Plutôt que les films décevant (Bob Rafelson en dépit des visions nocturnes et polluantes qu'a pu inspirer Jessica Lange allongée sur la table de la cuisine) ou réussi mais forcément bridé (Tay garnett avec la divine Lana Turner) pour ne parler que des versions les plus marquantes...pourquoi ne pas revenir aux fondamentaux : le roman de
James M. Cain.
Il faut quand même imaginer le choc quand paraît ce livre en 1934.
Car c'est un pur concentré de sexe moite et débridé et de violence.
L'histoire est devenue archi-connue : Franck Chambers est un routard (un vagabond, quoi) qui sur la route de San Francisco, s'arrête à la "Taverne des Chênes-Jumeaux", une gargote/ station service tenue par un Grec, Nick Papadakis, qui décide d'embaucher ce sans-le sou.
Franck rencontre alors la femme de Nick, Cora. "Son corps mis à part, elle n'est pas "d'une beauté folle" mais la rencontre des deux jeunes gens va déclencher une passion charnelle irrépressible qui va les conduire au meilleur d'abord, au pire ensuite.
C'est l'histoire brute, sans considération psychologique démesurée, de deux êtres qui n'ont rien en commun (Cora et ses rêves déçus aspire au fond à une vie établie et veut simplement devenir quelqu'un, tandis que Franck, lui, brûle de reprendre la route), mais qui ne peuvent résister à leur attirance physique l'un vers l'autre.
Et de fait, le récit fait rapidement monter la température. A propos de la blouse de cuisine de Cora : "elle était un peu froissée et souillée. Je sentais l'odeur de la femme" ou de leur premier contact physique : "Mords-moi ! Mords-moi ! je l'ai mordue. J'ai planté mes dents si fort dans ses lèvres que j'ai senti le sang gicler dans ma bouche" (sans parler de la mammophilie résurgente tout au long du livre).
Le sexe et le sang, l'amour vécu comme un affrontement permanent qui ne peut conduire qu'au désastre : un grand livre, rude comme un coup de poing ou de trique. le genre de polar dont devrait s'inspirer tant d'écrivains aujourd'hui dont le style chantourné peine à cacher la pauvreté du matériau. Là, le style est simple et cohérent puisque c'est Franck qui rapporte les faits.
On ne dira jamais assez le traumatisme lié à la rationalisation. Aujourd'hui avec la suppression du 2ème passage du facteur, c'est un pan de notre imaginaire qui s'est enfui. Des coups à voter
Besancenot !