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4,07

sur 598 notes
Pour son dernier roman en date publié chez Sonatine, l'écrivain britannique R.J. Ellory nous emmène à Jasperville, un bled perdu dans le Nord-Est du Canada où personne n'aurait l'idée de vivre s'il n'y avait pas de minerai de fer à exploiter.

En 1984, Jack Devereaux a d'ailleurs fui cette région hostile pour refaire sa vie à Montréal. Mais, vingt-six ans après avoir quitté l'enfer blanc québécois, il reçoit un appel de la police locale qui va malheureusement l'obliger à retourner au bercail. Son jeune frère Calvis vient en effet d'être arrêté pour tentative de meurtre et, ce qui étonne le plus Jack, ce n'est pas que son petit frère ait disjoncté… mais que cela ait mis si longtemps à arriver !

C'est donc sur fond blanc que R. J. Ellory déroule sa plume foncièrement noire. Un endroit éloigné de tout où les hivers sont rudes et les étés humides et peuplés de moustiques. Un environnement propice aux dépressions et aux suicides… si vous n'y mourrez pas avant, de froid ou dévoré par des animaux affamés, allant d'une meute de loups à un ours. Et pour couronner le tout, selon les autochtones algonquiens, la région serait également peuplée de wendigos, des créatures surnaturelles, maléfiques et anthropophages que vous n'avez pas vraiment envie de croiser. Bref, l'environnement idéal pour y planter l'intrigue d'un roman noir !

« Une saison pour les ombres » n'est pas seulement un cadre hostile limitant fortement l'espérance de vie, mais également l'histoire d'un retour aux sources forcé. En cherchant à comprendre pourquoi son frère a voulu tuer cet homme, Jack Devereaux se voit en effet obligé de lever le voile sur un passé qu'il avait pourtant enfoui au plus profond. Au-delà de ce frère qu'il a lâchement abandonné à l'aube de ses douze ans et des mauvais souvenirs qu'il a choisi de laisser derrière lui, Jack avait également tourné le dos à son premier amour… et à ces nombreux corps retrouvés éventrés au fil des ans. Welcome back à Jasperville !

« – Tu penses que Dieu nous punit tous ?

– Non, répondit Henri. Les hommes se punissent tout seuls. Dieu n'est là que pour porter le chapeau. »

« Une saison pour les ombres » est donc un roman foncièrement noir, livré par un maître du genre, ainsi qu'une recherche de vérité au coeur d'un passé pas toujours bon à remuer. Un roman d'ambiance qui dresse progressivement le portrait d'une communauté isolée essayant de survivre tant bien que mal là où personne ne veut demeurer. Une intrigue qui s'immisce au sein d'une famille et d'une fratrie détruite par les drames. Un endroit où vous ne voulez absolument pas aller…sauf qu'en compagnie d'Ellory, j'y serais volontiers resté encore un peu !
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« On est tous brisés, quoique chacun à un endroit différent. »

Pour Jack Devereaux, cet endroit c'est la ville minière de Jasperville ( ville fictive inspirée de Schefferville en plein coeur de la péninsule du Labrador ), Québec, Nord-Est du Canada : huit mois d'obscurité et de froid polaire qui l'isole du reste du monde. C'est là qu'il a grandi, là que sa famille s'est installée en 1969 pour suivre son père employé dans la mine de fer.

C'est ce lieu qu'il a fui dès qu'il a pu à 18 ans. Et c'est là qu'il doit revenir 26 ans après pour venir au secours de son petit frère qui vient d'être arrêté pour tentative de meurtre au premier degré. Sans que la police comprenne ce qui l'a fait disjoncter. Jack soupçonne qu'il y a un lien avec la série de meurtres jamais résolus : des jeunes filles de Jasperville régulièrement retrouvées mortes éventrées à partir de 1972.

Etonnamment, R.J. Ellory ne choisit pas de placer l'enquête en elle-même au centre du roman. Même si on saura au final qui a assassiné les jeunes filles, ce n'est pas la résolution qui semble le plus intéresser l'auteur, à peine le tueur. Ce qu'il privilégie, c'est l'exploration de la psyché humaine à travers un personnage principal en quête de rédemption, hanté par un passé traumatique.

« Il commençait à comprendre que les fantômes étaient en lui et que, même s'il partait au bout du monde, ils l'attendraient encore. »

R.J. Ellory est sans doute l'auteur de romans noirs qui sait le mieux injecter de l'émotion à ses récits en faisant la part belle aux blessures qui abiment l'enfance et font ce que nous sommes aujourd'hui. Il maitrise avec brio le procédé narratif classique alternant présent du retour de Jack à Jasperville et passé révélant progressivement les choix d'un homme qui s'est trompé et a évolué sur une quarantaine d'années.

Grâce aux flash-backs éclairant les tragédies qui ont détruit sa famille et sa ville durant son enfance, le lecteur a l'impression de comprendre totalement Jack : ses erreurs, sa lâcheté, sa peur, ses remords, sa culpabilité, ses souvenirs qui le secouent jusqu'au tréfonds dès qu'il met un pied à Jasperville, lui qui a cru en fuyant régler ses problèmes et s'est retrouvé enfermé dans une prison dans laquelle il s'est débattu durant 26 ans.

Pour évoquer le style de R.J.Ellory, Franck Thilliez parle de «  slow motion thriller », expression parfaite pour ce roman noir qui prend le temps de poser des personnages, un lieu et une atmosphère. C'est le maître des ambiances.
On a l'impression que la glaciale et glaçante Jasperville est une ville qui prend possession de ses habitants, une ville maudite que Jack doit parvenir à exorciser en affrontant les démons du passé, les siens et celui de la ville. En affrontant les légendes locales qui obsédait son grand-père et le terrifiait petit, celles mettant en scène les wendigos, créatures lycanthropes du folklore amérindien avides de chair humaine et capables de prendre possession de l'esprit d'une proie au point de le pousser au crime.

Un excellent roman noir qui explore les abimes émotionnels d'un homme en quête de rédemption.
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Enquêteur sur les incendies pour les assurances, Jack, ou plus anciennement Jacques, Devereaux reçoit un appel de Bastien Nadeau, de la Sûreté du Québec. Celui-ci lui annonce que son frère, Calvis, est actuellement en détention. Comme possédé, il a essayé de tuer un homme dont on ne sait encore s'il survivra à ses blessures. Même si Jack ne l'a plus vu depuis 1984, l'année où il a tourné le dos à sa famille et à Jasperville, il décide, malgré tout, de venir en aide à son frère, d'autant qu'il n'a plus que lui comme famille. Il pourra peut-être, enfin, comprendre pourquoi Calvis n'a perdu la tête qu'après toutes ces années. le trajet en voiture, qui lui prendra deux ou trois jours, sera l'occasion pour lui de se rappeler les moments terribles qu'a connu Jasperville, avec les meurtres horribles de plusieurs jeunes filles à partir de 1972, les drames qu'a connu sa propre famille, les raisons qui l'ont poussé à fuir la ville et ne plus y revenir...

L'on ne venait pas vraiment habiter la petite ville de Jasperville par choix mais pour le travail, grâce surtout aux mines de fer qui, dans les années 70, étaient fortement exploitées. Dès lors, il fallait s'acclimater au froid glacial, au vent tempétueux, aux 8 mois de l'hiver et à sa situation géographique loin de tout. Aussi, Jack, dès qu'il en a eu l'occasion, a fui et n'y est jamais retourné en plus de 25 ans. La faute à ces nombreuses jeunes filles, mortes dans des conditions horribles et inexpliquées, la population ayant toujours tenu pour responsables des bêtes sauvages, à sa propre famille et à Jasperville. Ce retour forcé dans sa ville natale va être l'occasion pour lui de lever le voile sur son passé et celui de Jasperville, et de mettre des mots sur le geste de son frère, se doutant déjà qu'il a un rapport avec les meurtres. À coup de flashbacks, R.J. Ellory fait la lumière sur les contours d'un passé sombre, relatant aussi bien les drames qu'a connu Jasperville que ceux plus personnels de Jack, expliquant alors ces profonds sentiments d'échec et de culpabilité, ses remords, sa lâcheté et sa fausseté d'aujourd'hui. Si les personnages sont profondément dépeints, notamment Jack et sa quête de rédemption et de pardon, l'atmosphère glaçante et sombre sied particulièrement bien à cette enquête aux multiples rebondissements.
Un roman noir et captivant...

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Ce très bon roman noir de R.J. Ellory tient son lecteur en haleine au fil des pages et pas spécifiquement sur l'enquête menée par le héros principal, Jack, dont le dénouement est d'ailleurs liquidé en quelques pages, mais aussi et sans doute surtout sur l'analyse psychologique des différents protagonistes, et ils sont nomnbreux.

Des victimes d'abord, plusieurs jeunes filles dont l'une, Thérèse, voit sa personnalité profondément analysée par l'auteur. Thérèse conduit le lecteur vers sa mère, Carine, premier amour de Jack et ainsi vers la famille complexe de celui-ci, père tyrannique, mère faible, frère à protéger, Calvis, soeur victime indirecte de l'assassinat de Thérèse qu'elle aimait.

Jack est revenu après plus d'un quart de siècle dans cette ville minière fictive du nord-est du Canada pour aider son jeune frère Calvis, accusé de tentative de meurtre. Et ainsi, R.J. Ellory a choisi une forme mêlant passé et présent dans une longue première partie où les démons du présent de Jack se voient confrontés à ceux de son passé à travers lequel l'auteur déroule tous les faits entourant les assassinats supposés des jeunes filles que d'autres croient victimes d'improbables animaux.

Ce choix dans le rythme de l'écriture peut avoir ses amateurs et ses détracteurs. Pour ma part, j'ai plutôt apprécié son originalité et précisément que l'auteur sait s'en détacher au moment opportun, réservant toute la deuxième partie à la progression de l'enquête réalisée par Jack.

Au cours de celle-ci, il approche des personnages pouvant paraître secondaires qui, en fait, ont tous un rôle important à jouer dans les différents aspects psychologiques du roman, tels le flic manquant de moyen d'enquêter tant d'années après sur des meurtres que ses prédecesseurs ont ignoré, les membres du personnel de la mine, l'homme que Calvis a tenté d'éliminer convaincu qu'il était de sa culpabilité. Tout cela participe à la qualité de ce roman étoffé par de nombreuses expressions du quotidien de la vie, de l'amour, de la famille, de la mort.

C'est aussi un roman sur la folie qui gagne peu à peu les esprits les plus faibles, abandonnés à leur sort comme Calvis, torturés comme son père, perdus comme son grand-père et d'autres encore emportés par le tumulte d'une existence qu'ils n'ont pas choisi, tumulte devenant trop souvent létargie, les plus faibles ou les plus souffrants n'ayant guère de choix pour échapper à leurs malheurs que de se donner la mort ou, pire peut-être, laisser celle-ci envahir leur esprit.

C'est bien une saison pour les ombres, la plus sombre ainsi que l'exprime son titre original, un beau roman très sombre et très réussi.



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« Les Devereaux arrivèrent à Jasperville en avril 1969. Eisenhower était mort, l'assassin de Bobby Kennedy était voué à la chambre à gaz, et les pertes au Vietnam excédaient celle de la Corée. Mais, pour les Devereaux, le reste du monde n'aurait pas pu être plus lointain et inconnu. »


Jasperville. « le trou du cul du monde, mais gelé jusqu'à l'os ». On n'y va ni pour le tourisme, ni par hasard. C'est la loi du marché du travail qui vous y conduit, la promesse d'un emploi bien rémunéré, d'un logement, de quoi subvenir aux besoins de la famille. le climat est très rude, dans ce nord ouest du Canada où l'hiver dure huit mois, huit longs mois sans lumière. A proximité des monts Torngat, « lieu des esprits mauvais » en inuktitut, ce sont les mines de fer qui créent l'attraction.

Des animaux sauvages s'ajoutent à la liste des dangers du secteur. Aussi lorsqu'une première jeune fille est retrouvée déchiquetée non loin de son domicile, les loups sont accusés.

Si Jack revient sur les lieux de son enfance après 26 ans d'absence, c'est que son frère se trouve en fâcheuse posture : il est en garde à vue après avoir agressé un homme, dont la survie ou non conditionnera l'importance de la peine.


Ce retour aux sources fera resurgir de nombreux souvenirs et qu'il aurait voulu oublier à jamais. Et devant l'immobilisme de la police locale, argumenté par la brièveté des contrats sur le poste, Jack mène l'enquête, en reprenant les nombreuses notes de son frère.


On est saisi par l'art de restituer l'ambiance de cet endroit si inhospitalier, et de ce que cela fait aux hommes. Pas de risque que le roman fasse affluer les touristes, si l'endroit n'était pas fictif. Les légendes du peuple autochtone hantent le récit. Et si le wendigo était à l'origine des meurtres en série ?

Le personnage central, dont on suit au fil des chapitres l'itinéraire pas toujours serein, est très intéressant et bien campé : un amalgame de forces et de fragilités qui le rend profondément humain.

Un excellent polar, tant pour les personnages que pour le décor et pour l'enquête passionnante.

408 pages Sonatine 5 janvier 2023
#Unesaisonpourlesombres #NetGalleyFrance

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R.J. Ellory fait partie de ces auteurs que je suivais régulièrement à une époque où je lisais énormément de policiers, thrillers et romans noirs. J'ai aimé « Seul le silence » ou « le chant de l'assassin ».
Aujourd'hui, je ne ferme pas la porte à ces genres littéraires mais mes goûts ont évolué avec le temps et je recherche davantage des romans plus lumineux, originaux, engagés ou vibrants.

« Une saison pour les ombres » est un thriller psychologique, un roman noir. R.J. Ellory bâtit son intrigue autour de Jack Devereaux, un enquêteur sur incendie pour les compagnies d'assurance qui revient, après de nombreuses années d'absence, dans la ville où il a vécu pendant son enfance.

*
L'auteur nous emmène ainsi dans l'extrême nord-est du Québec, à Jasperville, une petite ville industrielle gérée par une grosse entreprise, la Canada Iron.
Jasperville est situé en plein coeur d'un immense parc national, dans un territoire particulièrement inhospitalier et sinistre, entouré de chaînes de montagnes et de forêts abritant plusieurs sortes d'animaux sauvages, comme les ours noirs ou les loups de l'Est.

L'ambiance arctique produit une ambiance étrange et glaciale, noire et austère, qui, immanquablement, participe à installer un climat d'isolement et de tension.
Les habitants vivent dans des conditions climatiques extrêmes. Ils doivent composer avec des hivers longs, sombres, rigoureux et des étés humides où la glace fondue crée de vastes marécages, véritables viviers de moustiques.
C'est aussi un lieu hors du temps, chargé de mystère et qui porte malheur, une terre de magie où subsistent de vieilles légendes amérindiennes. Dans ses entrailles, vivrait le wendigo, un être surnaturel animé du désir de tuer et de se repaître de ses victimes.

*
Le lecteur entre tout de suite dans l'intrigue, harponné par un incipit fort et une vue en plongée sur le personnage principal.
Fuyant une enfance difficile marquée de nombreux décès d'une extrême sauvagerie, Jack Devereaux a quitté la maison familiale jusqu'au jour où un policier de la ville le contacte pour lui demander de revenir. En effet, Calvis, son jeune frère, vient d'être arrêté pour tentative d'assassinat.

« À ces mots, tout lui était revenu. Les monts Torngat, les forêts éloignées. L'odeur des feux de bois, du métal brûlant, des cirés mouillés dans l'entrée. Les vêtements humides, gelés, cassants comme l'ardoise le matin. Des formations de glace insensées – couche sur couche – aux fenêtres et aux murs. La triste vacuité horizontale du passé ; rien à voir que la distance. »

Les raisons de son geste restent encore obscures pour la police, mais Jack devine aussitôt un lien avec le décès de plusieurs jeunes filles de Jasperville lorsqu'il était enfant.

Cela fait vingt-six ans que Jack a coupé tous les liens avec cette ville maudite, avec sa famille, ses amis, son amour de jeunesse. Mais est-il possible d'oublier les évènements traumatisants de l'enfance, la violence psychologique subie, sa famille, ses promesses et ses manques, sans être rattrapé par les ombres du passé ?

« Les questions restées sans réponse creusaient un vide où se portait toute l'attention. Impossible de faire son deuil. Malgré tous leurs efforts pour accueillir le moment présent, le passé les aspirait tel un tourbillon, sans jamais desserrer son étreinte. »

*
R.J. Ellory a le sens du rythme et de la tension dramatique.
Mais en fin stratège, il n'hésite pas à prendre le temps de décrire les personnages, les paysages drapés de neige et de glace, l'ambiance oppressante et mystérieuse de ces lieux plongés dans la nuit polaire.
J'ai trouvé en cela qu'il se rapprochait davantage du roman atmosphérique que du roman d'action.

L'auteur a structuré la première moitié du récit autour de l'alternance entre passé et présent. La trame complète, tout comme les liens entre les personnages, se construit progressivement pour mieux nous faire comprendre la fragilité émotionnelle de Jack, la nécessité de fuir les événements comme celui d'y faire face.

« Un homme construit un château pour se protéger, puis se retrouve piégé à l'intérieur. Où qu'il aille, tous les couloirs le ramènent au même endroit. »

Pour cela, des flashbacks nous ramènent dans les années 70. Chapitre après chapitre, lentement, j'ai glissé dans l'enfance de Jack, aspirée par ses souvenirs douloureux, heureuse de remonter à la surface du présent pour enfin découvrir la vérité sur ces morts suspectes qui affectent toute la ville et plus particulièrement la famille de Jack.

« Il commençait à comprendre que les fantômes étaient en lui et que, même s'il partait au bout du monde, ils l'attendraient encore. »

Puis, dans la deuxième moitié du récit, l'ambiance s'alourdit, le mystère est là et l'intrigue démarre véritablement pour nous entraîner progressivement, de plus en plus loin, dans les profondeurs, les tourments et les déconvenues de l'âme humaine.

*
J'ai apprécié l'écriture de l'auteur, agréable, fluide et introspective. J. R. Ellory sait s'y prendre pour fouiller, creuser, excaver, déterrer les secrets en dévoilant peu à chaque fois pour mieux nous garder captif.
J'ai aimé le ton nostalgique du récit, la lenteur voulue, le sentiment omniprésent de désarroi et de conscience tourmentée, le suspense mélancolique qui ne laissent pas de côté les émotions, mais au contraire, diffusent la peur, la souffrance, le doute et la peur.

*
Tout au long de la narration, J. R. Ellory dresse des portraits sans concession, crédibles et nuancés, magnifiquement bien travaillés. Il n'y a pas de manichéisme, l'auteur décrit aussi bien les qualités que les failles de chaque personnage.
Jack est un protagoniste attachant, profondément humain, brisé qui tente de se racheter. Se sentant abandonné par les morts, il a abandonné les vivants à leur sort. Dans son esprit flotte un sentiment de solitude, de peur, d'abandon, de honte et de douleur silencieuse.

« La conscience est un pays intérieur. On a beau changer de décor, il y a toujours quelque chose qui vient vous rappeler ce que vous avez fait de pire dans votre vie. »

Avec ses destins brisés et ses personnages abîmés, le roman explore les thèmes de la culpabilité et de la trahison, du manque de communication dans les familles et des espoirs déçus, des blessures affectives et de la folie, et plus que tout, du poids des souvenirs et de la volonté de rédemption.

*
Malheureusement pour moi, mon avis va se situer un peu à contre-courant des autres lecteurs qui ont posté des billets plutôt positifs. Si j'ai savouré le développement émotionnel des personnages et la façon dont l'auteur maîtrise le suspense, si j'ai apprécié la peinture d'une ville terne et triste, ainsi que l'atmosphère empesée qui se resserre lentement en un huis-clos introspectif, il m'a manqué toutefois plus de densité, d'originalité ainsi qu'une conclusion plus aboutie et moins précipitée.

*
Pour conclure, J. R. Ellory fait preuve d'une belle maîtrise de l'intrigue, sa fausse simplicité soutenue par des descriptions d'une communauté isolée dans un climat hostile et une nature peinte dans un camaïeu entre blanc et noir.
« Une saison pour les ombres » est une lecture agréable et distrayante qui demande un regard lent et introspectif. Mais personnellement, il m'a manqué quelque chose pour être totalement conquise, plus de souffle, de singularité. Ce n'est bien sûr qu'un ressenti très personnel parmi tant d'autres. A vous de vous faire votre propre avis si le coeur vous en dit.
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Oui, mais finalement non.
Après avoir fui son patelin du Nord-Est canadien 25 ans auparavant, Jack vit peinard à Montréal, sans femme, sans enfants, sans chien, se satisfaisant de son boulot et de son meilleur pote. Mais lorsqu'il apprend que son jeune frère est en prison dans leur ville natale pour avoir tenté de tuer un homme, il se voit contraint d'y retourner pour affronter son passé -et aussi pour comprendre le geste de son frère, persuadé d'avoir trouvé le meurtrier de toutes ces jeunes filles assassinées pendant leur enfance.

Gros drame familial, donc, doublé d'une intrigue policière sur deux époques, mais d'abord roman d'ambiance.
Car il fait très froid dans ce coin du Québec où le soleil ne se couche ou ne se lève jamais selon les saisons. C'est l'exploitation du fer qui est à l'origine de la création de Jasperville (aka Despairville), ville minière où personne de sensé ne se serait spontanément installé. Et c'est dans cette atmosphère industrielle, obscure et glaciale, que des crimes sont commis sur des adolescentes sans que de véritables enquêtes soient ouvertes ; les morts sont simplement imputées aux bêtes sauvages ou à un esprit indien. le description de cette communauté repliée sur elle-même et de vieilles légendes m'a bien plu, R.J. Ellory sait créer avec soin des univers que l'on a l'impression de connaître depuis toujours, tant il y injecte de l'humanité.
C'est dans ce contexte que grandit Jack, qui finira par quitter cette ville en y abandonnant ceux qu'il aimait et en rompant les promesses faites. Et c'est rongé de culpabilité qu'il y revient finalement. J'ai bien aimé les problèmes de conscience de Jack, son incapacité à décider de sa vie et sa propension à l'autoflagellation -ça change des héros sans peur et sans reproches. J'ai aimé aussi l'histoire de sa famille, que l'auteur rend attachante.
Reste le mystère des meurtres en série, et c'est là où le roman m'a déçue, à force d'étirer l'intrigue sur autant de pages, pour finalement hâter sa résolution sans clarifier tous les faits. Je ne suis même pas sûre d'avoir tout compris. L'auteur me semble avoir privilégié la chronique familiale et communautaire, et les tourments de Jack, au détriment de l'enquête, et c'est dommage.

Pas grave, je continuerai de lire Ellory, parce qu'à l'instar de Stephen King, il aime et fait aimer ses personnages. Et c'est suffisamment rare et précieux pour donner le goût d'y retourner.
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Atmosphère, huis-clos, vieux mythe, voilà ce qui m'a fait apprécier ce roman de R.J.Ellory.
Un roman policier qui flirte avec le fantastique.
Bien souvent il est préférable de croire que seule un mythe comme le wendigo ou une bête sont capables de telles abominations.
À Jasperville, ne devrait-on pas plutôt dire Despairville, le froid, la nuit, les légendes qui effraient tant les enfants et la mort pèsent sur les esprits.
Des jeunes filles sont sauvagement assassinées, leur mort entraînera de nombreux malheurs.
Les enquêteurs se succèderont sans aucune aide extérieure, la ville est isolée et ne compte que sur ses habitants.
Des années plus tard, le passé rattrapera Jack Deveraux aura vécu sans le réaliser ces années loin de Jasperville à se donner les armes qui lui permettront de confondre et faire prendre le meurtrier.
Si la charge émotionnelle était trop forte pour rester, la culpabilité et les remords n'ont pas cessés. Son esprit n'a pas quitté les lieux.
Cette fois-ci, pas d'échappatoire : il a abandonné sa petite amie et sa famille (du moins ce qu'il en reste) mais là il va faire face.
C'est ma deuxième lecture de R.J. Ellory dont j'aime particulièrement la plume. Ici il s'agit de l'atmosphère d'une ville isolée du Canada excellemment reconstituée. C'est anxiogène, prenant, on croirait presque au fantastique. C'est habilement mené. Encore une lecture que je vous conseille.
Merci aux éditions Sonatine
#Unesaisonpourlesombres #NetGalleyFrance
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Camper du noir dans le très blanc de notre nordicité toute québécoise et surtout bien particulière est un exploit apprécié à savourer. RJ Ellory a très bien su, avec mains de maître, utiliser les codes d'une communauté, des gens qui, par choix ou obligation, décident de s'installer et de vivre dans ce climat si singulier caractérisé par le froid intense et une nature aussi inhospitalière.
C'est le propre des villes ponctuelles, développées autour d'une seule industrie, ici le fer, l'exploitation minière du fer. Des villes et des gens qui ne doivent leur survie qu'à la santé des filons. Saluons les recherches effectuées et le travail de documentation de l'auteur, car Une saison pour les ombres est tout à fait crédible.
C'est l'histoire d'une famille, les Devereaux, qui sombre, qui s'abîme, qui se fait englober par les ombres justement. Folie générée par le climat? le mode de vie? L'isolement? Que deviennent ceux qui restent à Jasperville? Ceux qui partent se reconstruisent-ils?
Dans cette petite ville des jeunes filles sont retrouvées horriblement mutilées, éventrées. Est-ce les bêtes sauvages? Est-ce LA bête? Est-ce l'homme? Car vivre dans un environnement aussi particulier c'est aussi alimenter les légendes de créatures diaboliques telles le Windigo. Et c'est très habilement que RJ Ellory a su marier le surnaturel au réel, les légendes aux faits, les diables et les âmes humaines qui parfois les habitent. C'est une longue enquête qu'effectuera Jacques, l'ainé de cette famille pour sauver (ou se sauver) son jeune frère et trouver une vérité.
Une saison pour les ombres est aussi cauchemar et ténèbres. Heureusement, quelques mois par année, on voit poindre le soleil.
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Un excellent roman de R.J. Ellory qui m'a permis de me transporter dans cette région du Canada où je n'aimerais pas vivre ! le froid, la neige et le vent, et ce, toute une grande partie de l'année. Sans moi ! C'est dans ce décor glacial que débarque un jour la famille Deveraux car le père a trouvé un travail dans la mine. Avec lui sa femme, son beau-père qui sombre dans la démence, sa fille et son fils (un dernier naît peu de temps après leur arrivée) s'installent dans cette ville perdue en espérant vivre correctement. Mais la tragédie s'attache à la famille Devereaux et Jack s'enfuit dès qu'il le peut en laissant son frère derrière lui. Après des années passées à Montréal, sans attaches, traînant avec lui culpabilité et regrets, Jack reçoit un coup de fil du seul flic de Jasperville, lui demandant de revenir s'occuper de son frère qui a poignardé un homme, persuadé que c'est lui l'auteur des crimes entres 1972 et 1990. de retour, Jack enquête bien sûr mais c'est l'occasion pour lui de se souvenir du passé, des meurtres de jeunes filles jamais résolus, de renouer avec les rares personnes qui l'ont connu et qui sont encore là.

Comme dans tout roman d'Ellory, l'action prend son temps pour se développer mais ce n'est pas gênant. On a tout notre temps pour s'imprégner de cette histoire, de cette ville inhospitalière dans laquelle on peut mourir de froid si on s'égare un tant soit peu de son chemin. Ces jeunes filles retrouvées mortes ? Ce sont peut-être des loups ? Ou un wendigo comme aime à le souffler le grand-père aux enfants Devereaux ? Coincé entre le surnaturel et la folie de son frère, Jack tâtonne, trébuche mais s'obstine à chercher. Une quête personnelle pour se faire pardonner. J'ai beaucoup aimé et je vous le recommande.

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