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Citations de Vassili Grossman (520)


J'ai trempé ma foi dans l'enfer. Ma foi est sortie du feu des fours crématoires, elle a franchi le béton des chambres à gaz. J'ai vu que ce n'était pas l'homme qui était impuissant dans sa lutte contre le mal, j'ai vu que c'était le mal qui était impuissant dans sa lutte contre l'homme. Le secret de l'immortalité de la bonté est dans son impuissance. Elle est invincible. Plus elle est insensée, plus elle est absurde et impuissante et plus elle est grande. Le mal ne peut rien contre elle! Les prophètes, les maîtres de la foi, les réformateurs, les leaders, les guides ne peuvent rien contre elle! L'amour aveugle et muet est le sens de l'homme.
L'histoire des hommes n'est pas le combat du bien cherchant à vaincre le mal. L'histoire de l'homme c'est le combat du mal cherchant à écraser la minuscule graine d'humanité. Mais si même maintenant l'humain n'a pas été tué en l'homme, alors jamais le mal ne vaincra.
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La vie devient impossible quand on efface par la force les différences et les particularités.
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EXTRAIT n°2 p. 280
(...) Une des propriétés les plus extraordinaires de la nature humaine qu'ait révélé cette période est la soumission. On a vu d'énormes files d'attente se constituer devant les lieux d'exécution et les victimes elles-même veillaient au bon ordre de ces files. On a vu des mères prévoyantes qui, sachant qu'il faudrait attendre l'éxécution pendant une longue et chaude journée, apportaient des bouteilles d'eau et du pain pour leurs enfants. Des millions d'innocents, pressentant une arrestation prochaine, préparaient un paquet avec du linge et une serviette et faisaient à l'avance leurs adieux. (...) Et ce ne furent pas des dizaines de milliers, ni même des dizaines de millions, mais d'énormes masses humaines qui assistèrent sans broncher à l'extermination des innocents. Mais ils ne furent pas seulement des témoins résignés; quand il le fallait, ils votaient pour l'extermination, ils marquaient d'un murmure approbateur leur accord avec les assassinats collectifs. Cette extraordinaire soumission des hommes révéla quelque chose de neuf et d'inattendu. Bien sûr, il y eut la résistance, il y eut le courage et la ténacité des condamnés, il y eut des soulèvements, il y eut des sacrifices, quand, pour sauver un inconnu, des hommes risquaient leur vie et celle de leurs proches. Mais, malgré tout, la soumission massive reste un fait incontestable.(...)


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L'homme perçoit toujours la vie comme une lutte entre le bien et le mal, mais il n'en est pas ainsi. Les hommes qui veulent le bien de l'humanité sont impuissants à réduire le mal sur terre.
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Tantôt mon voisin m’annonce, en m’étranglant de joie, que nos troupes sont passées à l’offensive et que les Allemands sont en fuite. Tantôt le bruit se répand comme quoi le gouvernement soviétique et Churchill ont lancé un ultimatum aux Allemands et que Hitler a ordonné de ne plus tuer les Juifs. Tantôt on annonce que les Juifs seront échangés contre des prisonniers de guerre allemands.
Ainsi, le ghetto est l’endroit au monde où il y a le plus d’espérance. […] Et la source de cet espoir est une : l’instinct de vie, qui résiste sans aucune logique à l’idée effroyable que nous sommes tous condamnés à périr sans laisser de traces. Je regarde autour de moi et je me dis : « Est-il possible que nous soyons tous des condamnés à mort qui attendent leur exécution ? »

PREMIERE PARTIE, Chapitre 17
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Plus les profondeurs de la vie sont immuables, plus les changements à la surface de l'océan sont brutaux.
On constate que les tempêtes vont et viennent mais les profondeurs de la mer, elles, demeurent.

Repos éternel
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La vie était horrible. Et ils eurent la prescience qu'une fois la guerre terminée, la force qui les avait jetés au fond de ce trou, leur avait enfoncé la gueule dans la boue, cette force opprimerait les vainqueurs aussi bien que les vaincus.
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Brusquement, le soleil couchant illumina la route et la maison en ruine. Les orbites calcinées des maisons semblèrent se remplir de sang glacé ; la neige, salie par la fumée des combats et labourée par les obus, prit des reflets dorés, tandis qu’au ras de la route les tourbillons de neige devenaient tourbillons de bronze intense.
La lumière du soir révèle la nature profonde des choses en donnant à nos impressions visuelles les dimensions d’un tableau, celle de l’Histoire et du destin. Mille voix parlent par ces taches de boue et de suie qu’éclaire le soleil couchant ; le cœur serré, nous comprenons le bonheur perdu, l’irréparable malheur, l’amertume de nos fautes et l’inaltérable envoutement de l’espoir.

TROISIEME PARTIE, Chapitre 31
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Strum se souvient du visage de son assistant lorsqu'il lança, en guise de plaisanterie, que Staline avait énoncé les lois de de la gravitation universelle avant Newton.

__ Vous n'avez rien dit, je n'ai rien entendu, lui dit ce dernier.

Plaisanter est idiot, comme si l'on s'amusait à donner des chiquenaudes à un flacon de nitroglycérine.
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La liberté n'est pas qu'un bien ; la liberté est difficile, elle est parfois malheur, elle est la vie.
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Vassili Grossman
(Lettre de Vassili Grossman adressée à Nikita Sergueïevitch Khrouchtchev suite à la confiscation de son manuscrit Vie et Destin)

Février 1962

Cher Nikita Sergueïevitch,

Je réfléchis sans cesse à la catastrophe survenue dans ma vie d’écrivain, au destin tragique de mon livre. Pourquoi donc mon livre, qui ne contient ni mensonges ni calomnies, mais où l’on trouve vérité, douleur, amour pour les êtres humains, a-t-il été l’objet d’un interdit ? Pourquoi est-il caché, à moi et aux hommes, comme un meurtrier criminel ? Cela fait une année que je ne sais pas si mon livre est intact, s’il est conservé, peut-être est-il détruit, brûlé. Si mon livre est mensonge, si mon livre est calomnie, qu’on le dise. Il faut que les lecteurs soviétiques pour qui j’écris depuis trente ans jugent ce qui est vérité et ce qui est le mensonge dans mon livre. On ne lutte pas ainsi contre le mensonge, on lutte ainsi contre la vérité. Je continue à croire que j’ai dit la vérité, que je l’ai écrit en aimant les hommes, en ayant pitié des hommes, en ayant confiance en eux. Je vous demande de rendre la liberté à mon livre. Il n’y a pas de sens, pas de justice dans ma situation présente. Ma liberté physique n’a aucun sens si le livre auquel j’ai consacré ma vie, se trouve, lui, emprisonné.

Avec mon profond respect,

Vassili Grossman.

[Extrait de l’émission Autant en emporte l’Histoire sur France Inter - min. 35'55 : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/autant-en-emporte-l-histoire/autant-en-emporte-l-histoire-du-dimanche-06-mars-2022-9594187


NDL : Evidement Khrouchtchev n’a pas répondu aux attentes de Vassili Grossman. Cette lettre fait suite à « l’arrestation » de son manuscrit Vie et Destin en février 61 et enfermé à la Loubianka, la prison du KGB. Une quinzaine d’années plus tard, deux copies dissimulées par des amis de l’auteur vont réussir à parvenir en occident et permettre de reconstituer, malgré quelques passages manquants, l’intégralité du livre. Il verra ainsi le jour en Suisse en 1980 grâce aux éditions L’Age d’Homme et enfin en Russie, en 1988. Dans un documentaire, sur Arte (que je ne suis hélas pas parvenue à retrouver), j’ai appris que le KGB avait enfin « libéré » en 2013 le manuscrit confisqué et l’avait transmis aux archives nationales russes. Peut-être permettra-t-il de compléter les passages manquants. Même s’ils ne diminuent en rien la force du livre, je ne désespère pas qu’un jour, et si possible de mon vivant, la version originale intégrale puisse enfin revivre!]
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Vassili Grossman
« Là où se lève l’aube du Bien, des enfants et des vieillards périssent, le sang coule. »
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L'aspiration de la nature humaine vers la liberté est invincible, elle peut être écrasée mais elle ne peut être anéantie. Le totalitarisme ne peut pas renoncer à la violence. S'il y renonce, il périt. La contrainte et la violence continuelles, directes ou masquées, sont le fondement du totalitarisme. L'homme ne renonce pas de son plein gré à la liberté. Cette conclusion est la lumière de notre temps, la lumière de l'avenir.
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Dans les conditions du front, la bureaucratie peut avoir des effets monstrueux. Vous connaissez l’ordre : « pas un pas en arrière » ? Et voilà que l’Allemand pilonne les nôtres, et il suffirait de passer sur l’autre versant pour que les hommes soient à l’abri ; ça ne change rien à la situation et ça peut sauver le matériel. Mais un ordre a été donné : « Pas un pas », et l’on garde les hommes sous le feu, et les hommes périssent et le matériel est détruit.

DEUXIEME PARTIE, Chapitre 13
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- L'homme ne comprend pas que les villes, créées par lui, ne sont pas partie intégrante de la nature. Il ne peut pas se permettre de lâcher son fusil, sa pelle ou son balai, s'il veut défendre sa culture contre les loups, les tempêtes de neige et les mauvaises herbes. Qu'il baye aux corneilles, qu'il se laisse distraire un an ou deux, et c'est terminé : les loups sortent des forêts, le chardon fleurit, la ville croule sous la neige, disparait sous la poussière. Combien de grandes capitales ont péri sous la poussière, la neige ou les broussailles!
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Molécule après molécule, la faim élimine des cellules les protéines et les graisses ; la faim ramollit les os, tord les jambes rachitiques des enfants, liquéfie le sang, dessèche les muscles, mange les cellules nerveuses ; la faim écrase l’âme, chasse la gaité et la foi, détruit la pensée, fait naître soumission, bassesse, cruauté, désespoir et indifférence. L’humain peut alors disparaitre en l’homme.

DEUXIEME PARTIE, Chapitre 50
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Il n’y avait rien de plaisant à observer les Juifs en train de se contorsionner dans la chambre à gaz. […] Rosé n’aimait pas son travail, mais il en connaissait tous les avantages, évidents ou cachés. […] Dans sa jeunesse, il avait été faible et craintif et n’avait pu lutter pour la vie. Il n’avait jamais douté que le parti avait pour seul but le bonheur des petites gens, des faibles. Et maintenant, il sentait déjà les conséquences heureuses de la politique de Hitler ; car il était, lui, un de ces petits hommes faibles et, maintenant, sa vie, celle de sa famille, étaient devenues bien meilleures, bien plus faciles.

DEUXIEME PARTIE, Chapitre 41
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Le médecin, après avoir examiné Beriozhine, ne savait quoi faire. Il avait l’habitude de soigner les membres écrasés, les cranes enfoncés, et voilà qu’un homme tombait malade de lui-même.

DEUXIEME PARTIE, Chapitre 18
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A Kobrine, il ne s’étonnait plus de voir les foules de gens avec des baluchons, les femmes en pleurs qui avaient perdu leurs enfants dans la cohue, le regard épuisé des vieilles. A kobrine, il s’étonnait de voir des maisonnettes proprettes avec des tuiles rouges, des rideaux aux fenêtres, des pelouses, des parterres de fleurs ; il comprit alors qu’il voyait le monde avec les yeux de la guerre…

Première partie, Chapitre 21
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C'était une évolution aussi difficile à déceler que l'œuvre du temps. Les tourments de la faim, les nuits d'effroi, l'approche du malheur commençaient à libérer la liberté en l'homme, à humaniser les hommes, à faire triompher la vie sur la négation de la vie.
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