Le violon d'Adrien

Traverser les océans pour explorer de nouveaux territoires littéraires enrichit l'imaginaire. En lisant "Le violon d'Adrien", de l'auteur haïtien Gary Victor, je suis partie loin, j'ai été déstabilisée souvent et j'ai connu le vertige si grisant de l'inconnu.

Adrien est passionné par le violon. Depuis que Monsieur Benjamin lui a montré comment s'en servir et a vu en lui un talent qui ne demande qu'à jaillir, le violon devient le centre de sa vie. Lorsqu'il doit posséder un violon pour pouvoir continuer d'en jouer, commence une quête têtue dans un pays en pleine crise politique.

Le roman est raconté à hauteur d'enfant et avec la naïveté de son âge. La dictature, ce qu'elle génère comme peurs et comme entraves, apparaît en toile de fond. Derrière la vision parfois candide d'Adrien, nous percevons ce que le régime a de cruel et de violent. Tout au long du roman, l'auteur maîtrise un équilibre subtil entre la lumière et l'obscurité, entre un garçon passionné et un pays torturé. Cette dualité qui traverse le texte rend la quête d'Adrien plus vitale et le poids de la dictature plus pesant encore. On perçoit comment le régime contraint les corps et les esprits, comment il gangrène un peuple tout entier.

Il y a de la magie, du chamanisme et des monstres sur le chemin d'Adrien. Parfois rêves et réalité se confondent. Il emprunte des voies dangereuses pour un petit garçon, aveuglé par son unique objectif d'acquérir un violon. Les mises en garde, les ombres ou les revers ne le détournent pas de son but. Son entêtement le fait traverser les revirements politiques sans en comprendre la réelle portée. Oscillant entre scènes hallucinées et récit plus réaliste, le lecteur est emporté par la volonté farouche du garçon. Sa détermination est belle car elle est absolue.

Autour de lui, des personnages hauts en couleur gravitent. En premier lieu il y a sa mère, modèle d'amour et de courage, et son père, mystérieux et envoûtant. Et puis il y a tous les autres, ceux qui veulent l'aider mais aussi ceux qui veulent profiter de sa candeur. Adrien tombe dans des pièges et tombe amoureux, Adrien se blesse et s'élève, Adrien devient un adulte en même temps que son pays se déchire.

Envoûtant et foisonnant roman, "Le violon d'Adrien" fait voyager dans des mondes où la frontière entre fiction et réalité s'amenuise, des mondes où les rêves repoussent les ombres.

L'innocence est la proie préférée des loups.

Dans les années 70, Haïti est un pays pauvre (ça l'est toujours) où tortures et assassinats sont monnaie courante. François Duvalier dit Papa Doc, est président à vie et ses sbires les "tontons macoutes" de sinistre mémoire font régner la terreur.
C'est dans ce contexte particulier que grandit Adrien un jeune adolescent naïf, passionné de musique et plus particulièrement de violon.Il rêve d'acheter cet instrument afin de poursuivrez les cours de Monsieur Benjamin. Étant trop pauvres ses parents ne peuvent réaliser ce souhait.
A côté de sa mère, de Nino, d'Annette qui essayent de le mettre en garde et de le protéger, d'autres ont moins de scrupules, l
Et lui font miroiter de l'argent facile. C'est pour Adrien, brave garçon innocent une succession d'expériences malhonnêtes où dégradantes. le point d'orgue sera les dramtiques conséquences de sa manipulation à des fins politiques.


Merci encore aux éditions Mémoire D encrier qui m'ontfait decouvrir un beau roman et un auteur talentueux

Le violon d'Adrien est le récit initiatique d'un adolescent haïtien apprenti musicien prêt à tout pour un violon, un instrument rare dans un pays en proie à la dictature, à la violence et à la pauvreté. Une quête mêlant thriller, leçon de vie et culture haïtienne; ce récit contient des détails à caractère sexuel pouvant heurter les plus jeunes.

Pour ma part,

J'ai adoré ma lecture : captivante et instructive, on ne s'ennuie jamais. Les descriptions sont réalistes, la plume est riche et utilise à l'occasion le créole haïtien en guise d'illustration pour plus d'authenticité. le récit est fluide, un savant équilibre entre découverte culturelle et leçon de vie.

Car il y a beaucoup d'aspects de la culture haïtienne à observer ici notamment les croyances locales, que je retiendrai à mon sens comme un syncrétisme religieux : un "mix" entre le christianisme évangélique, la phytothérapie et la sorcellerie vaudou héritée du fin fond des âges.

La trame du roman se déroule dans une époque problématique où Haïti est gangréné par l'oppression des "tontons macoutes" à la solde de la dictature présidentielle, vers les années 70, du temps des "gourdes" et du "borlette". le narrateur y dépeint la pauvreté, la corruption et l'insécurité d'une société au bord de l'implosion où un apprenti violoniste n'y a pas sa place :

« le violon, c'est pour la musique savante, Adrien. Notre pays est un bateau qui sombre. Il sombrera longtemps avant qu'une main peut-être divine ne le remette à flot. Pendant qu'il sombre, nos femmes et nos hommes ne pensent qu'aux choses les plus triviales qui soient. Je te plains. Tu es perdu dans un monde qui n'est pas le tien. Un petit Haïtien qui rêve de devenir un virtuose du violon ! »

Je n'ai qu'un seul mot pour ce roman de tous les genres riche en actions et en émotions : inclassable.

Coup de coeur.




Lien : https://www.aikadeliredelire..

Un roman déroutant comme savent l'être les romans de Gary Victor. C'est un auteur que j'apprécie particulièrement et ici, il ne déçoit pas.
Le parcours initiatique du jeune Adrien dans sa quête de son violon est saisissant. On sent la naïveté de l'enfant qui veut faire confiance et qui voit la vie en rose. En filigrane, la situation politique du pays qui lui échappe totalement. Il navigue à vue dans l'adolescence alors qu'on cherche à le tirer vers l'âge adulte. J'ai beaucoup apprécié les passages fantastiques qui rappellent l'importance de l'autre monde dans la culture haïtienne qui conjugue avec le réel.
J'ai reposé le livre avec un " c'est horrible !" , mais c'est tellement beau et tellement surprenant. Un voyage à entreprendre si on a le coeur accroché.
Ce n'est clairement pas un roman pour ado, mais bien un livre pour adultes qui montre la difficulté d'être un adolescent dans un monde en proie à la tourmente politique.

Gary Victor est l'un de mes auteurs favoris haïtiens et la parution d'un de ses livres est toujours un événement. Haïti qui, toujours chez l'auteur, est un personnage à part entière au travers de sa culture, ses réalités sociales et ses croyances.

"Le violon d'Adrien" ne déroge pas à la règle et l'on y retrouve, en toile de fond de l'histoire d'Adrien, l'ambiance moite de l'île, au sens propre comme au figuré : l'humidité de l'air et des esprits (pas tous, heureusement, seulement ceux des bandits !), cet entre-deux de temps et d'espace entre le réel et le fantasmé.

Parce que, bon, oui, c'est quand même bien d'Adrien dont on parle ici. de son rêve, tout d'abord : jouer du violon, et finalement, posséder un violon pour marcher dans les pas de son professeur charismatique Monsieur Benjamin. Ce rêve, innocent pour un tout jeune homme qui a compris aussi ce que sa maman projettait en lui, marque le début, la cause, la conséquence, et la fin de toutes les péripéties d'Adrien.

Au fil des pages et des (mauvaises) rencontres, toujours guidé par cet objectif à atteindre, Adrien gagne et perd, avance et recule, déçois et inquiète. On a envie de le voir réussir, et on a aussi parfois envie de le secouer (gentiment) et de le ramener à la raison et à la maison.
Avec sa détermination extrème, il nous entraine dans les méandres les plus sombres d'une société en prise aux affres de la dictature et de la corruption.

C'est intense. Et c'est une réussite, comme chaque fois !

Un très très grand merci aux @editionsmemoiredencrier pour l'envoi de cette merveille ❤