La journaliste
Lesley Downer lève, dans cette ouvrage, le voile couvrant le monde des saules et des fleurs. Pour ce faire, elle s'installe dans les vieux quartiers de Kyoto, près de Gion qui demeure encore aujourd'hui un des plus fameux "hanamachi", ou "ville-fleur". Son récit commence par les multiples péripéties pour parvenir à entrouvrir la porte de ce monde secret.
L'ouvrage se compose globalement de deux grandes parties. Dans la première, la journaliste remonte les siècles jusqu'à l"époque de Heian (ancien nom de Kyoto, époque courant de 794 à 1185) pour dévider l'historique des courtisanes puis des geishas. C'est l'occasion de diverses digressions au fil du temps sur les arts de l'amour à la cour impériale de Kyoto ou sur les débuts du kabuki à Edo (ancien nom de Tokyo). On découvre dans cette partie les multiples quartiers des plaisirs, de Shimabara, Gion ou Pontocho à Kyoto jusqu'à Yoshiwara à Edo-Tokyo. Leslie Downer en profite également pour dresser de magnifiques portraits de courtisanes célèbres, telle que Shizuka Gozen au XIIème siècle, maîtresse du héros militaire Minamoto no Yoshitsune. Ce dernier connut un destin tragique: jalousé par son demi frère Minamoto no Yoritomo, il fut forcé de se suicider avec femme et enfants. Shizuka, abandonnée dans sa fuite car enceinte, se vit arracher son enfant par les hommes de Yoritomo qui fracassèrent le crâne du bébé. Shizuka était très célèbre pour ses talents de danseuse. Yoritomo la somma de danser pour lui. Elle refusa, avant de céder. Sa danse fut si magnifique, chargée d'érotisme, d'insolence envers son bourreau et d'amour envers le beau Yoshitsune que la jeune femme fut libérée. Elle rasa sa longue chevelure et entra dans un couvent bouddhiste où elle mourut un an plus tard.
La seconde partie décode les us et coutumes de ce monde. Ici on découvre la formation des geishas, les manières de se vêtir, les rituels de ce monde. On s'étonne que dans les "ochaya" (maison de thé), le sake coule à flots alors que le thé... non. Après cette partie, les termes de "danna", "mizuage" ou "okiya" deviennent familiers. Enfin, Leslie Downer décrit la vie des geishas d'aujourd'hui. Comparé à la situation d'avant-guerre, leur nombre est désormais infime. Pourtant cette activité continue d'attirer des jeunes filles qui se lancent dans un apprentissage long et difficile des arts requis.
Ce documentaire est très intéressant à lire car il permet d'appréhender cette culture de l'éphémère typique du monde flottant. de plus, l'écriture est très agréable, les informations étant souvent émaillées d'anecdotes piquantes.