Suite et fin des aventures de l'Homme aux yeux gris, Archange, celui qui s'enfuit enfant de Tolède, qui parcourut l'Europe, qui fut soldat, armateur, courtisan, galérien, esclave jusqu'en Inde, et qui survécut grâce à sa rage, à son intelligence et à ses exceptionnelles facultés d'adaptation.
« Sur le tard, j'appris à manier mon destin comme si j'en eusse été le maître. »
C'est dans la lointaine Moscovie que nous le retrouvons, où il doit composer avec les coutumes locales et l'entendement moscovite, ce qui n'est pas chose aisée, même pour un ingénieux polyglotte comme lui, toujours prompt à biaiser et doué pour côtoyer les gens d'importance, le Titien autrefois, Boris Godounov et Ivan le Terrible aujourd'hui.
Remontant vers le Septentrion, Archange fuit au Danemark, à Elseneur, où il assiste aux problèmes de succession, dont William Shakespeare tirera Hamlet, et où l'on reconnaît ça et là quelques silhouettes shakespeariennes.
A Prague, il renoue avec la communauté juive et les raffinements européens, apprend à commercer les pierres précieuses, puis il retrouve l'Espagne de sa jeunesse, qu'il abandonne pour l'incompréhensible et dernière aventure maritime vers l'Afrique et la lointaine Goa.
L'Homme aux yeux gris a vieilli, ses cheveux et sa barbe grisonnent désormais. Et ce n'est pas la richesse qu'il recherche, ni le repos, mais le sens de l'existence, les raisons de la vie et de la mort, accroché jusqu'au bout à son exemplaire de L'Ingénieux Hidalgo Don Quichotte de la Manche. Ce Beau voyage est décidément placé sous le signe de la littérature, avec le tragédien Cyril Tourneur, auteur de la Tragédie du Vengeur, qui le pousse à se rendre à Elseneur, puis Shakespeare, et enfin Cervantès.
C'est un triste dernier périple que nous offre Petru Dumitriu, aux côtés d'Archange, qui ne craint plus rien, ni personne, pas même Dieu, et qui laisse le souvenir d'un homme exceptionnel, lointaine silhouette dans le désert, errant sans fin dans aux confins du monde connu. Ainsi se termine l'une des plus belles trilogies de la littérature mondiale, merveilleusement écrite, intelligente, brillante, née un jour de la contemplation d'un portrait inachevé du Titien.
Commenter  J’apprécie         495
Je suis petit-fils de marchands de la libre Novgorod, plus riches et fiers que ces princes moscovites que tu verras crever la faim dans les rues. Ceux -ci n'étaient que les gabelous des Tartares, et, quand ils venaient apporter à la Horde d'Or le produit de l'impôt, ils se mettaient à genoux, les Tartares posaient un grand plateau en guise de table sur leurs nuques, et festoyaient dessus, envoyant des coups de botte aux boyards moscovites qui se tenaient à quatre pattes sous la table. Que si par contre le produit de l'impôt était moindre que ce qu'ils avaient prescrit, les boyards gabelous devaient lécher et nettoyer avec leurs bouches les étriers embrenés des myrzas!
Mais après un instant de cette contemplation, elle se raidit et retomba, pâmée, en me disant entre ses dents: "Satyre papiste, fais-le-moi".
Le prix de la
libertéInterview en français de l'
écrivain roumainPetru DIMITRIU qui a fui son pays en compagnie de sa femme mais sans sa fille de 10 mois pour qui ils n'ont pas voulu prendre de risques. L'homme était dans son pays riche et célèbre mais il l'a fui pour la
liberté d'écrire. le
couple explique pourquoi il est parti, exprime sa souffrance d'avoir laissé leur enfant en Roumanie et demande le...