Viktor E. Frankl

P 89 - Aucune situation de la vie humaine n'est véritablement dépourvue de sens. C'est dire que les aspects apparemment négatifs de l'existence humaine, en particulier la triade tragique de la souffrance, de la faute et de la mort, peuvent se métamorphoser en réalité positive, en authentique accomplissement humain, pourvu que nous les abordions avec l'attitude et l'état d'esprit qui conviennent ! (…) si dans la véritable souffrance, la souffrance reconnue comme inévitable, je fais apparaitre une dernière – et néanmoins la plus haute – possibilité de sens, je m’acquitte non pas des premiers, mais des derniers secours. L’objection qui voudrait que la psychothérapie n’ait pas à consoler (…) est spécieuse. Ce n’est pas par hasard que le sage fondateur de l’hôpital général de Vienne, l’empereur Joseph II, a fait apposer au-dessus de la porte d’entrée cette inscription : saluti et solatio aegrorum – pas seulement pour la guérison, mais aussi pour la consolation des malades.

P 76 – pour pouvoir servir, il ne faut pas être domestique.

P 72 – la religiosité n’est authentique que là où elle est existentielle, là où par conséquent l’homme n’est pas poussé, d’une façon ou de l’autre, vers elle, mais se décide pour elle. Or nous voyons à présent qu’à ce facteur d’existentialité s’en adjoint un second, celui de spontanéité : la religiosité authentique – si elle doit être existentielle – doit aussi avoir le temps de germer spontanément. En cela on ne devrait jamais pousser personne.

P 60 – à l’inconscient instinctif, désigné par le ça, vient s’adjoindre comme nouvelle donnée l’inconscient spirituel. Avec cette spiritualité inconsciente de l’homme – qu’en outre nous avons rangée entièrement du côté du moi – s’ouvrait cette profondeur inconsciente où sont justement prises les grandes décisions, celles qui sont existentiellement authentique. Mais il en résultait ceci, ni plus ni moins : par-delà cette conscience de responsabilité, ou si l’on veut cette responsabilité consciente, il doit y avoir aussi quelque chose comme une responsabilité inconsciente.

P 58 – quand Jean-Paul Sartre déclare que l’homme, étant libre, doit choisir, s’inventer lui-même, être son propre « projet », et quand il ajoute que l’homme peut s’inventer lui-même sans référence à aucun modèle préétabli, sans que rien ne vienne à sa rencontre en provenance d’une au-delà de l’horizon strictement humain, il faut nous poser cette question : pareille entreprise ne ressemblerait elle pas au tour de la corde des Hindous ? Ce tour est celui du fakir qui voudrait nous faire croire qu’un garçon peut se hisser à la corde qu’il jette en l‘air.

« au fond », le spirituel est nécessairement, parce qu’essentiellement, inconscient. En conséquence de tout cela nous devons dire : que la personne, ce centre de notre être, a une « profondeur » inconsciente, l’esprit en sa source première est esprit inconscient.

Plus un homme essaie de démontrer sa puissance sexuelle et plus une femme veut arriver à l'orgasme, moins ils y réussissent. Le plaisir est un effet secondaire du sexe et on le détruit dans la mesure où on en fait un but à atteindre.
(...)
L'«intention paradoxale », une technique propre à la logothérapie, est fondée sur le double fait que la peur provoque l'effet qu'on appréhende et que l'hyperintention empêche la réalisation du désir. Avec cette technique, le thérapeute invite le client à adopter en pensée, ne fut-ce qu'un instant le comportement qu'il appréhende.
En voici un exemple. Un jeune médecin m'a consulté parce qu'il éprouvait une peur constante de trop transpirer. Or, l'anxiété qu'il éprouvait rien qu'à y penser suffisait à le faire transpirer abondamment. Afin de briser ce cercle vicieux, je lui ai conseillé, à chaque nouvel accès, de décider de montrer cette capacité à normal à ce qui l'entouraient. À la suite de notre entretien, chaque fois qu'il rencontrait une personne susceptible de déclencher en lui son angoisse d'anticipation, il se disait :« Je n'ai sué qu'un litre d'eau jusqu'à présent, mais maintenant, je vais en suer au moins dix ! » Résultat : ayant souffert de sa phobie pendant quatre ans, il put, après une seule consultation, s'en libérer de façon permanente en moins d'une semaine.

Deux prisonniers, dont les mobiles étaient pratiquement similaires, nous avaient fait part de leur intention de s'enlever la vie. Les deux hommes avaient invoqué l'argument typique : ils n'attendaient plus rien de la vie. Il était donc nécessaire, dans les deux cas, de leur faire comprendre que la vie, elle, attendait quelque chose d'eux ; qu'elle attendait quelque chose d'eux dans l'avenir. Nous découvrîmes que pour l'un des deux hommes c'était son enfant qu'il adorait et qui l'attendait dans un pays étranger. Pour l'autre, c'était un projet plutôt qu'une personne. Cet homme était un savant et avait écrit une série de livres qu'il se devait de terminer. Son travail ne pouvait être réalisé par quelqu'un d'autre, tout comme le père était irremplaçable pour son fils. Cette unicité, cette singularité qui caractérise chaque individu et qui donne un sens à sa vie influence autant le travail créatif que l'amour humain. Lorsqu'il se rend compte à quel point il est irremplaçable, un homme devient profondément conscient du fait qu'il est responsable de sa vie.

Ne visez pas le succès. Car on ne peut pas poursuivre le succès, pas plus qu'on ne peut poursuivre le bonheur. Ils ne sont que des effets secondaires du dévouement que l'on manifeste pour une cause plus grande que soi-même ou qu'une autre personne. Le bonheur, comme le succès, arrive quand on ne s'y attend pas. Écoutez ce que votre conscience vous dicte et agissez au meilleur de votre connaissance. alors vous verrez qu'à la longue le succès vous viendra précisément parce que vous n'y pensiez pas.

"Inutile de chercher un sens abstrait à la vie. Chacun a pour mission de mener à bien une tâche concrète et unique et, de ce fait, il ne peut être remplacé, de même que sa vie peut être renouvelée. La vocation de chacun est donc unique, tout comme sa façon de la réaliser."

"La raison de vivre, en effet, varie en fonction des individus, de leur situation et de leur histoire. Ce n'est donc pas le sens global de la vie qui importe, mais bien celui que lui attribue une personne à un moment donné de sa vie."

"Les efforts de l'homme pour trouver un sens à sa vie constituent une motivation fondamentale et non une "rationalisation secondaire" de ses pulsions. Sa raison de vivre est unique car elle n'est révélée qu'à lui seul: c'est alors seulement qu'elle prend un sens pouvant satisfaire son besoin existentiel."

"Mais il n'y a pas que le plaisir et la créativité qui donnent un sens à la vie. Et si la vie a un sens, il faut qu'il y ait un sens à la souffrance. La souffrance, comme le destin et la mort, fait partie de la vie. Sans la souffrance et la mort, la vie humaine demeure incomplète."

Plus quelqu'un fera preuve d'humanité, plus il aura de chance de servir les dessins de Dieu.

Parfois, nous n'épargnons pas seulement une souffrance supplémentaire au patient, nous l'aidons à trouver un sens à sa souffrance. Il peut même réussir à transformer sa souffrance en victoire.

L'identité ne se résume pas à soi-même, elle est ce à quoi quelqu'un s'est consacré, en se trouvant à travers la réalisation d'une œuvre personnelle.

Ne pensez pas à vous-même, mais concentrez vous sur cette œuvre à naître que vous allez réaliser.

Ce qui compte dans la vie, c'est de réaliser quelque chose.

Vous apprendrez à vous regarder comme membres d'une communauté invisible, la communauté des hommes qui souffrent, des hommes qui font l'expérience abyssale du non sens fondamental de l'existence humaine, mais qui, en même temps, luttent pour trouver une solution à un problème vieux comme l'humanité. La même souffrance et la même lutte, en somme, vous rattache aux meilleurs représentants de l'humanité. Essayez d'être patient et courageux : patient en acceptant de vivre un problème qui n'est pas encore résolu, et courageux en ne renonçant pas à lutter pour lui trouver une solution.

Peut-être que mon seul acte d'immortalité consistera dont la façon dont je fais face à l'adversité.