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EAN : 9782234095779
350 pages
Stock (18/10/2023)
4.46/5   28 notes
Résumé :

La fin de la guerre froide devait ouvrir une ère nouvelle, marquée par le triomphe de la démocratie libérale qui ne pouvait désormais que s’étendre. Aucun pays n’en a été plus convaincu que l’Allemagne réunifiée.
Trois décennies plus tard, à l’est, la Russie de Vladimir Poutine est devenue de plus en plus agressive. En Europe centrale, les jeunes démocraties sont tombées dans le piège du populisme. Et tandis qu’à l’ouest, la France tentait en vain de ... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (5) Ajouter une critique
Je ne sais pas le nombre d'articles que j'ai pu lire de Sylvie Kauffmann au fil des années, mais ils ont été nombreux et ils m'ont permis de mieux orienter mes pensées dans des dossiers complexes de l'actualité. Elle ne m'a jamais déçu. Il est vrai qu'elle dispose d'une solide formation, d'une curiosité à toute épreuve et de beaucoup de courage pour nous informer au mieux.

Le livre que le grand reporter du quotidien le Monde a envoyé fin août à l'imprimerie, fait un triste bilan de notre continent face aux ambitions territoriales de la Fédération russe sous le règne du mégalomane Vladimir Vladimirovitch Poutine.

Il démontre que la politique de la France, de l'Allemagne et de la plupart des pays d'Europe occidentale, à l'exception peut-être dans une certaine mesure du Royaume-Uni, ont, comme le titre l'indique, fait preuve d'un regrettable aveuglement dans les bonnes grâces du maître du Kremlin. Ce qui s'est soldé par l'invasion militaire russe d'Ukraine, qui en est aujourd'hui à son 609e jour !

La chancelière allemande, Angela Merkel, et les présidents français de Chirac, en passant par Sarkozy et Hollande, à Macron, tous ont pensé qu'il y avait moyen d'en arriver à une paix durable pour notre continent avec ce nouveau tsar de toutes les Russies. Ce n'est que trop tard que Macron et le chancelier allemand Olaf Scholz ont compris la vraie nature et les visions coloniales du dirigeant russe et se sont probablement dit, comme en 1938 Neville Chamberlain à propos de Hitler : Poutine n'est pas un gentleman !

Je fais abstraction ici de l'ex-chancelier allemand, Gerhard Schröder, et de l'ancien Premier ministre français, François Fillon, qui ont été gratifiés de nominations fort rentables dans des entreprises russes de gaz par Poutine en remerciement de leurs bons et loyaux services.

Si je comprends bien que nos dirigeants ont tout fait pour éviter une guerre, il n'en demeure pas moins qu'ils s'y sont pris de la mauvaise façon en multipliant les concessions et courbettes devant cet ex-officier du KGB et le capo mafioso qu'il est entretemps devenu.

Les indices ont pourtant été légion. de la liquidation de toute opposition à l'intérieur du pays, tels les journalistes Anna Politovskaïa, Natalia Estemirova, le transfuge Alexandre Litvinenko, empoisonné au polonium en Angleterre, les avocats Sergueï Magnitski et Stanislav Markelov, Boris Nemtsov, gouverneur de la province de Nijni Novgorod,.... et le pauvre Alexeï Navalny qui ne sortira pas de taule tant que Poutine est en vie, jusqu'aux fuites de capitaux à une échelle défiant l'imagination du kleptomane du Kremlin, considéré par certains comme l'homme le plus riche du monde. Une Douma (parlement) où ne siègent que ses potes, qui votent n'importe quelle stupidité poutinienne, une mainmise complète de la presse, qui ne débite que de la propagande, etc...

Je pourrais continuer la longue liste des signes avertisseurs, mais je m'arrête aux prouesses de sa politique étrangère : la 2e guerre en Tchétchénie, sa guerre en Géorgie, ses bombardements en Syrie, sa mainmise virtuelle de la Biélorussie, l'annexion de la Crimée, l'occupation du Donbass et finalement, le 24 février 2022, l'envahissement brutal de l'Ukraine.

La grande valeur de l'ouvrage réside dans le fait que tout au long de son exposé, qui est clair et net, l'auteure renvoie aux innombrables entretiens qu'elle a eus avec de nombreux protagonistes (sauf Sarkozy qui lui a refusé 2 fois un entretien) de ce drame, dont elle trace, ainsi, un tableau humain et vivant.

Vivant aussi et intéressant sont les portraits qu'elle brosse de certains politiques et hauts fonctionnaires. Je pense ici en particulier à son portrait d'Angela Merkel, Viktor Orbán, les frères Kaczyński de Pologne, Vladislav Sourkov ("Le mage du Kremlin" selon Giuliano da Empoli), Sarkozy et autres.

Personnellement, je trouve que l'ouvrage de Sylvie Kauffmann devrait faire partie des lectures obligatoires dans les dernières années de l'enseignement secondaire.
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Dans Les aveuglés, Sylvie Kauffmann nous explique pourquoi et comment les pays occidentaux, Allemagne et France en tête, ont fait preuve de complaisance envers la Russie de Poutine, et comment cette situation s'est retournée contre eux.

Ce livre est extrêmement précis, très bien documenté, et liste ses sources en référence. Il raconte en détail toutes les entrevues entre hauts responsables de l'Union Européenne et relate les propos de Poutine qui révèlent clairement le fond de sa pensée. Car son ambition de réunir d'anciens territoires soviétiques à la Russie était affichée depuis longtemps.

Sylvie Kauffmann nous raconte comment Poutine a manoeuvré pour en arriver là : "Les quatre plus grands pays de l'Ouest européen sont tombés dans les filets de Vladimir Poutine, chacun à sa manière, chacun attiré par un appât différent. Pour l'Allemagne, c'est le gaz et l'énergie bon marché. Pour la Grande-Bretagne, c'est l'argent des oligarques. Pour l'Italie, ce sont les affaires. Et pour la France, c'est le rêve permanent de construire une architecture de sécurité pour l'Europe qui, dans l'esprit de Paris, ne peut se concevoir sans la Russie."
Il a utilisé les faiblesses de chacun, rendu l'Allemagne dépendante du gaz russe pour développer une industrie performante à moindre coût. L'auteure descend en flèche l'ex-chancelier Gerhard Schröder, qui après avoir négocié Nord Stream est devenu membre du conseil d'administration de Gazprom. de son côté François Fillon est devenu administrateur de deux sociétés chimiques russes.

Parmi les arguments listés par Sylvie Kauffmann pour expliquer la situation, il y a le désengagement américain en Europe, conséquence du fiasco irakien. Il y a aussi les divergences entre l'ouest de l'Europe et les anciens pays du bloc soviétique qui sont beaucoup plus méfiants envers la Russie. Hors les pays fondateurs de l'UE n'ont pas vraiment été à l'écoute des nouveaux arrivants.
Enfin l'auteure cite l'attrait de certains européens pour la personnalité de Poutine. "Méfiance vis-à-vis de Washington et de Bruxelles, conservatisme social, défense du monde chrétien, notamment des chrétiens d'Orient, fascination pour le rôle du leader : autant d'atouts que présente Poutine aux yeux des critiques du libéralisme. C'est sur cette base que son régime cultive des relations étroites avec les partis populistes ou de l'extrême droite européenne."

Quant à Poutine, il a alterné le chaud et le froid. Des discours apaisants, à chaque fois suivis d'actions belliqueuses. Ne pas oublier qu'avant l'Ukraine, il a déclenché la seconde guerre de Tchétchénie, il a envahi la Géorgie dont deux provinces sont maintenant sous contrôle russe, et il a aussi lancé l'armée russe en Syrie où ses troupes font assaut de bestialité avec celles de Bachar. Et encore, l'auteure n'a pas parlé de la Moldavie dont une grande partie (la Transnistrie) est sous le contrôle de l'armée russe.

Le reproche qu'on peut faire à ce livre est justement la surabondance de détails. J'avais l'impression d'être bien informé sur la Russie, mais j'ai été noyé sous une avalanche de détails : 50 pages sur le pipeline Nord Stream, avec tous les comptes-rendus de toutes les discussions sur le sujet, ce fût beaucoup trop pour moi. Ce livre est vraiment à réserver aux passionnés de la géopolitique.
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Excellent ouvrage pour s'informer sur la guerre en Ukraine, comprendre sa genèse et découvrir en détail sa gestion par l'Europe.
J'ai trouvé ce livre excellent tant sur la forme que sur le fond.
Sur la forme, l'ouvrage de Sylvie KAUFFMANN est rempli d'anecdotes de la vie diplomatique et de dialogues reconstitués qui donnent cette singulière impression parfois de lire un roman. C'est fort plaisant à lire.
Sur le fond, le livre est particulièrement éclairant sur l'historique des relations URSS puis Russie / Europe surtout depuis l'arrivée au pouvoir de Poutine. Les acteurs diplomatiques sont décrits avec une grande précision et les multiples coups de semonce sont rappelés (discours de Munich 2007, crise géorgienne, suites de la révolution de Maïdan en 2014, ...). le livre est remarquable dans sa description de la gestion diplomatique (ou peut-être plutôt, absence de gestion...) par l'Europe; en particulier par le couple franco-allemand. C'est une excellente oeuvre pédagogique pour tout lecteur souhaitant avoir une vision d'ensemble de la crise ukrainienne sous l'aspect diplomatique. La dernière partie du livre s'interrogeant sur les suites fait un peu froid dans le dos car on a le net sentiment que la diplomatie européenne est bien loin du moment où elle parlera d'une seule voix.



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Comme le dit le quatrième de couverture, le lecteur a droit à une analyse passionnante de la part de l'auteure qui visiblement maîtrise parfaitement sa matière.

Non seulement ce livre est très intéressante mais il est écrit de manière à donner une certaine légèreté à la matière, le lecteur ne s'ennuie pas, il ne s'agit pas du tout d'une lecture barbante où on a envie d'abandonner.

Un livre qui ouvre des portes vers d'autres lectures et qui donne envie d'exploiter le sujet plus amplement, d'autant plus que la matière ne manque pas de volumes et que le lecteur peut se diriger vers la France, l'Allemagne ou la Russie, sans compter la bibliographie qui permet également de partager les lectures dont l'auteure s'est elle-même servie.

Un léger bémol, l'utilisation du tic de langage à de multiples reprises tel que "du coup" et ça, vous le savez, je n'aime vraiment pas.
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Cet essai se lit comme un roman ! Sylvie Kauffmann nous introduit auprès de personnages politiques de premier plan, dans plusieurs capitales européennes, Mme Merkel, Gerhard Schröder, bien sûr, mais aussi d'autres acteurs politiques de la scène allemande, Nicolas Sarkozy et E. Macron, en France, des hommes politiques français, mais aussi, et peut-être surtout, des dirigeants et acteurs politiques des pays de cette Europe de l'Est, bien plus lucides, en général, que ceux « de l'Ouest », sur le personnage de Vladimir Poutine et son entourage, avertis qu'ils sont de la réalité du pouvoir russe et de ses ambitions, pour les raisons que la journaliste rappelle et analyse.

On assiste aux tensions entre ces deux mondes, celui « de l'Ouest » dont les yeux peinent à se déciller en dépit des avertissements des pays de l'ancienne sphère soviétique, et les « petits » pays d'Europe centrale.
Une mention particulière pour Kaja Kallas, Première ministre estonienne, qui, lors du Conseil européen du 24 juin 2021, s'oppose à A. Merkel et obtient l'annulation du projet, porté par l'Allemagne et la France, d'un sommet Russie-Union européenne, pour la première fois depuis l'annexion de la Crimée.

Ce jour-là, celui où « Merkel a mordu la poussière et Kallas l'a terrassée », symbolise presque à lui seul le basculement au sein de l'UE et la revanche des « terres de sang », les pays de l'ex-Europe communiste.

Lien : https://web-mail.laposte.net..
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critiques presse (1)
LaCroix
21 novembre 2023
Comment Berlin, Paris et Washington ont laissé la voie libre au revanchisme russe de Vladimir Poutine.
Lire la critique sur le site : LaCroix
Citations et extraits (11) Voir plus Ajouter une citation
L'Allemagne fait la sourde oreille, assise sur la prospérité que facilite ce gaz bon marché venu de Sibérie, convaincue qu'elle sait mieux que les autres gérer l'ours russe. Lorsque la guerre éclate, Nord Stream 2 devient le symbole de l'aveuglement allemand face aux visées et aux manipulations de Poutine.
"Pourquoi est-ce possible ?" Zelensky pose la bonne question. L'Histoire de Nord Stream 2 mérite d'être racontée en détail tant elle rassemble tous les ingrédients de ce qui a pollué la relation entre la Russie et l'Europe : la corruption de Schröder, nommé par Gasprom président du conseil de surveillance de Nord Stream 2 à peine sorti de la chancellerie, la duplicité de Merkel, le mépris pour l'opposition des pays post-communistes, la docilité de la France face à son allié allemand - jusqu'au jour où elle se rebelle et tente de manœuvrer avec Bruxelles pour atténuer les effets sur l'Europe de l'addiction allemande au gaz de Vladimir Poutine.

Page 203
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Finalement, au moment où s’ouvre la deuxième décennie du XXIe siècle, les quatre plus grands pays de l’Ouest européen sont tombés dans les filets de Vladimir Poutine, chacun à sa manière, chacun attiré par un appât différent. Pour l’Allemagne, c’est le gaz et l’énergie bon marché. Pour la Grande-Bretagne, c’est l’argent des oligarques. Pour l’Italie, ce sont les affaires. Et pour la France, c’est le rêve permanent de construire une architecture de sécurité pour l’Europe qui, dans l’esprit de Paris, ne peut se concevoir sans la Russie.
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Dans une interview au journal Hamburger Abendblatt le 23 novembre 2004, le chancelier (Gerhard Schröder) délivre un satisfecit démocratique au président russe : « Oui, dit-il, je suis convaincu que Vladimir Poutine est un vrai démocrate, qu’il veut faire de la Russie une démocratie ordonnée et qu’il y parviendra. Il a rétabli les fonctions essentielles de l’État. »
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Mais contrairement aux monstruosités nazies, les monstruosités staliniennes n’ont pas été jugées, ni leurs auteurs condamnés. L’Allemagne, vaincue et coupée en deux, devait assumer la culpabilité de son passé, alors que l’Union soviétique, auréolée du statut de vainqueur et héritant de l’effroyable bilan de 27 millions de morts, pouvait se glorifier du sien.
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La formule "Le changement par le rapprochement", dans le cadre de l'Ostpolitik, devient le fondement de la stratégie du SPD à l'égard des voisins communistes de la RFA pendant la guerre froide : c'est le dialogue avec les États du bloc soviétique, plutôt que la confrontation, qui peut favoriser leur ouverture. Willy Brandt va la mettre en œuvre lorsqu'il s'installe à Bonn comme chancelier de la République fédérale en 1969. Elle débouchera sur la politique de détente Est-Ouest et sa consécration par l'acte final d'Helsinki en 1975, tournant dans la guerre froide.
Couronnée par un prix Nobel de la paix, décerné en 1971 à Willy Brandt, l'Ostpolitik est aujourd'hui un monument encombrant dont la vieille garde du SPD a du mal à se défaire alors que la guerre en Ukraine a pulvérisé des décennies de politique russe de l'Allemagne.

p. 166
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Vidéo de Sylvie Kauffmann
Modération Sylvie KAUFFMANN, journaliste au Monde Intervenants Erik ORSENNA, économiste et écrivain, membre de l'Académie Française, François VILLEROY DE GALHAU, gouverneur de la Banque de France
Concept économique relatif à toutes les activités économiques liées aux océans, aux mers et à leurs littoraux, les domaines d'application de l'économie bleue sont variés : pêche, transport maritime, énergie marine, ou encore tourisme.
L'économie bleue consiste à utiliser de manière durable les ressources marines. Car nos océans, en plus d'être une source d'emplois et de nourriture, sont également un soutien à la croissance économique, ils participent à la régulation du climat et contribuent au bien-être des communautés côtières. Veiller à la santé des systèmes océaniques est donc primordial.
L'importance de cette forme d'économie n'a pas échappé à la France. En effet, ses territoires d'Outre-Mer lui permettent de disposer du deuxième domaine maritime mondial et ils constituent des hubs maritimes importants dans leurs régions.
Quels sont aujourd'hui les enjeux d'une économie bleue durable ?
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