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3,22

sur 191 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Quelle superbe écriture. Ciselée, poétique, pleine d'arabesques, sensuelle par moments.

C'est surtout cette écriture qui m'a fait aimé ce livre, cette magie dans le style et la narration, et, en arrière-plan, le pouvoir de l'écriture et du livre, capable chez Zabor de repousser la mort. Qu'en sera-t-il de celle de son père alors qu'il a été jeté dans le désert avec sa mère répudiée ?

Conte plus que roman, fait d'aller-retour, de soubresauts : il est malgré ses 300 pages, peut-être un peu trop long. L'écriture est belle, mais l'histoire ne m'a pas emportée. J'ai de loin préféré son Meursault, contre-enquête. Mais je suis difficile, c'est un bon moment de lecture quand même.
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Même si on a déjà beaucoup entendu parler de Kamel Daoud, Zabor n'est que son deuxième roman... et le dernier à ce jour. Après l'exercice qu'était Meursault contre-enquête (un roman réponse à l'Etranger de Camus, il fallait avoir l'audace de le faire tout de même !), ce Zabor semble très vite être beaucoup plus personnel. Le romancier Daoud y cherche son style, raconte en partie son histoire à travers son personnage principal (Zabor est le nom arabe du livre des Psaumes, écrit par David... Daoud en arabe...).

L'ode au livre, à la lecture, à l'écriture traverse tout le roman... et une contestation osée (mais qui n'étonnera pas chez Daoud) de l'existence d'un Livre Unique qui aurait réponse à tout. La découverte des diverses langues de l'Algérie se fait dans le mystère, elle sont longtemps non nommées et pourtant si faciles à deviner entre les lignes : l'algérien (darija), l'arabe et le français, tout ce qui a construit l'identité de l'auteur. Le côté fable est très présent avec le pouvoir donné à l'écriture, celui de maintenir en vie, de sauver de la mort; littéralement et effectivement dans le roman, mais on ne peut que penser à l'écriture qui permet de garder une trace dans l'histoire pour les générations futures mais aussi de l'écriture comme rempart contre l'obscurantisme, comme parapet face à la folie où pourraient nous plonger les horreurs de ce monde.

Alors que son premier roman était "tenu" par l'impératif du face à face stylistique avec Camus, Daoud se trouve ici à nu, avec pour seule obligation son envie de trouver sa langue pour parler à son lecteur. La quête du personnage principal devient la quête de l'écrivain. On est toujours tenté par la référence à des grands anciens, et j'ai retrouvé un peu du réalisme magique d'un Garcia Marquez (le village parfaitement décrit, mais également totalement décalé par une part de surnaturel). Les trouvailles métaphoriques sont légion, là encore comme celles que Zabor finit par trouver au bout de sa quête. Même le ressassement qui pousse à une répétition lancinante de certaines tournures, de certains événements inlassablement repris à l'identique, ce ressassement est aussi celui de Zabor qui n'avance dans sa conquête de l'écriture d'imagination que par cercles successifs, lui ouvrant de plus en plus l'espace au sein du village. Le rapport au temps est totalement torturée (des passages en italique invoquent le présent au milieu du récit pas forcément chronologique de la vie de Zabor).

On sent un romancier en formation, fort de bases solides mais cherchant encore sa voix, mais plein de tellement de promesses qu'on attend avec impatience un troisième roman. On se consolera en attendant avec les récits non-fiction et les chroniques du journaliste Daoud.
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Après avoir lu avec beaucoup d'intérêt "Meursault contre enquête sorte de suite au roman célèbre de Camus L'étranger et son livre de chroniques Mes indépendances je viens de terminer son dernier livre,un roman Zabor ou les psaumes paru il y a quelques jours chez Actes Sud comme les précédents.
Ce roman est dans une veine nouvelle et se présente comme une sorte de conte (mais on aimerait en connaître le côté autobiographique!) dans lequel un jeune, dans un village reculé d'Algérie mène une vie à part car il a un don, du moins le croit- il et le croit- on autour de lui, celui de faire reculer la mort en écrivant sur ceux autour desquels rode la faucheuse.
Ce jeune éloigné par son père remarié dés son plus jeune âge vit chez une tante célibataire et son vieux grand père dans un village aux portes du sud. Cette tante qui ne s'est jamais mariée passe une partie de son temps devant des films de la télévision en noir et blanc et le jeune narrateur lui traduit les sous-titre en français comme le jeune Albert Camus traduisait a sa grand mère les sous titre des films muets de l'époque.... Ce village colonial avec un bas et un haut, avec ses maisons pas finies, avec son cimetière européen abandonné où se retrouvent quelques jeunes désoeuvrés ou voulant boire en cachette, avec ses clôtures faites de figuiers de barbarie vit dans une sorte de léthargie et seule l'imagination permet au jeune narrateur de s'en accommoder.
A cause de son don il se rend, à la demande de la famille, auprés de son père mourant, celui-là même qui l'a exilé dans la maison du bas avec sa tante pour qu'il tente d'éloigner la mort en écrivant.
Voilà le cadre mais l'essentiel est une réflexion sur la langue ou plutôt sur les langues et sur l'écriture. D'abord les deux langues de son enfance, l'arable littéraire de l'école et l'arable courant de la maison.En ce qui concerne l'arable littéraire il écrit "Jamais je ne parvins a en faire un rite; ce n'est ni sa faute ni la mienne mais celle de ceux qui la présentèrent comme un bâton et pas comme un voyage,comme un langage de Dieu à peine permis aux hommes, et cela me rebuta dés mon enfance. La vérité est qu'elle était mal enseignée, par des gens frustes aux regards durs. Rien qui puisse ouvrir la voie au désir."
Par ailleurs le concours avec l'arabe dialectal va ,aussi, l'écarter de ces langues. "D'un coup,parce que passibles d'être désignés par deux langues (dont l'une est celle de Hadjer,qui continue de dérouler sa parole derrière la porte), les arbres de la maison,les murs, la vigne, les cuillères et même le feu prirent un visage étranger. C'est de là que datent ma maladie et mes premiers tourments"
Il va ensuite lire de vieux livres laissés par les français et il fait dans ce roman un très bel éloge de la lecture qui, dans le fond l'a constitué.
"Pourquoi écrit-on et lit - on des livres? Pour s'amuser répond la foule, sans discernement.Erreur;la nécessité est plus ancienne,plus vitale.Parce qu'il y a la mort,il y a une fin, et donc un début qu'il nous appartient de restaurer en nous,une explication première et dernière"
Et ce qui va l'amener à écrire ce sont quelques livre et,en premier lieu Robinson Crusoé et son perroquet, un vieux livre "La chair de l'orchidée" qui va l'éveiller a la sensualité, les Mille et une nuits à l'imagination mais aussi, peut être, un traumatisme né du mouton sacrifié sous ses yeux un Aïd Kebir, traumatisme qu'il décrit si fortement!
Ce don de l'écriture est aussi une prison pour lui :"Je savais que j'étais prisonnier de mon don et d'Aboukir ( L'Algérie!),que je ne pouvais pas quitter ni rester immobile et inactif. Voyageur par l'imaginaire je devais y demeurer pour maintenir en vie les miens, les façades des murs, les vielles maisons, les arbres et les enfants malades et les poteaux et même les cigognes et les objets incongrus." (N'est-ce pas là le destin de Kamel Daoud lui-même menacé mais demeurant dans son pays?)


Ce roman est foisonnant et il mérite d'être lu et relu et comme tous les grands textes on n'en épuise pas tout le sens. La critique que j'attends va y trouver beaucoup de ce qu'est aujourd'hui Kamel Daoud cet intellectuel courageux et engagé qui a réussi a s'extraire d'un milieu qui ne devait pas le conduire là où il est aujourd'hui et c'est cette métamorphose qu'il nous présente dans ce conte qui est aussi, selon moi, une sorte d'autobiographie, un roman de la formation, un peu les Mots de Jean Paul Sartre ou Si le grain ne meurt de Gide mais en moins direct.
Lien : https://jpryf-actualitsvoyag..
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"Zabor ou les psaumes" est un merveilleux conte sur le pouvoir salvateur de l'écriture, emplit de poésie, de lyrisme et de splendides métaphores.
"Ecrire c'est écouter un son, le préserver et tourner autour, sans cesse, pour tenter d'en rendre la mélodie, s'en approcher le plus possible pour le conduire de l'oreille à la bouche".
Zabor, personnage principal, est orphelin de mère et rejeté par son père. Très proche de sa tante, dont il voue une certaine admiration, il cultive sa différence, d'une part dans son rapport à la religion, et d'autre part car il est le seul à savoir écrire.
Il nous décrit sa relation au Livre Sacré parallèlement à son apprentissage de l'écriture.
A huit ans, il se sent comme investit d'une mission, celle d'écrire pour prolonger la vie des morts. C'est dans un cahier nominatif et au titre très personnalisé qu'il appose ses écrits.
"L'écriture a été inventé pour fixer la mémoire".
Selon sa loi, il dispose d'un sursis de trois jours entre la rencontre avec l'agonisant ou un passant, et le moment de sa mort.
"Je suis responsable d'un ordre mais aussi d'un équilibre, un gérant de la gravité par l'usage de la langue."
Puis Zabor se retrouve face à un choix de conscience. Face à son père mourant, doit-il exercer son don afin de prolonger sa vie ?

Un roman magnifique à découvrir...notamment pour les passionnés d'écriture qui ne pourront y rester insensibles !


Lien : https://missbook85.wordpress..
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Zabor a un don. Celui de prolonger la vie des gens qu'il croise en écrivant. Un peu à la manière de Shéhérazade dans les Mille et une nuits, il raconte des histoires à la Mort pour la faire patienter. Comment a-t-il trouvé son don ? C'est ce qu'il nous raconte (ou le raconte-t-il à la mort ?) en essayant de ramener son père à la vie. Ce père qui l'a abandonné à la mort de sa mère et auquel il a des comptes à rendre.
J'ai eu beaucoup de mal à entrer dans le récit. Il m'a bien fallu une bonne cinquantaine de pages avant de me laisser bercer par la plume de l'auteur. J'ai été perturbé par la double narration. La typographie oscille entre italique entre parenthèse, et typographie normale. A la fin du roman, je ne peux toujours pas dire ce qui relève de l'écrit du narrateur, et ce qui relève de son histoire. Tout est imbriqué et laisse le lecteur étourdit de tous ces récits.
Zabor nous livre une réflexion sur la mort, le but de chacun sur cette terre. Cette notion de trace qui va rester ou non de nous après notre passage. Il nous montre l'importance des mots, des livres qui permettent de se souvenir des gens et de leurs histoires, même s'ils ne sont plus là.
Un livre envoûtant, à partir du moment où les mots ont pu nous happer.
Lien : http://laptitesourisduweb.si..
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Dans la Bible, Abraham s'apprête à sacrifier son fils Isaac pour obéir à Dieu ; dans le Coran, c'est Ismaël qu'Ibrahim s'apprête à sacrifier. Dans les deux cas le sacrifice est reporté sur un bélier....
Zabor, dont le véritable prénom est Ismaël est un jeune homme doué du pouvoir d'écrire. Ses récits permettent de prolonger la vie des habitants du village d'Aboukir mais à son détriment, Zabor à la voix chevrotante vit en effet sous la méfiance, voire la risée des gens du village. Ce jeune homme ostracisé par son propre père vit pour faire vivre les autres !
Ce roman est un récit mystérieux, un psaume dédié à la vie et à la puissance du verbe.
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Dans une démonstration éclairante du pouvoir absolu de la langue et de l'écriture, Kamel Daoud revient avec ce subtil mélange de fable et d'autobiographie qu'est « Zabor ou les psaumes ».
Derrière ce titre énigmatique se cache l'histoire de Zabor, enfant rejeté par son père, le boucher du village qui ne voit en lui que honte et faiblesse. Elevé par sa tante, le jeune garçon se réfugie dans les livres qu'il dévore littéralement. Comme une sorte de compensation que lui offre le destin, Zabor se rend compte peu à peu qu'en racontant à son tour la vie des mourants, il détient le pouvoir de faire reculer la mort grâce à l'écriture. C'est alors que Zabor est appelé au chevet de son père mourant.
Kamel Daoud pousse à son paroxysme la puissance de la langue et de l'écriture qu'il transforme en pouvoir suprême : celui d'éloigner la mort créant ainsi un lien de nécessité entre l'écriture et la vie. Dans cette fable métaphysique à la manière des Contes des Milles et une nuits, l'histoire des mourants devient la voix de l'humanité mêlée au chant de la littérature.
Dans ce roman, l'auteur oppose les textes au Texte sacré. Les textes multiples qui élèvent la pensée et ouvrent l'horizon de nos esprits face au Texte sacré, unique, qui enferme dans une parole désincarnée et menacée par le poids d'une religion qui oppresse. Un récit fiévreux et emporté où tout se tient dans les mots. Des mots d'une précision limpide et absolue, éclairés par une poésie sensuelle et lumineuse.
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4 étoiles pour la belle écriture incantatoire. Mais trop de circonvolutions, trop cérébral, trop long, tout de même assez fastidieux à lire.
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Ce livre ne s'est pas offert à la première approche, j'ai dû besogner pour en atteindre la substance, acceptant de poursuivre un chemin incertain parmi les mots, comme des cailloux semés pour conduire vers le dénouement. Suis-je parvenu à l'aboutissement de ma quête ? Non, si mon rêve était de saisir un message. Oui, s'il était de faire le voyage que nous propose Kamel-Daoud dans une pensée, une philosophie du monde et de l'existence. La force de cette fable, construite au rythme d'un long poème, est peut-être simplement de nous conduire vers une part de nous-mêmes. Dans ma grande candeur, comme si ce n'était pas vrai pour chaque bon roman, j'ai eu au fil du récit comme la révélation que ce livre était important et qu'il disait des choses importantes, mais que si j'en saisissais certaines, d'autres m'échappaient sans espoir.
La trame en est pourtant simple, le narrateur a le pouvoir de garder vivants tous ceux dont il écrit la vie. Dans le village où il demeure, il est l'objet de la crainte et du mépris. Son père ne l'a pas aimé, et il va mourir, alors pourra-t-il le sauver ? Mais le personnage principal est-il le narrateur ? N'est-ce pas finalement l'écrit, élevé au rang de mythe, qui s'incarne dans ce texte, comme le bras armé de l'émancipation, de la lutte contre l'obscurantisme et pour une liberté absolue de la pensée. Ce n'est pas un hasard que Shéhérazade soit convoquée dans l'histoire, elle qui sauve, par son courage et son talent de conteuse, toutes les femmes de la cruauté du Sultan, et qui, par la force des mots le rend meilleur. Zabor est un hommage à la littérature qui nous émancipe de la pesanteur du monde, nous rend libres, fait de nous des vivants.
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Kamel Daoud est un merveilleux conteur. Avec Zabor ou les psaumes, c'est donc, un conte philosophique, poétique, sur la passion, pour les livres, pour les langues, et au dessus de tout pour l'écriture. A travers son personnage, on perçoit aisément que c'est lui qui parle. Le roman est construit autour de l'histoire d'une famille algérienne, peut-être celle de l'auteur, racontait à travers l'éducation d'un enfant qui devient homme. Ismaël orphelin de mère, est indésirable aux yeux de sa belle-mère. Son père, Hadj Brahim, un riche éleveur de moutons, boucher et surtout sacrificateur rituel, vit avec sa nouvelle famille dans la maison du haut du village d'Aboukir, il installe ce fils, une de ses soeurs sans enfants, (la tante Hadjer) et son père (Hadj Hbib) dans une seconde maison en bas du village. L'enfant, parle un peu le français des colons, mais il apprend à lire en arabe à l'école coranique, enseignement basé essentiellement sur l'étude du Livre Sacré. Puis, il apprend de lui-même à lire le français, en découvrant des livres qui vont ouvrir son esprit. Il se passionne pour le mythique Robinson Crusoé, dans lequel il découvre l'importance du perroquet Poll, pour les Milles et une nuit, pour Moby Dick, pour le Seigneur des anneaux, avec La chair de l'orchidée il découvre la sensualité et tant d'autres qui le font voyager, lui qui est condamné à cet exil familial. Avec ces lectures, il découvre la puissance de l'écriture. Dans une foule de cahiers, il écrit, persuadé que ses écrits vont prolonger la vie de ceux sur qui il écrit, comme Shéhérazade prolonge sa propre vie en contant des histoires au Roi de Perse. Il devient Zabor et qualifie ses textes de psaumes. A ses cahiers il donne les titres des romans qui l'ont émerveillé. Il est ébloui lorsqu'il découvre que des images se révèlent être des métaphores. Il fait un formidable éloge de l'oeuvre de Daniel Defoe, et compare son île d'isolement à celle de Robinson. A l'image du perroquet Poll, les sentences de bon sens sont énoncées par un animal, en l'occurrence un chien anonyme. Heureusement que pour se construire il a auprès de lui sa tante Hajder qui se substitue à sa mère, et son grand-père bien que celui-ci soit atteint d'une maladie qui lui fait perdre la parole et la mémoire. Certaines descriptions sont fabuleusement belles, notamment celle sur le décès dans ses bras de son grand-père, ou criante de vérité, notamment le sacrifice des moutons pour la fête de L'Aïd. Mais ce qui m'a fasciné dans ce roman, c'est la passion pour les livres, pour la langue et pour l'écriture.
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