« Qu'on n'en parle plus ». Ce sont les derniers mots de ce roman et je les fais miens bien volontiers pour parler de ce monument de la littérature française !
Que ma lecture fut laborieuse... Nous suivons les déambulations de Ferdinand : dans la guerre, dans ses amours, aux colonies africaines, aux États-Unis, en tant que médecin en région parisienne et pour finir dans un asile de fous.
Vous vous demandez comment ces vies peuvent n'en faire qu'une seule ? Moi aussi. J'ai eu du mal à raccrocher les wagons à de nombreuses reprises ; je lisais avec fluidité plusieurs pages et puis pof ! je perdais le fil.
Ça blablate quand même beaucoup pour ne pas dire grand-chose, avec de grands discours ponctués de points de suspension.
Je suis sans doute passée à côté. J'ai lu et apprécié les petits traits provocateurs et quelques critiques de la société de l'époque. J'ai plutôt aimé l'écriture, sans que ce soit une Révélation, ce mélange de beaux mots et d'argot. Mais rien de plus.
Pourquoi je suis allée jusqu'au bout ? Déjà parce que je veux le lire depuis longtemps, sans avoir osé jusque-là (monument littéraire « intellectuel » + personnage de l'auteur). Ensuite parce que tout de même, j'ai lu pas mal de passages avec plaisir, au milieu de tous les autres inaudibles, donc ça me relançait !
Bref, je l'ai fini. « Qu'on n'en parle plus » ; j'ai déjà d'autres lectures en ligne de mire !
Commenter  J’apprécie         80
J'ai lu ce livre deux fois, à une vingtaine d'années d'intervalle. Lors de la première lecture, j'avais assez peu lu préalablement et l'impression que me fit ce livre s'apparente à l'effet d'une bombe. Je me souviens avoir été particulièrement enthousiasmé par le début du roman. J'ai également le souvenir que mon plaisir avait un peu décru vers la fin.
Eh bien, malgré les années écoulées et les nombreux livres que j'ai lu depuis lors, mes impressions sont assez similaires, avec l'admirable surprise en moins car je savais exactement à quoi m'attendre.
En effet, les trois premiers épisodes étaient, sont et resteront un must, je pense, pour les siècles à venir. Je vais même essayer d'être résolument plus précis par ce que j'entends par les " trois premiers épisodes ". Les chapitres du livre ne sont pas numérotés, ce qui n'est pas très pratique pour en parler, mais si l'on accepte de prendre un crayon à papier et de combler cette lacune, on comptera 45 chapitres.
Le premier épisode, qui s'étend sur les chapitres 2, 3 & 4 concerne les réalités concrètes du front lors du début de la guerre de 1914. Le deuxième épisode court sur les chapitres 11, 12 & 13 et concerne une colonie imaginaire et composite d'Afrique sub-saharienne. Enfin le troisième épisode touche à, ce que j'appelle de façon simpliste, l'Amérique avec les chapitres 15, 16 et 17 dédiés à New-York puis le chapitre 19 à Détroit.
Entre ces trois épisodes on trouve des transitions plus ou moins longues, l'un d'elle, assez longue correspondant à la vie sur l'arrière pendant la Première guerre mondiale. Mais dès le chapitre 20 et jusqu'à la fin, excepté un bref intermède à Toulouse au chapitre 35, tout le reste n'est qu'un seul et même épisode, ayant lieu en proche banlieue parisienne et s'étalant sur une dizaine d'années (un peu plus, un peu moins, on ne sait pas trop).
Or, quand je parle un peu autour de moi, je m'aperçois que tous ou presque, parmi ceux qui ont apprécié le roman, gardent un souvenir ému des trois fameux premiers épisodes et que peu me parlent de la suite. (L'explosion du clapier à lapin, le meurtre de la vieille, les affaires de cœur de Robinson, etc.) Peut-être est-ce justement dû au fait que l'auteur a fait un effort de concision, de symbolisation plus marqué pour ces épisodes qui correspondaient à une réalité vécue par lui depuis plus longtemps.
Tandis que l'autre, la banlieue, il la vivait encore lors de l'écriture et ça se sent, ça se vit, ça s'éprouve… On sent le marasme, le gris, la noirceur, la suffocation du quotidien, plein la figure à longueur de pages. Peut-être a-t-il moins condensé cette partie, peut-être aurait-il dû, qui sait ? Certainement pas moi, car qui suis-je pour donner à Céline des conseils d'amélioration pour son oeuvre ?
Non, loin de moi tout cela, je ne fais que constater les effets de l'oeuvre sur ma jouissance de lecture et je constate qu'elle est superbe et maximale pour les trois épisodes en question et qu'elle a parfois décliné dans le dernier quart du roman. C'est tout, rien de plus.
Toutefois, j'ai pu interpréter un peu mieux mon ressenti en lisant l'essai (assez ardu à lire, j'en conviens mais très intéressant) de Mikhaïl Bakhtine qui s'intitule Esthétique de la création verbale. Dans cet essai, le critique analyse le rapport de l'auteur à son héros et cela m'a permis de comprendre ce qui me plaisait moins dans la fin de roman et qui me semble différent dans les fameux trois épisodes.
Le personnage de Robinson, qui devient prépondérant justement dans cette fin de roman m'apparaît être une béquille maladroite. Il n'a aucune épaisseur, ce n'est qu'un dédoublement de Bardamu ayant pour unique fonction de permettre à Bardamu de continuer d'exprimer son jugement. Je dirais même que tout est un dédoublement de Bardamu dans la longue partie parisienne.
On voit Bardamu, on entend Bardamu, on parle Bardamu, on perçoit Bardamu et à propos de quoi ? de Robinson, qui n'est autre qu'une image affadie de Bardamu dans un miroir. Bardamu devient le castelet dans lequel les pantins jouent leurs scènes, or de pantins il n'y en a qu'un, et c'est Robinson. D'où mon manque d'intérêt dans cette partie.
Dans les trois épisodes sus-mentionnés, c'est Bardamu le pantin qui s'agite dans un décor donné et là c'est intéressant, captivant, même. Je pense que Céline s'est un peu trompé sur ce qui faisait son succès. Il pensait que c'était son style et je suis le premier à admettre que son style est exceptionnel, mais il n'y a pas que cela : la preuve, lorsqu'il a poussé son style jusqu'à l'outrance, les livres suivants n'ont pas eu le succès escompté.
Je pense même que s'il n'y avait pas eu ces trois fameux épisodes, le Voyage au bout de la nuit n'aurait pas du tout connu le retentissement que l'on connaît, style Céline ou pas style Céline. Je pense aussi que ce qui est particulièrement plaisant dans le Voyage et qui l'est moins dans les autres romans de l'auteur, c'est justement l'alternance, le mélange entre le style pur Céline et le style " ordinaire ", qui rend l'ensemble digeste.
En somme, Céline, c'est un peu comme ces alcools surpuissants qui gagnent à être coupés pour être savourés pleinement. J'ai le sentiment que ces deux éléments : le coupage nécessaire du style, et le placement de l'auteur-héros dans un véritable castelet et non être lui-même le castelet explique le relatif échec de ses livres ultérieurs.
Je remercie Bakhtine de m'avoir permis de comprendre ça. Donc, un livre que je trouve inégal, tout bonnement exceptionnel dans les trois premiers épisodes (disons du début au chapitre 19) carrément inégalé à ce jour selon moi, mais très inférieur dans la suite, non pas quant au style, qui reste le même, mais quant à la construction romanesque et à la place que s'attribue l'auteur-héros dans la narration et qui me paraît plus carencée, littérairement parlant.
En tout cas, une expérience littéraire que je conseille à quiconque d'effectuer. J'ai volontairement écarté le sujet très polémique de la personnalité et des engagements politiques de Céline qui, si j'en crois Proust dans son célèbre Contre Sainte-Beuve, n'ont pas vraiment lieu d'être dans une critique littéraire. Je ne suis pas là pour juger Céline car je pense n'en avoir ni les capacités, ni la licence, ni même l'ensemble des éléments du dossier qui me permettraient de m'en faire une opinion objective. Un livre par contre, j'arrive plus ou moins à en dire ce que j'en pense.
Commenter  J’apprécie         80
La danse macabre de Ferdinand et Robinson. Atrocement sublime.
Commenter  J’apprécie         80
J'ai commencé à le lire il y a environ vingt ans. Et je ne l'ai jamais terminé.
D'une part, parce que séparer l'oeuvre de l'auteur, c'est comme séparer le goût de la texture.
Je n'approuve pas les idées de ce monsieur. Par conséquent, je n'approuve pas son oeuvre.
MAIS, comme j'étais jeune et naive en ce temps là, j'ai quand même essayé de poursuivre ma lecture, pensant que bon, quitte à lire un truc, autant lire un "classique".
Alors, la question est : en quoi est-ce un classique ?
J'ai pas compris.
Non, mais, vraiment... j'aimerai qu'on m'explique. Parce qu'à part des injures et un langage inutilement violent en continu, qu'est ce qu'on peut en dire ?
J'étais sans doute trop jeune pour comprendre quoi que ce soit mais même, je n'en ai absolument pas saisi le fil conducteur.
Il ne m'en reste qu'un vague sentiment dégoûté, écoeuré et franchement, je ne le relirais pas même s'il était le seul roman disponible au monde.
Me frapper les neurones pour le plaisir de la douleur, ça ne m'intéresse pas.
Commenter  J’apprécie         83