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EAN : 9782915727791
128 pages
Les Bons Caractères (27/08/2021)
1.5/5   3 notes
Résumé :
En septembre 1970, au Chili, Allende, candidat socialiste de l'Unité populaire, emportait l'élection présidentielle. Trois ans plus tard, l'armée, commandée par le général Pinochet qu'Allende venait de nommer chef d'état-major, balaya le gouvernement à coups de canons et se lança dans une répression féroce contre les travailleurs et les militants de gauche. Loin d'ouvrir une nouvelle voie vers le socialisme, comme elle le prétendait, l'Unité populaire avait consciem... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Seul sur Marx

Au moment où Gabriel Boric et son gouvernement de gauche s'installe au pouvoir au Chili, l'occasion était belle de dresser un bilan de la période Allende.
Hélas, amis de l'Histoire, passez votre chemin.
Il ne s'agit pas ici de relater des faits, mais de délivrer un message : ce n'est pas un livre mais un tract.

Pourquoi pas, mais il faut le dire clairement On peut avoir des idées de toute nature, y compris celles qui peuplaient les rêves désormais posthumes d'Alain Krivine, mais il y a la manière.

Ce livre, sous couvert d'éclairage historique n'est qu'un plaidoyer grossier pour la 4ème (ou plus, à force de scissionner on s'y perd…) internationale. Chaque évènement, réel, est présenté sous une forme tendancieuse pour servir l'objectif ultime : dénoncer la politique « petite-bourgeoise » à l'oeuvre durant cette période au Chili, et déplorer l'absence de révolution prolétarienne et d'instauration d'une dictature du prolétariat, seule solution aux malheurs du peuple. le titre est d'ailleurs explicite et fait d'Allende, le complice objectif des militaires félons responsables des massacres de travailleurs (les autres victimes ne semblant pas compter).
Tout est fait pour démontrer qu'il fallait un « renversement de l'ordre bourgeois pour ouvrir la voie à l'établissement d'un pouvoir ouvrier ».

De ce point de vue, l'exemple chilien n'est de toute façon, qu'un support pour asséner lourdement les préceptes trotskistes les plus éculés.

Dès l'introduction, le doute n'est plus permis quant à la volonté de démontrer que, le capitalisme enfonçant la planète, « les opprimés auront alors à faire un choix : s'en remettre à des leaders qui, tels Allende, respectent l'appareil d'état de la bourgeoisie en prétendant s'en servir pour améliorer leur sort ; ou démolir cet appareil d'État pour exproprier la bourgeoisie, lui arracher les moyens de dominer l'économie et se donner ainsi les moyens de réformer la société sur des bases socialistes. »
Un peu plus loin, alors que le régime vacille, la morale ne s'embarrasse plus des frontières : « Seul un État des travailleurs pouvait entreprendre la construction d'une société débarrassée du capitalisme, une société socialiste. Et cela, non pas dans le cadre du seul Chili, mais dans un cadre international, à commencer par celui de toute l'Amérique latine ».

Dès lors, tous les aspects intéressants du livre que sont la description du contexte historique de ce pays souffrant d'un sous-développement lié à la mainmise des grands propriétaires fonciers et des multinationales américaines, les débuts prometteurs de l'Union Populaire, fragile coalition socialo-communiste conduite par Allende, puis sa fin tragique sous les coups de boutoirs des diverses oppositions, l'asphyxie financière, l'influence maléfique de la CIA et enfin la trahison de l'armée…tout ça est perverti par un discours politique convenu et rapidement prévisible.

On retrouve donc sans surprise, l'antiaméricanisme classique.
La politique américaine de ces années-là offre pourtant de multiples raisons d'être critiquée. Mais l'auteur choisit d'écrire au sujet des américains, que « le peuple vietnamien lui résistait avec succès depuis 10 ans ». C'est quand même oublier a minima que le Vietminh ne représentait pas tout le peuple vietnamien.

On a droit également au credo sur la trahison des partis communistes et des partis de gauche : « Après 1933, ils tournèrent ouvertement le dos à toute la politique menée par le parti bolchevique de Lénine et Trotski en 1917 et après ».
Ah l'éternel révisionnisme opposant le sanglant Staline aux héros Lénine et Trotski…qui eux, n'auraient jamais commis toutes ces atrocités.
Plus fort encore, à propos de Mitterrand : « Après son élection en 1981, lui et ses gouvernements successifs mirent en oeuvre une politique anti ouvrière ».
C'est sûr que l'instauration de l'Impôt sur les grandes fortunes, l'augmentation du nombre de fonctionnaires, la revalorisation des prestations sociales et des bas salaires, la réduction du temps de travail, la cinquième semaine de congés payés, la retraite à 60 ans...c'est clairement une attaque contre les ouvriers.

Et je ne parle même pas de l'antimilitarisme infantile : « Jamais ni nulle part, l'armée n'a hésité à intervenir dans la vie politique quand elle l'estimait nécessaire, ni à réprimer dans le sang les mouvements de contestation sociale qui prenaient de l'ampleur, surtout lorsqu'ils menaçaient directement l'ordre et le système des possédants ». Gasquet devait dormir durant Mai 68 ou les émeutes des Gilets Jaunes.

Dans ce pénible fatras, on aurait pu au moins espérer que ce pauvre Allende aurait droit à un minimum de respect, pour avoir tenté, malgré ses erreurs indéniables, de réformer un pays, au prix de sa vie.

Mais non, pour Christian Gasquet, ce social-traitre n'a eu au fond que ce qu'il méritait.
« Qu'il ait été tué ou qu'il se soit donné la mort, une chose reste certaine : jusqu'à la fin, il a refusé d'appeler les classes populaires à s'organiser pour contrer et briser le coup d'État. Il leur a refusé les moyens de s'armer, même si cela seul aurait pu les sauver, lui et son gouvernement ». Puis : « Allende était un homme politique de la bourgeoisie, respectueux de ses institutions, de ses lois, de son système économique et en définitive de ses intérêts de classe. Ayant désarmé les travailleurs militairement et surtout politiquement (sic !), tandis qu'ils laissaient l'état-major libre d'agir, Allende et les partis de l'UP portent une responsabilité majeure dans l'écrasement des classes populaires et le massacre des militants ouvriers et de gauche ».
Et enfin, en guise d'épitaphe (après avoir rappelé Blanqui) : « Loin d'ouvrir une nouvelle voie vers le socialisme, comme ils le prétendaient, ils ont consciemment suivi une voie qui ne pouvait pas changer le sort des classes populaires chiliennes, mais les plonger dans la barbarie ».

Bref, un récit assez détaillé et informé qui aurait pu être intéressant mais rendu indigeste par une dialectique trotskiste grossière qui transforme la lecture en messe révolutionnaire archaïque.
Si j'avais mauvais esprit, je dirais que quand des étudiants issus de la bourgeoisie tentent d'effacer leurs complexes d'enfants gâtés en se mêlant de faire le bonheur d'une classe ouvrière érigée en totem, ça donne ça. Comme le chantait tonton George « Ô vous les boutefeux, Ô vous les bons apôtres, mourrez donc les premiers, nous vous cédons le pas ».

Ah tiens, finalement, j'ai mauvais esprit.

Merci à Babelio pour cet ouvrage reçu dans le cadre de Masse critique.



PS. J'ai essayé de compter le nombre de « bourgeois » ou « bourgeoisie » dans le texte. Je me suis arrêté par lassitude à la page 70 (sur 123) : il y en avait déjà 43 !
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Mon ressenti: Spécialiste en histoire d'Amérique Latine notamment, je ne suis pas du tout d'accord avec beaucoup de points dans le livre, ainsi que sur l'angle de travail de l'auteur.
~ Je pensais avoir un contexte historique neutre dans cet ouvrage, mais cela n'est pas le cas. On retrouve bien la chronologie historique avec l'élection par exemple de Allende, élu président socialiste du Chili, ou alors le putsch de Pinochet. Mais alors, que de confusions pour moi dans cet ouvrage dans l'analyse du contexte historique! Citer dans presque toutes les pages la "Bourgoisie" et le message que veut faire passer l'auteur, ou encore dans le titre indiquant la responsabilité de Allende avec les travailleurs que l'on retrouve dans la conclusions ne me conviennent pas du tout. Ce qui me dérange, et ce, dès le départ, c'est la confusion de l'ouvrage qui devait être pour moi "éclaireur" sur ce passage de l'histoire mais l'angle de travail ne va pas: pas d'ouverture menant à la réflexion mais une démonstration de l'interprétation historique et politique de l'auteur.
~ Par contre, le cuivre au Chili y est bien expliqué.
~ Je pense que, quitte à prendre un parti pris, il faudrait développer davantage la mort de Victor Jarra et la maison de Pablo Neruda saccagée, et proposer une analyse réelle.
~ La mort du président y est à peine citée: là encore, cela mérite des explications, des théories et analyses d'historiens qui aideraient à une réflexion du lecteur (qu'est ce que cela change, pourquoi, comment...)
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Retour au collège avec ce court récit sur le Chili et ses soubresauts, quant un professeur d'histoire trotskiste livrait sa vision du monde à de jeunes élèves inconscients des périls de demain. Dès les premières pages, j'ai été intriguée par l'emploi du mot "bourgeoisie" à toutes les pages. J'avais l'impression de lire un trac politique et non un récit ou essai sur la politique chilienne entre 1970 et 1973. Quelques recherches sur le net m'ont permis de situer et l'auteur et la maisons d'édition. Mon intuition était la bonne. On flirte avec lutte ouvrière et la mouvance marxiste. Vous l'aurez compris, je n'ai pas aimé. Surtout je m'attendais à un récit historique, je souhaitais comprendre cette période de l'Histoire; l'impartialité de l'auteur et son écriture très académique m'ont laissé de marbre.
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