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EAN : 9791097100933
136 pages
Les Éditions Mille Cent Quinze (28/04/2023)
4.07/5   14 notes
Résumé :
Lorsque la catastrophe s’abat sur le pays de Sable, Reine et sa soeur de lait, Markowèfe, sont désemparées. Comment empêcher l’inéluctable vague de froid qui s’empare de leurs plantes-archives, qui colonise leurs terres ? Mais il y aussi Begga, fille de Reine. Et Begga est Insensible. Le froid, elle ne le comprend pas. Mais il lui parle. Et elle peut le traduire.
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Critiques, Analyses et Avis (6) Voir plus Ajouter une critique
Spécialisées dans le format court, les éditions 1115 alignent une jolie collection de nouvelles et de novella, donnant par la même occasion la possibilité à de nouvelles plumes françaises de faire leurs premiers pas littéraires. C'est le cas d'Esmée Dubois dont la novella Traduction vers le rose nous offre une fantasy inattendue en l'espace de 136 pages… et tout commence dans un pays appelé Sable en compagnie d'une Reine et de sa soeur de lait, Markowèfe.

Découpé selon le point de vue des personnages successifs que rencontre le lecteur, Traduction vers le rose visite un pays où les secrets s'enterrent et où le froid menace. Markowèfe, recueillie par Méroflède et ainsi soeur adoptive de la Reine du royaume de Sable, se découvre une passion pour les plantes et leur don incroyable : celui de capturer les mots , les harmonies et la musique. Elle devient ainsi la pépiniériste royale et conserve les secrets de son peuple du haut de sa Tour. Un jour pourtant, une enfant très particulière va naître.
Une enfant « insensible » au chaud, une enfant de sang royal, fruit de l'union de la Reine et de son époux ZEz.
À la fois gênante et effrayante pour ses parents, voici que la petite Begga est confiée à Markowèfe juste avant qu'une catastrophe se produise et que le froid ne commence à remonter du fleuve. Frigorifiés, les habitants de Sable perdent peu à peu espoir jusqu'au jour où l'étrange don de Begga est révélée à tous : elle peut traduire le froid en chaleur et sauver son peuple du désastre.
Mais tout a un prix…
Esmée Dubois surprend dès les premières pages.
Non seulement par son écriture poétique et ensorcelante mais aussi, et surtout, par son univers original qui convoque en douce pas mal de problématiques actuelles.
Traduction vers le rose est une novella de fantasy atypique qui prend le pari du récit choral pour nous montrer les deux points de vues d'une histoire et faire réfléchir sur l'impact de l'oppression sur le climat et sur l'avenir.

Ainsi, le lecteur apprend à connaître cette étrange monarchie matriarcale où les hommes ne sont guère présents, et où la sororité ne semble pas si forte qu'il n'y paraît, ou, du moins, plus médiocre qu'on ne s'y attendrait.
Petit à petit, Esmée Dubois construit la mythologie de son univers pour nous parler de plantes qui capturent les mots et les emprisonnent dans leurs racines, de jeunes femmes à la fois maudites et bénies qui vont devenir corvéables à merci pour le bien commun (rappelant en cela la sublime nouvelle Ceux qui partent d'Omelas d'Ursula K. Le Guin), et d'un système d'oppression économique qui mène à une catastrophe climatique. Sous ses dehors d'une fantasy hautement poétique, Traduction vers le rose pense aujourd'hui et demain, avec un peuple qui en exploite un autre pour une certaine ressource et cette ressource même qui sera la cause d'un bouleversement majeur du climat les condamnant aux dernières extrémités. C'est surtout un texte au féminin, sur des femmes victimes des leurs, condamnées à la solitude et à la tristesse pour ce qu'elles sont. Traduction vers le rose utilise des images fabuleuses, comme ce fameux principe de traduction de l'air froid en air chaud ou cette fleur qui cache vos pas et qu'on appelle « Pudique », mais aussi des rencontres, d'une mère rongée par le remord et d'une enfant abandonnée trop tôt, d'un grand-père soucieux et de sa petite-fille à part, d'une jeune conductrice perplexe et d'une traductrice qui rêve un jour de voir le froid.
C'est en réalité un grand texte qui se cache derrière cette courte novella, trop courte d'ailleurs pour son propre bien et qui se finit certainement trop abruptement tant il semble y avoir encore bien des choses à dire sur Sable et sur le peuple Grusien, sur le charbon blanc et les bêtes froides, sur les traductrices et leurs mères.
Espérons donc qu'Esmée Dubois ne soit qu'au début de son voyage…

Inventif, poétique, intelligent et subtil.
Autant de qualificatifs qui s'appliquent naturellement à Traduction vers le rose qui ne fait pas qu'offrir un univers fabuleux à son lecteur mais l'invite également à réfléchir sur ce que nous sommes prêts à sacrifier pour la chaleur de l'autre. Esmée Dubois fait une entrée remarquée (et remarquable) dans le monde de l'imaginaire français.
Lien : https://justaword.fr/traduct..
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Au pays de Sable, une vague de froid menace l'existence de ses habitantes. Reine et sa soeur de lait, Markowèfe sont bien démunies face à cet écueil funeste. Mais, contre toute attente, une solution semble se présenter à travers, Begga, la fille de Reine qui se révèle être une Insensible. A ce titre, elle ne sent pas le froid et ignore même ce que c'est. Pourtant, celui-ci semble lui parler. Mieux encore, elle peut le traduire en chaleur et ainsi sauver sa communauté de l'extinction. Mais en échange de quel sacrifice ?

Traduction vers le rose nous immerge dans un court récit, teinté de notes postapocalyptiques. Esmée Dubois pose ses valises dans un pays imaginaire, nommé Sable. C'est une monarchie gouvernée et peuplée uniquement par des femmes qui se retrouvent du jour au lendemain menacées par un danger climatique. Or, pour faire face à ce dérèglement, elles découvrent de manière fortuite que l'insensibilité de certaines est un atout pour combattre ce mal et inverser la tendance.

Dès lors, l'autrice a imaginé tout un procédé se rapprochant du rituel magique qui dote l'écriture d'un puissant pouvoir permettant la transcription du froid en chaleur. Mais il n'est l'apanage que de rares élues. Ainsi, son univers se pare des atours de la fantasy en laissant s'exprimer un puissant onirisme. Sous la plume d'Esmée Dubois naît un monde insolite où le vivant est en totale interaction. Aussi, la mémoire se transmet ici par les plantes qui servent de réceptacles pour tout archiver. Elle fait montre d'un imaginaire fertile pour mieux capturer l'attention de son lectorat.

Dans sa novella, Esmée Dubois met en scène un matriarcat où la sororité prédomine jusqu'à l'arrivée d'un élément perturbateur. Dès lors, les âmes solidaires s'oublient pour laisser l'instinct de survie prendre le dessus, quitte à dénoncer, trahir et sacrifier sans se poser de question ni remettre en cause leurs actes. Finalement, cette mutualité est surtout maintenue par cette génération d'élues sacrifiées qui n'ont pas d'autres choix que de mener à bien leur mission dans une totale abnégation pour la survie de toutes.

Plus que de chercher à mettre la femme, actrice de son destin, au coeur de son récit, Esmée Dubois met surtout en exergue la question climatique. A travers l'arrivée inopinée de ce froid qui emprisonne dans le gel et la glace empêchant la régénération du vivant et détruisant tout moyen de subsistance, elle s'empare d'une préoccupation sociétale majeure. Mais, plus que d'en faire le constat amère, elle va s'intéresser aux causes en donnant l'opportunité à l'un de ses personnages d'aller constater par lui-même ce qu'il se passe dans le pays voisin et réaliser la responsabilité de son peuple dans ce qui lui arrive. Il est donc question ici de responsabilité collective dans le choix et les conséquences des actions menées. Ce drame n'est donc pas la résultante de la fatalité et peut être rectifié pour peu qu'on s'en donne la peine.

En pointant du doigt ce matriarcat replié sur lui-même, l'autrice souligne le danger de vivre en vase clos en se coupant du reste du monde, ne s'y intéressant finalement que pour asservir et exploiter.

Traduction vers le rose est une novella déroutante et étonnante que l'autrice a voulu riche d'enseignements. Elle signe donc un postapocalyptique original qui restera sans doute dans les mémoires, ne serait-ce pour la poésie qui s'en échappe... plus sur Fantasy à la Carte.


Lien : https://fantasyalacarte.blog..
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Traduction vers le rose est une novella de fantasy insolite et post-apocalyptique qui met en scène une société matriarcale. Dans un royaume condamné au froid (Sable), ses habitantes complexes et fortes sont destinées à le sauver à travers leurs différences, en dépit du prix à payer.

L'un des gros points positifs de ce texte, c'est son style impeccable, travaillé, mais c'est surtout le monde complexe imaginé par l'auteur qui a soigné pas mal de détails fascinants sans jamais lasser le lecteur. Un monde bourré d'aspects recherchés, inventifs (dont sa magie, notamment) qui provoque la réflexion et dont les enjeux subtils sont efficacement mis en avant. Un monde peut-être un peu trop travaillé au vu de la taille de l'histoire qui aurait, pour le coup, largement pu s'étendre sur un roman de 400 pages. Il y avait matière à faire.

Bref. Une fois dedans, on se laisse porter avec un plaisir évident, car chaque aspect de la narration est maîtrisé. Chaque chapitre est écrit d'un point de vue différent, c'est toujours extrêmement bien représenté en fonction de l'état d'esprit du personnage. On a envie de connaître le sort réservé aux citoyennes de Sable, aux traductrices, aux conductives... On a envie de comprendre pourquoi les choses se sont effondrées et comment le royaume de Reine et de Markowèfe, sa soeur de lait, va pouvoir survivre car tout le condamne.

Ces femmes qui se sacrifient pour le bien-être de leur communauté, la souffrance physique, le désespoir qui les envahit, la démence qui plane... Il y a de la poésie et de la cruauté dans l'expression et l'imaginaire d'Esmée Dubois. J'ai trouvé le mélange parfaitement équilibré, grâce notamment aux thématiques qu'elle aborde en filigrane dont les plus importantes restent à mes yeux la tragédie du contrôle pour la survie, le danger de vivre replié sur soi-même sans chercher à s'ouvrir au monde et les dysfonctionnements liés à l'absence de sororité.

Une très très belle surprise, pleine d'ambition et d'intelligence malgré son format court. Des fantasy de ce type ? Intelligentes, réfléchies, poétiques ? Moi qui ne suis pas fan, je veux bien en dévorer tous les jours !
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Lorsqu'une terrible vague de froid s'abat sur Sable, la population se retrouve en grand danger. Heureusement, Marko et sa nièce Begga trouvent une solution pour survivre : lorsqu'une Insensible et une Conductrice unissent leurs forces, il est possible de traduire le froid en chaleur. Mais à quel prix ?

Lorsque l'éditeur de 1115 nous a pitché cette novella, j'ai été vraiment très enthousiasmé par cette idée de « traduire » le froid. Mais malgré de très bonnes idées, je ressors assez mitigé de ma lecture.

Je pense que ma frustration est essentiellement liée au format novella qui n'était peut-être pas suffisant pour développer ce concept. L'autrice a imaginé un monde vraiment intrigant mais on sent bien qu'elle n'a pas pu l'exploiter autant qu'il l'aurait fallu pour que l'histoire soit pleinement satisfaisante. Je trouve ça vraiment dommage parce que le système de magie qu'elle a inventé est vraiment original et intéressant.

Si on regarde un peu plus la forme du texte, j'ai beaucoup apprécié la poésie du texte, assez onirique sans être trop nébuleux non plus. Tout cela apporte beaucoup de charme, et renforce l'impression de cruauté qu'on peut avoir par moments.

Parce que oui, malgré la couverture rose et fleurie, le roman est plus sombre qu'on ne pourrait le croire. La traduction du froid coûte beaucoup aux femmes qui en sont en charge, tant leur liberté que leur santé mentale. On n'hésite pas un instant à bafouer les droits élémentaires de certaines femmes qui ont le malheur d'être nées avec le don qui va bien, tout ça pour le bien commun. C'est assez glaçant par moments, sans mauvais jeu de mot.

Une des particularités du récit est aussi qu'on suit des personnages différents à chaque chapitre. Si cela permet, petit à petit, d'avoir une vision plus précise des événements, et de recontextualiser ce que certains personnages nous laissent entendre, ça ne nous aide malheureusement pas tellement à nous attacher aux personnages.

Au final, cette novella n'aura vraiment pas été désagréable et elle aborde des sujets vraiment intéressants, mais elle laisse malgré tout un goût de trop-peu que j'ai trouvé un peu frustrant.
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Au royaume de Sable, Reine est la monarque et Markowèfe son archiviste. Dans ce pays de l'oralité, cette dernière a pour tâche d'enregistrer tout ce qui se dit, se chante ou se crie et ce grâce aux plantes qu'elle trimballe constamment puis qu'elle rempote, pour que les mots fassent leur chemin jusqu'aux racines et y être soigneusement conservés. Un jour de tempête, ses plants sont arrachés. Un pan entier de savoirs, dispersés à travers le royaume, au-delà même des frontières. Chez les Grusiens, par exemple, ce peuple considéré comme inférieur et exploitable à l'envi. Mais lorsque plusieurs décennies plus tard, le grand Froid s'abat sur le pays de Sable, Markowèfe s'interroge. Se pourrait-il que les Grusiens se soient emparés de leurs savoirs ancestraux pour se venger ?

Quel magnifique récit que celui-ci. Un royaume de femmes, ni bonnes, ni mauvaises, tentant de sauver leur monde, leurs proches, n'hésitant pas à en sacrifier d'autres pour cela. La plume est d'une poésie folle, les personnages que l'on côtoie fascinants, attachants ou surprenants. C'est une très belle découverte, entre Fantasy et conte que je conseille à tous les amoureux des mots et des beaux univers originaux.
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Citations et extraits (6) Voir plus Ajouter une citation
J'étais déjà trop vieille, alors, pour supporter sans conséquence un choc aussi immense. D'avoir vu le gaz de charbon s'échapper et des milliers de mots, glanés et captés, enracinés par moi depuis des années, s'échapper sous mes yeux dans le vent du cyclone, j'avais le souffle coupé et le sommeil bosselé. Mes nuits étaient des lambeaux de repos, déchirés de milles voix cauchemardesques.
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Et quand le froid s'éloigne, pudique, je suis si confiante que je le rappelle à moi, le froid. Je le vouvoie, le froid. Venez, venez, venez, venez, je lui dis.
Alors il revient me gifler et la fenêtre, par laquelle je le regarde, me claque à la gueule. Les doigts de tatouage m'échappent. « A, A », je reprends. Ma voix hypnotise ma voix.
De l'autre main, j'écris. Les oiseaux viennent. Ils volent, si lentement. Leurs cris appellent le fleuve mais il n'y en a plus, de fleuve, depuis le froid : l'étendue d'eau, désormais, n'est plus qu'une immense table de glace, servie pour des convives qui n'ont pas envie d'être là.
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Évidemment, ces activités de dressage, d’oiseaux et de chiens, me sont strictement interdites. Je n'ai absolument pas le droit d'essayer de savoir ce que je ne sais pas. Markowèfe l'a bien dit : si je suis traductrice du froid, c'est parce que j'ignore le froid. Je ne le vois pas. Il ne me fait pas, comme aux autres, mal à la peau et au cœur. Mais je suis seule et je m'ennuie et toutes ces bricoles, avec le corbeau, les oiseaux et les chiens, occupent un peu mon temps.
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Par bonheur, depuis le début, le ciel est avec moi.
Pour dire : depuis deux semaines que je suis là, dès que s'exprime la nature brutale des conductives, il y a un orage et quiconque prononce une mauvaise parole contre moi, la perd sous la neige. Mes oiseaux en boivent quelques gouttes ; pas n'importe lesquelles, heureusement. Je trie : les bonnes gouttes, les mauvaises. Mes oiseaux ne seront jamais infectés par la brutalité.
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J'aurais voulu avoir le temps de connaître mieux mon corps avant de partir le brûler ici. 
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