L'extinction des espèces ne résultera que de la mort douloureuse d'un nombre incalculable d'individus. Ce ne sont pas alors des statistiques qui diminueront, mais des vivants qui expireront.
La souffrance peut-elle ne pas être prise en compte ? Derrière la vie, il y a les vivants. Tout est là. Ce ne sont pas des idées qui vont devoir - par nos choix - tenter de survivre à l'effondrement : ce sont des personnes.
Il faut être poète pour penser hors de l'ordre et déceler l'arbitraire de ce qu'une tradition pluriséculaire fait nécessairement apparaître comme inéluctable.
Les humains représentent 0,01 % des créatures vivantes, mais ont causé 83 % des pertes animales depuis les débuts de la civilisation. Une situation génocidaire d’une ampleur sans précédent. Qui, de plus, commence à profondément nuire aux humains eux-mêmes.
Cet infime ouvrage s'inscrit dans un geste de "dernière chance", comme une supplique aux pouvoirs publics : ne pas considérer l'écologie comme la priorité majeure de ce temps relève du "crime contre l'avenir". Ne pas opérer une révolution dans notre manière d'être relève du "crime contre la vie".
Il est temps de regarder en face l'agonie de notre monde et d'être un peu sérieux.
Il ne s'agit que de décider si nous préférons sauver des vies ou des biens, des espèces ou un système, un avenir ou un instant. Tout est là.
Il est temps de nous empêcher de piloter le monde en état d'ébriété écologique.
Revenons aux faits. Un médecin alarmait récemment : « L'impact sanitaire du changement climatique menace d'annuler les progrès du XX* siècle ». Ceci à cause des effets directs de la température, mais aussi des effets indirects associés à la recrudescence de maladies tropicales ou disparues.
On peut aussi tous crier «Vive la liberté». Et c'est vrai : les libertés de contester, de revendiquer, d'explorer, de sauver, de migrer, de changer... sont aujourd'hui menacées. II me semble effectivement impératif de les réhabiliter. Mais, en contrepoint, la liberté de polluer dans l'insouciance, de détruire les espèces rares, d'opprimer les minorités, de moquer les marginaux, de sous-payer les femmes, de ne pas vacciner nos enfants ou de porter à leur paroxysme nos comportements indolemment destructeurs doit-elle être défendue ? Nous n'avons aucun autre choix que d'être subtil. On ne peut pas se contenter du « pour ou contre » la liberté. La pire injustice et atrophie intellectuelle aujourd'hui, la démission stricte de la pensée, c'est de poser - quel qu'il soit - un prisme unique sur le monde.
Parfois, je lis qu'il ne s'agit que de Ia fin d'un monde et pas du monde, qu'il ne s'agit que de la fin (possible) de l'humanité. Mais c'est une analyse assez contradictoire. Soit on considère que le monde n'est pas constitué des seuls humains - ce qui est raisonnable - et il est alors faux de clamer que seule l'humanité est en danger : si nous allons à la catastrophe, nous entraîneront avec nous une quantité proprement astronomique d'animaux qui sont bel et bien réels. Soit on considère que le monde n'est fait que des humains ce qui est assez fou, mais banal - et alors il s'agirait bien de la fin du monde. Dans les deux cas la correction n'a pas de sens. Si le niveau de catastrophe auquel nous faisons face n'est pas qualifiable de «fin du monde», alors j'ignore ce qui peut l'être...
La température a dépassé les 51 degrés (à l'ombre) en Algérie durant l'été 2018, tandis que le minimum nocturne à Oman n'est pas tombé en dessous de 42 degrés sur un cycle entier de 24 heures. Deux ans auparavant, on mesurait 54 degrés au Koweit. Á de telles températures, le corps humain ne fonctionne plus. Il détourne le sang vers les capillaires de la peau, rationnant les autres organes vitaux, le cerveau n'est plus alimenté. Le cœur pompe le sang jusqu'à épuisement.
Beaucoup de pays très peuplés sont en passe de devenir humainement invivables. C'est notamment le cas d'une grande partie de la Chine si l'on pousse la projection en 2070.