Voici une bande dessinée qui, en traitant d'un tel sujet, évite les écueils du manichéisme d'après coup, souvent formulé par des individus prétendant péremptoirement qu'ils auraient été de valeureux résistants mais auraient peut-être aussi été d'authentiques collabos ! Vae victis (malheur aux vaincus), comme le déclara jadis le chef gaulois Brennos, vainqueur des Romains, lesquels lavèrent violemment l'affront quelques siècles plus tard en la personne de Jules César.
Certes, Vichy ce n'était pas glorieux, comme le montre le déroulé en image de ce procès retentissant mais quelque peu avorté, où nombre de question ne furent pas abordées à l'époque, dont le zèle de certains à livrer des enfants juifs aux nazis, l'un d'entre ayant été un ami durable de
François Mitterrand : René Bousquet. « En 1945, c'est encore trop tôt pour la population française », dit le texte.
Mais, quels que soient les faits, il en est un indiscutable : il fallut composer avec un occupant sans foi ni loi autre que celle de son chef sanguinaire, Hitler. Évidemment, un Darnand, un Déat ou un Laval s'accommodèrent volontiers dudit occupant, mais cela ne suffit pas à expliquer toute la Collaboration de Vichy, dont le présent ouvrage montre la complexité.
C'est pourquoi cet album, qui offre un net aperçu du procès de Pétain, en plein été 1945, doit être salué pour ne pas avoir sombré dans l'invective facile. Car Pétain se résume dans cette phrase de Mauriac, qui assista au procès, et rapportée ici : « Pétain restera une figure tragique, éternellement errante, à mi-chemin de la trahison et du sacrifice. »
Sur le plan de la forme, cet album a des allures de dossier judiciaire, et le choix du noir et blanc offre une sobriété bienvenue pour un sujet toujours incandescent…