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Christine Auché (Traducteur)
EAN : 9782266334426
480 pages
Pocket (12/01/2023)
  Existe en édition audio
4.37/5   4354 notes
Résumé :
Ce ne sont encore que des enfants : Patrocle est aussi chétif et maladroit qu'Achille est solaire, puissant, promis par sa déesse de mère à la gloire des immortels. En grandissant côte à côte, l'amitié surgit entre ces deux êtres si dissemblables. Indéfectible.
Quand, à l'appel du roi Agamemnon, les deux jeunes princes se joignent au siège de Troie, la sagesse de l'un et la colère de l'autre pourraient bien faire dévier le cours de la guerre... Au risque de f... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (525) Voir plus Ajouter une critique
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sur 4354 notes
Achille et Patrocle ont grandi ensemble. L'un, athlétique, doté d'un physique avantageux et très sûr de lui, est prince et demi-dieu par sa mère. L'autre, gringalet et réservé, est en exil et sans avenir. L'amitié, et bien plus encore, vont les lier de manière indéfectible jusqu'au bout de leurs destinées. Appelés par Agamemnon à combattre à ses côtés lors de l'interminable guerre de Troie, les deux jeunes gens vont y jouer un rôle décisif.


Ce récit aux allures très actuelles m'a très agréablement replongée dans mes souvenirs de l'Iliade et de la mythologie grecque. L'on y découvre des héros particulièrement humains et finalement bien vulnérables, dans leurs colères, leurs doutes et leurs destins de mortels, assez loin d'ailleurs des habituels raccourcis qui flottent dans notre mémoire collective. Il n'est ainsi absolument pas fait mention ici du fameux talon d'Achille...


La plume est alerte et fluide, la lecture facile et plaisante. Elle est l'occasion d'un débat sur le choix entre le bonheur paisible d'une longue et casanière vie de famille et le glorieux éclat d'une existence brève mais héroïque, tandis qu'elle dépeint très naturellement la relation homosexuelle des deux principaux personnages, appelés à se sacrifier pour le salut de la Grèce antique.


Aussi agréable qu'il soit, ce texte ne m'a toutefois pas fait vibrer. Entre les caprices d'un Achille présomptueux blessé dans son orgueil, la soumission d'un Patrocle posé en éternelle victime, et l'aveuglement d'un Agamemnon responsable de toutes les mauvaises décisions, je n'ai pas ressenti de réelle sympathie pour ces héros, à vrai dire bien plus souvent agaçants qu'à leur tour. Sans aucun doute louable comme ouvrage de vulgarisation et de découverte, ce livre n'a pas réussi à renouveler mon enthousiasme d'antan pour l'épopée d'Ulysse dans l'Iliade et l'Odyssée.

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Le chant d Achille est un roman puissant et romantique que je n ai pas pu lâcher. J ai été subjuguée par le récit porté par la voix de Patrocle. Quel choix judicieux !

Patrocle jeune prince gringalet peu doué pour se battre et dont le père ne lui porte aucune estime , tue par accident et pour se défendre un autre jeune homme. Sans même écouter ses explications, Patrocle se voit exilé et confié au roi Pelée. Patrocle se refugie dans le mutisme. Il ne sera jamais comme le fils de Pelée : le beau Achille convoité par les autres garçons. Pourtant contre toute attente, c est Patrocle qu Achille choisit pour compagnon. Achille va parvenir à fendre l armure de Patrocle et à panser ses blessures. Une belle amitié va naitre, une fidélité à toute épreuve. Amitié vite remplacée par un amour intense entre les deux garçons. Patrocle va magnifier Achille, le rendre humain alors qu aux yeux des autres il n est qu un demi dieu, un héros et un prince. On imagine à travers les yeux de Patrocle, Achille jongler avec les figues, jouer avec les noyaux d olive... Patrocle va aimer Achille malgré les difficultés ( dont la mère d Achille la néréide Thetis) , le suivre sur la montagne avec Chiron mais aussi dans tous ses combats. Pour protéger Achille de son propre orgueil, Patrocle prendra tous les risques... Mais ce n est pas un amour à sens unique. J ai aimé découvrir Achille éperdument amoureux.
J ai vraiment été emue aux larmes par cette histoire d amour entre ces deux garçons. Touchée aussi par ce destin inexorable: Achille est voué à mourir en héros. J ai adoré découvrir le personnage de Patrocle si souvent dans l ombre.
Une écriture fluide qui m a replongée avec délice dans la guerre de Troie.
Gros coup de coeur.
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Brad Pitt savait-il, en acceptant le rôle, qu'Achille était allé jusqu'à s'exiler sur l'île de Scyros et se travestir en fille dans un groupe de danseuses pour échapper à la guerre. Voilà qui aurait pu quelque peu ternir l'image du héros guerrier et ôter des scrupules à l'acteur vedette, lequel se reprochait d'avoir accepté un rôle trop racoleur.

Il est un euphémisme de dire que l'adaptation de la guerre de Troie par Wolfgang Petersen est très libre. Dans son film, entre autres écart avec l'Iliade, la guerre de Troie est l'affaire de deux semaines et passe sous silence les atermoiements du héros de Troie plus enclin à jouir de ses amours que de gloire militaire. Si l'on en croit en tout cas la version que nous livre Madeline Miller dans le chant d'Achille.

Dans la controverse qui s'est faite jour au fil des siècles à propos de l'amitié qui unissait Achille et Patrocle, Madeline Miller a faite sienne la version de l'éminent historien Bernard Sergent, président de la Société de Mythologie française, abondant à une relation homosexuelle. Et pour couper court à l'autre aspect de la controverse quant au statut de l'un par rapport à l'autre, Eraste (le plus âgé, pour ne pas dire vieux) Eromène (le plus jeune), Bernard Sergent a trouvé dans ses recherches approfondies suffisamment d'éléments pour faire de leur idylle une passion entre jeunes amoureux de même âge. L'homosexualité jouissant en cette époque aux dires des spécialistes de la plus grande tolérance. Époque donc bénie des dieux à leur égard et à leur regard. Sauf que ce dernier était assombri, ou éclairé selon l'intention qui préside, par une autre valeur de l'époque, aujourd'hui disparue : l'honneur. Valeur qui, lorsqu'elle est bafouée, aux délices de l'amour commande de lui préférer la guerre .

Histoire d'amour entre deux jeunes garçons donc, mais contrariée par l'honneur souverain – ils ont dix-sept ans lorsqu'Agamemnon les entraîne dans cette folle épopée pour reprendre Hélène aux Troyens – que nous suggère la version de Madeline Miller dans ce bel ouvrage. Version que l'on prend au sérieux. Elle a mis dix ans pour écrire ce roman qu'on qualifiera d'historique puisque fondé sur des textes dont les premiers nous viennent de l'antiquité grecque. Sachant qu'ils étaient déjà loin d'être contemporains des faits générateurs de la légende qu'ils colportaient. C'est comme ça que la légende se fait histoire pour qui n'y prend garde, se nourrissant à l'envi d'imaginaire épique, celui-là même qui de bouche à oreille au fil du temps sculpte un héros de marbre dans un bloc de calcaire à peine dégrossi. Après tout "La vérité, c'est ce que croient les hommes", déclare Ulysse à ses deux jeunes qui voudraient dissimuler leurs sentiments réciproques. Mais on n'est pas prince ou demi-dieu pour vivre dans le mépris de ce que commande l'honneur, sauf à sombrer dans l'opprobre et perdre son statut.

Patrocle est le narrateur de cette épopée. On ne s'étonnera pas, connaissant le sort qui lui est réservé sous les murs de Troie, de le savoir à la fin de l'ouvrage s'adresser à nous n'étant plus alors "constitué que d'air et de pensées." Plus que tout autre il est celui qui endure et subit cette guerre pour rester fidèle et loyal envers son amant devenu son maître. Ne dit-il pas de lui-même être considéré par les autres "seulement comme l'animal de compagnie d'Achille". Il est celui dont les sentiments sont à la fois les plus humbles et les plus purs. Lorsque figé dans sa fierté offensée Achille refusera de combattre aux côtés d'Agamemnon, Patrocle se substituera à celui-ci pour sauver sa réputation. Se sachant haï par Thétis, la déesse mère d'Achille, il ne peut espérer aucun secours des dieux. Sa fidélité à la grandeur de son amant le perdra. Mais "aucune loi n'oblige les dieux à être justes".

A prendre le parti de l'amour sincère entre deux jeunes hommes, Madeline Miller n'en trahit pas pour autant ce qui est communément admis du sort de Troie et de ses héros des deux camps. On n'en dira pas autant du film de Wolfgang Petersen. Autant que puissent être l'univers des dieux et les fantasmagories de la légende, l'amour reste une valeur qui ne varie ni avec le temps ni avec la qualité de ceux qu'il favorise. Mais depuis que le monde est monde une valeur autant malmenée par l'homme toujours prompt à lui mettre des bâtons dans les roues.

Madeline Miller m'avait conquis avec circé. le chant d'Achille confirme mon engouement. A quand un troisième ouvrage de cette auteure inspirée pour combler mon avidité à fréquenter dieux et demi-dieux. Ils me dissipent de notre réalité trop nourrie d'humaine nature dont on sait combien elle est avide de la chose matérielle. Et sous l'emprise d'un dieu avare de manifestations mais n'en revendiquant pas moins quand même monopole et majuscule.
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Achille est un héros de la guerre de Troie ( à ne pas confondre avec Achille Zavatta )
Il est beau, valeureux, il a de gros biscoteaux et il sent bon le sable chaud. Mais c'est un musculaire pur et il est bête à manger du foin. Son meilleur ami est un certain Patrocle qui le harcèle sexuellement et lui met régulièrement la main aux fesses, ce laideron a très envie de se le faire. Achille lui répond toujours avec un calme olympien : " Je préfère qu'on reste amis." Patrocle porte des lunettes à double foyers et a un physique à la Woody Allen. circé était sa correspondante scolaire quand il était au collège et il lui envoya une jolie lettre pour lui demander conseil. Elle lui apprit comment confectionner un philtre d'amour ainsi que plein de trucs sexuels qui rendent les hommes totalement fous au lit ( voir circé ). Grâce aux conseils de circé, nos deux héros devinrent amants.
Hector qui était encore plus bête qu'Achille, tua Patrocle par inadvertance, il s'excusa auprès de Patrocle mais celui-ci étant mort, il ne lui répondit rien. Pour se venger Achille tua Hector. Pour se venger de la mort d'Hector, Paris tua Achille. Pour se venger de la mort d'Achille, Philoctèle tua Paris et ainsi de suite jusqu'à ce qu'ils soient tous morts ; c'est dire s'ils étaient bêtes ces héros grecs !
Après sa mort, ( il était un demi-dieu ) Achille vécut sur l'île Blanche. Il se maria avec Médée, Hélène, Iphigénie, Polyxène, Polygame, Polyéthanol et la Reine D'Angleterre ( jeune ).
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Voilà un beau roman relatant les aventures d'Achille et de son compagnon Patrocle.
Si l'on connaît surtout Achille, fils de la divinité Thétis et du roi Pelée comme guerrier glorieux de la guerre de Troie, on n'en sait guère sur son ami Patrocle.
Dans ce roman, c'est Patrocle qui mène la narration et c'est à travers son ressenti qu'on suit ses aventures liées à celle du fabuleux héros de la mythologie grecque : leur enfance à la cour du roi Pelée, leur adolescence auprès de Chiron, le Centaure, qui les initia aux arts de la guerre mais également à la musique et à la médecine, leur exil sur l'île de Scyros et puis bien sûr leur participation à la guerre de Troie auprès d'Agamemnon et d'Ulysse.

Le récit est flamboyant et même si l'on connaît l'inéluctable fin, il n'en reste pas moins haletant.
Madeline Miller s'inspire fortement du récit de l'Iliade d'Homère, s'attachant à en restituer les moments clés de la vie d'Achille et de Patrocle. Je n'ai pas lu L'Iliade et serai bien en peine de faire une quelconque comparaison. Toujours est-il que ce récit n'apparaît pas comme un terne copié-collé et qu'il restitue merveilleusement bien la dimension héroïque des légendes grecques. Mais il va au-delà encore. L'auteure fait de ce Chant d'Achille un véritable chant d'amour, une ode tragique et sentimentale.


C'est un roman intéressant car il tranche sans hésitation avec l'image que le public lambda se fait du demi-dieu au talon vulnérable. D'ailleurs, ici, comme chez Homère, la célèbre légende de l'invulnérabilité d'Achille n'est pas évoquée. Achille a certes une allure divine mais il n'en reste pas moins mortel.
Loin de l'image virile véhiculée par celle de Brad Pitt dans le film Troie, Achille apparaît plutôt comme un prince à la beauté androgyne et radieuse. Vaillant et agile combattant, fort et pugnace, ardent et fier, il aime aussi à se prélasser au soleil et à jouer de la lyre. Et c'est bien sûr tout l'attachement qu'il porte à Patrocle qui fait de lui un être sensible, terriblement faillible et assoiffé de vengeance...


Laissez-vous porter par le Chant d'Achille, hymne émouvant au rythme impétueux et farouche, à la mélodie lyrique et généreuse, aux accents colériques et impitoyables.
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critiques presse (1)
Telerama
16 juillet 2014
Chez Madeline Miller règne une grâce singulière et ténue, entre frénésie politique et intimité de l'amour. Elle ne porte jamais le drapeau de la cause gay à travers ses deux héros, elle fait juste de leur histoire une élégie racinienne.
Lire la critique sur le site : Telerama
Citations et extraits (412) Voir plus Ajouter une citation
Dans l’immense pièce, sa beauté rayonnait telle une flamme vitale et radieuse, qui attirait mon attention malgré moi. Sa bouche était un arc charnu, son new une flèche aristocratique. Quand il s’asseyait, ses membres ne se tordaient pas à la manière des miens, mais se plaçaient naturellement avec une grave parfaite, comme si il posait pour un sculpteur.
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J’aurais pu lui en dire davantage, lui parler du rêve qui me laissait bouffi, les yeux injectés de sang, et des cris avortés qui me brûlaient la gorge lorsque je les ravalais. Du ballet incessant des étoiles qui virevoltaient devant moi durant ces nuits d’insomnie.
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Dans l’obscurité, deux ombres tendent les bras à travers le crépuscule pesant et sans espoir. Leurs mains se rencontrent, et quand la lumière les inonde subitement, on dirait que cent urnes dorées déversent soudain leur contenu ensoleillé.
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Il rouvrit les yeux.
— Trouve-moi un héros qui ait été heureux.
Je réfléchis. Héraclès était devenu fou avant de tuer sa famille ; Thésée avait perdu son épouse et son père ; les enfants de Jason et sa nouvelle femme avaient été assassinés par la précédente ; et si Bellérophon avait tué la Chimère, il était resté estropié après être tombé du dos de Pégase.
— Tu vois, tu ne peux pas.
Il s'était rassis, penché en avant.
— C'est vrai.
— Je sais. On ne te laisse jamais être à la fois célèbre et heureux, constata-t-il en arquant un sourcil.
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“On lui avait laissé un passage menant au point où les rois étaient rassemblés, en plein cœur de la foule. Chaque prince nouvellement arrivé devait se présenter devant ses pairs et son nouveau chef de guerre, et le tour d'Achille était venu. Après être descendu le long de la planche de bois, il dépassa les rangées d'hommes qui se bousculaient pour s'arrêter à quelques mètres des souverains. Quant à moi, je le suivais à distance respectueuse.
Agamemnon nous attendait. Le nez aussi courbé et pointu que le bec d'un aigle, le regard brillant d'une intelligence cupide, il était compact, large du torse, et fermement campé sur ses pieds. Il semblait aguerri, mais usé aussi, et plus vieux que les quarante ans que nous lui connaissions. À sa droite, à la place d'honneur, se tenaient Ulysse et Diomède ; à sa gauche, son frère Ménélas, le roi de Sparte, à l'origine de la guerre. Ses cheveux d'un roux saisissant que je me souvenais avoir vus dans la salle de réception de Tyndare étaient désormais teintés de gris. Grand comme son frère, il avait des épaules robustes et carrées de bœuf d'attelage. Chez lui, les yeux noirs et le nez recourbé qui constituaient les signes distinctifs familiaux paraissaient plus doux, plus modérés. Enfin, à la différence d'Agamemnon, il avait un beau visage, marqué de rides d'expression joviales.
Le seul autre roi que je parvins à identifier avec certitude était Nestor, un vieil homme au menton à peine couvert d'une barbe blanche clairsemée, mais dont le regard vif contrastait avec le faciès diminué par l'âge. Selon la rumeur, il était le doyen du monde, et le survivant rusé de milliers de scandales, de batailles, de coups d'État. Il gouvernait la bande sablonneuse de Pylos, au trône duquel il s'accrochait encore avec obstination, à la grande déception de ses dizaines de fils qui vieillissaient inexorablement alors que ses célèbres lombes usées en engendraient de nouveaux. C'étaient d'ailleurs deux de ces fils-là qui le soutenaient par le bras, jouant des coudes pour écarter les autres têtes couronnées et obtenir une place devant. Lorsqu'il nous vit, Nestor resta bouche bée, sa maigre barbe gonflée d'excitation par sa respiration. Il adorait l'agitation.
Agamemnon s'avança, les mains ouvertes dans un geste de bienvenue, puis resta debout dans une attitude régalienne appelant les courbettes, l'obéissance, et les serments de loyauté qui lui étaient dus. Achille était censé s'agenouiller et lui donner tous ces signes d'allégeance.
Or non seulement il ne se mit pas à genoux, mais il n'y eut ni salutation, ni inclinaison de tête, ni cadeau.
Achille se borna juste à rester debout très droit, le menton levé, devant eux tous. La mâchoire d'Agamemnon se crispa. Il avait l'air stupide avec ses bras levés, et il le savait. Mes yeux lui envoyaient des messages urgents et muets. Autour de nous, Ulysse et Diomède s'arrêtèrent et un silence inconfortable s'installa. Les hommes échangèrent des coups d'œil perplexes. Tendu, les mains serrées derrière le dos, j'observai Achille et le petit jeu auquel il se livrait. Ses traits semblaient découpés dans la pierre tandis qu'il fixait le roi de Mycènes pour le mettre en garde, en silence, mais d'un regard qui signifiait : tu ne me commanderas pas. Le silence s'éternisa, aussi douloureux et haletant que lorsqu'un
chanteur s'épuise à tenir la note. Et puis, alors même qu'Ulysse esquissait un pas en avant pour intervenir, Achille se décida enfin à parler.
Je suis Achille, fils de Pélée, de descendance divine, meilleur des Grecs, venu pour vous apporter la victoire.
Au bout d'une seconde ou deux de mutisme effrayé, l'assistance rugit son approbation. La fierté allait bien à notre peuple : les héros ne sont jamais modestes.
L'expression d'Agamemnon se durcit, mais Ulysse s'était déjà approché pour poser une main ferme sur l'épaule d'Achille, froissant ainsi le tissu de la tunique. Il prit la parole d'un ton apaisant :
- Agamemnon, Seigneur des Hommes, nous t'avons amené le prince Achille pour qu'il te prête serment d'allégeance.
Il lança un regard d'avertissement à Achille, qui signifiait : il n'est pas trop tard. Néanmoins, ce dernier se contenta de sourire et d'avancer un peu, de sorte que la main d'Ulysse lui tomba de l'épaule.
Je suis venu de mon plein gré aider votre cause, annonça haut et fort Achille avant de pivoter la foule qui l'entourait. Et je suis heureux de pouvoir combattre avec autant de nobles guerriers de nos royaumes.
Un nouveau vivat bruyant et prolongé retentit. J'eus l'impression qu'il mettait de longues minutes à s'éteindre.
La voix d'Agamemnon s'éleva finalement depuis les sombres replis de son visage, empreinte d'une patience sûrement acquise au prix de nombreux efforts :
En effet, j'ai la meilleure armée au monde. Et tu y es le bienvenu, jeune prince de Phtie, dit-il avec un sourire tranchant. Quel dommage que tu aies été si long à nous rejoindre !
Achille n'eut pas le loisir de répondre aux sous entendus contenus dans cette déclaration, car Agamemnon avait déjà enchaîné d'un ton tonitruant :
Hommes de Grèce, nous avons assez perdu de temps. Nous partirons pour Troie demain. Allez vous préparer dans vos camps.
Sur ce, il fit volte-face d'un air déterminé avant de s'éloigner au pas de course le long de la plage.
Les rois constituant son cercle rapproché, Ulysse, Diomède, Nestor, Ménélas et quelques autres, le suivirent aussitôt, puis se dispersèrent pour rejoindre leurs navires. En revanche, le reste des souverains s'attarda, désireux de rencontrer le nouveau héros : le Thessalien Eurypyle, Antiloque de Pylos, Mérion de Crète et le médecin Podalyre, des hommes attirés ici par la gloire ou liés par leur serment, venus des quatre coins rocailleux de nos contrées.”
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