La crucifixion de l'Ukraine : Mille ans de guerres de religions en Europe

Le titre de l'ouvrage, « La crucifiction de l'Ukraine : Mille ans de guerres de religions en Europe » , synthétise l'idée directrice de Jean –François Colosimo. L'Ukraine est au centre de rivalités, parcourue par des lignes de fractures entre grandes puissances, alors qu'elle poursuit sa quête d'indépendance depuis le baptême des Slaves orientaux en 988.Le sort tragique que l'Ukraine connaît aujourd'hui renvoie l'Europe à son passé, à ses « mémoires contradictoires ». Les identités se réveillent, fondées sur les références religieuses et les volontés nationalistes des états. le défi que l'auteur relève est d'importance : les parcours politiques, religieux sont complexes, riches en péripéties et renversements. La synthèse en 288 pages porte d'emblée ses limites : dense, parfois complexe, elle déroule nombre d'acteurs et d'évènements, de références religieuses et de conflits entre le spirituel et le temporel… L'empire romain se scinde entre latin et byzantin ; une religion, le christianisme, se divise entre catholiques et orthodoxes, puis protestants ; Rome et Constantinople- Byzance, puis Moscou entendent diriger. Dès sa « naissance », l'Ukraine ( la Rus' de Kiev au VIII ème siècle) concentre les conflits religieux de la Méditerranée. Les fils directeurs de l'argumentaire suivent les méandres religieux et politiques (les deux sont liés par nécessité) pour souligner la thèse de J F Colosimo. L'auteur se penche sur l'amnésie de l'Occident qui a oublié que « le fait religieux est premier », que la culture procède d'un culte. Sûre d'être à l'abri, dans une illusion de paix, l'Europe a été surprise par la guerre en Ukraine. L'occident « efface » la religion, l'orient en assure la « vitalité » où elle est un moyen de résistance. L'effondrement du communisme (en 1979) marque le retour du religieux au Proche Orient, en Europe… J P Colosimo explore la mémoire des européens de l'est, analyse l'identité russe qui mêle nationalisme et religion. L'Ukraine dans sa volonté d'indépendance menace l'intégrité et l'existence de la Russie. La guerre en Ukraine oppose le bien et le mal, du sacrifice va naître une nouvelle ère. Les références religieuses (bibliques, mythologiques…) sont nombreuses. J P Colosimo ici transcende les commentaires journalistiques pour dégager une vision millénariste. L'exercice n'est pas aisé, la lecture est exigeante.

Livre remarquable par son érudition et la mise en perspective de la géopolitique européenne aujourd'hui. L'Histoire que cet essai déplie est écrite dans une langue soutenue, souvent métaphorique mais bien documentée. Cet essai nous fait découvrir sous un autre angle de l'affrontement bimillénaire entre l'empire d'Orient et l'empire d'Occident. Sa grande vertu est de remettre, sans jeu de mots et au sens propre, l'église au milieu du village. En effet on a souvent sous-estimé l'influence religieuse et ses conséquences dans la bipartition de l'empire romain. Mais la complémentarité puis la compétition entre Rome et Constantinople fut d'abord religieuse. C'est ce que l'auteur nous explique avec force détails. Trop peut-être même pour un lecteur averti . D'où cette impression de vertige qui nous saisit devant cette l'accumulation d'informations diverses. Touffu, ce livre manque de synthèse ou de rappel à notre actualité pour permettre au lecteur lambda de s'y retrouver. A lire cependant si on veut mieux comprendre le tragédie ukrainienne.

Ce livre est très enrichissant et ce fut une véritable gageure de décrire plus de mille ans d'histoire de l'Ukraine en moins de 300 pages. D'autant que cette histoire est particulièrement complexe.
Je déplore cependant l'absence de cartes. Ma lecture en aurait été facilitée
Un glossaire en fin d'ouvrage aurait été une aide pour les non spécialistes dont je suis.