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La présence de ce petit empereur à la cour de Louis XVI est le point de départ du court roman que Christophe Bataille consacre à la première chritianisation de la péninsule indochinoise à la fin du XVIII siècle. le récit se poursuit avec l'envoi d'une mission d'évangélisation de l'Indochine. C'est l'évêque (in partibus) d'Adran - en Arabie -, Pierre Pigneau de Behaine, mentor du petit empereur, qui arme le Saint-Jean et le Saint-Paul. Les deux navires quittent le port de la Rochelle en avril 1788, avec à bord quelques frères franciscains accompagnés de deux blondes religieuses. le voyage est long et périlleux, comme toujours en ces temps de découvertes. L'Indochine est loin, par la route du Cap. Les navires doivent rejoindre rejoigent Saïgon. Mais le choléra les rattrape et emporte la soeur Armande. Reste seule la soeur Catherine, "née près de Bordeaux en 1760-. le Saint-Paul dépose ses missionnaires et son équipage qui s'en va tenter de conquérir le pays, s'enfonçant dans la jungle hostile. L'expédition, largement imaginaire, est le pendant asiatique de la folle expédition d'Aguirre évoquée dans le film de Werner Herzog. Tous les militaires finissent massacrés, alors que les industrieux missionnaires, restés sur la côte, se fondent dans la population, curieuse de cette nouvelle religion, qui ne pertube guère la leur : " Les paysans écoutaient les Evangiles. Ils continuaient de croire en leurs dieux anciens. le Viêt-nam conservait tout et tout s'y mêlait dans l'éternité. (p.65). Mangés par le jungle et le temps, coupés de leur pays, frère Dominique et soeur Catherine, "oublieux de tous et oublieux d'eux mêmes" (p.77), s'absorbent des les travaux et les jours, fascinés par la beauté des paysages. Leur foi et leurs racines ne sont plus que souvenirs. La cour de Versailles a oublié depuis longtemps les missionnaires qui n'ont plus de nouvelles de leur pays. Remontant à des temps primitifs précèdant le péché originel, ils se découvrent dans la communion avec la nature. Il y a un art de l'économie du récit chez ce jeune auteur dont le texte commence comme un roman historique et finit comme un apologue, mais au prix des plus grandes libertés prises avec L Histoire.
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Le Vietnam au temps de la Révolution française…

Il existe plusieurs façons d'appréhender un fait historique dans un roman. L'auteur peut, par exemple, choisir de développer une épopée pittoresque avec moult rebondissements, ce sera alors un roman d'aventure dans lequel le fait historique est présent en filigrane et sert davantage de contexte à la romance, il peut aussi faire de son livre un roman essentiellement historique avec moult détails et dates bien précises en en romançant le moins possible le déroulé, mais en se tenant aux faits, rien qu'aux faits. Les livres récents « Pour mourir, le monde » de Yann Lespoux, ou encore « Les naufragés du Wager » de David Grann illustrent ses deux façons de traiter du fait historique.

Christophe Bataille choisit une autre voie avec ce court livre, celle de l'épure et celle des sens.

L'auteur ne s'encombre pas vraiment avec l'exactitude des faits, et utilise dates et liens de causes à effet avec parcimonie, voire de façon lapidaire. L'essentiel étant de voir comment un fait historique, en l'occurrence l'aide de religieux français (des Dominicains) au Vietnam peu avant la Révolution française, est parvenu à l'oubli le plus total.

Pour réhabiliter la mémoire de ces hommes et de ces femmes partis à l'aventure en cette terre inconnue, bravant tous les dangers et notamment les maladies, Christophe Bataille tente d'imaginer ce qu'ont vécu ces gens, l'accueil qui leur a été fait en ces contrées exotiques, leur vie là-bas des années durant. Il a choisi, pour ce faire, de mettre au premier plan l'aspect sensoriel de cette aventure.
En moins de cent pages, nous prenons ainsi connaissance d'un fait historique relativement méconnu tout en ayant une vive impression en termes de sensations olfactives et visuelles, ce qui a pour effet de marquer fortement la lecture et de rendre ainsi le fait historique en question marquant. Un procédé bien vu pour retenir un événement historique dans sa globalité.

« Soeur Catherine ne se lassait pas de ces champs inondés aux teintes changeantes. le matin, les pousses vertes étaient rouges du ciel nouveau ; puis le soleil donnait une pureté singulière à ce plat paysage. Les femmes, pourtant, continuaient de repiquer le riz. le jour tombait enfin, irisant les eaux de verts sombres et inquiets. Comme la France étaient loin ; tout y paraissait futile. Au Viêt-Nam, parmi ces paysans qu'elle comprenait mal, devant la nature sauvage, soeur Catherine était humble ».

Sous le règne de Louis XVI, le jeune empereur du Vietnam, Canh, est envoyé à la cour pour demander de l'aide au Roi et échapper aux révoltes de son pays. Son père, le prince Nguyen Anh, chassé de son palais par les paysans en révolte, s'est lui-même réfugié au Siam. La France, dont il a eu vent de la puissance d'antan, pourrait-elle leur prêter main forte ?
Le jeune empereur a seulement sept ans, a fait neuf mois de mer pour parvenir jusque-là et adresser sa demande et, après avoir entraperçu les fastes de la cour, mourra rapidement d'une pneumonie, non sans avoir touché le coeur de l'évêque Pierre Pigneau de Bréhaigne qui décide alors, contrairement à l'avis du roi qui comment à s'inquiéter sérieusement de l'humeur du peuple français, de préparer deux navires pour aller sauver le Viet-Nâm. le but est à la fois d'y envoyer des soldats pour faire la guerre mais aussi des religieux pour lutter contre l'impiété et répandre la bonne parole. Il faut dire aussi que chacun se prend à rêver de ce pays lointain dont la faune et la flore faisaient alors l'objet de multiples rumeurs enchanteresses, faisant oublier un temps les premiers prémisses de la Révolution.

Soldats et dominicains missionnaires débarquent ainsi dans ce pays après un voyage tumultueux. Si les premiers échouent très vite du fait d'un manque de volonté pour comprendre ce pays, du fait des maladies et de leurs manières brutales, les seconds vont être aimés et intégrés car ils s'adaptent, écoutent, respectent les habitants et leurs coutumes. Leur vie cependant sera une vie de dur labeur et leur seule récompense le sourire des gens du pays qui se plient assez volontiers aux rites catholiques tout en conservant leurs croyances.

« Il avait fallu mille ans aux Vietnamiens pour se libérer du joug chinois ; contre les Français, moins de deux semaines suffirent. Ceux-ci étaient courageux et armés, mais la maladie les prit. La chaleur les indisposa. Ils dormaient dans les rizières, parmi les moustiques et les crapauds buffles dont les cris gigantesques troublaient le sommeil. Ils étaient épuisés et inquiets. La végétation silencieuse leur était hostile ; l'eau les tuait lentement. Ils étaient sales et vides comme leurs barriques de vin. La solitude leur devint insupportable. Tous les matins, on retrouvait l'un d'eux tués dans son sommeil ».

Le style adopté alterne entre descriptions poétiques de toute beauté et énumération rapide, on pourrait dire lapidaire, des faits pour mieux passer à la description suivante.
Quant la fin imaginée par Christophe Bataille, elle est particulièrement émouvante, l'auteur s'est laissé aller à une réinterprétation personnelle du mythe d'Adam et Eve, ou, tout du moins, à ce que peut apporter une vie recentrée sur l'essentiel.

Simplement beau, vain et nostalgique.

Un grand merci à Francine -@afriqueah- à qui je dois cette lecture (livre repéré dans la liste « Pépites parmi les récits courts » de Fanny -@Fanny1980-)


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Annam de Christophe Bataille prouve qu'un très court roman peut laisser une impression profonde. Une expédition française d'évangélisation qui part pour l'Annam juste avant le début de la révolution française. Moment dramatique parfait pour parler des bouleversements du monde et des hommes. de ces périodes où le premier empire français lui était déjà contesté par les anglais, où l'on revenait du Canada en guerre, où l'on s'exilait dans les monarchies européennes si l'on avait quelque chose à perdre et où l'on pouvait aussi tomber sous le charme d'un pays lointain et paisible et de sa culture. ça n'a pas duré malheureusement.
Lien : https://www.lesmotsjustes.org
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Ce livre est un bijou tout petit mais précieux , à l'écriture délicate et précise, charnelle, soyeuse. Très court mais intense, cette épopée incroyable et oubli. la brièveté du récit apporte puissance et effarement au lecteur. Un beau livre que l'on a peut-être oublié sous la masse de la production mais qu'il serait bon de redécouvrir. Merci à ma belle mère qui s'en débarrassait !
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1787 –Le petit Canh, empereur du Vietnam alors âgé de 7 ans, vient à Versailles demander l'aide de Louis XVI. Une révolte paysanne l'a chassé de son trône et il en appelle à la grandeur de la France pour. Hélas pour lui le royaume de France n'est plus aussi riche, la grogne monte dans les campagnes et Louis XVI refuse d'engager des dépenses pour une terre si lointaine. Séduit par je jeune empereur l'évêque Pierre Brigneau de Bréhaine arme 2 bateaux qui partent pour le royaume lointain. le petit empereur est mort mais l'évêque entend évangéliser cet empire longtemps dominé par la Chine. Après de longs mois d'un voyage difficile, marins, militaires et religieux arrivent sur place. Mais l'heure de la révolution a sonné en France et rapidement les religieux vont sombrer dans l'oubli.

Dans un très court roman Christophe Bataille nous raconte cette expédition. Un texte trop court, trop rapide et pourtant riche description des tourments politiques qui secouaient l'Europe en opposition avec le calme de ces rizières du Viet-nam. On y découvre un pan de l'histoire que pour ma part j'ignorais (et on ne peut s'empêcher de penser à l'Indochine puis à la guerre entre du Viet-nam menée par les troupes américaines deux siècles après cette expédition). C'est la confrontation entre deux cultures, présentée très sobrement, et le récit de cette évangélisation ratée (doit-on le regretter ?).

On suit le parcours physique et spirituel de ces religieux partis répandre la foi chrétienne et qui se retrouvent seuls, abandonnés de tous et surtout de la France. « le sens de leur présence au Viet-nam s'était noyé dans les drames et les saisons. Mais ils étaient prisonniers de ce pays ». Partis guidés par la foi, ceux qui survécurent au bras vengeur du nouvel empereur trouvèrent la paix de l'âme et le goût simple du vivre en harmonie avec la nature, mais ressentirent également la désillusion générée par l'éloignement de la mère-patrie, l'abandon de la part de celle-ci et la perte progressive de la foi.

Si j'ai apprécié la clarté du propos, la qualité des descriptions des paysages et des états d'esprit, la présentation et le rappel du contexte géopolitique, j'ai regretté que ce premier roman, qui ne manque pas de qualités, soit aussi court et ne prenne pas le temps de développer son propos.
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Avant de dévorer "Un jésuite à la cour de Siam" de Raphaël Vongsuravatana, je m'étais embarqué pour le Vietnam avec quelques missionnaires dominicains sous la houlette de Christophe Bataille.

Les deux ouvrages rendent compte des menées diplomatico-religieuses de la Frances en Asie du Sud-est sous les règnes de Louis XIV et Louis XVI mais diffèrent fondamentalement de par leurs conceptions.

Raphaël Vongsuravatana est historien, s'il instille ici ou là quelques assertions personnelles, son travail demeure strictement documenté.
Alors qu'Annam est un roman et, bien qu'étayé par de solides bases historiques, Christophe Bataille s'est donné la liberté de combler les lacunes de la documentation selon son imagination et pour notre plus grand plaisir.

Un bonne lecture dont la brièveté m'a presque frustré.
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Annam est un court roman qui décrit un épisode oublié de l'histoire de la France et du Vietnam : sous le règne de Louis XVI, l'appel à l'aide d'un empereur vietnamien déchu à son alliée la France entrainera l'armement et le départ de plusieurs vaisseaux. Parmi l'équipage, des missionnaires désireux d'aller répandre la bonne parole, leur voyage sera si long et difficile que l'on croira qu'ils ont péri en route et qu'ils finiront oubliés de tous sur la terre vietnamienne qu'ils ont appris à aimer.
Dans ce très court récit (moins de 100 pages pour décrire ce qui aurait pu être une épopée !), Christophe Bataille n'a pas un mot de trop et sait nous faire partager en quelques phrases toute une ambiance et une atmosphère. Les descriptions du terrible voyage en bateau comme celles de la découverte du Vietnam puis de la vie simple et humble des religieux sur places sonnent justes et sont empreintes de poésie. le lecteur revit ces temps difficiles où s'embarquer pour le bout du monde était souvent synonyme d'un voyage sans retour. L'auteur nous touche aussi par l'accent qu'il met sur la vie simple que mèneront sur cette terre étrangère les quelques religieux rescapés : ayant vite compris toute la vanité et la vacuité de leur mission d'évangélisation, ils s'intégreront à la population locale et partageront le quotidien difficile des villageois. Ni tout à fait chez eux ni capables de retrouver leur patrie, ils accepteront leur sort et sauront s'en contenter avec philosophie.
L'air de rien ce roman pose donc quelques questions essentielles sur la place de la religion, la volonté qu'ont eu les Occidentaux de vouloir coloniser et évangéliser des populations qui vivaient très bien sans eux et le rôle de la véritable foi dans tout ça. Un roman que j'ai trouvé un peu court (j'aurais bien aimé partager plus longtemps cette histoire et certains épisodes auraient pu être étoffés) mais qui sonne juste et dont le style poétique résonne en nous. Une jolie découverte !
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Dans ce très court roman de Christophe bataille, j'ai découvert un épisode de l'histoire de France, inconnu pour ma part.
Sous le règne de Louis XVI, alors que la France se prépare à vivre un moment d'histoire tragique et bouleversant, le jeune empereur du Viet-Nâm est envoyé à la cour pour échapper aux révoltes de son pays. Il a sept ans, il ne parle pas français et vivra très brièvement.
Parallèlement, l'évêque Pigneau de Bréhaigne arme deux navires pour sauver le Viet-Nâm de l'impiété et de la guerre.
Soldats et missionnaires débarquent dans ce pays inconnu. Ils s'adaptent, la vie est rude, ils n'auront que peu de satisfactions dans cette vie de labeur, si ce n'est le sourire des gens du pays.
Roman historique, certes mais écrit avec beaucoup de sensibilité et de pudeur, beaucoup de poésie aussi. Un petit cadeau à offrir, ou à s'offrir.
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Louis XVI n'a pas le temps, il a bien envoyé des missions ( pas des missionnaires) au Brésil, à Ceylan, aux Amériques, en ce qui s'appellera par la suite la Nouvelle Calédonie, ) lorsqu'il reçoit la visite inopinée d'un enfant de sept ans « empereur du Viet Nam ».Il sait à peine parler, ce petit, et encore moins le français, langue étrangère, et encore moins le français de la cour de Versailles et de ses codes.
Louis XVI a d'autres soucis, on est en 1787, le peuple de Paris commence à gronder, et le petit ambassadeur meurt un beau jour de froid dans la galerie des glaces.
Cette histoire vraie, Christophe Bataille nous la raconte dans un court, subtil, lumineux petit livre, ainsi que la mission de dominicains en terre du Vietnam. Leur progression en ces terres humides , faune secrète, bambous abritant des serpents , avec le croassement des crapauds buffles qui vous éloignent de l'idée même de dormir, est une progression vers le meilleur d'eux mêmes, vers ce qu'ils sont. Les jésuites sont massacrés, leurs compagnons dominicains, aussi, la France les as définitivement abandonnés et leur compagnon meurt.

Ils sont deux survivants, un homme et une femme, se retrouvant après les travaux des champs, dans une vie rude, austère. Peu à peu, évangéliser perd son sens, à mesure qu'ils assistent aux fêtes du village, qu'ils côtoient les paysans, qu'ils comprennent leur mystique. Qu'ils se rejoignent dans la vérité de leurs corps..

« Leurs âmes s'étaient dénudées : il leur restait l'essentiel ».

Magnifique petit roman, phrases courtes, incisives, recherche de l'essentiel, d'autant plus puissante que les mots sont choisis et chaque fois justes.
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Comme les soldats à la toute fin du texte, j'ai fermé doucement le livre non pas pour aller vers d'autres villages mais pour me remémorer toute cette histoire parfaitement inconnue de moi. L'écriture est très belle, elle embarque le lecteur dans la France de 1787, les navires Saint-Paul et Saint-Jean et le Viêt-Nam. On fait le plein d'humanité, de beauté et de simplicité. À lire sans hésiter.
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