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Critiques filtrées sur 4 étoiles  
L'enterrement d'un père à Belgrade fait revenir un homme d'Argentine, revoir un ami, retrouver des lieux de conflit.
Une correspondance timide s'établit ensuite, qui reprend une vieille amitié de jeunes combattants, exhume la peur enfouie et les difficiles souvenirs des guerres de Yougoslavie.
Les lettres s'allongent, introspectives, laissant entrevoir un drame suggéré à demi mots. Une maison, trois soldats, une femme...
Honte et culpabilité libèrent la parole pour mettre un point d'orgue à une exaction dont ils portent le poids.

Refermant ce roman épistolaire écrit à quatre mains par deux auteurs à l'univers littéraire assez proche dans le ton minimaliste, une question s'impose: quel personnage correspond à quel auteur?
le style est si fluide et équilibré que je n'ai pas de réponse. Ce doit être le reflet d'une complicité en amitié et en écriture car c'est une réussite.

Tragédie de la guerre, histoire d'amitié: tout est dit avec pudeur en moins de cent pages.
Toujours impeccables, chers auteurs!
Et toujours le plaisir en mains des Editions de la Fosse au Ours à la jaquette épurée.
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Un aveu: j'étais fâchée depuis le lycée avec le roman épistolaire à cause de Montesquieu qui aura gaché une bonne partie des mercredis après-midi de mes 16 ans, passés dans la douloureuse étude de ses satanées lettres persanes, ce que 25 ans plus tard je ne pardonnais toujours pas. Mais ma crise d'adolescence arrivant quasiment à son terme (j'aime prendre mon temps), j'ai décidé de renouer avec le genre grâce à deux grands auteurs, Choplin et Mingarelli. Roman de moins de 100 pages et contemporain, la prise de risque comme choix de lecture me semblait acceptable. Et banco, j'ai accroché.

Cette correspondance fictive entre deux amis d'enfance renouant le contact après s'être perdus de vue une quinzaine d'années est très aboutie, malgré une idée de départ peu séduisante. Car à bien y réfléchir, que vont se raconter deux copains qui mérite d'en faire le récit? Quitte ou double, ça peut être très vite casse-pieds ce genre d'échange.

Au début on lit en effet les banalités d'usage des retrouvailles: je suis trop content de te retrouver ; ouais moi aussi ; ben moi je travaille dans une scierie ; ah c'est chouette moi je suis dans un bureau en musicologie, etc... 
Puis finalement après avoir fait le tour des politesses, le sujet de conversation qui s'impose entre anciens potes est évidemment les souvenirs du passé. Mais Pavle et Jovan, nos deux protagonistes, malgré cette apparente légèreté de ton du début, ne vont pas nous raconter leurs souvenirs de vacances ou de virées en boîtes (ouf). Non car eux partagent un lourd passé: ils ont participé à la guerre en ex-Yougoslavie 15 ans plus tôt et sont liés à jamais par un évènement tragique dont ils sont les seuls témoins.
Tous deux avouent d'abord du bout de la plume puis plus ouvertement leurs difficultés à la fois à se souvenir et à oublier cet épisode qui les bouleverse toujours. Les faits sont présents mais flous, chacun connait sa vérité et la confronte à celle de l'autre, cherchant à réveiller cette mémoire et faire éclore la vérité pour mieux affronter ses propres souvenirs.

Témoin de cet échange épistolaire sur une période d'un an, on assiste semaine après semaine à l'évolution des confidences, des plus superflues aux confessions les plus intimes. L'écriture leur permet alors de se mettre à nu, de se confronter à la confusion de leurs sentiments, entre colère et culpabilité, et de mettre enfin des mots sur l'ineffable. Mais leur correspondance leur permettra aussi de prendre la mesure de l'inutilité des mots pour guérir certaines souffrances.
Une brillante réussite pour une brillante association d'auteurs. 

Une promesse maintenant: Montesquieu tu pourras donc remercier Choplin et Mingarelli car grâce à eux, je reviendrai vers toi pour te laisser une deuxième chance. Mais t'emballes pas, uniquement quand j'aurai vraiment fini de grandir, là je boude encore un peu avant.
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« L'Incendie » est un roman épistolaire à quatre mains et à deux voix, celles d' Antoine Choplin et Hubert Mingarelli.
Jovan et Pavle, deux amis d'enfance, évoquent leurs récentes retrouvailles au terme d'une longue séparation. Après quelques banalités qui retardent le moment de se parler vraiment, ils reviennent sur la nuit où les flammes ont envahi le ciel noir, sur la petite maison qui semble maintenant s'enfoncer dans la forêt, sur cet événement avec lequel ils se sont « arrangés » jusque-là pour essayer de vivre, mais qu'ils ne peuvent oublier. En mettant des mots sur cette blessure, en révélant leurs secrets, en tentant de partager leurs culpabilités, ils mettent en péril leur fragile équilibre, avec l'espoir qu'enfin le passé cesse de les hanter.
Avec une économie de mots qui donne d'autant plus de poids aux non-dits, Antoine Choplin et Hubert Mingarelli signent un roman épuré et pudique sur la culpabilité.
Un grand bonheur de lecture.
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Dans mes lectures préférées de l'an dernier figurent "La nuit tombée" d'Antoine Choplin et "Un repas en hiver" d'Hubert Mingarelli, alors quand j'ai appris qu'ils avaient écrit un roman à quatre mains, je ne pouvais pas le manquer.

Je ne sais pas qui a écrit quoi et ça n'a pas d'importance, la réussite est totale. C'est un roman épistolaire, un échange de lettres entre deux hommes qui se sont revus récemment, après une longue éclipse. Pavle vit à Belgrade, Jovan en Argentine. L'histoire se dévoile peu à peu à travers leur échange. Les deux hommes ont combattu en ex-Yougoslavie et doivent vivre avec de lourds secrets.

Ils nous sont révélés au fil des lettres ; il y a d'abord des demi-vérités, des demi-mensonges, un pas en avant, deux en arrière, des allusions, chacun ignore ce que l'autre a fait ou dit exactement. Des images reviennent sans cesse, leur ami Branimir, un incendie, une maison isolée et habitée. Je n'en dis pas plus.

Grand roman sur la culpabilité, les circonstances qui transforme un homme en prédateur et la difficulté de vivre avec, après. Sur une amitié qui ne veut pas mourir aussi. L'écriture sobre va droit à l'essentiel. Une lecture indispensable.

Lien : http://legoutdeslivres.canal..
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Une nouvelle de 80 pages écrite à 4 mains sous format épistolaire mais sans qu'on puisse distinguer deux écritures (mon petit bémol mais la similitude des voix des personnages - leur différence est plus dans ce qui est raconté - sert aussi le propos, et puis peu importe qui a écrit quoi du moment que le résultat est bon). Une nouvelle de 80 pages qui prouve que la force des mots ne dépend pas de leur nombre, même si on peut avoir envie d'en savoir plus sur les personnages. Une nouvelle de 80 pages qui aborde la guerre par le biais de la petite histoire, celle qui fait que deux jeunes amis qui aimaient lire ensemble portent le poids des actes enfermés dans le non-dit.
Il me reste à continuer l'exploration de l'oeuvre d'Antoine Choplin (après le héron de Guernica et La nuit tombée) et à découvrir celle de Hubert Mingarelli.
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N°900– Mai 2015

L'INCENDIEAntoine Choplin Hubert Mingarelli – La Fosse aux ours.

Deux hommes qui se sont connus dans le passé et qui se sont revus à l'occasion de l'enterrement du père de l'un d'eux entament une correspondance. Jovan habite Belgrade et travaille aux archives d'un institut de musicologie et Pavle habite un port de l'Argentine et travaille dans une scierie. La cérémonie passée, ils décident d'entreprendre une correspondance. C'est à cet échange épistolaire qu'est convié le lecteur.

Au commencement, les lettres sont brèves, presque timides mais rapidement ce qui pouvait passer pour une correspondance de circonstances qui n'avait aucune chance de perdurer bien longtemps, s'étoffe, les lettres s'allongent et évoquent des souvenirs précis du conflit en ex-Yougoslavie auquel ils ont ensemble participé. Pourtant elles sont écrites avec une grande économie de mots, comme si ce qui motivait réellement cette correspondance devait cependant rester secret. On y apprend l'existence d'une maison désormais en ruines à Ostrovo, la présence d'un troisième soldat, Branimir, et d'une femme, l'occupante de cette maison. Dès lors le lecteur entre de plain-pied dans les souvenirs, mais ils resurgissent presque malgré soi et on aurait bien voulu les oublier à jamais au point que leur simple évocation suffit à interrompre momentanément cet échange, tant le malaise qu'ils ont réveillé est grand. C'est un peu comme si Jovan voulait se débarrasser de « ses sales pensées » en les écrivant à son ami par dessus l'océan, mais elles s'incrustent malgré sa volonté de parler d'autre chose.

Cette correspondance est assez étrange. Non seulement elle évoque un souvenir que nos deux épistoliers auraient voulu oublier, mais c'est un peu comme s'ils souhaitaient se faire mal ou remuer avec cependant un certain courage les vieux démons et, par ce biais, obtenir une forme de rédemption, cette correspondance n'étant pas autre chose qu'une véritable confession. L'absolution devait sans doute venir de cette évocation elle-même et de la réponse de l'autre, de sa compréhension, de son acquiescement, ou peut-être du chemin fait à moitié par chacun d'eux ? Cette volonté de revivre le passé en évitant de voir le monde non comme il est mais comme on voudrait qu'il soit, de pratiquer face aux difficultés la politique de l'autruche, l'envie que tout cela n'ait été qu'un simple cauchemar ou simplement que tout cela n'ait jamais existé, c'est sans doute l'attitude de Pavle qui a pris l'initiative de cette évocation que Jovan fait semblant de ne pas comprendre, au moins au début. Il y a une montée de l'intensité à travers les phrases échangées, mais aussi une sorte de paradoxe dans cet échange. Jovan et Pavle remuent un passé fangeux mais, à la fin de chaque lettre, ils font échange d'amabilités et de voeux qui sont en contradiction avec les paroles partagées, les non-dits qu'ils font semblant d'ignorer, des souvenirs qu'ils voudraient définitivement effacer.

Je me suis toujours demandé si on pouvait se libérer par l'écriture, si le fait de mettre des mots sur des maux pouvait les adoucir, exorciser des peurs, des deuils, des remords. J'ai longtemps cru à l'effet cathartique du discours, j'en suis beaucoup moins sûr maintenant. Je ne suis pas sûr non plus que cet échange de lettres qui s'étale sur environ un an contribue à rapprocher ces deux hommes et à entretenir leur amitié, je pense au contraire que chacun gardera ce souvenir comme une plaie ouverte en refusant d'en parler et que ces lettres n'ont finalement fait que raviver une douleur bien inutilement. Cela m'évoque aussi le souvenir qui s'effrite avec le temps. Non seulement la mémoire humaine est naturellement défaillante et ce d'autant plus qu'on veut occulter celles de nos actions qui ne nous ont pas vraiment grandi. Ce roman, parce qu'on peut dire que c'en est un, est original dans la manière dont il est conçu. Il aurait parfaitement pu être écrit par un seul auteur mais il a été réalisé à quatre mains. Sa singularité réside en effet dans le fait que les deux écrivains ont respecté le rythme de la correspondance, l'un attendant la réponse de l'autre pour, à son tour prendre, la plume. C'est une invitation à la réflexion qui n'est pas inutile et également un bon moment de lecture .
©Hervé GAUTIER – Mai 2015 - http://hervegautier.e-monsite.com
Lien : http://hervegautier.e-monsit..
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Il n'y a pas que les lectrices du club qui ont été touchées par ce très court roman épistolaire, Jérôme, Aifelle chez qui je l'avais déjà remarqué, partagent leurs avis. Je l'ai également beaucoup apprécié. Il s'agit d'un texte qui se lit en une heure ou deux mais qui trotte dans votre tête pendant beaucoup, beaucoup plus longtemps. Puisqu'il se lit vite on peut s'appesantir sur chaque mot et sur ceux qu'on ne peut pas prononcer tellement l'horreur est parfois au delà des mots.

Prenez, par exemple, ce texte qui sert d'introduction:

1991. L'Armée populaire yougoslave, soutenue par les forces paramilitaires, envahit la Croatie pour mettre fin à sa volonté de sécession. Les combats font des milliers de victimes. Des villes et des villages subissent de lourds dommages.

Ce genre de phrases, on les lit souvent, on est choqué puis on oublie. « Les combats », « les victimes » « les dommages » : ce ne sont que des mots, des mots ordinaires et sans beaucoup de contenu, des mots « normaux » puisqu'il s'agit de guerre. Antoine Choplin et Hubert Mingarelli, vont grâce à la correspondance de deux hommes qui ont participé à cette guerre nous la rendre dans toute son horreur à partir d'un seul fait qui n'est somme toute qu'un détail aux yeux de l'Histoire. Leurs lettres commencent alors qu'ils se sont revus après les événements qui les ont tellement marqués l'un et l'autre, on ne sait pas combien de temps s'est écoulé depuis qu'ils sont revenus à la vie civile, Pavle en Argentine et Jovan à Belgrade.. En revanche, on sait qu'un certain Branimir , n'est plus qu'un souvenir pour eux. Les lettres sont échangées d'abord sur un ton banal et puis peu à peu la tension monte jusqu'à la chute finale. Pavle et Joan, ne pourront jamais vivre comme si la guerre était derrière eux. Elle est en eux maintenant , et pour toujours.

La guerre c'est donc ça : pousser trois copains qui aiment rire et faire des projets d'élevage de lapins à commettre les pires atrocités ?
Lien : http://luocine.fr/?p=3687
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Des années après le conflit en ex-Yougoslavie, deux amis entament une correspondance pour comprendre ce qu'il s'est passé et ce qui les a séparés.
Un court roman émouvant et juste.
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Je connaissais la plume d'Hubert Mingarelli que j'apprécie : simple et pleine de poésie. Voilà l'occasion pour moi de découvrir celle d'Antoine Choplin.

Et je ne fus pas déçue. C'est un récit qui se dévoile pas à pas, au fil des lettres échangées entre Pavle et Jovan. Au fil du temps qu'il leur faut pour accepter et dévoiler leurs actes à leur correspondant et ancien ami.

Une guerre n'est jamais propre et « chirurgical ». L'homme étant ce qu'il est, il y a toujours des exactions sur le terrain. Mais parfois, cet homme, qui a lu, est capable de faire ressortir son humanité, même quand on la croyait perdue.

L'image que je retiendrai (attention spoiler) :

Celle de l'un des deux amis faisant passer la jeune fille par la fenêtre pour la sauver des flammes.
Lien : https://alexmotamots.wordpre..
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