J’ai passé presque toute mon adolescence à Cendrécume. Et vous savez comme cette ville est grise, froide, et statique. On la dit fantomatique, cimetière des espoirs, plus proche de Samaris que de Celephais, à juste titre. Peu nombreux sont ceux qui peuvent y passer seulement deux jours sans penser sérieusement au suicide. Peu nombreux sont ceux qui y vivent encore, qui y vivent vraiment.
Si j’y suis resté si longtemps c’est que j’y suis né. Mes parents étant morts trop prématurément à mon goût, j’avais redirigé mon affection vers la cité elle-même, tissant ainsi un lien qui me protégeait de son cynisme, comme un enfant se vaccine des défauts de sa mère.
Toutefois, j’avoue être passé par une période particulièrement sombre. Différents échecs sentimentaux, une inquiétante baisse d’inspiration, et une brume plus lourde que d’habitude, me poussèrent à la déprime. Me balader dans les rues désertes du port en ruine ne me calmait plus, vagabonder sur la plage de sable blanc me lassait, et mon travail à la bibliothèque devenait – pour la première fois – ennuyeux.
Il n’y avait pas une immensité de solutions : ou je quittais la cité-brouillard, ou je venais demander – une fois de plus – de l’aide à Medicastro.
Si l'on ne peut gagner le cœur d'une femme en descendant pour elle en enfer, on ne peut l'obtenir par les armes de la simple humanité.
[Une Hécate et son Chien - Léa Silhol]
Le nez loin dans son bol, Juliette méditait sur un thème hautement philosophique, en tout cas pour son âge. Les livres étaient-ils capables de mentir ? Vaste sujet pour sa petite tête ? Elle était en train de découvrir que, si les livres sont incapables de mensonges conscients , leurs auteurs, eux, étaient souvent de grandes personnes, donc tout à fait capables d'inventer n'importe quoi pour vous faire manger votre soupe ou pour ne pas répondre à une question.
[J'veux un Dragon - Olivier Gechter]
Chaque musée est un cimetière. Derrière leur façade culturelle, nos incursions dans ces lieux ne sont en réalité que des visites aux chers disparus.
[Ceci n'est pas ce que m'a dit Agathe - Léo Henry]
C'est la vanité des charitables que de ne pas aimer être refusés, comme si cette inacceptation ôtait toute valeur à leur geste, et leur faisait injure.
[Une Hécate et son chien - Léa Silhol]