« L'histoire » est un récit qui aurait pu s'appeler « une histoire » mais c'est le point de vue de l'auteure, Maren Sell, sur ce qu'elle a vécu avec Yann Andréa, le dernier amant de Marguerite Duras.
Signé à quatre mains, ce livre vient d'être publié alors qu'il a été écrit il y a une quinzaine d'années. C'est sans doute en raison de la mort de Yann Andréa il y a un peu plus d'un an. Cela pourrait ressembler à de l'opportunisme mais ce livre m'a intéressée parce qu'il est plutôt bien écrit et que Maren Sell a des choses à dire.
Car Yann était Celui que Marguerite Duras appelait le préféré, celui qui l'a accompagnée pendant 15 ans jusqu'à son dernier souffle. Alors on comprend pourquoi il est dépressif quand Maren le rencontre au Roseburd, bar du 14ème arrondissement de Paris, en 1998.
Elle va aimer cet homme qui n'a pourtant rien d'attirant, oisif et alcoolique. Mais ce qui va la mener à la passion est en rapport à son métier d'éditrice. D'abord, c'est l'omniprésence de Duras qui ne les quitte jamais vraiment et parce qu'elle va faire renaître Yann à la création littéraire, tel un phénix. Elle va raconter la genèse de « Cet amour-là » et de « ainsi » les deux récits signés Yann Andréa sur sa relation avec Marguerite Duras et la douleur de son absence. Il y a même eu une adaptation au cinéma de « Cet amour-là » avec Jeanne Moreau.
Et puis il va aussi écrire des petits textes les soirs de déprime devant une vodka orange, dans les bars qu'il fréquente la nuit : le Roseburd, le Bedford ou le café de Flore. Maren va les intercaler avec ses textes à elle, comme s'ils se donnaient la main (car cette relation ils l'ont vécu à deux). Elle le raconte et explique la co-signature de ce livre qui n'a, en fait, été écrit que par elle.
Les textes de Yann ne sont pas toujours passionnants car ce sont ceux d'un dépressif. de plus, ces faux airs durassiens sont parfois agaçants mais on peut le comprendre. le style de Maren Sell dérape aussi parfois avec des expressions durassiennes comme « sans raison aucune » par exemple mais cela ne m'a pas empêché d'apprécier cette histoire-là.
Ce livre est un cadeau de mon mari pour ma fête et il m'a fait plaisir car je m'intéresse à tous les écrits sur Marguerite Duras.
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« Ainsi » de Yann Andréa est un livre est assez court qui se lit rapidement.
C'est un journal de deuil. Nous sommes en décembre 1999 et le passage à l'an 2000 a quelque chose de symbolique ; l'événement est important et appelle à l'écriture sur les souvenirs de l'amour perdu.
L'amour perdu c'est Marguerite Duras, sa compagne et mon auteure préférée, morte en 1996. Cette perte il ne s'en remet pas même s'il connait l'amour physique avec une autre femme. Il dialogue avec le fantôme de l'unique Amour en regardant la Seine, seul devant sa machine à écrire. Il utilise le style de Marguerite Duras mais c'est normal car il a beaucoup écrit sous sa dictée.
Le début est très bien mais c'est assez vite lassant car on a l'impression qu'il est en boucle, peut-être à cause des répétitions (avec Marguerite Duras qui répète beaucoup je n'ai jamais eu cette impression). Heureusement, il y a quelques belles phrases à propos de l'amour éternel comme, par exemple, « Et tandis que je vous oublie je pense encore à vous. »
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Après M.D., chronique du retour à la vie de Marguerite Duras, après la seconde très longue hospitalisation de l'écrivaine (9 mois en réanimation),Yann Andrea va écrire l'histoire de son amour pour elle, de son amour à elle pour lui, amour qui contient comme tout amour sa part d'impossible. Un dimanche matin, après des semaines de maladie et de déclin, Marguerite Duras meurt. Yann Andrea va à son tour traverser une sorte de mort, affective, sociale. Cloîtré dans la chambre qu'elle lui a laissée, il s'enfonce de jour en jour dans l'absence au monde, l'absence à lui-même. Il existe, s'il ne vit plus, dans une incurie et une forme de rejet de sa personne ,dans la trivialité d'un corps réduit aux fonctions les plus basses, et qui se dégrade livré à luimême: obésité, crasse, apathie, apragmatisme et aboulie.. Personne ne venant forcer sa solitude, c'est lui-même qui un jour, au bout de trois ans de marasme et de clochardisation, émerge en faisant le constat qu'il n'est pas mort ,qu'il est vain de penser qu'il peut ainsi mourir.
Il revient vers la vie, auprès de sa mère qui vient avec son compagnon le chercher pour le ramener dans son terroir du Lot et Garonne, voyage en auto vers la vie, où la vision du panneau routier de Duras ne lui est même pas insupportable. Et écriture de ce livre qui fait oeuvre, Devant lequel on pense en effet que seul cet homme-là pouvait vivre, et écrire, cet amour-là.
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Automne 1982. Marguerite Duras accepte une cure de désintoxication de la dernière chance. Elle est hospitalisée à Neuilly et va traverser l'épreuve du sevrage de l'alcool.Apparaissent alors le manque physiologique et psychique, les crises d'angoisse, les hallucinations et les idées délirantes, semi comateuse d'abord à cause de la surcharge médicamenteuse nécessaire pour éviter le délirium, puis sevrée de la camisole chimique qui lui permettait de tenir sans l'alcool, sans le soutien de son autre béquille: l'écriture. Et c'est Yann Andrea son compagnon qui va tenir la chronique de ces jours décisifs où se joue la vie et la santé mentale et physique de M.D. Ce livre décrit simplement les gestes et paroles de cette écrivaine et de cette femme aux confins de ce qu'un être humain peut supporter pour revenir parmi les humains. Il s'adresse à elle et au-delà à nous, associant le lecteur à son effroi, à son espoir, à son amour pour cette femme si proche de la déchéance physique et mentale, qui garde cependant une fierté et une posture altière qui lui est propre. Parfois petite fille découvrant que réellement elle ne reverra plus ni sa mère ni le petit frère adorés, parfois déesse sans âge distribuant les jugements positifs ou négatifs mais toujours sans appel. Marguerite Duras, telle qu'elle fut et resta encore quatorze années après être revenue du rivage des morts. Et qui en 1984 écrivit l'Amant, pour lequel elle décrocha le prix Goncourt.
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Je crois que je vais acheter tous les livres de Yann Andrea car je suis encore bouleversée par l'histoire qu'il raconte, celle qu'il partage avec Marguerite Duras en cure de désintoxication à l'hôpital américain de Neuilly .
Je suis impressionnée par sa capacité à aimer une personne malade, à ce point. Il lui fait la lecture et il y a une anecdote à propos de Savannah (en référence à "Savannah bay" la pièce de théâtre écrite par Marguerite Duras) qui se trouve en Floride et que M.D. découvre toute étonnée sur un atlas en disant "c'est incroyable !" parce qu'elle pensait l'avoir inventé. Ce sont surtout de petits moments qui permettent de supporter la cure douloureuse mais dont la compagne de Yann Andrea avait bien besoin.
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