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3,34

sur 256 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Une lecture agréable dont j'attendais malgré tout un peu plus de souffle.

Les protagonistes (acteurs, producteurs, metteur en scène, maquilleuses....) sont réunis à Brighton - station balnéaire - pour le tournage d'un film au titre énigmatique dont on sent tout de suite que ce ne sera pas le chef d'oeuvre du siècle. Nous sommes en 1968.

Le récit est construit autour de 3 personnages principaux "TRIO" qui ont tous une face cachée loin de celle qu'ils donnent à voir au public et à leurs relations.
Talbot Kydd, producteur, est peu convaincu par le film qu'il est en train de produire et est préoccupé par son homosexualité non assumée. Il mène une vie de convenance et de façade auprès de son épouse Naomie mais cette duplicité lui pèse de plus en plus.
Elfrida Wing l'épouse du metteur en scène dont le couple bat de l'aile, romancière à succès en panne d'inspiration depuis 10 ans et alcoolique. Elle boit en cachette pour oublier le manque d'inspiration et monte différents stratagèmes afin que son entourage ne s'aperçoive de rien. Elle a de nombreuses idées de titres de livres mais est incapable d'écrire une ligne.
Enfin, Anny Viklund, actrice à succès, en proie à une vie sentimentale chaotique, incapable de prendre des décisions, trouve refuge dans les médicaments en alternant ceux pour dormir et ceux pour se maintenir éveillée et est confrontée au retour de son ex mari en cavale accusé de terrorisme contre les Etats Unis.
Tout ce petit monde gravite dans la petite commune de Brighton pour le tournage du film.

Trois grandes parties compartimentent le récit : Duplicité, Capitulation et Évasion.

L'écriture de William Boyd est comme toujours très agréable, l'environnement du cinéma parfaitement décrit, avec ce qu'il faut d'égo, de diva, de comportements excentriques...
Les personnages ont chacun leur part d'ombre et William Boyd entremêle les mensonges des uns avec les exigences des autres.

Comment rassurer son éditeur et obtenir une avance alors qu'on ne peut écrire autre chose qu'un titre ?
Comment assumer son orientation sexuelle en 1968 lorsqu'on est sexagénaire dans un monde qui commence tout juste à se libérer ?
Comment prendre des décisions réfléchies alors qu'on est sous l'influence constant de psychotropes ?
Comment cacher ces fissures dans un univers fait de de strass et de paillettes où la réussite appelle la réussite et doit être le seul leitmotiv sous peine de disparaitre des écrans radars ?

Entre introspection et vie publique, chacun des membres du Trio vit de plus en plus mal la situation. Parviendront-ils à reprendre la maîtrise de leur vie, de leurs valeurs ? et à quel prix ?

La 1ère partie m'a semblé un peu longue et tarde à s'accélérer. Et même si à partir de Capitulation (2ème partie) le récit est plus soutenu et plus rythmé, je trouve que l'ensemble manque de peps.
Les dialogues sont savoureux, parfois caustiques, les réflexions intérieures des personnages sont acérées et donnent de la profondeur aux personnages.
Il m'a toutefois manqué un je ne sais quoi pour être totalement conquise.

Merci aux éditions du Seuil et à Babélio Opération Masse critique pour cette découverte.






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Trois destins s'entre-mêlent, celui d'un producteur de films, celui d'une jeune actrice et celui d'une écrivaine alcoolique, en mai 1968, à Brighton en Angleterre, sur les lieux du tournage d'un film.
J'ai trouvé le style plaisant, fluide, agréable à lire. Les personnages me sont devenus progressivement attachants. Mais j'ai été frustrée par l'alternance constante relativement rapide des trois points de vue, ne laissant pas assez de temps à mon goût pour accompagner le personnage et s'intéresser véritablement à son sort. de ce fait, cela m'a demandé du temps pour accrocher.
J'ai été quelque peu déçue également du degré très relatif de relations entre les trois personnages. Cependant, la trajectoire de chacun a un intérêt en soi.
Le tout ne manque pas d'humour, ce qui allège le propos et la réflexion sur la double-vie et l'accomplissement de soi.
J'ai trouvé intéressant le portrait complexe des métiers du cinéma.
Malgré un démarrage cahotant, une lecture assez sympathique au final. Merci à la Masse Critique Babelio et aux éditions Seuil pour l'envoi de cette oeuvre.
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A Brighton, en cet été de 1968, se tourne un film au titre digne d'un roman feelgood : L'Épatante Échelle pour la lune d'Emily Bracegirdle. Autour du plateau, gravite un trio qui a bien des choses à cacher : Elfrida Wing, la femme du réalisateur, noie son chagrin d'épouse trompée et ses angoisses de la page blanche à coups de gin et de vodka. Elle a connu un retentissant succès littéraire dix ans auparavant, conduisant les critiques à la surnommer « la nouvelle Virginia Woolf ». Oui mais depuis, la flamme de l'inspiration s'est éteinte…
Le producteur du film, Talbot Kydd, mène une vie conjugale morne car de façade ; il occupe une petite garçonnière où il se réfugie incognito pour faire de mystérieuses photos, soigneusement sous clé. Depuis que l'homosexualité n'est plus illégale il aimerait faire son coming out mais ne sait pas comment s'y prendre. Et il a fort à faire avec ce tournage où s'enchainent les embûches et les trahisons.
La starlette Amérique Anny Viklund, quant à elle, est une jeune beauté qui tombe facilement dans les bras d'hommes pas toujours triés sur le volet. Voilà qu'en plein tournage, son ancien mari en cavale lui demande de l'aide. Activiste terroriste, il est recherché par le FBI et la CIA ; Anny lui accorde son aide et se retrouve sous les projecteurs, des forces de l'ordre cette fois…
A partir de ces trois personnages très bien campés et attachants, chacun dans leur genre, William Boyd signe un scenario riche en rebondissements, surprises et chausse-trappes, mené avec un sacré sens du rythme. Chacun des personnages s'enfonce dans ses secrets jusqu'à un point de non-retour, habilement résolu pour chacun.
L'ambiance d'un plateau de tournage est très bien rendue, et le milieu de la production décrit sans concession.
William Boyd s'amuse beaucoup et le lecteur s'amuse avec lui : les situations sont parfois cocasses ; il cite avec humour titres et paroles tirées de la variété anglaise par exemple, bien ridicules sortis de leur contexte.
Une très bonne comédie dramatique, que je verrais bien mise en scène par Woody Allen.
Un grand merci à Babelio pour cette lecture, découverte grâce à une opération masse critique.
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La lecture du dernier roman de ce grand romancier anglais m'a été proposée dans le cadre d'une opération Masse Critique.

Brighton 1968.
On assiste au tournage d'un obscur fil au scenario fumeux.
Et au fil des chapitres s'égrènent les épisodes de vie de trois personnages autour de ce tournage.

Elfrida, l'épouse du réalisateur.
Ecrivaine en mal d'inspiration et trompée par son mari, qui noie son désarroi dans l'alcool.

Talbot, le producteur du film.
Il se débat entre aléas du tournage, caprices des acteurs et exigences de ses associés. En proie à un questionnement incessant sur son orientation sexuelle.

Et pour compléter ce trio, Anny, actrice américaine d'origine suédoise.
Vedette du film, elle jongle avec ses conquêtes masculines et est rattrapée de manière inquiétante par les actes graves de son ex-maris.

Tout ce beau monde survit dans cette comédie douce amère.

C'est subtil, profondément humain et drôle parfois.
Comme un vieux film d'un Woody Allen qui quitterait New York pour prendre l'accent British.

Merci Mr. Boyd. Un très bon livre!
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Je remercie chaleureusement Babelio et les éditions du Seuil pour cette lecture et leur confiance !
Nul besoin de présenter l'Anglais William Boyd, auteur de seize romans, de recueils de nouvelles, de pièces de théâtre mais aussi scénariste et réalisateur. Autant de rôles où il n'a pas son pareil pour nous divertir. Avec "Trio" son tout nouveau roman paru aux éditions du Seuil, il nous convoque à Brighton, une station balnéaire où se déroule, à l'été 1968, le tournage d'un film qui fait fi de l'état tumultueux du monde à ce moment là. Comme son titre l'indique, nous retrouvons trois personnages principaux, mais également trois parties dans cette histoire rocambolesque où il faut accepter de se laisser porter par le récit un brin tiré par les cheveux, mais totalement loufoque concocté par William Boyd. de l'humour, des situations cocasses, un parfum de nostalgie, la description d'un monde du cinéma et de ses tourments à une époque charnière de son histoire, tout cela dans un même roman et je dois dire que c'est plutôt réussi. C'est un roman sur les faux semblants, les mensonges, les doubles vies, les travestissements et les rôles que nous empruntons dans la vie professionnelle comme dans celle de l'intimité. La métaphore de l'acteur, de l'écrivain qui joue un rôle où invente une autre réalité qui sied mieux à son créateur que les affres de la vie au quotidien. C'est un roman léger, printanier, écrit avec finesse, sans aucune autre prétention que celle de nous divertir. On sent que Boyd a pris beaucoup de plaisir à l'écrire et à nous faire partager son univers fantasque. A ce titre, la traduction d'Isabelle Perrin est savoureuse, pleine d'esprit et elle restitue parfaitement cet humour décalé, ces personnages fissurés derrière leur apparente réussite. On retrouve donc dans cette histoire, ce trio, Talbot Kydd, le producteur qui doit affronter les tempêtes d'un tournage qui vire au fiasco : l'actrice principale fait faux bond, le casting est un immense gâchis avec certaines actrices comme cette extravagante Sylvia Slaye, aux mensurations plus vraiment en rapport avec son statut d'ex starlette, un scénario qui n'a de cesse d'être réécris, bref vous l'aurez compris pour ce pauvre Talbot ce n'est pas la joie. Nous retrouvons également avec plaisir Elfrida Wing, l'épouse du metteur en scène qui la trompe ouvertement tandis qu'elle cherche, se noyant dans l'alcool (la vodka, le gin tonic) depuis dix ans, l'inspiration pour son nouveau roman qui doit faire d'elle l'égale de Virginia Woolf, à qui tout le monde la compare. Tout du moins à ces débuts.. Elle cherche l'inspiration dans les derniers jours tragiques de la vie de la romancière si talentueuse et pourtant maudite qui se suicida en 1941. Enfin, Anny Viklund, une actrice américaine d'origine suédoise sublime mais qui a une vie amoureuse des plus compliquées. Elle sort avec Jacques un philosophe français, mais aussi Troy, l'acteur principal et amant passionné et son ex-mari. Ce dernier est poursuivi par la CIA après avoir commis trois attentats sur le sol américain qui eurent pour effet de rendre un pauvre soldat cul de jatte.. Vous l'avez compris, William Boyd ne se prend pas au sérieux et nous divertis durant un peu plus de quatre cents pages. Mission réussie, que demander de plus à un romancier.

Lien : https://thedude524.com/2021/..
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Comment réussir sa sortie? Une question que peu de personnes se posent. La grande majorité se contente d'attendre que leur vie se déroule. À sa manière, chacun des trois personnages de Trio va choisir une nouvelle voie. Leur but: quitter un quotidien devenu pesant, bien qu'il puisse nous paraître enviable.

Anny est une actrice en vogue. Elfrida est cataloguée comme "la nouvelle Virginia Woolf". Talbot roule en Alvis, il se dit qu'il a tout pour être heureux: de l'argent, la santé, des enfants qui ont réussi... mais pourtant, quelque chose le tracasse, il ne sait quoi.

Chacun d'eux a quelque chose à dissimuler. Son homosexualité. Un penchant déraisonnable pour l'alcool. La panne totale d'idées pour démarrer un nouveau livre. le refus de rencontrer les voisins. L'incapacité à comprendre ses propres enfants. le dégoût du smalltalk, cette convention qui nous oblige à parler en société de tout et surtout de rien. Les autres sont ils fréquentables? Échanger des platitudes, supporter leurs manies, leur corps avachis? Faire semblant de s'intéresser à eux? Comme le dit l'un des personnages, "si tu te rappelles du nom des gens et de ce qu'ils font dans la vie, ils te considèrent comme un demi-dieu".

Le contexte soixante-huitard, contrairement à ce qu'évoque la quatrième de couv', n'est pas le sujet principal ici, et l'histoire m'a semblé totalement contemporaine. le style est simple, direct, accessible, avec les habituelles petites piques de Boyd envers la société britannique. Exemple: "Jacques avait une personnalité originale, comme s'il aimait provoquer et éprouver méfiance et mépris envers tous ceux qu'ils rencontrait. Sauf que cette attitude était générée par la confiance en soi, par la réussite et non par la susceptibilité, cette maladie anglaise débilitante".

La description du milieu du cinéma, avec Talbot en producteur allant de crise en crise, est assez réjouissante, même si elle est parfois un peu attendue. Jubilatoires sont les différentes versions de la première page du roman qu'Elfrida n'arrive pas à écrire. Un livre à la fois divertissant et qui donne à réfléchir. Peut-être pas le meilleur de Boyd, mais il tient bien la route.

Tout est dérisoire, et la seule question qui vaille est celle que pose Camus, cité en exergue: juger si la vie vaut la peine d'être vécue... ou pas.
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Je suis toujours contente de lire de nouveaux livres et de sortir de mes sentiers battus (plus policiers ou thrillers), et je remercie Babelio pour cette opportunité. Néanmoins, on nous promettait là un récit tendre et jubilatoire dans une ambiance sixtie's débridée, ... mouais, pas convaincue...
Ainsi donc à Brighton, 1968, on tourne un petit film au nom à rallonge "L'Épatante Échelle pour la lune d'Emily Bracegirdle." L'occasion pour 3 personnages de se croiser :
- Talbot Kydd, le producteur, sémillant sexagénaire, à la naïveté touchante qui gère sa vie professionnelle et personnelle en se voilant tout autant la face. Bonne pâte, il accepte les caprices de tournage et les magouilles de son associé et préfère ignorer son homosexualité quitte à être malheureux.
- Elfrida Wing, la femme du réalisateur (un vrai coureur de jupons), une ancienne auteure à succès, noie, depuis 10 ans, dans l'alcool la page blanche de l'écrivain.
- Quant à Anny Viklund, c'est une belle et jeune actrice, à la carrière prometteuse mais à la vie personnelle chaotique. Toujours dans un brouillard médicamenteux elle multiplie les relations toxiques et l'arrivée de son ex-mari, un terroriste en fuite, ne va pas arranger ses affaires.
3 destins singuliers mêlés dans une histoire quelque peu rocambolesque. C'est distrayant et ça se lit bien mais je n'ai pas été plus séduite que cela. Si le personnages de Talbot m'a touché, il est attachant et finalement déterminé sur la fin, ceux des 2 femmes m'ont vraiment paru caricaturaux. On a la pochtronne en goguette et l'actrice écervelée incapable de saisir un bonheur simple qui lui tend les bras (sans parler de la fin qui frôle le n'importe quoi).
J'ai lu ce roman sans difficultés mais il ne restera pas dans mes annales...
Petit aparté qui m'a divertie: je ne m'attendais pas à avoir dans un livre d'une plume anglaise, l'aéroport de ma commune ni à une escapade au Cap Ferret dans ses moindres recoins.
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Si l'on excepte la lecture ultra rapide d'un petit opuscule de nouvelles ferroviaires, mes sept derniers livres lus appartiennent tous au grand genre littéraire du roman policier dans sa globalité, qu'il soit noir, classique ou encore de mystère. Aussi quand Pierre Krause, de Babelio, que je remercie ici chaleureusement ainsi que les Editions du Seuil, m'a proposé de lire et commenter Trio de William Boyd dans le cadre d'une masse critique, j'ai sauté sur la double occasion de sortir de mon style de prédilection et de découvrir un auteur que je ne connaissais pas.

A la fin des années 60, dans la charmante station balnéaire de Brighton, une équipe de cinéma britannique tourne un film au titre improbable de "l'Epatante Echelle pour la Lune d'Emily Bracegirdle". Nous y retrouvons les trois personnages principaux de Trio : Talbot Kydd, le producteur, Anny Viklund la jeune vedette américaine et Elfrida Wing, romancière en panne d'inspiration et épouse du metteur en scène. le premier est stressé par tous les problèmes, petits et grands, matériels et humains, à résoudre sur le tournage d'un film mais surtout, derrière la normalité de façade d'une vie de famille tranquille avec femme et enfants, il a de plus en plus de mal à refouler son homosexualité ; la deuxième, actrice adulée dans son pays natal est accro aux médiacaments et se débat entre un ex-mari terroriste recherché par le FBI et ses deux amants, un philosophe français et la vedette masculine du film, un jeune chanteur anglais ; la troisième noie dans un alcoolisme mondain le syndrome de la page blanche dont elle souffre depuis dix ans et la tristesse d'une vie conjugale avec un époux volage. Tous les trois, au cours de cet été 1968, véritable période charnière dans le monde avec les évènements de mai en France, l'opposition grandissante à la guerre du Vietnam et les tensions raciales aux Etats-Unis, la fin du Printemps de Prague et la libération sexuelle, vont vivre des situations qui vont les conduire à prendre des décisions qui bouleverseront leurs vies.

L'auteur nous propose avec son dernier roman une triple histoire avec des personnages attachants qui se débattent dans des vies tourmentées en ayant du mal à être eux-mêmes dans un monde en transformation mais dans lequel le "moi public" prend trop souvent le pas sur le "moi privé". Même si William Boyd s'appuie sur son expérience de réalisateur et de scénariste pour décrire avec justesse et précision le milieu du cinéma et développe dans un style agréable à lire, entre humour et ironie, les sentiments de ses héros, l'ensemble manque un peu de rythme malgré le découpage de l'oeuvre en trois parties d'inégales longueurs qui pourrait faire penser à une accélération vers un dénouement qui laisse le lecteur un peu sur sa faim. En ce sens je préfère un Jonathan Coe et surtout un Nick Hornby, deux auteurs dans la mouvance desquels se situe Boyd. Ceci dit la découverte de cet auteur reste néanmoins plaisante et je ne manquerai pas, grâce aux critiques des Babeliotes, de me renseigner sur ses autres livres pour dépasser ce bémol qui m'empêche de mettre quatre étoiles.
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A l'été 1968, loin des explosions qui secouent le monde, une équipe de cinéma tourne dans la station balnéaire de Brighton. Entre complications et manigances en tout genre, le producteur sexagénaire Talbot Kydd ressent d'autant plus de lassitude, qu'à ses soucis professionnels s'ajoute le secret de plus en plus pesant de son homosexualité. La jeune actrice principale Anny Viklund, aux prises avec une vie sentimentale agitée, se retrouve compromise par son ex-mari, terroriste en cavale. Quant à la femme du metteur en scène, Elfrida Wing, c'est dans l'alcool qu'elle noie ses blessures d'épouse délaissée et ses affres de la page blanche, elle que l'inspiration a désertée depuis ses premiers succès littéraires.


Lui-même scénariste et réalisateur, c'est en connaissance de cause que l'auteur évoque le milieu du cinéma et de la création littéraire, ses paillettes et ses turpitudes, dans une restitution savoureuse, ironique et désabusée. Dans ce royaume du faux-semblant où les egos s'épandent sans limites et où fleurissent intrigues et coups bas, les trois personnages principaux ont en commun la traversée d'une profonde crise existentielle. Douloureusement, chacun prend peu à peu conscience du schisme qui a grandi entre leur « moi public » et leur « moi privé », les amenant au sacrifice de leurs valeurs et de leurs aspirations les plus profondes. Sauront-ils retrouver la maîtrise de leur existence, ou dériveront-ils inexorablement vers quelque conclusion tragique ? La fiction dévorera-t-elle la réalité, ou Talbot, Anny et Elfrida réussiront-ils à se préserver ?


Si l'histoire, adroitement rédigée et pavée de détails aux terribles accents de vérité, témoigne d'un oeil aiguisé et d'une plume de qualité, sa lecture m'a toutefois semblé manquer d'un soupçon de souffle et de rythme. Partagé entre les histoires concomitantes de son trio de personnages, le récit s'achemine vers son dénouement sans réelle montée en puissance, faisant piaffer le lecteur par son pas globalement si égal et tranquille qu'il finit par retenir ses effets, tant comiques que dramatiques.


Malgré son relatif manque de pep, ce roman satirique demeure une lecture agréable, dont on retiendra l'intelligente et piquante peinture de ce dangereux miroir aux alouettes que représente la célébrité. A se confondre avec leur personnage public, tant s'y seront perdus, corps et âmes…


Un grand merci à Babelio et aux Editions du Seuil pour cette masse critique privilégiée.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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William Boyd : à priori, j'étais moyennement enthousiaste sur la perspective de lire un de ces romans. Je ne sais d'ailleurs pas pourquoi, j'avais cet à priori, surtout moi, qui adore la littérature anglo-saxonne, mais je ressentais l'auteur comme un homme écrivant pour les hommes (oui, je sais, c'est sexiste, mais je n'y peux rien). Néanmoins, à l'occasion d'une masse critique (j'en remercie Babelio et les éditions du Seuil), je me suis immergée dans le dernier opus de William Boyd, "Trio" et j'ai passé un excellent moment.
La couverture est très visuelle une coccinelle Volkswagen rouge d'où émerge deux jambes gainées d'un collant rouge et de ballerines de même couleur, le tout se détachant sur un fonds bleu turquoise (qui n'évoque pas spontanément la Manche à Brighton).
Le texte se lit vite et très vivant, dynamique, drôle. On sent que Boyd connaît bien cet étrange milieu qu'est le cinéma et la mise en scène.
Le trio est ici composé de deux femmes et d'un homme, parmi un grand nombre d'autres d'individus qui gravitent autour d'un film en cours de réalisation "L'épatante échelle pour la lune d'Emily Bracegirdle" (j'adore ce genre de titre de film qui prend toute la place sur l'affiche).
Nous sommes l'été 1968 dans la folklorique station balnéaire de Brighton. En France, il y a eu les événements de mai 1968 (une nouvelle révolution française !), mais le petit monde du cinéma tourne toujours autour de lui même. Nous rencontrons Anny Viklund, jeune actrice vedette qui comme son nom ne l'indique pas, est américaine. Elle est belle, sort d'un divorce avec un "terroriste", Cornel Weekes, a une "relation" avec un intellectuel français répondant au nom de Jacques Soldat, tout en ayant une liaison avec son partenaire dans le film, Troy Blaze, jeune et sympathique chanteur à la sexualité épanouie.
Il y a aussi Jennifer Tipton, nom de plume : Elfrida Wing, écrivain propulsé la "nouvelle Virginia Woolf" depuis une décennie et qui noie sa panne d'inspiration dans l'alcool. Son mari, Reggie Tipton réalisateur, la trompe comme d'habitude cette fois ci avec une romancière, plus jeune, plus inventive, Janet Headstone.
Nous croisons le producteur du film Talbot Kydd, un gentleman à l'ancienne, costume impeccable, une épouse directrice d'école, Naomi, deux enfants adultes, Humphrey (joueur de timbales) et Zoé, avec lesquels il n'échange plus beaucoup et une homosexualité réprimée qui vient tout juste de ne plus être reconnue comme un "crime" en Angleterre à l'époque.
Les multiples rebondissements du roman (dont un film porno, la CIA, les entourloupes entre "amis") et de la réalisation du film se déroulent en parallèle comme si la vraie vie s'invitait dans la "fausse vie" du film
Le roman se divise évidemment en 3 parties : Duplicité, capitulation et Evasion. Les noms des personnages sont tous à double sens ou presque : traduit en français, ils rajoutent du comique au texte qui aborde des sujets très sérieux : l'homosexualité, l'alcoolisme, la drogue, l'engagement politique. J'ai pensé à Jean Seberg et son engagement avec les Black Panthers, au livre de Frantz Fanon "Peau noire, masques blancs", aux acteurs "shakespeariens" John Gieguld, Alec Guiness et Richard Burton. Ce roman a eu une résonance étonnante pour moi, car je suis en train de lire "le journal d'un écrivain" de Virginia Woolf qui vient d'être réédité en livre de poche et même si j'ai du mal avec les romans de l'auteur, je suis toujours touchée par son histoire.
L'histoire de Trio, elle, finit dans un couvent, ne me demandez comment, lisez le livre : vous ne serez pas déçus !
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