Eschaton. La destinée finale du monde. Titre remarquablement bien choisi pour ce livre, dont le thème aborde l'annihilation du monde tel qu'on le connaît, de par les affres humaines. Un sujet qui n'est pas si inédit dans l'anticipation, mais dont
Guy-Roger Duvert s'empare avec habileté pour que ses mots nous content non pas un énième jugement dernier mais bien une romance sur fond politisé et quelque peu darwiniste de l'évolution de l'espèce humaine, qui dans les carcans de la richesse et de la haute société échappera donc, surement, à l'Apocalypse de l'
Eschaton.
Nous rencontrons sur notre chemin Casey, le compositeur qui offre son savoir-faire aux jeux de réalité augmentée, utilisés par la population pour échapper à l'évidence d'une Terre décimée par l'égoïsme et les catastrophes naturelles ; Eve, cette journaliste prodige, puits de connaissance et de curiosité pour la culture artistique : musique, peinture, tout ce qui revêt un fond de créativité ne la laisse pas de marbre, et il faut dire qu'elle nous en parle avec beaucoup d'entrain ; et Lucius, le très secret collaborateur de Butterfly Inc. , qui connaîtrait le jour exact de la fin du monde. C'est ce dernier qui propose à Casey d'intégrer le Framework, ce paradis qui sauvegarde l'esprit tandis que le corps lui, reste à la surface de la planète bleue, disparaît dans le fracas d'une bombe nucléaire, ou bien d'un tsunami.
Il est entendu que même si ce livre nous parle de la romance entre Casey et Eve, qui je dois dire est très bien amenée et d'une douceur presque reposante (oui, paradoxal au vue de l'atmosphère fataliste du livre), le message écologique est bien là, pas du tout caché derrière des palabres sans sens. Des villes côtières englouties par des torrents d'océan, des guerres civiles à n'en plus finir, des zones de non-droit où les gangs font régner la terreur alors que les habitants tentent désespérément de ne pas mourir de faim... Et encore une fois la ploutocratie aveugle, qui se conforte dans ses habitations luxueuses, prêts à échapper à la destinée sombre de la Terre, à bord d'un vaisseau pour Mars, dans le froid habitacle d'un bunker, ou bien dans les rouages électriques du Framework.
Un roman plus simple d'accès que la saga
Outsphere, par exemple, mais dont les messages sont clairs et ne passent pas par des chemins détournés. J'ai beaucoup apprécié le côté aventure, évidemment, avec cette quête pour le salut d'Eve, que le Framework pourrait lui offrir, et aussi le côté philosophique et éthique de la chose, très bien amené lors de leur périple dans les bas-fonds d'un New York délabré, en la personne de Madame Hashimoto. Note très positive également pour le côté artistique du livre, comme la musique symphonique et l'accès au plus grand nombre de cette dernière et le tableau-inspiration de Casey dont l'interprétation m'a beaucoup touché. On s'inspire d'une oeuvre pour créer, et c'est valable dans l'écriture, dans la musique, dans la peinture... J'en ai une interprétation assez poétique qui n'est peut être que propre à ma personne, mais cette dernière me satisfait.
Le livre est court mais les mots s'assemblent avec cohérence et dynamisme, sur un sujet qui me plaît et que je lis presque tous les mois (on est fan d'anticipation ou pas hein). Il s'agit d'un one shot mais peut-être qu'une suite ne lui serait pas délétère, car la survie du Framework me donne envie de découvrir les tréfonds de cette création, et mon côté interprétatif (si quelque chose est écrit dans un livre, ce n'est jamais pour rien, il y a toujours une implication avec quelque chose d'autre) voudrait comprendre sa vraie finalité. Quelques questions qui demandent des réponses, mais je dois vous dire que j'ai réellement aimé ce roman et sa justesse, happée par la beauté de l'amour et de l'union d'Eve et Casey dans un fatalisme éreintant mais qui n'arrivera pas à éteindre leur flamme.
Un thriller d'anticipation qui ne doit pas rougir face à ses petits compères comme
Outsphere, qui se lit tout seul à l'abri dans un cocon où j'espère, j'échapperai moi aussi à l'
Eschaton.
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