout est vrai, les mots sont durs, cash je dirais même. C’est l’ado qui parle et on y croit. J’ai adoré aussi  la manière de décrire ce qui l’entoure avec les « imams 2.0 »  et les qualificatifs qu’il attribue à ceux qu’il croise et notamment cette psychologue. C’est fin et plein d’humour à la fois.



Ce roman vous prend aux tripes



Sous ses apparences un peu rugueuses, racaille presque, se cache un jeune garçon sensible, emphatique, soucieux des autres et surtout animé d’une vraie volonté de sortir de ce chemin misérable tout tracé à cause de ses origines très modestes. C’est fort, ça prend aux tripes ! 



Les femmes sur le chemin de vie d’Abad occupent une place de choix : il y a Ethel la psychologue bien entendu, mais aussi Batman, la jeune fille voilée dont il tombe amoureux à travers sa fenêtre et des ombres entraperçues, Odette, la vieille voisine, Gervaise la prostituée africaine... Elles vont toutes à leur manière aider Abad.



Bref un premier roman très réussi et magnifique ! 


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Rhapsodie des oubliés

J'ai découvert ce roman grâce à l'association des 68 premières fois.



Rhapsodie des oubliés, quel ovni !

Ce livre est une tranche de vie, de vie réelle. Je n'ose imaginer combien d'enfants vivement actuellement dans la même situation que Abad. La plume de l'auteure, parfois crue, reflète la réalité du quartier. J'ai eu l'impression d'y être, vraiment.

Je pense que ce livre ne plaira pas à tous, c'est assez lent, ce n'est pas un livre d'action. Mais c'est un bel écrit, parfois bouleversant, parfois touchant. Au delà de la dureté de ce quartier, on découvre en Abad un jeune adolescent touchant, perdu, attendrissant. J'ai particulièrement aimé sa relation avec Odette, la voisine.

L'écriture nous transporte vraiment et on enchaîne les pages sans s'en rendre compte.

Je recommande ce roman aux amoureux des écrits de Romain Gary, j'ai totalement senti son influence dans ce livre.

Une étonnante découverte que je ne regrette pas !
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Rhapsodie des oubliés

Il y a chez Abad, un peu du "Momo" décrit par Romain Gary dans "La vie devant soi", mais il y a aussi l'instantané d'un quartier parisien, la Goutte d'Or où cohabitent toutes les immigrations, légales ou non, tous les désespoirs d'une société ni française ni étrangère.



Au travers de ce gamin des rues, franchement porté sur la branlette (il y a des passages savoureux, d'une réalité et d'une fraîcheur..), se dessine le portrait d'un quartier de "recalés", d'Ida la gamine juive sauvée de la Shoah, à Gervaise (-Hello ZOLA -) la pute africaine, des "Barbapapas" (intégristes islamistes auxquels l'auteur via la narration n'accorde aucune circonstance atténuante - le chapitre en mode texto sur les candidats au voyage vers la Syrie est décapant !) à Madame Odette, retraitée-virée de Radio France et qui fait découvrir musique et littérature à ce gosse "de rien"...



C'est Paris, dans ses replis pas bobos, dans sa cruelle réalité, c'est aussi un témoignage émouvant, souvent drôle, parfois sinistrement réaliste qu'offre Sofia Alouine !

Une belle plume, un auteur à suivre !

Presque coup de cœur !!



(Il nous en faut de ces auteurs qui racontent les autres, les musulmans pas rigoristes pas terroristes, qui narrent "l'ensemble" et pas la détestation, qui donnent à voir des êtres humains exactement identiques à nous dans toutes leurs faiblesses, dans tous leurs espoirs..)



(....) faire semblant que tout va bien, éviter la honte, y revenir un jour, fermer sa gueule même si la rage gronde. Pas chez nous, pas chez toi, homme englouti ici et refusé là-bas."

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Rhapsodie des oubliés

La rue Léon, dans le quartier de la Goutte d'or, vue par les yeux d'un enfant. Ce petit Abad, bien qu'il ait tout d'un enfant a déjà compris beaucoup de choses et il fait un retour sans concession sur son quartier. Rien ne lui échappe. Et même s'il voudrait se faire passer pour un dur, il est en réalité touché par tout ce qui l'entoure. Et notamment par sa voisine ou la fille de la rue. Il finit même par se laisser aller avec la "dame qui ouvre le dedans", autrement dit une psy.

C'est écrit avec un langage de jeune de la rue, mais ça n'empêche pas, de donner à voir une réalité concrète et bien "adulte".

Un roman touchant et parfois presque mélancolique.
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Rhapsodie des oubliés

« Ma rue raconte l’histoire du monde avec une odeur de poubelles. »



La Goutte d’Or, Barbès, rue Léon,le magasin Tati, Paris 18ème arrondissement. Pas le 18ème de Montmartre, non, le populeux, le coloré, celui qui fait un peu peur. « Une planète de martiens, un refuge d’éclopés, de cassos, d’âmes fragiles de « ceux qui ont réussi à dépasser Lampedusa » »



C’est là que vit Abad et sa famille, partie du Liban pour vivre dans ce quartier. Un immeuble où l’on entend tout chez les voisins. Il a treize ans, un goût prononcé pour les grosses poitrines, les petites, les nichons… Bref, il est en pleine crise, le sexe le démange, l’amour l’interroge. Lorsqu’un groupe de femen logent en face de chez lui, c’est la masturbation assurée , bon prince, il loue ou prête, selon les garçons, sa fenêtre.



Ce gamin est éveillé, intelligent, un titi parisien nouveau genre, genre Momo du livre de Romain Gary-Emile Ajar. Dans son quartier se côtoient les putes, les intégristes que les gamins appellent les Barbapapas, tout comme les femmes voilées, surnommées « Batman »



Les adultes les pensent mauvais, mauvais élève, sale, menteur, méchant alors « que dans la vraie vie, celle qui pue la merde, c’est la rue qui nous appelle et non l’inverse. Et pour ceux qui n’ont pas de mère, il n’y a qu’elle pour les comprendre, les aimer, et donner un sens à leur vie. Ceux qui habitent là où ça sent les fleurs ne peuvent pas piger. »



Plusieurs femmes lui ont donné tout l’amour et la confiance qu’il recherche. Il y eut d’abord, Gervaise (coucou Zola!), la pute au grand cœur qui arrive du Cameroun et rêve de retrouver sa fille restée au pays. Tous les deux se tapissent le coeur de petits moments de tendresse glanés ça et là ; elle mourra sous les coups de son mac et ou de sa bande.



Odette fut sa chance. Cultivée, archiviste à la Maison de la Radio, elle lui fait faire ses devoirs, lui ouvre son univers culturel et qu’Abad rapproche un peu de sa grand-mère tant chérie.



Ida, la psy, qui lui est imposée par l’Aide Sociale à l’Enfance, celle qui nomme « la dame d’ouvrir dedans ». « Comme tous les mardis à 18 heures, je suis assis sur la petite chaise en bois inconfortable en face de la dame d’ouvrir dedans . Il faudra parler ». Pourtant parler, il ne le veut pas ; par son obstination, « Pourquoi toi, dans ton fauteuil tu comprendrais quelque chose à ce qui m’arrive ? On n’a pas la même vie.. En pus je te l’ai dit, je cause qu’aux belles, pas à des vieilles comme vous qui ont des têtes de crapaud moisi ». Ce dot être difficile à entendre alors, elle lui raconte son histoire et l’ouvre-boîte fonctionne et… Il parle et, peut-être grandit.



Ce gamin et sa bande des « Apaches du dimanche » font les quatre cents coups comme tout gamin. Ils vivent, s’amusent dans la rue et Sofia Aouine s’en fait la porte-parole (Il y a un peu du Momo du roman de Romain Gary). Ce quartier polyphonique, multiracial est dur. La bande y côtoie la drogue, le sexe, les barbapapas, les batman.



Tiens, je ne résiste pas à recopier le passage concernant « la secte » qui a capté son meilleur pote Slobodan Radovitch qui « s’était transformé en marionnette de carnaval pour mecs du Jihad ».



« La secte des moitié qamis moitié jogging Philippe Plein pailleté, baskets Louboutin cloutées à mille K, moitié din moitié bicrave, un pied dans les go fast et l’autre dans la Hijra, moitié rap moitié tajwiq, une oreille chez Kaaris et l’autre dans l’application islam-pro d’Apple Store. Génération étrange allant à la mosquée après la sortie chicha night-club du vendredi, rêvant du combo Phuket, Marrakech, Dubaï et de faire la oumra en même temps, du cul de Kim Kardashian et d’épouser une fille en niqab labellisé halal -mais si possible avec le corps d’une escort de Vivastreet ».



Ce passage donne le ton du livre, à la fois savoureux, piquant, ironique, tragique, très réaliste et touchant (lorsque Abad ouvre son cœur.)



Un très bon premier livre et une autrice à suivre.
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Rhapsodie des oubliés

Paris, 18ème. Rue Léon. Cette rue qui vous prend et non pas le contraire selon le narrateur, Abad, un gros dur au cœur tendre. Cet adolescent de 13 ans est à la recherche de l’amour, coûte que coûte. Sa vie jouxte celle de clochards et de religieux, se mêle à celle de prostituées comme Gervaise pour qui il éprouve tant d’amour, de voisins comme Odette, cette vieille femme chez qui il se réfugie pour écouter de la musique et lire des livres et qu’il affectionne tant, d’une psy, Ida, chez qui il se livre une fois par semaine, au début contraint.



Un langage à deux étages. Souvent sans fioriture. Parfois poétique. Toujours très percutant. Une misère omniprésente. Une palette de sentiments.



J’ai trouvé ce livre saisissant. Il m’a happée. Je n’arrivais pas à lâcher. Pourtant….Les premières pages m’ont laissé sceptique. J’ai eu du mal à me faire au langage du narrateur. J’ai craint, l’espace d’un instant que ce qui allait m’être conté ne serait rien de plus qu’une banale histoire de misère dans une jungle urbaine mille fois dépeinte.



L’auteure m’a fait peu à peu avancer dans la rue Léon. Progressivement, sur la pointe des pieds. Au fil des pages, j’ai mis de côté mes hésitations et je me suis laissée guider. J’ai fait connaissance avec des personnages qui ont eu beaucoup à m’offrir. Ils ne sont ni beaux, ni riches, ni lisses mais pleins de failles à explorer.



Un bon voyage que je n’étais pas certaine d’achever avec succès.
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Rhapsodie des oubliés

« Cette ville est un mac, elle te gère, tu tapines, tu khalasses (tu payes) et tu files droit. Ici, on se doit d’être jeune et riche, pas pauvre et pas vieux et surtout pas malade » .



Bienvenue à Paris ! Ah Paris… Ville Lumière, romantique et ville des amoureux par excellence. Ca c’est pour la carte postale…

Et il y a cet autre Paris : celui qui défile sous le regard vif et acéré d’Abad, 13 ans, Gavroche des temps modernes, déraciné de son Liban natal suite à l’exil familial et parachuté il y a 3 ans à la Goutte-d’Or dans le quartier de Barbès, ville-monde à lui tout seul.



Dans ce Paris là, ça grouille, ça deale, ça prie, ça rit, ça s’insulte, ça frappe, ça triche, ça se tait, ça souffre, ça espère et se résigne (beaucoup) et surtout ça vit, sans oublier d’aimer.



Un premier roman tel un uppercut, lauréat du Prix de Flore 2019 :

Les mots sont comme les coups qui pleuvent sur un ring : cinglants et sans temps morts, les pauses tendresses en plus.



Difficile de résumer ce roman, ce qui serait-ce d’ailleurs à mon sens très réducteur tant il bouillonne des nombreux thèmes abordés. Alors, lisez-le si vous souhaitez être bousculé, emporté, révolté et attendri aussi, par une plume aiguisée qui n’a certainement pas fini de s’exprimer.

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Rhapsodie des oubliés

Un livre enthousiasmant, un personnage attachant, un langage cru, des figures féminines sensibles...



Ce fut un plaisir de rencontrer cet ouvrage, malgré un début difficile.

Une fois rentré dans le contexte, une fois accepté les tournures de phrases particulières, le vocabulaire vif et sans détour, nous ne pouvons que vivre avec Abad, dans cette rue, dans ce quartier, le suivre, évoluer avec lui, le comprendre...



Un beau moment!
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Rhapsodie des oubliés

Je viens de finir ce premier roman de Sofia Aouine. Il fait du bien, en faisant parler un jeune libanais récemment arrivé en France dans le quartier de Barbès. Sans tomber dans le pathos, l'ouvrage fait découvrir les préoccupations d'un ado, sensibilise aux facteurs du décrochage scolaire, et montre comment nos lieux d'habitation peuvent nous conditionner. Le narrateur en devient attachant. Je recommande.
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Rhapsodie des oubliés

J'ai aimé lire les mots d'Abad, ce petit "poulbot" ou "Gavroche" contemporain. Dans la rue de Abad, on croise beaucoup d'oublié-e-s. En peu de mot, le livre n'est pas épais, Sofia Aouine réussit à nous faire partager les misères de notre temps, tout en nous arrachant beaucoup de sourires.



Un premier roman qui m'a fait penser à "Momo" d'Émile Ajar (Romain Gary), une version réactualisée en quelque sorte.

Une auteure à suivre :))

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Rhapsodie des oubliés

« Ma rue raconte l’histoire du monde avec une odeur de poubelles. Elle s’appelle rue Léon, un nom de bon Français avec que des métèques et des visages bruns dedans »



Abad est un adolescent de treize ans, qui vit dans le dix-huitième arrondissement, au moment du récit. Sa vie est quelque peu bouleversée. Entre sa famille qui fuit le Liban pour se réfugier en France, la précarité, la violence de la rue, la vie ne lui apporte pas le bonheur sur un plateau. Abad, comme beaucoup d’adolescents, cherche tant bien que mal où est sa place dans le monde, il cherche à se forger une identité. Il vit parmi les oubliés. Les prostituées, les réfugiés, les personnes âgées, les alcooliques, les chômeurs, les mères célibataires. Pas facile de grandir dans un milieu pareil. Pourtant, elle a son charme la rue Léon, et Abad y fait de belles rencontres. Mais on y trouve peu d’amour. L’amour, c’est d’ailleurs ce que recherchera l’adolescent tout au long du roman.



« Vous savez, une pute, c’est une belle qui a grandi trop vite. Même si vous pensez que c’est juste une pute, je le sais et je vous le dis, une pute, c’est une maman aussi »



Le langage est très cru, ce qui peut surprendre mais donne, selon moi, beaucoup de crédibilité au récit. Sofia Aouine raconte un quartier particulier avec son langage propre, et c’est tout le charme du roman. J’ai beaucoup aimé cette lecture, même si j’ai trouvé que l’autrice insistait trop sur les désirs sexuels d’Abad et que le fil conducteur était un peu flou. Malgré ces deux points négatifs, je vous recommande ce texte relativement court, qui a pour intention de mettre en avant les oubliés, les laissés-pour-compte. Rhapsodie des oubliés est le premier roman de Sofia Aouine, et c’est une belle réussite.
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Rhapsodie des oubliés

J’avais très envie de découvrir à mon tour, ce livre qui a séduit tant de personnes. Et bien, moi aussi j’ai été conquise et époustouflée. J’ai lu et dévoré en quelques heures ce très beau roman, qui, selon moi est percutant et ne laissera personne indifférent ! [C’est un livre à lire !]⁣

Nous sommes transportés dans l’histoire d’Abad, un adolescent de treize ans, haut en couleurs mais surtout attendrissant et émouvant. Il nous décrit une réalité, sa réalité du monde qui l’entoure, bien loin de faire rêver, malheureusement. Son quotidien n’est pas facile tous les jours, il essaie de s’échapper du monde où règnent violence, drogue, et bien d’autres choses... que nous ne connaissons pas forcément.⁣

La plume de Sofia Aouine est un pur délice ! Elle est la fois tendre et brutale dans ses mots et emporte facilement son lecteur dans son univers. À de nombreuses reprises, l’auteure a fait chaviré mon cœur et aujourd’hui encore, certains passages résonnent en moi.⁣ Le prix de Flore est amplement mérité, bravo pour cette pépite littéraire !
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Rhapsodie des oubliés

Bourré de clichés jusqu'à l'absurde, je suis choquée que certains puissent comparer ce roman à Zola ou à Gary...
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Rhapsodie des oubliés

Abad, jeune émigré libanais, a l’âge de tous les possibles, celui d’une vie qui commence, des envies de sexe et d’amour, de voyages et de découvertes, l’envie de vivre et de se fabriquer de beaux souvenirs. Mais c’est sans compter sur le père quasi absent, la mère débordée et soumise, les copains qui promettent la lune et ne voient pas les pièges, sur la justice qui n’entend pas ces gamins qui espèrent, attendent, tombent.



Alors dans la vie d’Abad il y aura Madame Futterman, la dame qui ouvre dedans, celle qui malgré sa vie de petite fille juive triste, sait écouter et rire encore ; il y aura Gervaise, la belle prostituée noire qui par peur des sorciers ne quittera jamais cette condition avilissante qui l’attendait à Paris quand on lui avait fait miroiter un vrai métier pour élever sa fille, il y aura Odette, la voisine accueillante qui offre un peu de rêve et de douceur au pays des sucreries et de la musique, il y aura encore Batman, la jeune fille voilée, tenue enfermée par les hommes de sa famille autant chez elle que sous son voile et qui ne rêve que de s’échapper pour enfin respirer, pour laquelle Abad aura son premier coup de foudre.



Premiers amours, premiers émois, premières grosses bêtises, quitter la rue Léon et la Goutte d’Or, quitter encore une fois ceux qu’on aime, partir encore pour grandir.



Quelle écriture, vivante et violente, utilisant à la fois l’argot et le langage des rues pour faire passer les émotions, la vie qui brule et bouleverse Abad et ses copains. Quelle énergie, quel humour mais aussi quel tourment dans ces mots, ces rencontres, ces aventures amères et douloureuses. Il se dégage de ce roman une rage de vivre, d’être, d’exister, qui prend le lecteur et ne le lâche pas. Si Abad m’a fait penser au petit Momo de Romain Gary, d’ailleurs présent en exergue d’un chapitre, son tempo est bien celui d’aujourd’hui. L’auteur fait vivre par ses mots, son rythme, cette ville qui perd ses jeunes dans les quartiers où la violence, la drogue et la misère ne sont jamais loin, malgré leur rage de vivre, leurs rêves et leur droit au bonheur.

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