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4,3

sur 1451 notes

Critiques filtrées sur 3 étoiles  
En général, mes premières impressions post lecture sont « fiables » dans le sens où elles perdurent souvent, parfois s'affadissant un peu lorsque l'empreinte d'un livre, pas assez forte, s'estompe. Mais rarement je revois mon jugement initial. Cela a été le cas pour cet American dirt.

Ce roman émotionnellement très fort raconte l'odyssée désespérée d'une mère et de son fils pour fuir le Mexique, après le massacre des seize membres de leur famille par un cartel, en intégrant la masse de migrants voulant passer clandestinement al Norte, aux Etats-Unis.

Dès les premières pages, l'écriture incisive et précise de Jeannine Cummins happe le lecteur qui se dit qu'il met les pieds en terrain connu, celui des récits violents de gangsters et de narcotrafiquants sur fond de contexte mexicain décrit nettement ( assassinats massifs de journalistes, impunité des cartels, ultra violence de ces derniers, corruption généralisée ). Mais très rapidement, ce qui se dégage de ce roman, c'est l'empathie que l'auteur développe pour ses personnages qui traversent des souffrances inconcevables, pour ceux qui réussissent à surmonter des traumatismes inouïs dans l'espoir de se reconstruire ailleurs. C'est sans doute cette articulation entre course poursuite haletante et récit de l'intime qui est le plus réussie, d'autant plus que c'est l'angle féminin qui est choisie pour raconter ces caravanes de migrants latino-américains.

Il n'y a rien de strictement politique dans le récit de Jeannine Cummins, juste une description complète et réaliste ( ou qu'on imagine tels ) du parcours de ces migrants clandestins. Elle fait le choix du souci moral et humanitaire en donnant des visages, ceux de Lydia, Soledad, Rebeca, Luca, à la masse anonyme des migrants, habituellement présentés comme des gens pauvres et impuissants mendiant à grands cris à nos portes ou comme une populace d'envahisseurs criminels selon les points de vue. Elle leur redonne une dignité en les montrant comme acteurs de leur vie capables de construire leur futur. Elle offre un temps d'arrêt au lecteur pour entendre ces voix, comme un pont entre des personnes aux vies radicalement différentes.

Et c'est très fort de voir cette mère et ce fils se déguiser en migrants pour survivre aux sicaires des cartels envoyés à leur trousse, jusqu'à devenir des migrants à part entière s'accrochant au toit de la Bestia ( le train ), fuyant les brutalités de la migra et des milices antimigrants, rongés par la faim, l'insomnie, la paranoïa dans une terreur omniprésente, devant affronter les violences faites aux femmes comme la traversée du désert de la Sonora. On vit, on respire l'histoire de ces migrants fictifs qui semble si vraie, ses périls mais aussi la solidarité et l'héroïsme inattendu de personnes ordinaires. Tout est vibrant de mille émotions. En fait, Jeannine Cummins offre un temps d'arrêt au lecteur pour entendre ces voix qu'on n'entend jamais, elle offre d'autres subjectifs comme un acte d'urgence éthique pour dépasser les a priori sclérosants, comme un pont entre des personnes aux vies radicalement différentes. Les embardées poétiques et singulières des monologues intérieurs de la mère portent le récit au-delà même.

J'ai refermé ce roman très enthousiaste, soufflée par la puissance émotionnelle qu'il a dégagée. Et puis quelques jours passant, quelques semaines après, j'ai un peu réévalué cette immédiateté fulgurante de l'émotion qui a dévoré voire confisqué une réflexion plus profonde.La ligne entre empathie et pitié, entre réalisme et voyeurisme est très fine. Elle est parfois à la limite d'être franchie malgré l'évidente sincérité de l'auteure. Je n'ai par exemple par compris le choix de monter une « bluette » sentimentale quasi de type romance entre Lydia et le chef mafieux. Au-delà de ce choix hasardeux et peu pertinent, le fait de démarrer le roman par un massacre, de choisir comme personnages principaux une mère et son fils menacés d'une mort atroce, confisque toute argumentation, aucun débat n'est possible, aucun chemin émotionnel autre que celui choisit par l'auteur n'est possible. J'ai encore du mal à me situer par rapport à ce roman qui me met quelque peu mal à l'aise.

PS : A noter qu'aux Etats-Unis, ce roman a eu un énorme succès. Il a également fait rebondir les polémiques récentes sur l'appropriation culturelle, certains refusant à l'auteure sa légitimité à parler des migrants, car elle est blanche et non latino-américaine ( elle a « seulement » une grand-mère portoricaine ), polémiques que je trouve injustes au vu de la qualité du travail de documentation de l'auteure.
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Immense succès de librairie aux États-Unis, American Dirt est un cauchemar. Les aventures survenues aux personnages principaux du roman sont effectivement un cauchemar. Toute proportion gardée, sa lecture a été aussi un cauchemar pour moi. Je sais que ce commentaire me place en opposition frontale avec toutes les critiques que j'ai pu lire, mais je l'assume, je n'ai pas aimé ce livre.

Tout commence à Acapulco, une ville balnéaire mexicaine sur l'océan Pacifique, dont le nom, il y a encore vingt ans, était synonyme de paradis touristique. Aujourd'hui, elle est le terrain de jeux sanglants entre cartels de la drogue qui s'entretuent pour son contrôle, tout en s'affrontant aussi violemment à la police. C'est une des villes les plus dangereuses du monde.

Propriétaire d'une petite librairie à Acapulco, Lydia vit tranquillement avec son mari, journaliste d'investigation, et leur fils Luca, huit ans. Elle sympathise avec un client, Javier, un homme charmant, cultivé, attentionné, qui vient régulièrement papoter bouquins avec elle. Il s'avère toutefois que cet amateur de livres est le chef d'un des cartels les plus cruels et les plus puissants. Et voilà qu'un article du mari journaliste d'investigation déclenche une cascade de faits tragiques, et notamment le massacre de toute la famille. Lydia et Luca en réchappent miraculeusement.

On n'apprendra les préalables au drame que plus tard, dans des flash-back que ressasse Lydia sur sa route. Car s'estimant menacée de mort et croyant voir un affidé de Javier dans chaque individu croisé, elle a décidé de quitter clandestinement la ville avec son fils, à pied, sans bagages ni moyens ou presque, pour se rendre aux États-Unis, où elle compte un vague parent, perdu de vue depuis des années. Sur son chemin de 4 000 kilomètres – et 460 pages – son statut personnel se dissout en même temps que sa bourse se vide. Lydia et Luca finissent par fondre leur destinée avec celle d'autres migrants, originaires d'un peu partout en Amérique latine, fuyant misérablement la guerre, la pauvreté, la persécution, l'insécurité, la violence, l'intolérance et tout ce qui est intolérable.

Un cauchemar de près de deux mois pour Lydia et Luca, qui vont de ville en ville, pour une large part à pied, parfois en bus ou couchés sur le toit d'un train de marchandises, faisant étape dans les conditions sanitaires qu'on imagine. Lydia, terrorisée, n'accorde sa confiance à personne et ne se sent nulle part en sécurité. Un scénario un peu répétitif !

Les premières pages du roman m'ont fait entrer de plain-pied dans le massacre de la famille. Je n'ai pas eu le temps d'acquérir de l'empathie pour les malheureux personnages et je ne me suis donc pas placé dans le jeu de l'auteure, qui cherche à horrifier et à apitoyer les lecteurs. D'autant que des scènes terrifiantes du livre sont racontées dans un style appliqué, un peu naïf, de conte pour enfants. J'ai passé l'âge, à supposer que je l'aie jamais eu, d'être effrayé et bouleversé par l'histoire de Barbe-Bleue ou du Petit Poucet.

Selon le romancier Don Winslow, American Dirt vaudrait Les Raisins de la colère. On peut mettre en parallèle les circonstances humaines dramatiques qui ont inspiré les deux ouvrages, mais je n'ai pas retrouvé, chez Jeanine Cummins, la plume audacieuse ni le souffle épique de John Steinbeck. Et si, comme John Grisham, j'ai moi aussi très vite tourné les pages, c'est parce que je m'ennuyais de toujours relire les mêmes péripéties, avec leurs inévitables et prévisibles rebondissements.

Dans une postface, l'auteure se déclare sensible aux aspects humanitaires d'un phénomène tragique, qui touche dans le monde des centaines de milliers de personnes en déplacement et en souffrance. Comment ne pas l'être ? Son manuscrit avait fait l'objet d'enchères incroyables entre plusieurs éditeurs. L'enjeu ? La publication, dans l'air du temps, d'un grand roman social compassionnel écrit par une femme blanche sur une malheureuse « populace brunâtre ». S'en est suivie une polémique en boomerang, de la part de Mexicains qui s'estiment injustement montrés du doigt et de migrants qui dénoncent une « appropriation culturelle » illicite. Ça aussi, c'est dans l'air du temps.

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Au Mexique, la ville d'Acapulco n'est plus la station balnéaire paradisiaque qu'elle était jadis. Aujourd'hui, elle subit le joug de cartels de la drogue ultra-violents, qui se déchirent pour le pouvoir, l'argent et le territoire, et les habitants en sont souvent les victimes collatérales, soit qu'ils tombent directement sous les tirs croisés, soit qu'ils subissent les conséquences économiques de cette violence : effondrement du secteur du tourisme, racket des petits commerçants par les narcos, impuissance ou corruption généralisée des autorités. le danger est désormais présent partout, tout le temps et pour tout le monde, mais encore plus pour les journalistes téméraires (lire : suicidaires) qui persistent à enquête sur les cartels. Tel est le cas pour Sebastián, assassiné avec une douzaine de membres de sa famille lors d'une fête d'anniversaire. Seuls sa femme Lydia et son fils Luca, 8 ans, en ont réchappé par miracle. Mais Lydia sait que le cartel va revenir pour les tuer eux aussi, alors elle n'a d'autre solution que de fuir le Mexique et d'essayer de passer aux Etats-Unis. Et pour éviter de laisser des traces qui permettraient au cartel de les localiser, il faut renoncer à utiliser téléphone, internet, cartes de crédits, passeport, avion, autocar... le seul moyen, paradoxalement le moins "dangereux", est de se fondre dans le flux de migrants qui remontent l'Amérique centrale en direction du nord et de voyager clandestinement, à pied ou sur le toit d'un train de marchandises (surnommé « La Bestia », un nom méchamment évocateur), avant de tenter de passer la frontière et traverser le désert avec un passeur. Un périple au cours duquel tous les dangers et toutes les horreurs sont possibles.

Grand succès de librairie aux Etats-Unis, « American dirt » a également fait l'objet d'une polémique, parce que écrit par une Américaine blanche sans racines mexicaines ou latinos, et en conséquence taxée d'appropriation culturelle illégitime. Je n'ai pas d'avis sur la question, sauf que l'auteure s'est manifestement documentée sur son sujet, que ce qu'elle raconte à propos du parcours épouvantable de ces migrants semble tout à fait plausible, et que sa démarche paraît sincère.

Là où je coince un peu, c'est sur la façon dont elle raconte cette histoire. Son écriture m'a semblé par moments tellement scolaire, appliquée, naïve, qu'elle échoue à susciter la compassion, l'effroi ou l'horreur qu'elle recherche. Avec la conséquence que je n'ai pas éprouvé d'empathie pour les personnages qui, par ailleurs, sont un peu caricaturaux : Lydia est intelligente, belle, cultivée et était vaguement amoureuse sans le savoir du chef du cartel qui a abattu son mari, Luca est très intelligent, très mignon et étonnamment mature pour son âge, les deux jeunes soeurs Honduriennes qu'ils rencontrent pendant le voyage sont hyper-belles, hyper-solaires et hyper-courageuses. Fallait-il en plus que tout cela se termine en happy-end peu subtil, et que le texte soit parsemé de mots et d'expressions en espagnol pour faire plus authentique ?

Je ne remets évidemment pas en question la tragédie vécue par les migrants sud-américains (et les autres d'ailleurs), dont le désespoir et la détermination sont déchirants, ni le fait qu'il est nécessaire de parler et d'écrire sur ce sujet. Ce roman, malgré qu'il soit un peu long, répétitif et prévisible, a le mérite de rendre hommage à ces damnés de la (leur) terre. de là à comparer l'auteure (comme le fait Don Winslow) à John Steinbeck, c'est une autre histoire.

En partenariat avec les Editions 10/18 via Netgalley.

#AmericanDirt #NetGalleyFrance
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L'une des premières balles surgit par la fenêtre ouverte, au-dessus de la cuvette des toilettes devant laquelle se tient Luca...Et ainsi de suite pendant 7 longues pages résumant la tuerie de toute une famille, enfin presque, 16 personnes sur 18 pendant une fête. Seuls sont rescapés la mère Lydia et Luca son fils de 8 ans.
Terrible incipit, terrible épisode. Tout s'effondre pour cette femme rescapée. le mari, Sebastian, mort, celui qui était visé, le journaliste, mort de ses articles anti cartels, entraînant sa famille car autant faire les choses complètement. Tous morts, personne ne parle. Deux rescapés, ça ne parlera pas plus!
La trame est lancée. Une seule issue, fuir. Acapulco, Mexico, le pays, le Mexique, l'espoir s'appelle Amérique, Etats-Unis.
Mais la route est longue, très longue jusqu'à la frontière et ensuite franchir le mur érigé par la volonté d'un ancien président américain et puis, une autre longue route jusqu'à Denver, Colorado où habite un oncle, une tante ou un cousin, enfin de la famille.
Dans la tête c'est déjà difficile, alors à marcher, c'est pire!
Les tripes c'est pour l'autre, le gamin, sa chair de sa chair, il faut y arriver, oui, y arriver.
Les méchants, le cartel des Jardiniers, ainsi nommé parce qu'ils tuent avec des outils, bêches, pelles, marteaux et couteaux pour décapiter. Une ou des balles, on remercie, c'est une grâce octroyée, pas de souffrance.
"Siège social" Acapulco, mais ils sont partout, partout les murs ont des yeux et des oreilles, jusqu'en Amérique dit-on.
Lydia ne savait pas que le client de sa librairie, gentil, cultivé, amoureux d'elle était un parrain, le jardinier en chef. C'est son mari qu'il lui a ouvert les yeux. Trop tard.
Trop tard, le ver était dans le fruit.
Alors le seul espoir, la fuite.
C'est cette fuite avec tous ses aléas, ses peines, quelques joies partagées, si peu, la route que raconte ce livre.
Grande aventure, des rencontres belles et mauvaises aussi, la surveillance constante, aux aguets même en mangeant, aucun ami, ni la police ni personne, personne dans aucun camp, aide-toi encore et toujours et veille, veille sur Luca.
Il y a eu controverse sur ce livre de la part d'intellectuels mexicains qui ont remis en question la légitimité de l'autrice pour écrire cette fiction, de sa méconnaissance du terrain et du flux migratoire mexicain et sudaméricain. C'est une américaine sans attache mexicaine.
Pour moi, j'ai fait abstraction de tout ça pour avancer dans ce roman en lisant un livre d'aventures qui pouvait être proche de la réalité que, personnellement, je ne connaissais pas beaucoup plus que ce que l'on entend dans les médias.
J'ai trouvé cette aventure prenante, bien écrite, même parfois haletante bref je ne regrette pas cette lecture qui, en aucun cas, m'a paru fantaisiste.
C'est parfois un peu long, certains passages notamment les retours en arrière mais, dans l'ensemble, on tremble assez pour cette femme et son fils, dont le sort ne fait envie à personne, moi y compris.
Lien : https://www.babelio.com/livr..
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D'un côté, une lecture fastidieuse, faite de détails, de trains en veux-tu en voilà. On voudrait aller à l'essentiel plutôt que de descriptions : va-t-elle réussir à s'en sortir avec son fils et quitter le pays ? de l'autre - comment ne pas faire autrement ? - l'autrice excelle à nous montrer, dans le surplus des kilomètres et des rencontres, en choisissant une approche intimiste, ce que c'est que de devenir migrant mexicain et de vouloir rejoindre les États-Unis pour sauver sa peau. Quelle épopée ! On ne veut surtout pas de sa vie à Lydia qui doit fuir après que tous les membres de sa famille aient été exécutés. On ne veut même pas aller vivre dans ce Mexique gangréné par la Mafia, les bains de sang et les corruptions - c'est en cela d'ailleurs que le livre va faire polémique auprès des populations latino-américaines. Superbe road-trip (certes long), encensé aux USA, comme le nouveau "Les raisins de la colère" moderne, presque témoignage tant il est réaliste. Il vient rappeler deux choses : un migrant fuit, il n'envahit pas ! Et, l'Amérique ce n'est pas seulement les Etats-Unis, un Mexicain est Américain ; alors ce rêve américain, lequel est-ce ? Ce roman gagne cette année d'ailleurs le prix des Libraires décerné par les éditons 10-18 qui le publie en France
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Lydia est libraire à Acapulco, son mari Sébastian est journaliste, ils ont un fils de huit ans Luca. Lydia a sympathisé avec un client de sa librairie, Javier, avec qui elle aime bien discuter. Elle ignore qu'il est à la tête d'un important cartel de narco traficants. Sébastian écrit un article dans son journal sur Javier et le cartel où il dévoile son identité, ce qui va déclencher la colère de celui ci. Tous les membres de la famille de Lydia vont être décimés un jour de fête d'anniversaire en représailles . Seuls, Lydia et son fils échappent au massacre.
Mais les narcos sont à leurs trousses., une seule alternative s'offre à eux, s'enfuir, disparaître., se mêler au flot des migrants qui tentent de passer aux États-Unis. Ils vont parcourir les milliers de kilomètres sur les trains de marchandises qui se dirigent vers le nord,accrochés sur le toit des wagons, hébergés dans des refuges pour la nuit quand il y en a ,avec la peur au ventre d'être repérés par des narcos qui se mêlent souvent aux migrants pour passer inaperçus. le récit de la traversée sur la Bestia (le train de marchandises) m'a paru un peu long. le rythme s'accélère quand Lydia et Luca doivent traverser le désert à pied de nuit pour passer la frontière guidés par un passeur.
Ce roman a été très bien accueilli à sa sortie et j'en attendais beaucoup, trop peut-être. J'ai été déçue par le style que j'ai trouvé lourdaud, sans style particulier , peut-être est ce dû à la traduction.
Je n'ai pas ressenti d'empathie pour les deux personnages du roman, je pense que l'auteure s'est contentée de raconter des faits sans faire d'analyse psychologique poussée de ses personnages.
L'auteure après un accueil chaleureux à la sortie de son roman a été le sujet de polémiques de la part de certains intellectuels Latinos l'accusant d'appropriation intellectuelle, n'étant ni migrante ni Latino elle n'est pas jugée légitime pour parler de ce sujet. Cela soulève le problème de la légitimité des écrivains quand ils écrivent sur des sujets qui ne leur sont pas personnels.
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Ça y est, c'est mon tour ! Mieux vaut tard que jamais : l'heure est enfin venue pour moi de grimper sur "La Bestia" !
Depuis la parution remarquée d'American Dirt en 2020, nombreux sont les lecteurs qui ont déjà entrepris le voyage infernal sur le toit de ce redoutable train de marchandises, emprunté chaque année clandestinement par des milliers de migrants pour traverser le Mexique et gagner la frontière américaine (*). Tous ces lecteurs (ou presque) parlent d'un livre fort, d'un grand roman, d'une révélation.
Soit, alors tentons l'expérience !
Longtemps après mes petits camarades, je prends donc le train en marche, me cramponne fermement ... et advienne que pourra.

Dès le début ça secoue !
À l'occasion d'une fête de famille, un journaliste mexicain et la quasi-totalité des siens (seize personnes !) sont sauvagement assassinés par les sicarios du cartel le plus puissant d'Acapulco, dirigé par le mystérieux Javier. Sebastián, le journaliste exécuté, venait justement de publier à son sujet un article à charge. Seuls Lydia, la femme de Sebastián, et Luca, leur fils de huit ans, échappent au massacre. Très vite Lydia comprend que le commanditaire de la tuerie, Javier, n'est autre qu'un client de sa librairie, qui la courtise depuis quelques temps et qui, sûr d'avoir été trahi, n'aura de cesse de la poursuivre pour ne laisser derrière lui aucun survivant et assouvir complètement sa vengeance.
La pauvre libraire et son fils n'ont plus le choix : il leur faut prendre immédiatement la fuite, cap au nord, direction l'Eldorado américain. C'est le début d'une interminable traque, et l'occasion pour le lecteur de mesurer toute l'ampleur du drame vécu par les migrants Mexicains, Guatémaltèques ou Honduriens, toujours plus nombreux à risquer leurs vies de misère sur le dos de "La Bestia" dans l'espoir d'un avenir meilleur. D'un avenir tout court.

Et pour ce qui est de nous dépeindre l'indigence absolue de ces clandestins, les impasses totales que sont devenues leurs existences, la faim et la peur de chaque instant, l'insécurité terrifiante qui règne dans ces contrées sans loi livrées aux mains des gangs et des narcotrafiquants, l'auteur n'y va pas de main morte !
Page après page, au fil d'une série de rencontres et de péripéties plutôt répétitives, Lydia et Luca ne cessent de s'enfoncer toujours plus loin dans l'horreur d'un pays décrit sous son jour le plus sombre... Seuls contre tous, sans ressources et accablés par la perte de leurs proches, ils frôlent la mort à chaque embarquement à bord du "La Bestia". La menace est partout, chaque migrant croisé est un tueur ou un violeur potentiel, chaque nuit passée dans un centre d'accueil est une nuit d'angoisse, chaque jour de marche dans la poussière du désert semble plus douloureux que le précédent et chaque patrouille de "la migra" (la terrible police aux frontières constituée de miliciens violents et corrompus) est une nouvelle source de panique. Ça fait beaucoup.
Heureusement dans ce puits de détresse sans fond surnagent quelques compagnons d'infortune dignes de confiance, et une poignée d'âmes charitables offrant de l'eau ou de la nourriture en bordure de la voie ferrée aident nos deux fuyards à survivre. Rares étincelles d'humanité dans une obscurité qui semble sans fin.

Si la force de caractère de Lydia et Luca assurément impressionne, si l'effondrement total et soudain de leur monde effraie, si la somme d'épreuves qu'ils traversent émeut, je n'ai pour autant pas été transporté comme d'autres lecteurs semblent l'avoir été, et la relation un peu ambiguë entre la vaillante Lydia et l'insaisissable Javier (gangster sans pitié capable des pires atrocité, mais aussi père de famille aimant et poète sensible à ses heures perdues...) ne m'a semblé très à propos.
À la longue, la course poursuite trépidante s'est transformée en succession poussive de mésaventures assez prévisibles, et les ficelles utilisées par l'auteur pour susciter notre émotion et notre empathie m'ont semblé un peu grosses. Quant à l'écriture de Jeanine Cummins, simple et directe (phrases courtes, dialogues nombreux, verbes d'action au présent de l'indicatif), elle ne manque ni de rythme ni de spontanéité mais elle ne m'a pas non plus particulièrement enthousiasmé.

En résumé : un sujet fort et cruellement actuel mais un traitement sans grand relief, quelques longueurs, un style plutôt quelconque et des personnages et situations assez stéréotypées qui ne m'ont pas tout à fait convaincu, malgré l'intention parfaitement louable de l'auteur. "J'ai profondément conscience que les gens qui affluent à notre frontière sud ne sont pas une populace anonyme brunâtre, mais des individus à part entière qui ont chacun une histoire, des origines et une raison personnelle de venir ici", écrit Jeanine Cummins dans ses notes en fin d'ouvrage. "J'ai donc souhaité raconter l'une de ces histoires personnelles et uniques - sous forme de fiction - afin d'honorer les centaines de milliers d'autres que nous ne connaîtrons probablement jamais. Ce faisant, j'espère marquer un temps d'arrêt et permettre au lecteur d'entendre les particularités de ces personnes : que lorsque les médias nous montrent des migrants, nous puissions nous souvenir que ce sont des personnes comme nous".
Madame Cummins, puissiez-vous être entendue aux USA et partout dans le monde...


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(*) Pour ceux que ça intéresse, voici un reportage glaçant sur "La Bestia", dont j'ignorais l'existence :
https://www.arte.tv/fr/videos/083369-000-A/mexique-la-bestia/
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J'ai vu beaucoup de très bon avis positif sur ce livre depuis sa sortie cependant j'étais toujours un peu hésitante car j'ai un peu de mal avec tout ce qui concerne la partie cartel/ drogue etc...

Cependant je me suis laissé tentée par ces nombreux avis positif car au final il est plus question ici de la fuite de ces cartels et de la recherche pour elle et son fils d'un lieu sûr ou elle pourra continuer sa vie plus sereinement.

Le restant de sa famille s'étant fait décimer sous ses yeux lors d'une fête familiale, son mari ayant écrit un article sur le cartel d'Acapulco.

Dans ce récit nous alternons entre la fuite de Lydia et sur sa vie passé avec sa famille dans cette ville d'Acapulco qui est petit à petit gangréné par le trafic de drogue.

J'ai trouvé le récit de l'auteur vraiment poignant et plus que réaliste cependant je dois avouer à mon grand regret ne pas avoir ressenti plus d'empathie que cela pour ces personnages.

On se doute des difficultés rencontrés par ces personnages le long de leur périple, les personnes malhonnêtes essayant de leur voler le peu qu'il leur reste, les passeurs, les femmes et les enfants qui sont les premières proies de ce chemin vers leur futur liberté.

Cependant au fil de ma lecture vers la fin j'ai de plus en plus été touché par leur destin, mais j'ai trouvé l'écriture de l'auteur plutôt froide comme si elle nous tenait malgré elle en retrait de son récit.

J'ai tout de même apprécié cette lecture et je lirai à nouveau cet auteur si l'occasion se présente.
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Lydia et son fils de huit ans, Luca, fuient un cartel après l'exécution de leur famille et traversent le Mexique du nord au sud en suivant l'itinéraire des migrants. Ce road movie mexicain écrit par un auteur américain, a été vendu à plus d'un million d'exemplaires et assez étrangement a suscité une vague d'indignation aux Etats-Unis. Quelle est la cause de ce drame ?

Le pitch de ce thriller fleuve tient sur un ticket de métro. Idée assez simple. le traitement est intéressant mais sans effet particulier. J'ai trouvé qu'il souffre de beaucoup de longueurs et de psychologies inutiles. C'est un peu une bonne série Netflix mise sur papier. Alors comment comprendre cette bronca Outre-Atlantique ? C'est peut-être que le sujet est hyper sensible dans ce pays à peine remis de l'ère Trump et de son mur anti-migrants.

La peinture du Mexique par Jeanine Cummins y est sans concession : pays prison, corrompu à l'os, avec ses samaritains et ses traitres. L'homme est un loup pour l'homme, mais cela on le savait ; Cormac Mc Carty l'avait si bien décrit dans Méridien de Sang avec une force incroyable. Don Wislow avait aussi été très clair dans La Griffe du Chien. Donc rien de véritablement neuf... alors ?

Nourri par une recherche documentaire fouillée, le livre est un acte militant. C'est bien ici la source du scandale, les contestataires remettant en question la légitimité de l'auteur. Aïe ! Combien d'autres livres auraient mérité le pilon selon ces censeurs, ces nouveaux moralisateurs ? Raconter la descente aux enfers de cette bourgeoise aisée qui rejoint le sort des migrants d'Amérique nécessite-t-il un certificat d'authenticité ?

Alors mettons sur le côté cette écume qui passera, ce qui est plus intéressant ici est la relation de Lydia avec son fils et celles qu'elle tisse au fil de leurs rencontres ; la sensibilité féminine de l'auteur rend le texte à la fois fluide et riche d'émotions.

En tout cas les lecteurs ont tranché. Ils ont remis la littérature au centre du débat. A lire pour voir.

Thomas Sandorf

Merci à #NetGalleyFrance  pour cette lecture d'#AmericanDirt
Lien : https://thomassandorf.wordpr..
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C'était portant réglé comme sur du papier à musique. L'annonce d'un contrat à sept chiffres pour l'achat du manuscrit, des auteurs en vue comme John Grisham ou Stephen King qui encensent l'ouvrage, nul doute que American Dirt, nouveau roman de Jeanine Cummins, allait connaître le parcours fulgurant du best-seller à l'américaine. Mais peut-on parler d'immigration clandestine, et plus particulièrement de celle issu de la frontière avec le Mexique, lorsque l'on n'est pas soi-même issue de cette communauté ? Aux Etats-Unis où le communautarisme est désormais bien ancré, la question a suscité une polémique au point tel que la romancière a dû interrompre sa tournée pour des raisons de sécurité tandis qu'une pétition signée par une centaine d'auteurs demandait le retrait de l'ouvrage des recommandations de la papesse de la télévision, Oprah Winfrey. A l'heure d'un thème sulfureux comme l'appropriation culturelle qui porte désormais des connotations négatives, une grande partie de la diaspora latino a donc estimé que même si Jeanine Cummins a une grand-mère portoricaine et un mari européen qui fut un temps sans papier, elle n'était pas autorisée à évoquer un sujet si sensible que l'immigration clandestine à une période où un président parlait de bâtir un mur pour régler le problème. Voilà où nous en sommes aux Etats-Unis, lorsqu'il s'agit de choisir le thème d'un roman. Pourtant, même s'il est imparfait ou comporte quelques inexactitudes comme le mentionne certains écrivains, doit-on se priver d'un roman qui évoque le drame quotidien de migrants qui tentent de franchir la frontière américaine, en quête d'un monde meilleurs ? La réponse est assurément non quand bien même pourrait-on éprouver quelques déceptions tant les promesses sont grandes à l'instar d'un bandeau racoleur de Don Winslow évoquant « les raisins de la colère de notre temps ».



Libraire à Acapulco, Lydia est mariée à Sebastián, un journaliste qui traite du sujet délicat des narcotrafiquants qui sévissent dans la région. Alors qu'il publie un portrait du chef d'un des cartels, Lydia découvre qu'il s'agit de Javier un étrange client érudit, fan comme elle de Gabriel Garcia Marques, et avec qui elle s'est liée d'amitié. La parution de l'article bouleverse la vie de Lydia qui doit prendre la fuite avec son fils de huit ans, prénommé Luca et désormais seul survivant du massacre qui a décimé l'ensemble de sa famille. Traqués par les membres du cartel, Lydia et Luca entame le périple des migrants en provenance du sud du continent qui font route vers les Etats-Unis. Un périple dantesque, sur le toit de la Bestia, dénomination des trains de marchandises qui roulent vers le nord. Une route semée d'embûches où il faut affronter policiers corrompus et sicarios déterminés pour franchir cette frontière hostile où le désert devient un piège mortel.



American Dirt débute assurément comme un roman noir avec une mise en scène à la fois subtile et bouleversante où la romancière décline le massacre d'une famille par le prisme de son héroïne et de son fils trouvant refuge dans une salle de bain tandis que les coups de feu résonnent tout autour d'eux. Dès lors il ne s'agit plus que de sensations terribles avec cette mise en exergue de la frayeur latente d'être découvert par les sicarios qui achèvent tous les membres de la famille réunis autour d'un barbecue qui vire à la tragédie. A partir de là, on observe la fuite de Lydia et de son fils Luca qui n'ont pas d'autre choix que prendre la route qu'empruntent tous les migrants du sud du continent américain, afin de trouver refuge aux Etats-Unis. Durant ce parcours dantesque, Lydia se remémore ses liens avec Javier, le commanditaire du massacre, avec qui elle s'était liée d'amitié sans savoir qu'il s'agissait du chef du Cartel de Jadineros sévissant dans l'état de Guerrero. S'attendant à une confrontation avec ce personnage ambivalent qui semblait assez prometteur, on regrettera son absence au fur et à mesure d'un périple qui manque singulièrement d'ampleur pour se concentrer sur la fuite de Lydia et De Luca, deux personnages attachants qui se fraient un chemin dont les embûches semblent se régler miraculeusement, un peu à l'américaine, à l'instar de la manière dont ils trouvent le moyen de combler le manque d'argent qu'ils doivent remettre à leur passeur. On assiste ainsi à une succession de rencontres comme celles de Rebeca et Soledad, deux soeurs au parcours terrible qui viennent du Honduras ou de Beto, une jeune garçon asthmatique que Lydia prend sous son aile. Une manière comme une autre de découvrir des parcours différents de migrants qui semblent pourtant sonner assez faux en se demandant, entre autre, comment ces individus ont pu amasser une somme si importante pour franchir la frontière. Parce qu'en se concentrant sur la fuite de Lydia et De Luca, Jammie Cummins semble oublier l'ensemble de la situation des migrants avec une vision assez étriquée du problème occultant ainsi une vision globale de la situation qui n'en fera donc pas « les raisins de la colère de notre temps ». Toutefois, même si le récit est effectivement truffé d'inexactitudes ou d'approximations quand ce ne sont pas tout simplement des stéréotypes à l'image d'un Mexique qui semble uniquement gouverné par les trafiquants, on appréciera cette aventure qui a tout de même le mérite de nous donner l'image de ce que peut être l'enfer que vivent ces migrants en tentant de franchir la frontière en quête d'une vie meilleure.



Parfois traité sur un mode un peu trop sensationnaliste, American Dirt devient un thriller assez convenu dont on devine un épilogue à l'américaine, assez commun, qui décevra quelque peu des lecteurs qui attendaient, tout comme moi, beaucoup de ce roman que l'on disait pourtant prometteur. Décevant au final.



Jeanine Cummins : American Dirt (American Dirt). Editions Philippe Rey 2020. Traduit de l'anglais (Etats-Unis) par Françoise Adelstain et Christine Auché.



A lire en écoutant : La Pistola Y El Corazón de Los Lobos. Album : La Pistola Y El Corazón. 1988 Slash Records Inc.
Lien : https://monromannoiretbiense..
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