Grosso modo, à l'origine, il n'y avait rien que de la matière volatile et Dieu est arrivé ; il créa la Terre et ses différentes formes de vie. La suite de l'histoire, on la connaît, le jardin d'Eden, l'harmonie et puis… le début d'un laisser-aller – aux prétextes d'une plus grande liberté et de l'acquisition d'un certain confort de vie – où l'humanité a fait siennes des notions telles que la dépravation, l'hypocrisie, la cupidité… A bien y regarder – et en observant nos conditions de vie actuelle – on se demande à partir de quand ce fichu grain de sable s'est glissé dans le mécanisme bien huilé de la création (et tout ne peut pas s'expliquer par le fait qu'on ait croqué dans une pomme), pourquoi les voix qui s'élèvent contre ces dérives n'ont pas permis que l'on réagisse… et de quelles autres dérives peut-on bien être encore capable avant que la machine ne s'enraye définitivement ? le problème avec cet album, c'est que
Joe Sacco en imagine quelques-unes et malgré leur absurdité, elles ne semblent pas impossibles…
Quand allons-nous réagir ?
(...)
Le lecteur va être amené à plonger dans un univers déjanté où les périodes de l'Histoire se mélangent. Ainsi, on voit évoluer des personnages directement sorti de l'époque de la Seconde Guerre Mondiale (fringues, avions, décors…) alors même que Nixon et les technologies existantes durant son mandat présidentiel… ainsi que les gadgets fonctionnels de notre temps (un caissier scanne les codes-barres d'articles, les ordinateurs portables pullulent sur les tables de réunions…). Dans ce fatras temporel, la mise en abyme de l'auteur [dans cet album] nous invite à le cueillir au moment-même où il reçoit les directives pour une nouvelle mission dont la cible est Téhéran. Affublé du grade de Colonel de l'armée de l'air U.S., il a tôt fait de corriger cette bévue en rappelant qu'il est auteur de bande dessinée. Cela dit, le quiproquo lui a tout de même permis de côtoyer un haut gradé qui ressemble étrangement à Clémenceau (le monocle en plus).
On est ainsi poussé dans un ailleurs, à la fois passé où l'on se fait assaillir par une succession étourdissante de propos qui montrent la guerre et ses absurdités et où le scandale du Watergate transpire à chaque page sans jamais être explicitement nommé. Durant la lecture, on ne manquera pas de repenser à la situation explosive du Moyen-Orient et aux enquêtes sur les écoutes téléphoniques (franco-françaises, révélations de Snowden). On est aussi dans un futur proche puisque cette configuration politico-économique est à la fois inconnue et surannée, du fait du caractère absurde des forces en présence et de l'attitude des protagonistes. Et puis il y a là quelque chose de très archaïque dans le rapport au corps et le recourt à une sexualité bestiale réduisant l'homme à tout ce qu'il a de plus primaire. On ressent une accentuation des tensions, un rapprochement douteux entre les médias et les politiques, la validation de textes de lois incohérents… L'auteur s'amuse, cinglant et cynique. le ton est à l'humour mais les vérités qui sont tapies dans ses propos ne leurrent pas sur sa motivation à dénoncer les dysfonctionnements d'un système planétaire où les enjeux semblent parfois ne tenir qu'à une habile prouesse d'équilibriste.
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