Lambeaux de conscience pour une mort lente…
La construction et la densité de l’écriture donnent une force à ce sujet sans unité de lieu ni de temps, l'auteur nous dit la planète brûle ne détournons pas la tête.
Ce troisième opus est une confirmation d'un talent réel et d’une écriture puissante.
La construction qui alterne ce que je nomme des lambeaux de conscience qui prennent une forme éblouissante, ne seraient-ils pas des éclairs d’une foudre révélant la violence de l’orage de notre monde et d’une planète en feu ?
Émilienne Malfatto me fascine par cette écriture si dense qui nous donne cette sensation d’un tableau impressionniste où le mystère réside dans tous les détails à visualiser pour connaître l’intention du peintre.
Le sujet m’a fait penser à l’auteur discret et talentueux Hubert Mingarelli avec Quatre soldats, dire ce que la guerre fait aux hommes.
En peu de mots, mais des mots choisis avec art , le lecteur voit se dissoudre l’humanité.
« Le colonel a oublié le moment exact où il a cessé de dormir. Après quel mort, quel interrogatoire, quelle bataille, quel corps qui n’en était plus un. »
Une fiction que le lecteur sait réelle, donc pas besoin de nommer car elle concerne tous les hommes de la planète.
L’écriture maîtrise l’art d’arrêter sa course juste au moment où cela serait insupportable à lire.
On se surprend à penser à des figures emblématiques de la torture de tous les pays et toutes les époques, on pense aussi à cette guerre à nos portes.
Le rythme nous porte vers la plongée du précipice de l’irrémédiable.
C’est un cri magistral qui nous dit l’absurde et nous enjoint de ne pas le banaliser.
C’est un livre dense, puissant, une déflagration littéraire qui se confirme.
Le colonel ne dort pas, quand sera-t-il des lecteurs ?
La couverture est éblouissante et dans la veine des mots d’Émilienne Malfatto.
Lu dans le cadre du Prix Landerneau 2022
©Chantal Lafon
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