Un mot , sur une des pièces de ce recueil que j'ai particulièrement appréciée:
Salle des fêtes de Philippe Minyana
Un groupe de 10 personnages, 3 hommes et 7 femmes, tous veufs ou veuves des guerres variées de notre beau XXème siècle, se retrouvent en congrès pour des "témoignages" vécus, qu'il s'agit de donner avec une certaine clarté et un grand sérieux au public -nous, en l'occurrence- réuni dans une Salle des Fêtes où papillonne, gros bourdon endimanché et affairé, l'organisatrice, Madame Beton, la bien-nommée, un peu moins gâteuse, un peu moins brut de décoffrage -sans jeu de mots avec son patronyme!- , un peu moins vieille que ses invités - et responsable de la bonne tenue de la célébration..
Inutile de dire que, très vite, passée la première émotion ,la compréhensible timidité, les inhibitions attendues devant la difficulté de s'exprimer en public, les témoignages se mettent à déraper, jusqu'au délire...
Le texte est cruel, drôle, tragique.
Tous ces vieux débris pathétiques, écharpés par la vie, qu'on ne peut plus arrêter de témoigner, se mettent même à entonner des chansons de Damia -"Et là-haut, les oiseaux, qui nous voient tout petits, si petits"..., une incroyable et merveilleuse chanson que Juliette a exhumée il y a quelque temps et qui me file toujours le frisson, à l'entendre...
Entre cabaret populaire, réalisme sociologique, délire et poésie, "Salle des Fêtes" nous embarque pour une drôle de traversée...
Face au public, les dix pantins se lèvent, s'asseyent, chantent, crient, rient, pleurent...et peu à peu se tisse, à travers leurs témoignages déjantés ou dérisoires, un tissu commun, bouleversant: ces veufs et veuves de guerre c'est nous, c'est notre humanité éclopée qu'ils nous racontent avec leurs pauvres mots.
On rit, et même beaucoup , mais il n'y a pas de quoi rire...
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