Mémoire Encrier [corriger]

Ce n'est pas un roman, c'est plus proche de la chronique journalistique: des brèves, des instants de vie couchés sur le papier comme des instantanés. De savants aller retour entre l'avant et l'après 12 janvier.

J'ai beaucoup apprécié la forme adoptée qui évite de tomber dans le pathos et surtout qui donne à voir la grandeur du pays, son histoire à travers les gens qui le connaissent et non le misérabilisme constant qu'on nous vend. J'ai souri en lisant les lignes consacrées aux médias et aux humanitaires.

C'était encore plus savoureux à lire, quand en parallèle les médias reviennent sur la dette de la France à Haïti. Bref, un joli moment de lecture sur un sujet pourtant grave.

Un roman déroutant comme savent l'être les romans de Gary Victor. C'est un auteur que j'apprécie particulièrement et ici, il ne déçoit pas.

Le parcours initiatique du jeune Adrien dans sa quête de son violon est saisissant. On sent la naïveté de l'enfant qui veut faire confiance et qui voit la vie en rose. En filigrane, la situation politique du pays qui lui échappe totalement. Il navigue à vue dans l'adolescence alors qu'on cherche à le tirer vers l'âge adulte. J'ai beaucoup apprécié les passages fantastiques qui rappellent l'importance de l'autre monde dans la culture haïtienne qui conjugue avec le réel.

J'ai reposé le livre avec un " c'est horrible !" , mais c'est tellement beau et tellement surprenant. Un voyage à entreprendre si on a le cœur accroché.

Ce n'est clairement pas un roman pour ado, mais bien un livre pour adultes qui montre la difficulté d'être un adolescent dans un monde en proie à la tourmente politique.

Ce n'est pas un coup de coeur, c'est un livre "coup de poing" qu'il faut lire et partager, peut-être encore davantage aujourd'hui au vu des derniers événements à Haïti... La langue est brute et imagée, elle ne cache rien de la réalité quotidienne des bas-fonds. Elle essaie de se tenir au plus près de la violence assénée ou reçue, par des êtres humains qui n'ont pas choisi leur destinée.