« J'écris pour la sauver de l'oubli. Jeter des mots comme on sème des graines… Vaste tentative d'immortalité dont l'écriture seule peut nous donner l'illusion. »
Ces quelques mots de
Monique Etienne, autrice de cette magnifique biographie consacrée à sa mère, sont éloquents.
le journal d'Anna, ma mère, résultat d'un travail d'écriture admirable, est impressionnant.
Le texte est dense, riche, sans concession, plein d'une intimité surprenante parfois.
Monique Etienne a aussi été bien aidée par les récits et le journal laissés par Anna, sa mère, comme ce message écrit par elle pour ses 70 ans, résumé franc et direct d'une vie riche en imprévus et en militantisme.
« Elle s'appelait Anna et elle est morte le 27 juin 2013. »
Sa vie s'arrête et c'est là que tout commence pour
Monique Etienne qui se lance dans un travail minutieux aboutissant au livre que je viens de refermer et que j'ai eu la chance de lire grâce à
Daniel Berthet que je remercie.
Le journal d'Anna, ma mère m'a plongé d'emblée dans une enfance triste. Anna est la fille de Marie, femme très pieuse mais dure qui imprègne profondément l'esprit de son enfant. Dans les années 1920 et pour longtemps encore, le pouvoir de la religion catholique est immense sur les esprits et les rites imposés impriment définitivement les cerveaux friables des enfants qui y sont soumis.
Joseph, son père, est marin et il milite à la CGT. Il pourra être fier de sa fille et de ses engagements militants, plus tard. Avec sa mère, elle a découvert les milieux bourgeois et d'extrême-droite de la Rochelle dont elle est éjectée dès le décès de Marie à 38 ans.
La guerre survient quand Anna a 17 ans et elle se trouve obligée de travailler à la mairie d'abord puis pour les Allemands à la base sous-marine. Si elle tombe amoureuse de Richard, le lieutenant de la Wehrmacht, elle ignore tout des horreurs commises par les siens dans les camps de la mort.
C'est à 22 ans, quand le cauchemar des alertes aériennes est terminé, qu'elle rencontre Jack. Elle l'épouse et lui donne deux enfants : Michel et Monique. La maladie, les promotions de Jack à la SNCF, les déménagements successifs marquent leur vie, une vie jamais monotone.
De temps à autre,
Monique Etienne interrompt son récit pour commenter « En aparté » et préciser son ressenti. Elle ajoute aussi les dates d'Anna et des extraits de son journal.
L'ensemble donne un récit varié avec quelques redites et surtout une parte importante consacrée à l'après 1968 et tous les engagements militants d'Anna débutés dès 1962 avec le Mouvement mondialiste. Elle lutte contre le franquisme, l'apartheid, pour les Palestiniens, pour les Saharaouis, pour tous ceux qui souffrent atrocement de l'oppression, contre toutes les injustices.
L'autrice n'oublie pas les amours d'Anna qui se libère sexuellement, aime sans retenue mais revient toujours dans le cocon familial qu'elle préserve jusqu'au bout.
En lisant le journal d'Anna, j'ai retrouvé quantité de moments d'Histoire vécus, ressentis mais je reste profondément impressionné par cette vie si riche sur tous les plans malgré tous les chausse-trappes qui jalonnent immanquablement nos existences.
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