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Un roman fort comme tous les livres d'Erri de Luca qui amène à réfléchir justement sur la question suivante, Un soldat doit-il réfléchir et en a t-il le droit ? le tout soutenu comme toujours chez Erri de Luca par une fort belle écriture ... et un portrait bouleversant de femme ou plutôt devrais-je dire de fille meurtrie par le passé de son père...
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Première découverte des écrits de Erri de Luca avec le tort du soldat. A travers une écriture fluide et cadencée, l'auteur aborde plusieurs points de vue : celui du narrateur bien sûr mais également celui de la fille du soldat, jamais nommée. Ici, ce sont surtout la langue et l'écriture qui sont au coeur de l'histoire. du point de vue du narrateur, la nécessité de retrouver la langue yiddish, de la prononcer et de la faire vivre comme un témoignage de l'oppression et de la survivance de ses orateurs. de l'autre, un soldat, vu à travers les yeux de sa descendance, qui recherche, dans les mots yiddish sa propre perte et la défaite du nazisme.
Ainsi, de mots en mots, ce sont deux visions opposées de la défaite et de la guerre qui se confrontent. En très peu de pages, et même si l'oeuvre aurait pu gagner en intensité en faisant de ses personnages des êtres attachants et non seulement des témoins, l'auteur parvient à l'essentiel : lire, écrire, prononcer une langue chérie et lier ses personnages grâce à elle. L'ensemble reste ainsi intéressant et a le mérite d'interroger sur ce qui reste de la pensée, des croyances et de l'idéologie après la mort et la défaite. La langue devient alors un refuge et une expérimentation, ce qui donne à ce court roman des allures de petit essai. Une oeuvre délicate bien que violente à sa façon. A découvrir.
Lien : http://leblogdeyuko.wordpres..
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« Pour toi, toute coïncidence est un hasard, parce que tu ne veux ni voir ni connaître. Et pourtant, tout est écrit dans ces sommes égales. » Ainsi l'ancien criminel de guerre nazi parle-t-il à sa fille de ce qu'il vient de découvrir, dans sa vieillesse : « la kabbale était le noyau ignoré du nazisme ». le tort de ce soldat en est conforté, non pas qu'il regrette ses crimes, mais plutôt son ignorance d'alors, car le Tort du soldat, ce fut la défaite.

Erri de Luca a construit un double récit remarquable dans lequel il n'y a pas de hasard. Sa rencontre dans un refuge de montagne avec ce criminel et sa fille n'est pas fortuite. Amoureux des grands espaces parmi les cimes ou sur les mers où tout semble libre, ce roman est parfaitement ordonné selon des calculs qu'il a fait siens.

« J'ai fermé les yeux, je me suis endormi une minute, car je ne sais pas prier. » Puis, les ayant rouverts, il a écrit cet hommage à un peuple et à une langue, le yiddish, qu'il a voulu apprendre, pas simplement parce qu'elle a de commun, avec son napolitain natal d'être « expertes en misères, émigrations et théâtres. »

Erri de Luca n'est pas croyant, pourtant il a déjà écrit de nombreuses lectio divina, publiées en plusieurs épisodes par Gallimard. La fille du criminel nazi ne croit pas en dieu non plus, mais elle sait qu' « en hébreu, un des noms de la divinité signifie : « Ce qui suffit ». (…) Je ne suis d'aucune foi, mais pouvoir s'adresser à « Ce qui suffit » doit être une bonne ressource. »

C'est également ce que l'on peut dire de ce dernier ouvrage paru d'Erri de Luca, qui a bien mérité le prix Jean Monnet 2014 de littérature européenne.
Lien : http://tmblr.co/Z4Dxcn1MpaUVM
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Le tort du soldat, si l'on en croit cet ancien criminel de guerre, c'est la défaite. Celle qui pousse à fuir, à s'exiler, à changer d'identité et d'apparence avant de regagner son pays d'origine. Celle qui fait vivre dans la crainte d'être reconnu malgré tout. Celle qui fait que sa propre fille ignore son vrai nom. Tous deux mangent un soir dans une petite auberge. A la table voisine, l'autre narrateur, marqué par une visite dans les camps de la mort et occupé à une traduction d'un texte en yiddish et inconscient de ce qui se joue juste à côté.

Il s'agissait de ma première rencontre avec Erri de Luca. Si j'ai aimé sa plume, à la fois précise et poétique, ainsi que l'histoire, je suis malheureusement restée sur ma faim et un peu extérieure au récit. Extérieure, à cause des détails concernant le yiddish et la kabbale, dans lesquels je ne suis pas totalement entrée, notamment les liens chiffrés entre les textes et autres prédictions qui ne m'ont absolument pas passionnée. Sur ma faim, à cause de la brièveté du récit, et plus particulièrement dans sa deuxième partie, narrée par la fille de l'ex-nazi. Cette partie, soyons franche, m'intéressait nettement plus que la précédente, surtout pour les questions qu'elle pouvait amener, sur le choix, la culpabilité, le remord, la responsabilité, la filiation. Comment vit-on, comment se construit-on, lorsque l'on se découvre, jeune adulte, enfant d'un criminel de guerre? Comment voit-on dès lors ce père qui, d'un instant à l'autre, révèle une vie totalement différente de celle racontée jusque là? Comment se construit-on lorsque l'on apprend que notre identité n'est qu'un faux nom? Comment mêle-t-on l'histoire et L Histoire? Malheureusement, la brièveté du récit et la quasi sécheresse du compte-rendu de la narratrice ne m'ont pas permis d'obtenir toutes les réponses aux questions que je me posais.

Un rendez-vous manqué, donc, sans doute parce que j'en attendais autre chose (encore n'avais-je pas cette attente avant de commencer ma lecture : elle n'a émergé qu'au cours de celle-ci). Je pense néanmoins provoquer une nouvelle rencontre avec cet auteur, parce que j'ai le sentiment que son écriture pourrait me plaire. A confirmer, donc, à l'occasion...
Lien : http://margueritelit.canalbl..
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Quel roman !! c'est passionnant de lire l'histoire de cet homme adepte du yiddish et de cet autre homme qui sans jamais se sentir coupable a participé à l'horreur du siècle dernier (enfin une des horreurs, il y en a tant), sans état d'âme.
Un parallèle qui a finalement un dénominateur commun : la fille du soldat qui crois retrouver un ami d'enfance..
C'est très beau, très rapide à lire et ça fait réfléchir sur beaucoup de sujets, notamment le sort des enfants des tortionnaires
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Pourquoi ai-je mis la note de 3/5 à ce livre ? le titre est alléchant et trompeur. le tort du soldat serait d'avoir perdu la guerre. Il serait alors dans son droit, le seul qui vaille, celui d'avoir fait son devoir. Mais pour un soldat allemand de la 2ème guerre mondiale les génocides ne seraient rien. Malheur au vaincu. Rhétorique célèbre. Une fois de plus, Erri de Luca se livre à son sport favori. Faire bref et long à la fois. Son amour du Yiddish et du mysticisme nous emmène trop longuement sur les seuls textes sacrés Hébreux. Avec un tel sujet on attendait davantage de réflexion sur la condition du vaincu pris dans le recul de l'histoire. le texte, pourtant court, s'étire sur les relations chiffrées qui se trouveraient dans les écrits et la prédictivité de ces textes. Pas très intéressant tout cela. le criminel de guerre tenterait-il de se repentir ou de comprendre ce qu'il aurait aimé détruire, ce pour quoi il était soldat ? Nous restons sur notre faim, nous ne sommes même pas invités à nous poser la question. le tort du lecteur est d'attendre une petite lumière de ce livre.
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Un récit lumineux d'Erri de Luca. Texte en 2 parties avec 2 narrateurs différents pour donner à lire les 2 versants de l'histoire.
Les thèmes récurrents chez Erri de Luca sont bien présents et toujours aussi bien traités : l'enfance (la mer, l'apprentissage), le yiddish (l'apprentissage de la langue, sa traduction, son importance), l'Histoire du XXème siècle (la Shoah), l'escalade, le rapport à la nature et bien entendu la notion de "traces".
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Incroyable, je n'ai pas vraiment réussi à entrer dans ce petit livre, moi qui suis un admirateur de Erri de Luca! J'ai pourtant pris beaucoup de plaisir dans les 20 dernieres pages ou j'ai retrouvé, au delà de l'écriture poétique, des themes forts qui font échos à d'autres livres comme "Tu, Moi" ou "Les poissons ne ferment pas les yeux"....pas le meilleur livre de Erri pour moi...
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N°767 – Juillet 2014.

LE TORT DU SOLDATErri de Luca - Gallimard.

Le narrateur se voit confier la traduction en italien de l'oeuvre d'un écrivain juif inconnu en Italie. Il explique pourquoi le yiddish est une langue riche et l'attachement qui est le sien à sa littérature. Il parle d'une rencontre fortuite dans un restaurant des Dolomites avec un vieil homme et une jeune femme. Pour lui les livres ont peuplé son enfance et chacun était pour lui une fenêtre sur le monde. Plus tard l'extermination des Juifs par les nazis l'a bouleversé, il a visité certains camps pour s'imprégner de la souffrance et de la mort injustes de ces gens, a évoqué leur résistance héroïque dans le ghetto de Varsovie, les grandes figures qui l'inspirèrent et les écrivains survivants qui en portèrent témoignage.

Puis vient le récit plein de bon sens et parfois de naïveté de la jeune femme qui était en compagnie de l'homme à côté de la table du narrateur. Elle est allemande et l'homme qui l'accompagne est son père, un ancien tortionnaire nazi dont le seul tort, de son point de vue, est d'avoir été vaincu. Elle narre son histoire personnelle où ses parents lui ont sciemment caché la vérité, son père changeant de nom et de visage et se cachant sous le masque d'un aïeul pour ne pas avoir à lui avouer qu'ils était un criminel recherché. C'est le départ de sa mère qui provoque cette révélation et elle cherche à comprendre ce père qui campe toujours sur les certitudes de l'idéologie nazie. Il y a une sorte de complicité du silence entre elle et ce vieil homme qui finit par s'intéresser aux subtilités de la kabbale, aux mystères de l'alphabet et de la grammaire hébraïque et même y puiser les raisons de l'échec d'Hitler. Pourtant il est fier de ce qu'il a fait, redoute un éventuel procès et sa sentence et n'entend même pas se justifier en se cachant derrière les ordres reçus, sa seule faute ayant été la défaite de l'Allemagne. Dans son attitude il y a une sorte de défi. Il craint d'être pris puisqu'il est inscrit sur la liste des criminels recherchés, mais il quitte l'Amérique du Sud où il s'était réfugié, rejoint sa ville de Vienne et accepte pendant de nombreuses années un poste de facteur qui, dans sa tournée, a de centre Simon Wiesenthal ! Pourtant la compréhension de sa fille ne va pas jusqu'à porter le vrai nom de son père et elle se fait même stérilisée pour ne pas avoir d'enfant et ainsi ne pas transmettre les gènes de son père.

Ce récit évoque la rencontre avec le narrateur dans cette auberge des Dolomites et le vieil homme se croit découvert à cause des caractères yiddish des documents que le narrateur est en train de traduire à la table voisine. Pire peut-être, le côté paranoïaque qu'il a développé pendant toutes ces années de cavale reprend le dessus et il voit là un avertissement prélude à son arrestation puis à son exécution alors que, pour sa fille, l'image du narrateur lui évoque un agréable souvenir d'enfance. Ce quiproquo le délivre de la vie en même temps que sa fille est sauvée in-extremis dans l'accident de leur voiture, libérant cette dernière du contrat tacite qui la liait à son père.

Ce sont donc deux récits croisés offerts au lecteur avec une écriture simple, dépouillée et fluide, une évocation de l'angoisse de devoir, toute sa vie, supporter un mensonge pour la jeune femme et pour le vieil homme la certitude aveugle non seulement d'avoir fait son devoir en obéissant aux ordres mais, ce faisant, d'avoir bien agi.


©Hervé GAUTIER – Juillet 2014 - http://hervegautier.e-monsite.com
Lien : http://hervegautier.e-monsit..
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Hasard ou nécessité ?


L'auteur-narrateur, parti faire de l'escalade dans les Dolomites croise, un soir, dans une auberge, un couple insolite : un vieil homme et sa fille.

Cette rencontre est la source des deux récits qui s'enchaînent. Dans le premier, Erri de Luca raconte comment un éditeur lui a demandé de choisir et traduire des textes de d'Israel Joshua Singer, frère du Nobel Isaac Bashevis, inconnu du lectorat italien. C'est l'occasion pour lui de relater son parcours : son voyage en Pologne, sa visite du ghetto de Varsovie et celle du camp de Birkenau, son apprentissage de la langue yiddish, dont il dit qu'elle « n'est pas morte si un seul homme au monde peut encore l'agiter entre son palais et ses dents, la lire, la marmonner, l'accompagner sur un instrument à cordes », et ses choix de traducteur.

Le second récit est pris en charge par la jeune femme rencontrée à l'auberge. Elle a vingt ans quand sa mère quitte le foyer ; elle découvre alors que celui qu'elle croyait être son grand-père est en fait son père. C'est son parcours d'ancien criminel nazi qu'elle raconte. Il n'a ni remords ni regrets et estime que son seul « tort de soldat » est d'avoir été du côté des vaincus. Il s'est mis à déchiffrer l'hébreu pour comprendre le mystère de la défaite nazie dont il affirme qu'elle était annoncée dans la Kabbale, le texte mystique de la culture juive.

Deux récits dans lesquels s'expriment donc un rapport différent à la mémoire ainsi qu'à la langue et à l'alphabet hébraïque ; pourtant les deux hommes se réclament d'une même approche de la « pure vérité ».

Tout l'art d'Erri de Luca, simplicité et intensité, en moins de 100 pages !

Ecouter l'auteur parler de son livre dans "Du jour au lendemain", l'émission d'Alain Vienstein sur France Culture :
Lien : http://www.franceculture.fr/..
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