Citations de Viktor E. Frankl (201)
En réalité, j'aurais pu éviter cette épreuve si j'avais effectivement émigré aux États-Unis. Là-bas, j'aurais pu développer la logothérapie à ma guise, j'aurais pu travailler au grand œuvre que je m'étais donné pour mission d'accomplir. Mais je n'avais pas émigré, et je me trouvais donc à Auschwitz. Ce fut le lieu de l'experimentum crucis, car c'est à l'intérieur des camps de concentration qu'étaient mises à l'épreuve les deux aptitudes humaines les plus fondamentales : l'auto-transcendance et l'auto-distanciation. Cette expérience cruciale confirme le principe essentiel de "volonté de sens" et d'auto-transcendance- le fait pour l'être humain d'aspirer à quelque chose qui se situe au-delà de lui-même, de vouloir atteindre quelque chose qui le dépasse. Il s'est avéré qu'à condition égale, ceux qui regardaient vers l'avenir, vers un sens qui n'attendait qu'à être accompli, ceux-là avaient davantage de chance de survivre.
Les deux hommes avaient invoqué l’argument typique : ils n’attendaient plus rien de la vie. Il était donc nécessaire, dans les deux cas, de leur faire comprendre que la vie, elle, attendait quelque chose d’eux dans l’avenir. Nous avons découvert que pour l’un des deux hommes c’était son enfant qu’il adorait et qui l’attendait dans un pays étranger. Pour l’autre, c’était un projet plutôt qu’une personne. (...) Une personne qui réalise l’ampleur de la responsabilité qu’elle a envers un être humain qui l’attend, ou vis-à-vis d’un travail qu’il lui reste à accomplir, ne gâchera pas sa vie.
L'être humain n'est pas complètement conditionné ; il a le choix d'accepter les conditions qui l'entourent ou de s'y opposer. En d'autres termes, il ne fait pas qu'exister, mais il façonné lui-même sa vie à chaque moment.
Je me souviens qu'un contremaître me fit un jour présent d'un morceau de pain qui constituait une partie de sa ration du matin. Ce ne fut pas tant le fait d'avoir reçu un peu de nourriture qui à ce moment là m'avait ému jusqu'aux larmes, ce fut ce "quelque chose" d'humain qui avait accompagné ce don, les paroles et le regard qui avaient ajouté à ce geste toute sa valeur humaine.
L'homme est partout confronté au destin, il a partout l'occasion de s'accomplir à travers la souffrance.
Dans la cour, nous decouvrîmes le ciel qui, à l'ouest, était couvert de nuages de formes diverses et aux couleurs chatoyantes, du bleu métallique au rouge sang. Quel contraste avec les baraques grises et maussades, tandis qu'ici et là des flaques d'eau éparpillées sur le sol boueux reflétaient le ciel embrasé ! Au bout de quelques minutes, émouvantes de silence, un prisonnier dit à celui qui se trouvait à côté de lui : "comme le monde pourrait être merveilleux !".
A vrai dire personne ne devrait avoir à se plaindre aujourd'hui d'un manque de sens de la vie : il nous suffit d'élargir quelque peu son horizon pour se rendre compte que si nous bénéficions assez largement du bien-être, beaucoup d'autres mènent une existence misérable. Nous jouissons de la liberté - mais qu'en est-il de la responsabilité pour les autres ? Il y a plusieurs millénaires l'humanité s'est haussée jusqu'à la fois en un seul Dieu, qu'attendons-nous pour prendre conscience de l'unique humanité, conscience que j'appellerais volontiers monanthropisme - Une conscience de l'unité de l'humanité, unité transcendant toutes les diversités, qu'il s'agisse de la couleur de la peau ou de celle d'un parti.
A vrai dire Freud n'a pas mieux compris sa découverte que Christophe Colomb qui, en découvrant l'Amérique, se croyait en Inde? Freud pensait que la psychanalyse se ramenait essentiellement à des mécanismes comme le refoulement et le transfert, alors qu'il s'agissait en fait d'une compréhension plus profonde de soi-même grâce à une rencontre existentielle.
Le corps de l'homme ,n'est nullement un reflet fidèle de son esprit : il en serait ainsi d'un corps "transfiguré", mais le corps de l'homme "déchu", dans la mesure où il reste un miroir n'est qu'un miroir brisé et déformant. Certes, toute maladie ne réside pas dans le fait même de la maladie - il réside plutôt dans la façon de souffrir, dans l'attitude du malade face à sa maladie, dans sa façon de la vivre.
... le cerveau lui-même a besoin de sens. On peut donc retrouver ce besoin élémentaire de sens, chez l'homme, jusque dans les fondements biologiques de son existence.
... le cerveau lui-même a besoin de sens. On peut donc retrouver ce besoin élémentaire de sens, chez l'homme, jusque dans les fondements biologiques de son existence.
Ce qui compte pour l'homme, ce n'est pas le plaisir comme tel, mais une raison d'être heureux. Dans la mesure où il fait du plaisir la visée de son intention, voire l'objet de sa réflexion, il en perd de vue la raison du plaisir - et le plaisir lui-même s'évanouit.
Nous pensons quant à nous, que précisément la religiosité ne saurait avoir sa source dans un inconscient collectif, déjà pour cette raison qu'elle appartient aux décisions personnelles, et même les plus personnelles, justement celles qui sont du moi.
La déclaration d'un patient : "J'ai bien souvent pleuré en rêve des pleurs qui me délivraient, des pleurs qui ramenaient la paix comme je ne puis la connaître à mon réveil."
Avec sa découverte de l'inconscient spirituel, l'analyse existentielle a échappé à ce piège où était tombée la psychanalyse : déposséder l'inconscient du moi et le réduire au ça. Mais qui plus est, elle échappait du même coup à un autre danger, son danger interne pour ainsi dire : en reconnaissant l'inconscient spirituel, elle paraît à toute intellectualisation et rationalisation possibles en ce qui concerne l'essence de l'homme. Celle-ci ne pouvait plus lui apparaître comme exclusivement Raison - pas plus que l'homme désormais n'apparaissait comme un être compréhensible par la seule raison (raison théorique non moins que "raison pratique").
La conscience morale ne devient compréhensible que si nous lui reconnaissons une provenance extra-humaine, et que si par conséquent nous reconnaissons finalement et véritablement à l'être humain son caractère d'être créé. en sorte que nous pouvons dire ; en tant que maître de ma volonté, je suis créateur ; mais en tant qu'esclave de ma conscience, je suis "créature". En d'autres termes : pour expliquer chez l'homme qu'il soit libre,, l'existentialité suffit - lais pour expliquer qu'il soit responsable, je dois me reporter au caractère transcendant de la conscience morale.
Toute liberté est liberté à l'égard de quelque chose et en vue de quelque chose. A l'égard de quoi l'homme peut-il être libre, sinon de ses pulsions ? Son moi est libre à l'égard du ça. En vue de quoi est-il libre, sinon de l'existence responsable ? La liberté de la volonté humaine est donc liberté "envers" les pulsions "pour" une existence personnelle, "pour" la conscience morale.
Pour conclure [...], on peut donc dire ce qui suit : là où le moi (spirituel) plonge en une sphère inconsciente comme en son fond, nous pouvons, selon les cas, parler de conscience morale, d'amour ou d'art. Là où inversement le ça psychophysique pénètre par effraction dans la conscience, nous parlons de névrose ou de psychose - selon qu'une telle pathogenèse se présente soit comme une psychogenèse (dans la névrose), soit comme une physiogenèse (dans les psychoses).
... nous avons également une compréhension prémorale de la valeur, qui est essentiellement antérieure à toute morale explicite : c'est justement la conscience morale.
... l'instance qui décide si quelque chose doit devenir conscient ou rester inconscient fonctionne donc elle-même de façon inconsciente.