"The Willows" ou "Les Saules" est cette extraordinaire nouvelle fantastique publiée pour la première fois en 1907... Les premiers paragraphes, somptueux de pure poésie géographique, nous rappellent les plus belles pages de Julien GRACQ, celui des "Eaux étroites" (1976) décrivant les mouvements de feuilles des grands peupliers de l'Île Batailleuse sur sa chère Loire, face à Saint-Florent... sauf qu'il s'agit ici du Danube estival au début du XXème siècle... Fleuve sauvage... et constamment en crue... où les dizaines de milliers de saules nains forment une mer miroitante qui a l'habitude d'être submergée... Deux campeurs aguerris (le narrateur et son compagnon, dit "Le Suédois") se réfugient -- avec leur canoë et leurs deux pagaies -- sur un îlot immergé, couvert de sable, de galets, et de saules... Là où ils ne sont pas attendus... "Des intrus", donc... Tout d'abord, l'arrivée de quelques Signes... Oui, des "Intersignes", exactement comme dans les récits ethnographiques d'Anatole LE BRAZ ("La Légende de la mort chez les Bretons armoricains") ou dans son célèbtre roman, "Le Gardien du Feu"... Ce langage des Signes que l'on retrouvera encore dans les romans-poèmes les plus méconnus du Vaudois Charles-Ferdinand RAMUZ ("Le Règne de l'Esprit Malin", "Les Signes parmi nous") : ces Signes sont ici un cadavre flottant qui se révèle une otarie plongeant au fond de l'eau, puis un étrange Hongrois les hélant depuis une barque à fond plat qui file à toute vitesse, du côté du lointain rivage lui-même recouvert de saules... L'homme écartera lentement les bras dans le crépuscule, se signera puis disparaîtra : le Suédois comprendra que cet étrange Hongrois des brumes les a pris eux-mêmes pour... des fantômes ! La beauté, la sauvagerie, l'inquiétude, le chant du fleuve qui grossit, des bruits curieux, des chuchotements autour du fragile abri de toile, l'une des pagaies qui disparaît, le fond du canoë fendu (et la noyade assurée), l'inquiétude qui monte, d'étranges silhouttes brumeuses entraperçues dans les arbres, les provisions qui disparaissent, une myriade de trous autour de la tente, l'attente anxieuse du petit matin...
L'une des plus extraordinaires nouvelles extraite de ce recueil de sept contes, reflétant tout l'art anxiogène et animiste du grand Algernon BLACKWOOD (1869-1951), auteur anglais justement célèbre Outre-Manche. Humble auteur parfois qualifié de "Lovecraft anglais" dont trois autres recueils de nouvelles fantastiques ("Le Wendigo", "Migrations" et "Le Camp du Chien") ont également été traduits en français -- talentueusement par Jacques Parsons -- pour être publiés dans la légendaire collection "présence du futur" par l'éditeur Denoël...
[Ajoutons ici en appendice la reproduction du court -- et excellent -- article en langue anglaise du site "GoodReads" à propos de le nouvelle "THE WILLOWS" (1907) d'Algernon BLACKWOOD... ]
" Two friends are midway on a canoe trip down the Danube River. Throughout the story Blackwood personifies the surrounding environment — river, sun, wind — and imbues them with a powerful and ultimately threatening character. Most ominous are the masses of dense, desultory, menacing willows, which "moved of their own will as though alive, and they touched, by some incalculable method, my own keen sense of the horrible."
"The Willows" is one of Algernon Blackwood's best known short stories. American horror author H.P. Lovecraft considered it to be the finest supernatural tale in English literature. "The Willows" is an example of early modern horror and is connected within the literary tradition of weird fiction. "
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