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Après des années passées en Argentine, le narrateur, italien, est rentré au pays. C'est un homme de cinquante ans, un jardinier, avec un passé lourd comme un cheval de trait.
Dans le bistrot où il s'arrête quotidiennement pour déjeuner, il est abordé par une jeune femme d'une trentaine d'années au nom qui sonne « comme le début d'une chanson lorsque tu en apprends la musique au vol et plus tard les paroles », Làila, « qui va avec les hommes pour de l'argent ».
Entre eux naît aussitôt un amour naturel, spontané, un « amour à vapeur », qui a la force et l'attraction de celui que l'on n'attendait pas.
En l'homme pourtant il y a encore tant d'Argentine, ce passé qui se conjugue encore au présent lorsqu'il en livre quelques bribes. Les traits de son visage ne parlent que de ça, de la guerre, de la dictature qui sévissait là-bas…sa bien-aimée Dvora arrachée à ses bras, exécutée, jetée pieds et poings liés à la mer, les tueries, les armes que l'on prend pour le combat ou pour le désir de vengeance, et puis les années passées à fuir, à arpenter terre et mer, pour enfin se retrouver sur le sol d'origine, à chercher la paix dans les gestes simples du quotidien, émietter un peu de sauge du bout de l'ongle, tourner les pages d'un livre, boire le café avec l'Africain Selim ou « écouter les comètes, les planètes, les amas et les essaims » comme le font les arbres qu'il plante.
Si une vie d'homme dure comme celle de trois chevaux, l'homme sait au fond de lui que son deuxième cheval est sur le point de mourir alors il vit simplement l'instant présent, sans penser à demain car « que sais-je de demain ? Ici, il y a tout l'aujourd'hui qu'il faut. »

Une fois n'est pas coutume, le napolitain Erri de Luca nous envoûte par la force et la grâce de phrases mesurées, assainies, filtrées au tamis du coeur pour en extraire l'essence universelle, celle qui nimbe les êtres et les choses d'un parfum d'absolu.
Il faut être Erri de Luca, ou peut-être faut-il être italien (?), pour dire l'amour comme cela, avec des mots qui sortent de terre comme des pierres qui se transforment en fleurs. Des mots tordus comme des ceps de vigne cherchant le soleil, des lignes comme de jeunes pousses affleurant du sol et tirant vers le ciel, des phrases au goût de terre, de ciel et d'eau, toutes simples, mais si lumineuses, graves mais si magiques, mélancoliques mais pas nostalgiques.
« Trois chevaux » évoque la dictature militaire argentine des années 1980, l'amour, la constance, l'amitié, les choix et les interrogations de l'existence, avec cet art de la retenue, de l'équilibre, cette circonspection dans la narration qui caractérisent l'auteur depuis « Tu, mio», « Arc en ciel » ou « Une fois, un jour », cette façon de dire en laissant avant tout ressentir, percevoir et humer, afin de nous envelopper d'émotions intenses et durables.
Assurément, un grand et superbe texte.
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Voici quelques jours que j'ai achevé la lecture de ce livre et je ne pouvais pas m'en détacher.
C'est un livre très court mais magnifique, très intense et profond : mesyeux lisent et voient les personnages et mon nez sent les odeurs, c'est très important les odeurs de la sauge, de l'ail, du vin etc.
L'histoire est simple : un homme de 50 ans jardinier rencontre une femme plus jeune dont il va découvrir le métier plus tard.
Ce livre a été pour moi une respiration. Ne pas penser, pas de philisophie, juste sentir et ressentir les choses, s'arrêter un peu, se poser....
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J'avais déjà lu,il y a plusieurs années. Je viens de le relire et j'en suis émue.
"car il est bon que le temps nous accomplisse"
Trois chevaux est une oeuvre difficile,ou plutôt,exigeante,introspective, qui ne se laisse pas absorber rapidement. Il faut la lire lentement,en scandant intérieurement chaque parole. Ce n'est qu'avec de le patience qu'on pourra recueillir, savourer les nuances colorées et passionnées de la pensée de l'auteur.
Il faut se défaire de la lecture rapide des romans actuels.
C'est un livre qui emporte une part du lecteur et qui réussit à l'émouvoir ; ce lecteur attentif ne sera plus le même.
Erri de Luca parle du vent,de la terre,des arbres,des fleurs et des parfums.
De son amour pour la nature,les femmes,la sagesse, les livres.
(merci à l'ami italien dont je me suis inspirée)
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Je ne connaissais pas du tout cet écrivain et c'est grâce à à des Babeliots de mes amis (Endymion et Marina53) que j'ai eu envie de le découvrir.

Je voulais lire « le poids du papillon », mais mon libraire m'a conseillé vivement de commencer par celui-ci, choix que je ne regrette pas du tout.

Avec beaucoup de pudeur, un italien, devenu jardinier en Italie, amoureux de la terre et des livres, égrène en filigrane les souvenirs de l'amour qu'il a vécu en Argentine et les atrocités qu'il a subit dans ce pays.

Il vit un deuxième amour en Italie, mais quel avenir lui est-il réservé ?

Un roman que j'ai beaucoup apprécié. J'ai vraiment envie de découvrir les autres oeuvres d'Erri de Luca. C'est une très belle découverte.
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Un italien, revenu au pays, après avoir tout perdu en Argentine : son travail, sa femme victime du vol de la mer (déjà quelque chose là-dessous, terrible !) Maintenant il est jardinier et semble se consoler auprès des arbres et des fleurs. de plus, un amour lui tombe dessus en la personne de Làila, que son mac refuse de libérer du métier. Il y a aussi l'africain qui vient chercher des fleurs pour les vendre et possède une belle philosophie de la vie. Ces trois personnages vont amener une fin inattendue. Lecture pas toujours simple avec des faits du passé qui arrivent brusquement et qui sont narrés aussi au présent. ⭐️ ⭐️ ⭐️ ⭐️
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Je débouche une bouteille de Lambrusco rosé bien frais. Un vin italien pour l'histoire d'un homme, un jardinier qui retrouve sa terre natale, son Italie après un séjour en Argentine pour retrouver la femme qui l'aimait.

Mais avant de te raconter cette histoire de chevaux, je te parle de la plume d'Erri de Luca, de ses phrases aussi courtes que le souffle divin d'une femme en train de faire l'amour.

Car l'écriture a cette sensualité, la beauté des mots comme la beauté du corps d'une belle argentine, d'une belle italienne.

Des métaphores et de la passion qui enveloppent les disparitions et les morts d'une dictature.

Comment ne pas tomber sous le charme de cette écriture des premiers instants.

« Je lis seulement des livres d'occasion.
Je les pose contre la corbeille à pain, je tourne une page d'un doigt et elle reste immobile. Comme ça, je mâche et je lis.
Les livres neufs sont impertinents, les feuilles ne se laissent par tourner sagement, elles résistent et il faut appuyer pour qu'elles restent à plat.
Les livres d'occasion ont le dos détendu, les pages, une fois lues, passent sans se soulever.

Ainsi, à midi, au bistrot, je m'assieds sur la même chaise, je demande de la soupe et du vin et je lis.

Ce sont des romans de mer, des aventures de montagne, pas des histoires de ville, je les ai déjà autour de moi.

Je lève les yeux, attiré par le reflet du soleil sur la porte d'entrée par laquelle ils entrent tous les deux, elle dans un air de vent, lui dans un air de cendre.

Je reviens à mon livre de mer : il y a un peu de tempête, force huit, le jeune homme mange avec appétit tandis que les autres vomissent. Puis il sort sur le pont, se tenant solidement sur ses pieds parce qu'il est jeune, seul, tout à la joie de la tempête.

Je détourne les yeux pour couper de l'ail cru sur ma soupe. J'avale une petite gorgée d'un vin rouge âpre, qui sent le fût.

Je tourne les pages dociles, des bouchées lentes puis je lève la tête du blanc du papier et de la nappe, je suis la ligne de carrelage qui fait le tour de la pièce et qui passe derrière deux pupilles noires de femme, mises sur cette ligne comme deux « mi » fendus de la ligne basse d'une portée musicale. Elles sont pointées sur moi.

Je lève mon verre au même niveau et je le laisse en l'air avant de boire. Cet alignement force mes pommettes à ébaucher un sourire. La géométrie des choses environnantes fait naître des coïncidences, des rencontres.

La femme, de face, me sourit… »

Comment ne pas tomber amoureux de ces pupilles noires, ce regard pénétrant qui fixe ton verre de vin.

Elle s'assoit devant moi, sur cette chaise de bistrot, une aubergine rôtie et sa mozzarella di bufala dans une assiette. Ce parfum enivrant, ses effluves qui se mêlent au basilic frais. Un air d'Italie souffle sur la terrasse ensoleillée, ce midi.

Je sors de la poche de ma veste ce livre d'occasion qui est passé de main en main, d'amitié en amour. Je caresse ses pages, lisse sa couverture, respire son parfum. Un tout petit livre mais plein de bonheur qui mélange l'Italie et la Patagonie, les fragrances des piémontaises à celles des argentines et qui lie les métaphores à la beauté naturelle.

Comment ne pas se reconnaitre dans ce type, simple et jardinier, assis à l'ombre d'une terrasse avec un verre de vin et un vieux bouquin pour simple compagnie. Oui, ce type pourrait être moi. Et cette femme, de face, qui me sourit… A moi ? Je détourne les yeux, plonge mon regard dans mon verre, et bois une dernière gorgée de ce vin rouge et âpre avant d'achever ma lecture.
Lien : http://leranchsansnom.free.f..
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Le narrateur aime lire les livres d'occasion dans un café quelque part en Italie du sud. Tous les jours, il parle un peu au patron, homme simple et hospitalier, qui luit sert un repas frugal avec un peu de vin. le narrateur y croise un jour Leila qui lui donne son numéro de téléphone. Leur rencontre lui en évoque une autre. Jeune homme, il est amoureux de Dvora, une Argentine, il l'épouse et la suit dans son pays. A présent le narrateur est revenu seul en Italie du Sud. Il est le jardinier d'un réalisateur de documentaires qu'il a connu dans le Nord quand il était ouvrier. le propriétaire était alors un étudiant, simple et bon, et puis un activiste comme lui. le narrateur a une cinquantaine d'années, des mains d'ouvrier, il aime les arbres et les plantes. Il recherche l'harmonie, la paix, le silence. Un journalier africain clandestin au sourire magnifique apparaît à la porte du jardin. le narrateur lui donne du mimosa qu'il pourra vendre au marché. L'Africain est un homme simple et sage.
Le roman entier est écrit au présent et entremêle les deux premières vies du narrateur. Sa vie en Argentine, dramatique racontée à Leila la prostituée, qui l'a contraint à fuir et sa vie présente, bien calme. Mais la violence réapparaît soudain. Il devra faire un choix. En Argentine on lui a appris que la vie d'un homme dure autant que celle de trois chevaux. C'est l'Africain qui lui fera comprendre qu'il est temps d'enterrer sa deuxième vie. A la fin, le narrateur met un livre dans la poche intérieure de sa veste.
Ce roman de 1999 aux allures de parabole me laisse une impression mitigée car je ne suis pas très sensible à son style que je trouve agaçant et narcissique, faussement simple. Chaque phrase constitue un paragraphe de quelques lignes à peine. De Luca taille de très belles phrases au sécateur et a tendance à les regarder fleurir avec ravissement.
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Il me vient parfois des bouffées oxymoriques, pas seulement lors d'une obscure clarté au petit matin après un coucher tout aussi matinal. Non, tout simplement cet auteur déclenche des flashes dans le récit tranquille d'un jardinier. Et cela produit ce genre d'effets:

C'est un roman d'une sobriété éblouissante. Il exprime une violence poétique. Les grands espaces sont si exigües que l'on peut vous traquer et vous tuer.
Un jardinier dévasté par le deuil et le régime des colonels mais assagi par les arbres et surtout une femme.

La découverte du talent d'Erri de Luca. Un livre à relire.
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Tout petit livre d'à peine plus de cent pages et pourtant il contient tout: toute l'humanité du monde, sa beauté, sa fragilité, son amour, sa stupidité, sa haine, son amitié. L'auteur conte l'histoire d'un italien revenu au pays après avoir vécu les années de plomb du fascisme en Argentine et y être devenu un assassin. Aujourd'hui jardinier, taiseux et lecteur, il vit dans la sobriété de celui qui connait la valeur des mots, des sentiments, de l'amitié aussi.
Ce livre est bouleversant de justesse et de beauté, de simplicité et d'émotions. L'auteur, Erri de Luca, fait passer toute une vie d'homme juste et simple en une poignée de mots choisis, qui font mouche, et qui m'ont profondément touchée - jusqu'à la larme.
J'ai adoré passer chaque page avec cet homme meurtri qui croit encore et qui se laisse choisir par l'amour. Quel qu'en soit le prix.
Livre indispensable.
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Dans ce récit qui se moque bien de la linéarité, le choix de la concision et la description pointilleuse accrochent le regard. Erri de Luca empoigne certains thèmes pour y glisser des parenthèses, des souvenirs et de la poésie.

Les thèmes abordés me parlent et les questions existentielles me touchent. Son écriture n'est jamais sèche, mais juste, sentimentale sans sucrerie. C'est plutôt dépouillée et pourtant elle fait jaillir un univers sensoriel et émotionnel d'une grande richesse.

La construction des phrases a un côté rêche comme du papier de verre qui frotte du bois et pourtant il parvient à lier ciel et terre avec la couleur et la lueur des mots.


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