Dickens et Noël c'est une vieille – et longue – histoire : Entre 1843 et 1848 il écrit les cinq nouvelles (ou courts romans) qui composent ce recueil : «
Un chant de Noël », «
Les carillons », « le Grillon du foyer », « La bataille de la vie », et «
L'Homme hanté ou le Pacte du Fantôme ». Les trois premiers eurent très vite un immense succès. Puis, à partir des années 1850, Dickens devint directeur de journal (et principal rédacteur) : d'abord dans « Household Words » (« Paroles familiales »), puis dans « All the year round » (« Tout le long de l'année »). Il eut à coeur de livrer entre 1850 et 1867 plus d'une vingtaine de récits sur le thème de Noël, qui eurent également du succès, mais moins que les titres précédents.
Du reste il n'est pas étonnant que Dickens se soit intéressé de près à Noël et à sa mythologie. On sait que l'enfance constitue un des piliers de l'oeuvre. Sa propre enfance malheureuse constituait déjà un préalable. Noël, représentait également un havre de paix, de chaleur et de bonheur familial. L'occasion, aussi de rappeler les valeurs évangéliques de charité, de compassion et de pardon. Il y a donc, dans ces «
Contes de Noël » une quintessence de la pensée de Dickens, à la fois regard tendre sur l'enfance, justice sociale, attente/espérance d'un bonheur partagé en famille, résilience et tolérance…
« Un conte de Noël » (« A Christmas carol ») est, de tous les récits de Noël de notre auteur, le plus universellement connu, tant il a été repris au cinéma et à la télévision, le thème servant de base à une multitude d'adaptations animées ou filmées, que ce soit sur petit ou grand écran, à la radio, au théâtre, au ballet et bien entendu sur tous les supports médiatiques modernes. L'histoire, nous la connaissons : Scrooge est un affreux bonhomme, misanthrope, avare, méchant, insensible à la pitié (et d'ailleurs insensible à tout sentiment). Rien ni personne ne trouve grâce à ses yeux. Jusqu'à ce soir de Noël où il se trouve nez à nez avec Marley, son ancien associé. Celui-ci l'avertit de la venue prochaine de trois esprits, qui auront pour tâche de l'amener vers le bien, faute de quoi il sera destiné à errer sans fin après sa mort. Les esprits, le rendront spectateur de sa propre vie, lui faisant prendre conscience de ses propres défauts, et l'amenant à changer radicalement d'attitude.
«
Les carillons » (« The chimes ») raconte l'histoire de Toby, un commissionnaire qui attend ses clients dans le froid glacial, devant le porche d'une église. Sa fille veut se marier avec un garçon honnête et travailleur, mais le monde est fait pour les riches, et les pauvres, c'est fait pour pleurer. C'est ce que les cloches de l'église font comprendre au pauvre Toby en lui montrant son triste destin. Mais ces mêmes cloches carillonneront joyeusement pour le mariage. Ce n'était qu'un mauvais présage !
« le grillon du foyer » (« The cricket on the hearth ») est tout de même moins pessimiste. Un prélude humoristique nous fait entendre un duo inattendu entre une bouilloire et un grillon. Dans cette maison vit un gentil couple (John et Dot, et leur bébé, et leur bonne Tilly) dans une bonne atmosphère de bonheur simple et tranquille. Ils accueillent même un mystérieux locataire qu'ils logent avec plaisir. du moins jusqu'à ce que leur voisin, un perfide vendeur de jouets nommé Tackleton vienne semer le doute sur la fidélité de la jeune femme. Ce méchant de chez méchant exploite par ailleurs son employé Caleb, qui vit misérablement avec sa fille aveugle (Bertha). Son fils Edward est parti en Amérique en laissant une fiancée éplorée, que justement le sinistre Tackleton s'apprête à épouser. Les choses se gâtent tellement que le grillon se tait. Mais il est écrit que tout s'arrangera et que le grillon rechantera.
On peut regretter que le style de Dickens soit parfois emberlificoté, qu'il soit complaisant dans la description du malheur des gens, et qu'il tire un peu trop sur la corde sensible, on ne peut pas ne pas l'aimer, pour l'amour qu'il porte à ses personnages, et à travers eux, à nous lecteurs et lectrices, et pour le bonheur, simple et à portée de la main qu'il nous montre et nous fait toucher du doigt.