Quand on termine la lecture de ce portrait de
Georges Bizet, on reste d'abord inconsolable. Mort brutalement à l'âge de 36 ans, quelques mois après la première représentation à Paris de son opéra Carmen, le compositeur ne connaîtra pas l'extraordinaire succès posthume de cette oeuvre considérée comme son chef-d'oeuvre et qui, mal accueillie à ses débuts, est l'un des opéras les plus joués aujourd'hui. Combien d'autres chefs-d'oeuvre encore s'il avait vécu plus longtemps … et s'il avait cultivé toute la palette de ses talents. C'est ce point de vue qui sert de fil rouge au portrait que dresse l'auteur, de Bizet en compositeur déterminé à trouver le succès dans le genre de l'opéra, très prisé du public d'alors et, par ce choix, négligeant, selon lui, les possibilités que lui offraient ses immenses talents d'orchestrateur et de pianiste. Compositeur passionné, il dut cependant, faute des succès espérés, et parce qu'« il faut vivre ! », consacrer beaucoup de temps et d'énergie à des travaux annexes, leçons de piano et transcriptions pour éditeurs de musique. La lecture est très agréable, pas trop « pointue » pour les non spécialistes, va à la rencontre du monde musical et littéraire de cette seconde moitié du 19eme siècle, et redonne vie, grâce aux témoignages de ses amis, élèves ou confrères, à un homme attachant, aimant la vie et blessé par les échecs, doué d'humour et doté d'une belle plume comme le montre sa correspondance. Enfin, musique et littérature se rejoignent dans les compositions de Bizet mais aussi dans sa famille puisque sa femme, Geneviève Halévy, elle-même fille de musicien, se remariera plus tard, tiendra un salon parisien et sera l'une des inspiratrices du personnage de la Duchesse de Guermantes dans A la recherche du temps perdu de
Marcel Proust.