Qu'est-ce que
le malaise turc si ce n'est un rapport conflictuel à
L Histoire? La Turquie peine à avancer car elle ne sait pas reconnaître la richesse de son passé et de son territoire. Elle ne sait pas reconnaître ses erreurs, ses manquements, ses défaillances. Elle perd son temps, pourtant précieux, à renier ce qui fait pourtant son identité : sa pluralité. Car la Turquie n'est pas Turque. Elle est turc, arménienne, kurde, grecque, assyro-chaldéenne etc.. Elle est musulmane, alévie, chrétienne, juive etc. Elle est multiple, composite, foisonnante. La réduire, à coup de répression et de négation, à la seule identité turque, pour copier - et mal - l'imaginaire politique "occidental", c'est l'apauvrir, la malmener, la meutrire. C'est l'empêtrer dans des maux lourds à porter.
Et qu'est-ce que
le malaise turc si ce n'est un rapport à l' "Occident" complexé ? La Turquie, tantôt la copie, tantôt la fuit, parce qu'elle n'assume pas ce qu'elle est, parce qu'elle veut devenir cet "Occident" qui la refuse pourtant; parce qu'elle se perd dans ce refus, prenant, du coup, le contre-pied comme si c'était forcément une bonne idée. La Turquie, depuis sa création, se perd parce qu'elle prend toujours le pire des chemins du "monde occidental".
Celles et ceux qui ont déjà étudié la Turquie n'apprendront rien de cet essai. En revanche, il est à conseiller aux autres qui ignorent sa complexité.
Cengiz Aktar, avec la participation de l'excellent Étienne Copeaux et Nilufer Göle, tous deux interrogés en fin d'ouvrage, résume avec efficacité ce qui fait
le malaise turc. Je vous le conseille si vous voulez commencer à comprendre ce pays torturé qui ne sait pas panser/penser ses plaies. C'est une bonne entrée en matière.