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Critiques de Tristan Garcia (252)
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Faber : Le destructeur

L'écriture de Tristan Garcia est remarquable. Chaque phrase est d'une grande précision. Tout fourmille tellement de détails, qu'on pourrait penser que l'auteur a vu voire vécu, toutes les scènes. Il y a aussi beaucoup de références culturelles à l'Histoire, des livres, de la musique... Bref, aucun doute, Tristan Garcia est un érudit.

Son livre est donc très riche et très intense.

Quant à l'histoire, elle commence assez simplement. Une amitié entre trois élèves à l'école: deux rejetés, Madeleine et Basile puis Faber qui vient les sortir de leur position de tête de turc. Il se lie entre eux trois, un lien très fort. Il passe tout leur temps ensemble et ne vivent que les uns pour les autres. Cette dépendance salvatrice à une époque a eu aussi des conséquences plus négatives sur ces jeunes. Lorsqu'on les retrouve à l'âge adulte, chacun a fait sa vie, mais ce passé ne les a pas laissés indemnes.

Tristan Garcia nous plonge petit à petit dans un thriller parfois angoissant.

Ce livre est surprenant et déroutant. Ce qui est sûr c'est que c'est écrit d'une main de maître, très bien construit et assez atypique.
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7

Ce livre me fait penser au film "un jour sans fin", mais c'est sa vie que l'auteur refait 7 fois, en utilisant les points critiques de ses expériences de vies précédentes. C'est ironique, dynamique, raconté avec humour, et on se laisse prendre à chaque cycle, en imaginant soi-même ce qu'on pourrait faire.

Les nouvelles ne sont pas toutes de la même qualité, j'ai particulièrement aimé les 3 premières ! peut-être que 5 ou 6 auraient suffi ?
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7

Prix du livre Inter 2016, « 7 » de Tristan Garcia, chez Gallimard, est aussi sorti cette année en poche (Folio) . « 7 », ce sont d’abord six histoires distinctes qui abordent des thématiques différentes, la septième partie, elle-même subdivisée en sept sections (!) vient apporter un éclairage sur l’ensemble…une structure diabolique pour un roman singulier et captivant !

La première histoire nous propose de considérer les effets d’une drogue permettant de remonter le temps ; la seconde nous emmène aux origines du rock ; la troisième est une quête de la beauté un peu sanguinolente, et ainsi de suite… tour à tour apparaissent des militants, des extra-terrestres, un personnage qui s’appelle Moon, un autre qui est contrôleur de Principes, des antispécistes de l’Hémisphère numéro 27, et finalement un immortel qui au fil de ‘ses vies’ essaie d’échapper à son destin.

La complexité de la structure, la multiplicité des personnages, la diversité des thématiques abordées en font un roman exigeant et ambitieux, à portée philosophique. Les voyages dans le temps, les réincarnations conscientes c’est-à-dire vécues avec les souvenir des vies précédentes, permettent d’ouvrir les récits à tous les possibles. J’ai aimé cette profusion d’idées, cette imagination sans limite, comme si l’auteur mettait au défi son lecteur de le suivre – sans condition. Afin de poursuivre, suivez le lien !
Lien : http://bit.ly/2yRlu8y
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7

7 est un roman et un seul. Ne vous y trompez pas , il y a bien sept histoires qui sont juxtaposées dans ce livre, mais elle forment un tout cohérent, comme le révèle la dernière d'entre elles. Et ces histoires construisent un univers.



Tristan Garcia invente un monde où les causes sont fantastiques, ou l'inexplicable existe. Un monde dans lequel tout fonctionne selon des principes fabuleux auxquels on est bien tenté de croire. Ces principes, exposés dans les premières histoires, vont permettre d'interroger notre monde.



Le premier texte interroge la notion de jeunesse, le second la nature du processus de création, le troisième la beauté. On va également avoir un texte qui questionne l'engagement politique, un autre les limites du religieux, on a aussi un texte qui sonde les limites du fantastique.

Enfin la dernière partie, la plus spectaculaire envisage l'immortalité d'un homme sous forme d'une éternelle renaissance, et elle va englober la totalité des questions précédentes et poser des questions métaphysiques et humaines.

Car si on doit revivre toujours la même vie, comment réinventer l'amitié, l'amour, la science, la politique, la religion, comment accepter cette condition ?

L'auteur développe tous ces thèmes avec une grande virtuosité, la narration est toujours très bien rythmée, les questions existentielles se succèdent, le style est léger mais présent et toujours adapté.

Les histoires recèlent toutes une forme de poésie et sont d'une grande mélancolie dans le fond.



Alors certes, ce livre est un pavé, il est difficile de le prendre à la légère et certains lecteurs auront probablement du mal à s'immerger dans sa lecture. De plus les renaissances successives du dernier personnage appelleront des redondances qui seront insupportables pour certains, mais je crois que ce livre vaut le coup de faire l'effort, pour tout ce qu'il contient, tout ce qu'il brasse comme émotions et comme matériaux existentiels.



C'est un livre que j'ai énormément apprécié et que je vous recommande chaudement conscient toutefois qu'il ne peut pas plaire à tout le monde.
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7

A la base, un concept original et plutôt séduisant.

7 romans en 1.

7 histoires qui se suivent et résonnent (plus ou moins) d'un même écho.

La plume est alerte, bien rythmée.

Hélas, le lecteur est rapidement englué dans un magma narratif fumeux, tortueux, voire scabreux.

Entre réalité, fantasmagorie et fantastique les frontières s'effacent, les récits patinent, s'embourbent.

J'ai calé à mi-chemin... ou alors je suis passée totalement à côté !
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7

Epais ouvrage de 558 pages qui se présente plus comme 7 minis romans que comme 7 nouvelles. Pourquoi cela ? Parce que la nouvelle obéit à des règles, notamment celle de la chute que l’auteur veille à ne pas appliquer dans toute sa rigueur. Ce livre n’offre pas non plus des contes, cette discipline littéraire contenant soit une morale (Perrault, Andersen, Tolkien) soit une philosophie (Voltaire et ses contes philosophiques) soit un contenu farfelu et humoristique (Jacques Perret « la bête Mahousse ») soit encore une vision onirique ( Henri Gougaud « « figure de poupe »).

Dans 4 récits (Hélicéenne, les rouleaux de bois, hémisphères et la Septième) l’auteur opte pour un statut interne : il emploie la première personne du singulier et vit les évènements. Dans 3 récits (Sanguine, le révolution permanente, l’existence des extraterrestres) il opte pour le narrateur témoin à la limite dans « Sanguine » du narrateur omniscient. Le premier récit (Hélicéenne) vaguement inspiré par la science fiction traite du retour sur le passé. Le deuxième (les rouleaux de bois) aborde la musique avec une avalanche de mots étrangers et abscons. Le troisième (Sanguine) mélange une pesante réflexion sur la beauté et son traitement par les médias. Le quatrième (la révolution permanente) s’interroge à travers une narration sans logique ni attrait sur les changements du monde. Le cinquième (l’existence des extraterrestres) se présente d’avantage comme une histoire policière comportant des réflexions sur la politique sans que l’auteur veille à prendre de la distance sur les propos des personnages. La sixième (hémisphère) la moins mauvaise se lit assez bien avec sa réflexion sur une organisation sociale qui semble inspirée du monde anglo-saxon. Dans la septième qui porte ce titre l’auteur écrit en page 526 « de sorte que pour la 7° il ne me restait plus rien à raconter ». On ne saurait mieux dire. Il continue pourtant à noircir du papier avec des trivialités, des histoires écœurantes de nez qui saigne et d' invraisemblables pseudo réincarnations.



Mélange malsain d’histoires apparemment fantastiques et de conclusions vaguement réalistes, cet ouvrage se révèle délirant, snob, prétentieux. Il comporte beaucoup de grossièretés gratuites et banales, de la pub pour une marque de cigarette, il fait en creux l’apologie du haschich, les scènes de sexe sont décrites sans la moindre originalité (lisez « Val-paradis » d’Alain Jaubert c’est autre chose !) et surtout il est rempli de longueurs insupportables. A part « hémisphère » il ne livre aucune réflexion intéressante.

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7

Je reste sur ma faim avec ce livre... L'auteur nous transporte dans des univers étranges et atypiques qui visiblement ne me parlent pas !

La plupart du temps je n'ai pas réussi à le suivre, dans le meilleur des cas je me suis ennuyée, dans le pire j'ai trouvé l'atmosphère glauque et dérangeante.
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7

Sept grandes nouvelles de plus de 50 pages chacune, indépendantes les unes des autres mais avec un thème commun: la notion de temps.

Souvent fantastiques ces nouvelles nous racontent nos obsessions sur ce que nous sommes, ce que nous étions peut être et ce que nous pourrions devenir ou changer.

Dans "Hélicéenne" c'est une drogue qui nous permet de revenir en arrière et de revivre un âge choisi. "Les rouleaux de bois" nous déroute par le fait que tout est déjà écrit , "Sanguine" part du principe que nous avons un contraire qui vit l'inverse de notre vécu pour que nous puissions exister. "La révolution permanente" nous parle de nos fantômes ou qui sait anges gardiens, "L'existence des extra-terrestres" déterrent nos angoisses d'un autre monde que le notre, "Hémisphères" celles du communautarisme et la peur des autres. Enfin "La septième" reprend le thème de la vie éternelle que l'on revit mort après mort (Replay de Ken Grimwood ou 22/11/63 de Stephen King) et nous donne la clé finale de ce roman.

Très bien écrit et documenté comme peut l'être un roman de science-fiction, on adhère ou abhorre. J'ai adhéré et pris beaucoup de plaisir à cette lecture qui nous fait voyager dans notre monde d'aujourd'hui et ............ de demain peut-être.
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7

77 fois j'ai failli abandonner, je me suis accroché mais pour moi les 6 premières parties sont plus la pour y faire référence dans l'ultime partie que pour encourager le lecteur à continuer sa lecture.

Je reste perplexe, la construction reste intéressante mais est ce suffisant?

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7

Moi, je vendais du présent et ça, tout le monde pouvait se l'offrir. Libre à vous de l'appeler de la drogue, à l'époque je préférais dire: de la chimie. La vie, c'est quoi? Normalement, c'est simple: protéines, ADN, double hélice et molécules...Mais c'est dur de se sentir vivant dans notre monde de merde. On a l'impression d'être des pierres qui souffrent. Alors je proposais un petit supplément de chimie à la chimie humaine, dans l'espoir de rendre l'existence supportable.
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Faber : Le destructeur

Ce quelqu'un, qui n'était ni tout ni rien, c,est Mehdi Faber... Un enfant, un adolescent, puis un homme qui a hanté à la fois la vie de Madeleine, de Basile, de Tristan et de toute la ville de Mornay. C'est de sa vie mystérieuse dont il est question dans ce roman... Même si la lecture de ce livre est simple, fluide et rythmée par des chapitres courts, l'histoire n'en est pas moins étrange... Tout comme les différents narrateurs, on a du mal à cerner ce personnage, mi-ange mi-démon... Mais son âme n'est jamais très loin, bonne ou mauvaise...
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Faber : Le destructeur

Madeleine, Basile et Faber grandissent ensemble depuis l'âge de huit ans. Rien ne les sépare, ni leurs différences, ni leurs jeux dangereux. Basile et Madeleine grandissent dans des familles "normales" ; Faber, adopté par un couple âgé traîne très tôt un lourd passé. Faber, plus fort que les deux autres les protège des fortes têtes de la cour de récréation ; Basile et madeleine protègent Faber de lui-même, de ses excès. A la fin d'une adolescence tumultueuse leurs chemins se séparent.

On retrouve le trio vingt ans plus tard. Ces retrouvailles qui portent les stigmates d'un passé commun douloureux achèveront de briser cette belle amitié dans le sang.

Alternant présent et passé et la parole des différents protagonistes, Tristan Garcia décrit une génération tiraillée entre ses aspirations et les contraintes sociales, mais son roman est surtout le portrait de trois individus sensibles qui ne se remettent pas de leur adolescence.

Un bémol cependant : l'auteur choisit en fin de roman de mettre en scène une sorte de double de lui-même, qui à la manière d'un deux ex machina vient conclure l'histoire. Dommage, la ficelle est un peu facile. J'aurais préférée une fin ouverte? incertaine plutôt que cette conclusion un peu facile.
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Faber : Le destructeur

Faber est un être énigmatique, mi ange, mi démon. Orphelin très jeune, cet enfant maghrébin est recueilli par Marthe et Jean, un couple brisé par la mort de leur fille. A l’école de Mornay, Faber va défendre Basile, un jeune garçon devenu la tête de turc du méchant Romuald et Madeleine, une fille un peu garçon manqué. Les trois enfants vont très vite être inséparables et Basile et Madeleine idolâtrent le jeune Faber.

Dès les premiers chapitres, l’auteur nous fait comprendre toute l’ambiguité de Medhi Faber. Il est beau, intelligent, torturé, défenseur des plus faibles. Adulte, il n’est plus qu’un homme à l’écart de la société, sale et sans le sou.

Tristan Garcia excelle dans la construction de ce roman qui se dévoile par étape, alternant l’âge adulte des retrouvailles et les périodes de collège puis de lycée. Ce n’est que dans l’ultime partie que l’on comprend le drame de cette période adolescente.

Le récit montre aussi cette place difficile recherchée par l’adolescent. Être suffisamment fort pour ne pas se laisser manipuler par les meneurs, vouloir comme Faber être ce leader qui lève les foules, savoir accepter qu’un ami ait d’autres admirateurs. L’amitié peut parfois être possessive, étouffante. Et comment la vit-on lorsque l’on a grandi et que l’on a trouvé une place comme Basile ou Madeleine alors que Faber reste toujours un marginal?

" L’âge fait toute la différence, il sépare les hommes comme le font les genres, les classes et les cultures; mais il ne coupe pas seulement les individus les uns des autres, il écarte chaque individu de lui-même d’année en année."

L’auteur parvient grâce à la construction et à l’ambiguïté de ses personnages à créer un récit complexe, inquiétant qui laisse une large part de mystère. Le style est assez classique et maîtrisé mais je n’aime pas spécialement les passages avec des verbes sans sujet.

Je regrette aussi un peu le dénouement qui se fait avec l’arrivée de Tristan, l’auteur, un jeune garçon un peu semblable au jeune Faber. Même si j’avoue qu’il donne finalement une vision un peu philosophique au personnage de Faber, une tentative d’explication de cet étrange personnage. Enfant perdu à la mort de ses parents, Faber a -t-il retourné sa peine ou sa culpabilité contre lui et la société ou est-ce un être foncièrement maléfique ? Les vies de Madeleine et Basile auraient elles été meilleures ou pires sans la rencontre de Faber.

La période, le lieu ont ils un impact sur les illusions perdues de cette jeunesse puisque l’auteur dit plusieurs fois que l’histoire est celle de " ces enfants de la classe moyenne… deux générations après une guerre gagnée, une génération après une révolution ratée ».



Je retiens deux points forts sur ce livre : la construction et l’ambiance particulière et prenante que l’auteur est parvenu à créer.
Lien : http://surlaroutedejostein.w..
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Six feet under : nos vies sans destin

L'auteur est un jeune écrivain et philosophe français. Les intellectuels s'intéressent depuis une demi-douzaine d'années aux séries et cette nouvelle collection des Presses Universitaires de France en témoigne. En tant que mathématicien, c'est avec une certaine méfiance que j'ai commencé ma lecture. Elle s'est vite dissipée tant les phrases obscures, les mots rares et les références littéraires inconnues ne s'étalent pas sur les quelques cent-cinquante pages de l'essai : il n'y a guère de passages difficiles pour un lecteur lambda. Le ton n'est pas passionné, à peine cordial, mais cela se lit bien car on sent que l'auteur apprécie la série laquelle participe aussi à donner une âme à son écriture.



Moi-même séries-vore j'ai eu la chance de recevoir ce livre dans le cadre de l'opération Masse Critique. J'ai beaucoup aimé Six Feet Under et c'est une joie de retrouver ainsi les personnages et l'ambiance si particulière de l'entreprise familiale : je remercie Tristan Garcia pour cela. Et c'est une évidence : malgré un résumé des saisons le livre s'adresse à ceux qui connaissent la série.



Après une mise en bouche l'ouvrage se décline en six "thèmes", comme les "pieds sous terre" ah ah : l'individu, la famille, le travail, l'amour et la sexualité, la mort, le sens de la vie. Des gros plan sur des épisodes et des personnages courent tout du long sans être spécialement rattachés au chapitre du moment. Voilà donc un découpage très artificiel qui cependant rend la lecture plus agréable, comme des respirations entre les différents titres.



Mon avis est très mitigé quant au contenu proprement dit. Je trouve qu'on est plus souvent dans la contemplation et des descriptions éclairées que dans une véritable analyse de fond. Certes, quelques passages sont forts, mais au bout du compte seul le quatrième pied "ils s'aiment" m'a globalement convaincu. J'aurai en fait préféré un magazine écrit à plusieurs mains et accompagné d'une riche iconographie au service du propos.



Un ouvrage à réserver aux fans de la série d'autant qu'il a la bonne idée d'être d'un format proche de celui d'un dvd.
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La meilleure part des hommes

Véritable plongée dans le Paris des années 80 aux années 2000, dans sa communauté gay et donc dans son principal fléau, le sida.

Quatre personnages aux activités différentes, journalisme, activiste politique, romancier, témoignent des jeux de haine et d'amour, de relations qui se font et de déchirent entre deux d'entre eux.
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La meilleure part des hommes

En premier lieu, je me dois d'ouvrir une petite parenthèse afin de remercier les Editions Gallimard et l'opération Masse Critique / Babélio qui m'ont permis de recevoir cet ouvrage gratuitement en échange d'un billet sur mon Blog ! Je suis ravie d'avoir pu participer à cette opération bien que je craigne après la publication de mon article, de figurer désormais sur une obscure liste noire des blogueuses littéraires bannies définitivement par les Maisons d'édition... pour délit de critique acerbe.









Car j'avoue : je n'ai pas aimé ce roman. Du tout.









Entre critiques dithyrambiques et lecteurs affligés, je fais partie des seconds. Bien que reconnaissant de son auteur un jeune homme cultivé, les nombreuses références philosophico-politiques en sont la preuve, je regrette la lourdeur de son écriture qui tourne à l'exercice de style. Texte aux échanges bruts, saccadés, brouillons, c'est écrit comme on parle.









Un réalisme cru porté par un ton faussement décontracté, corrélé par les événements racontés : l'homosexualité, la montée du sida, les déchirements des protagonistes, le sordide de situation. Cette histoire de bohèmes parisiens m'ennuie alors qu'elle devrait me déchirer. Le propos de l'auteur sur l'apparition du sida dans le Paris des années 80 et 90, fil conducteur du roman, peine à émouvoir et semble même prétexte à l'écriture de cette prose apprêtée. Un exemple, l'accumulation des surnoms donnés aux personnages, notamment celui de Dominique : Doum, Doumi, Doumé, Doum-Doum ou encore Dom. L'effet escompté est-il d'agacer le lecteur ? Si c'est le cas, je confirme que ça marche.









Comment peut-on mettre une telle distance entre ce sujet éminemment sensible et cette façon de le raconter ? Un parti pris orgueilleux qui à mon sens, fait sonner le glas de la crédibilité du récit.









Conclusion : Pensum rebutant, froid et sans saveur, je suis déçue voire consternée, convaincue que l'auteur s'est bien fichu de son lectorat avec son roman factice.


Lien : http://www.bouquineuse.com/p..
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La meilleure part des hommes

de Tristan Garcia

Roman - 305 pages

Editions Gallimard - août 2008

Prix de Flore 2008



Des hommes c'est souvent la meilleure part que l'on retient, parce qu'ils nous l'ont présentée au cours de leur vie. Parfois, la meilleure part des hommes est celles qu'ils ont cachée, tue, enfouie, en dévoilant au contraire leur côté odieux à la face du monde. C'est le cas de William Miller, jeune homosexuel rebelle, provocant, dangereux aussi par son comportement irresponsable. C'est Elizabeth qui nous en parle, qui nous conte la vie de cet homme, et aussi de Dominique Rossi, activiste dans le milieu gay, et enfin de Leibowitz, son amant. Ces trois hommes de sa vie ont connu leur heure de gloire, leur réputation, leur influence dans les mondes culturel, politique ou militant. Mais leurs vies privées, déchirées par les ravages du Sida, des conflits interreligieux, furent le théâtre de passions et de trahisons déchirantes. Elizabeth en est témoin.



Un style parlé très contemporain, une déferlante de dialogues, d'anecdotes, de tranches de vies. De drames. J'arrive pas à dire que j'ai aimé ce livre, loin de m'avoir emballée, j'ai trouvé la lecture assez laborieuse.



Extrait :

"J'étais plutôt seule.

Doumé disait souvent à Will en lui caressant la nuque, lentement : "On est heureux, c'est con, hein, on n'en fout pas une rame."

Il continuait d'écrire des articles pour Libé, mais sa vie c'était Stand désormais. J'avais pris sa place pour le culturel, au journal. J'écrivais un peu sur tout, je travaillais beaucoup.

Je ne sais pas comment ils ont été heureux, c'est précisément le genre de choses privées qui ne sont plus ce qu'elles sont quand on les voit de dehors, quand on en parle et quand on les écrit."



Certains passages m'ont plus laissée admirative.



Extrait :

"Les hommes dont la meilleure part n'est pas le coeur, mais tout autour d'eux, leurs actes, leurs paroles, et tout ce qui s'ensuit, leurs parents, et leurs héritiers - ils se survivent, leur disparition n'est finalement qu'une péripétie de leur plus longue durée, à nos yeux.



Quant à la meilleure part des hommes qui la gardent dans leur coeur, faute de mieux, jusqu'à la dernière heure, elle vit mais aussi elle meurt avec eux."

William est un écrivain provocateur, prônant l'amour sans protection malgré la séropositivité d'un partenaire. Comme lui. Personnage choquant, égoïste en apparence, assumant sa maladie et ses souffrances, refusant tout conformisme, il impressionne. Il semble que seule la narratrice Elizabeth reste la seule compréhensive et indulgente quand tous ses amis et amants sont devenus ses ennemis.

Evidemment très ancré dans la similitude avec l'histoire réelle de la fin du siècle dernier, je l'ai lu sans réaliser à quelles personnes réelles les personnages faisant référence. Seul l'organisme Stand, mouvement de lutte et d'émancipation de l'homosexualité en France, m'a évoqué clairement Act Up. Mais mes connaissances limitées ne me permettaient pas de pousser plus loin les rapprochements.

Il s'avère donc que ce William Miller renverrait de manière implicite à Guillaume Dustan, Leibowitz à Alain Finkielkraut , Dominique Rossi à Didier Lestrade. J'aurai appris des choses.
Lien : http://chezlorraine.blogspot..
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Vie contre vie : Histoire de la souffrance

Aujourd’hui je vais évoquer Vie contre vie le second tome d’Histoire de la souffrance de Tristan Garcia. Le précédent volume était intitulé Âmes ; ce nouvel opus peut se lire indépendamment du précédent et dans l’avertissement liminaire l’auteur indique que les neuf histoires de ce volumineux texte peuvent être lues en suivant l’ordre proposé (qui est chronologique) ou au gré de l’inspiration du lecteur. Ce qui relie ces neuf parties c’est bien entendu l’ambition de ce projet littéraire démesuré qui consiste à évoquer les multiples formes de la souffrance humaine et animale depuis la création de la vie jusqu’à nos jours.

Vie contre vie débute au onzième siècle en Andalousie et se termine à la fin du dix-huitième en Angleterre. Durant cette période le monde change, les arabes quittent l’Espagne, l’Amérique est découverte, les sciences et la médecine débutent leurs premiers progrès. Au gré des histoires et des aventures souvent violentes Tristan Garcia balaye les siècles de son érudition et narre des moments historiques fictifs d’une grande puissance. Ce volume est plus digeste que le précédent, la lecture est plus fluide, peut-être parce que certaines périodes historiques évoquées sont mieux connues du lecteur lambda. L’écriture s’adapte au récit, le style n’est pas univoque. Garcia navigue d’une époque à la suivante d’un continent à un autre avec facilité. Il est un conteur émérite, un fabuliste formidable. Le sujet central de ces histoires indépendantes est la souffrance et l’évolution progressive pour diminuer la douleur et affronter plus sereinement la mort (par exemple avec l’invention des premières anesthésies). Certains protagonistes sont doués de facultés étranges leur permettant de ne pas ressentir la souffrance. Ceci peut avoir des avantages, mais la souffrance est également un moyen de se prémunir des conséquences de certaines violences en mettant en place des stratégies adaptatives. Force est de constater que la résilience humaine est souvent ahurissante, par exemple lors des récits relatifs à l’esclavage avec les transferts transatlantiques des noirs amenés vers les Amériques. Les clés de lecture et de décryptage sont multiples mais ce qui compte c’est le plaisir de la découverte de ces épopées. Il serait fastidieux de développer des exemples, selon les histoires le nombre de chapitres est plus ou moins conséquent et l’auteur trouve le rythme pour chaque histoire. Parfois en quelques pages un conte s’élabore, d’autres histoires polyphoniques nécessitent un plus long développement.

Vie contre vie est un roman total, une œuvre gigantesque et sincère. Tristan Garcia poursuit son projet même si Âmes a probablement trouvé moins de lecteurs que ses premiers romans, il parvient à se renouveler et à fasciner par ce travail de documentation, de mise en fiction et d’unité globale de son ambitieux récit.

Voilà, je vous ai donc parlé de Vie contre vie de Tristan Garcia paru aux éditions Gallimard.


Lien : http://culture-tout-azimut.o..
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Laisser être et rendre puissant

Une somme dense et originale, en tout cas fine et passionnante, comme souvent avec Tristan Garcia. L'esprit de cette somme est à première vue assez similaire à celle de ce qui était selon moi son ouvrage majeur, à savoir Forme et objet : on y voit une tentative de penser les choses en « égalité » à la limite du n'importe-quoi sans y tomber, c'est-à-dire sans tomber dans l'indétermination intégrale tout en laissant pourtant être ce qui peut être, et cela sans les considérations d'une métaphysique particulière que l'on reconstruira par la suite et qui consistera davantage à choisir et à trier. Toutefois, l'approche et l'objectif divergent, puisqu'il ne s'agit pas tant de partir d'une « ontologie plate » avant une « intensification » que d'entrer dans une « catabase », c'est-à-dire dans une plongée vers le possible ontologique, avant d'entrer dans une reconstruction métaphysique de la puissance (une « anabase »). Il faut d'ailleurs bien comprendre que, pour Garcia, il ne s'agit pas de tout laisser être effectivement, au risque d'une impossibilité, mais de laisser être ce qui peut l'être, avant de rendre puissant ces possibilités dans une métaphysique de la formation des êtres. Il faut donc bien comprendre que puissance et possibilité s'opposent ici : la puissance est un pouvoir de traitement des possibles, c'est-à-dire qu'une forte puissance limite fatalement les possibilités en général tandis que les possibilités limitent la puissance – celui qui est possiblement charpentier et professeur et qui demeure dans cette pure possibilité termine par n'être ni l'un ni l'autre. L'objectif est de trouver un « commun distinct ». Qu'est-ce qu'un commun distinct ? Ce n'est évidemment pas une entité si commune qu'elle en perd sa distinction, ce n'est évidemment pas une entité si distincte qu'elle en perd son caractère de commun : il s'agit de pouvoir distinguer du commun, en prenant les possibilités une à une, en allant au minimum de détermination – de trouver ce qui commun en restant encore distinct. Il ne s'agit donc pas, dans un premier temps, de choisir le meilleur commun distinct, qui est le propre d'une métaphysique « irénique » à reconstruire ensuite (et qui cherche, selon les critères assignés, le modèle le plus puissant), mais le commun distinct tel qu'il est en ontologie « superlative ».



On note qu'énormément d'auteurs sont cités, parfois trop (au risque de la superficialité). Ce sont essentiellement des auteurs contemporains et modernes, ainsi que des philosophes analytiques. On note quelques répétitions et quelques tâtonnement sans pour autant noter de la confusion argumentative. le style est donc aussi relâché que le contenu est fin et rigoureux. La structure générale du livre est très pertinente.



Le livre s'organise en plusieurs parties



Introduction.

On y voit que la métaphysique est un discours irénique et multiple tandis que l'ontologie est un discours radical, dogmatique et superlatif. Il faut alors voir les chose en entonnoir, dans lequel on doit cesser le processus de recherche juste avant le n'importe-quoi : toutes les métaphysiques doivent se baser sur une ontologie commune, qui n'est rien d'autre que la recherche du commun distinct, avant de rechercher le meilleur commun distinct, de manière pluraliste et en fonction de ce que l'on recherche à comprendre (identité ? Processus ? Formation?)



Livre I : Laisser être

Il s'agit ici de « laisser être », c'est-à-dire de laisser se concevoir les possibles jusqu'à la limite, jusqu'au minimum de détermination qu'a besoin l'être : on y laisse les possibles se manifester un par un, dans toute leur possibilité (il est nécessaire de les laisser se concevoir un par un, comme cela est indiqué dans le livre II, car un est le minimum et car le possible « se soustrait au compte »). Il ne s'agit donc pas de trouver l'être le plus imposant mais de trouver l'être minimal.

- La perception, qui est une rencontre de proche en proche entre deux êtres, comprend aussi la pensée, qui est perception des variations ontologiques de ce qu'il y a. Cette perception inverse son objet tout en augmentant pourtant le monde.

- Il s'agit de défendre la « libéralité », qui n'est confondue avec l'idéologie politique libérale (qui est au contraire critiquée), mais ce qui est « l'état minimal de l'être »

- le minimum est commun en tant que minimum, distinct en tant qu'il est encore un être juste avant le non-être (en dessous du minimum) et égal



Livre II : Catabase

Il s'agit de s'enfoncer, de descendre, vers ce possible. Pour cela, on passe par plusieurs « stations ».

Il faut néanmoins d'abord comprendre que l'indétermination totale est impossible : un être déterminé à être indéterminé est déjà minimalement déterminé, tandis qu'un indéterminé à être indéterminé implique déjà un devoir-être-indéterminé. A la frontière de cette indétermination, la catabase devra s'arrêter.

Les stations sont respectivement : le nihilisme (qui en demande trop à l'être), la théorie critique (qui met tout son condition), le substantialisme (moins contraignant mais oublieux de sa production), le nominalisme (qui n'arrive pas à se stabiliser entre le substantialisme et la matérialisme), le matérialisme (encore moins contraignant mais risquant de retomber dans le substantialisme), le réalisme (encore moins contraignant en tant que le réel est fin de la représentation), le réalisme des possibles, la station des modes de l'être (on y découvre qu'il ne peut pas il y avoir moins qu'un être).



Livre III : Némésis :

On y voit les contradictions de toute ontologie trop libérale. La pensée libérale et la pensée autoritaire sont renvoyées dos à dos.



Livre IV : Anabase :

Là, il s'agit de passer du possible à la puissance, il s'agit d'une remontée à la surface, de recompositions métaphysiques. Il faut rendre puissant les possibles, les lier, à les intégrer dans une métaphysique du meilleur commun distinct. La catabase restera toujours à disposition en cas de besoin. Il s'agit de mettre en opposition deux métaphysiques :

- La métaphysique du résultat, qui est en fait la métaphysique de l'identité. Elle est dite métaphysique du résultat car elle ne prend pas en compte le processus d'identification entre le sujet et son attribut : pourtant, pour opérer, elle doit bien les distinguer, bien qu'une telle distinction se fasse en vertu du résultat seulement (x=x, c'est déjà instaurer deux x qui s'identifient).

- La métaphysique du processus, qui est plus moderne et qui agit de manière tout à fait contraire. Pourtant, on risque à chaque moment la confusion.

Face à cela, Garcia opposera une métaphysique de la formation : les frontières des êtres sont des puissances de distinction, qui ne sont ni complètement intégrées dans l'espace (métaphysique du processus, dans laquelle il n'y qu'un processus) ni complètement exclues de l'espace (métaphysique du résultat, dans laquelle la frontière n'est qu'une espèce de ligne nulle), mais qui oscillent entre une conception du résultat et une conception du processus.



Livre V : Rendre puissant

Il s'agit de se donner moyens de représentation d'être égaux mais distincts. Plusieurs cas sont traités. Les passages sur la vie sont très intéressants. Des sujets actuels sont indirectement traités. On sent ici, comme tout au long de l'ouvrage, les opinions politiques de l'auteur.



On peut cependant se demander : quel problème veut vraiment traiter l'auteur ? Une telle pensée revient, au fond, à de l'esthétisme. Le problème semble manquer, au profit d'une recherche de théorie déconnectée de tout enjeu. Pourquoi un tel laisser-être, pourquoi un tel rendre-puissant ? Tristan Garcia ne veut rien de transcendantal. Il ne veut pas un possible reconduit par une structure apriorique. Il veut laisser être les choses mêmes en tant qu'elles sont choses. Or s'en contenter, c'est contempler. Mais il faut voir l'enjeu. Laisser être, voilà certes une posture réaliste qui a la particularité de penser le possible. Mais comment ne pas voir que ce possible révèle, par sa propre étance, une structure de l'étance en général, c'est-à-dire une structure apriorique ? Pourquoi ne pas régresser jusqu'à un plan transcendantal susceptible de montrer les enjeux obscurcis par cette simple étance demeurée ininterrogée comme possibilité même ? En un mot, pourquoi s'en contenter, pourquoi ne pas en apercevoir des fondements ? Pour ma part, c'est un enjeu phénoménologique que je vois. L'esthétisme de l'auteur se tient, mais n'interdit rien. Et c'est d'ailleurs cela même qu'il veut
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L'architecture du possible

J'ai appris beaucoup de choses sur cet auteur qui aime à jouer à cache-cache avec lui-même et donc, forcément, avec nous. Pourquoi certains de ses livres me passionnent et d'autres m'ennuient. J'aime vraiment sa démarche, entre philosophie et littérature, qu'il explique avec talent dans ce livre d'entretiens. Il y a du Régis Debray mais aussi du Umberto Eco ou du Milan Kundera chez cet homme encore très jeune et indiscutablement talentueux. Il me tarde de voir vers quelle oeuvre il va « converger ». J'ajoute que son sens de l'engagement, à la fois intense (un de ses mots préférés) et réflexif, à la recherche de l'authenticité et de la radicalité mais en refusant la violence et le binarisme, est sans doute celui qui me parle le plus dans la « jeune génération ». Il me donne envie de mieux comprendre les luttes intersectionnelles dont il prend le parti.



Je partage aussi son goût pour la concision (pour moi : parcimonie), son rejet du style, sa volonté de s’intéresser « à tout », même si pour beaucoup cela revient à travailler « sur rien ».
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