Mon cher ennemi

Lapin et Renard : pas les meilleurs amis du monde ! Mais peut-être bien les meilleurs ennemis … Pour leur sixième album ensemble, Baum et Dedieu s'inscrivent dans deux grandes traditions : celle de la rivalité opposant les deux bestioles et celle du roman épistolaire.
Car les deux compères ont une vieille querelle à vider et un certain 14 février n'a pas été pour eux le jour des grandes déclarations sentimentales, mais celui d'un événement traumatisant. Et Lapin d'écrire à Renard pour lui demander des explications, tandis que celui-ci entreprend la rédaction de ses mémoires. Chacun y va donc de sa version des faits, à la lumière de ses souvenirs, de ce qu'il s'est raconté, de ce qu'on lui a raconté. Et cette joute épistolaire, d'injure en insulte, de calomnie en demi-vérité, d'arrogance en moquerie, va progressivement évoluer vers une version commune, une vérité réparatrice. Dans ce texte fort, il sera question de cruauté, de haine, de rivalité, mais aussi de solidarité, de compassion, de sincérité. Ce fameux 14 février restera un jour marquant, associé au sang et à la violence, mais leurs souvenirs confrontés les conduiront à une nouvelle version des faits où la nature profonde de chacun sera valorisée. La tension croissante entretenue par les échanges épistolaires se dénouera en une nouvelle amitié, fondée sur la vérité partagée et la sincérité des échanges autant que sur la solidarité face à un ennemi commun. Une fois n'est pas coutume, je laisse le dernier mot à l'un des protagonistes : « Les mots ne guérissent pas toujours, mais il est certain qu'ils soignent. Et dès lors que j'écris, je respire un peu mieux. Lapin, ces lettres m'ont sauvé. Merci. »

"Les mots ne guérissent pas toujours, mais il est certain qu'ils soignent". Les lettres qu'ils s'échangent avec ferveur sont le cataplasme, apaisant et rédempteur, que Gaspard Goupil et Jeannot Lapin ont choisi d'appliquer sur leurs plaies fraîchement rouvertes. Et si, pour la forme (ennemis jurés obligent ! ) ils s'agonissent d'abord d'injures et de sarcasmes bien sentis, dans le fond, ils ont surtout le besoin viscéral de partager.
Partager le souvenir d'un événement funeste.
Partager l'indicible vérité. Les torts et les responsabilités.
Partager enfin une réconfortante amitié. D'autant plus sincère, qu'elle non plus n'avait rien de prémédité.

Savoureux. Facétieux. Subtiles. Drôles. Piquants. Des épithètes qui s'appliquent indifféremment aux mots, aux illustrations et à tout ce qui fait le talent de Gilles Baum et Thierry Dedieu. L'autre duo d'acolytes de cet album insolite et tendre qui rend un bel hommage à l'amitié, aux mots et à leurs pouvoirs conjugués.

Mon cher ennemi est un très bel album écrit sous la forme d'une correspondance entre un lapin et un renard. Si les premières lettres sont plutôt courtoises, on comprend assez vite qu'un différend très important oppose ces deux-là et on assiste à l'éclatement de sentiments violents de part et d'autre : colère, ressentiment. Les deux compères sont fâchés suite à un incident survenu un 14 février. Sauf que chacun des deux se souvient d'une certaine façon de ce qui s'est passé ce jour-là et chacun en veut à l'autre, persuadé que c'est lui le fautif. Mais au fil des révélations, ils vont se rendre compte que l'autre n'est pas aussi coupable que ce qu'il pensait. C'est une histoire qui parle de tolérance, qui prône le dialogue et l'écoute de l'autre et surtout le pardon. Une très belle lecture pour petits et grands.

Voilà un album étonnant, et même étonnamment profond sur la mémoire traumatique et le pardon. Lapin et Renard s'échangent des lettres pour tenter de se rappeler un événement survenu le 14 février plusieurs années auparavant. Petit à petit, les pièces s'assemblent et le jour terrible se reconstitue. Mais savoir la vérité permet-elle de pardonner ? de se pardonner ?

Les illustrations aux couleurs tranchées et sans trait sont sublimes et apportent une profondeur supplémentaire (et parfois de l'humour) au texte.

Un album complexe pour les plus grands, à partir de 8-9 ans.

Un album pour les élèves d'élémentaire bien que les personnages (renard et lapin) soient enfantins.
Je pense que cet album est très intéressant à exploiter avec des CP / CE car il fait bien la passerelle entre la maternelle ( > histoires gentillettes de renard qui voudrait se bouloter un lapinou) et l'élémentaire (histoires avec plus de fond, de questionnements, de vocabulaire).
Par ailleurs la construction "épistolaire" de la narration ajoute un plus à l'album.