Un aspect fondamental du symbolisme féminin est indiqué par le nombre neuf. Celui-ci, qui est le dernier terme dans la série des unités, est le nombre de la circonférence qui définit la limite « passive » d’une figure dont le centre constitue le pôle actif. Elle représente l’achèvement d’un cycle de manifestation et comporte par là l’idée de perfection.
Rappelons qu’en islâm « le pèlerinage, c’est Arafa » et que le nom de cette Station ultime évoque celui de la Connaissance d’Allâh et par Allâh. Les pèlerins se rendent à cette Station le 9 du mois de Dhû-l-Hijja ; Ibn Arabî écrit à ce sujet : « La théophanie ne cesse de s’amplifier (durant les premiers jours de ce mois) dans les (degrés correspondant aux) nombres simples jusqu’à ce qu’elle atteigne la neuvième nuit, qui est la dernière qui se rapporte à ce type de nombres, c’est-à-dire aux unités. La manifestation divine est alors parfaite dans l’ordre des nombres simples et procure au pèlerin la Connaissance d’Allâh par la perfection des principes constitutifs originels. C’est pourquoi le pèlerin se présente à cette connaissance et y accède dépouillé de tout vêtement cousu, c’est-à-dire de ce qui est composé. »
Un symbolisme analogue se retrouve chez Dante. Dans la Vita Nuova, après avoir rappelé que « selon la chrétienne vérité, neuf sont les Cieux mobiles »(1), Dante déclare que « à considérer plus subtilement la chose, et selon l’infaillible vérité(2), c’est elle-même (Béatrice) qui fut ce nombre », affirmation d’autant plus remarquable qu’il ajoute : « Cette Dame fut accompagnée du nombre neuf pour donner à entendre qu’elle était un neuf, c’est-à-dire un miracle dont la racine, autrement dit la racine du miracle, n’est autre que la merveilleuse Trinité. » En effet, la Trinité « Père, Fils et Esprit Saint qui sont trois et un » est à l’origine de l’apparition miraculeuse de Béatrice ; autrement dit : la manifestation de sa Dame est l’accomplissement même du miracle.
(1) Dans le Pythagorisme, les Muses qui entourent l’Apollon hyperboréen sont également au nombre de neuf. La Musique, qui a donné son nom à l’ensemble, évoque l’harmonie et la « juste mesure ».
(2) Opposée ici à la vérité « chrétienne », c’est-à-dire un christianisme formel. (pp. 16-17)