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EAN : 9782841090242
144 pages
Le Temps des Cerises (01/02/1995)
4/5   2 notes
Résumé :
Un vieux militant, que l'Histoire a rendu un peu amer et qui est atteint de la cataracte, fait passer une petite annonce dans la presse afin de trouver quelqu'un qui l'aide à classer ses archives. Se présente une jeune étudiante que rien ne prédispose, semble-t-il à s'intéresser à cette histoire.
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Critiques, Analyses et Avis (2) Ajouter une critique
Reste un clou sur le mur vide.
Celui sur lequel était accroché le portrait de Lénine.
Le vieux militant, après trente ans, vient de se décider à le décrocher, car c'est le temps des lendemains qui déchantent.
Dans son pavillon de banlieue s'entassent ses archives de toute une vie de militantisme. Il fait appel à une jeune étudiante, documentaliste, qui va pouvoir l'aider à mettre de l'ordre dans ses papiers, et surtout dans ses souvenirs.
Durant sept journées un dialogue va s'installer entre lui, qui représente le passé, et la jeune fille, figure de l'avenir.
Il voudrait bien se convaincre, la convaincre, qu'il était dans le vrai, que ses intentions étaient bonnes, et qu'une dérive s'est installée peu à peu sans qu'il en soit coupable.
Ah qu'elle était belle l'Internationale qui gonflait le cœur de ceux qui l'entonnaient !
- "Nous ne sommes rien, soyons tout". Que d'espérance dans ces mots !
Elle disait aussi "l'état comprime" et "guerre aux tyrans".
Mais d'autres ont construit un socialisme affreusement étatique et les tyrans étaient bien en place à Budapest en 1956 et à Prague en 68.
Il raconte les meetings salle bullier en 33, juste après le procès Dimitrov. Le front populaire et le livre d'André Gide : Retour d'URSS.
Gide était devenu soudainement un ennemi qu'il était de son devoir d'insulter et calomnier.
Le deuxième jour il sort des photos de cartons poussiéreux. Là, c'est lui pendant la guerre d'Espagne, sur le front d'Oviedo, à l'automne 36. Ici c'est André Malraux à Teruel.
La troisième journée il lui parle de ses combats au sein des Francs-Tireurs et Partisans Français. Nous sommes dans le midi de la France . Son chef, le Capitaine Alexandre est aujourd'hui plus connu sous le nom de René Char.
Les SS, la Milice. L'arrestation et la déportation au camp de Dachau. La septième armée américaine le libère. Retour en France où pour la première fois ses certitudes vacillent à la vue de ces femmes tondues que l'on exhibe nue dans les rues de la ville.
Mais ce n'était qu'un incident dans cette atmosphère de liesse générale.
On venait de liquider Pétain, les collabos, la bourgeoisie tremblait. Une aube nouvelle encore ? Une Europe dans la paix après Yalta ? Il voulait croire en la fin des hécatombes.
Mais tout a mal tourné et les évènements se superposent dans son récit comme un trop-plein qu'il ne peut retenir. Un vomi dans lequel se mélange le procès Kravtchenko qui dénonçait les goulags dans son livre " J'ai choisi la liberté", le Sentier Lumineux au Pérou, les grands procès Staliniens, Rajk, Slansky. L'affaire des blouses blanches côtoie les Gardes Rouges en Chine et les Khmers Rouges au Cambodge.
L'avenir radieux s'était bien assombri après toutes ces années.
Brejnev et les tanks en Tchécoslovaquie tuèrent ses dernières résistances.
Le militant ne pouvait plus accepter ça, d'autant qu'avec la disparition de Dubcek allait suivre plus tard au Chili celle d'Allende.
Aujourd'hui où Raymond Jean rédige son livre (1995) tout est à refaire.
Sarajevo en flamme, la balkanisation est de retour.
Les derniers espoirs sont morts même s'il termine son ouvrage par ces mots : "l'avenir, bien sûr. Le futur. Il doit tout de même y avoir toujours quelque chose à changer dans le monde, non ."
Sage précaution de l'auteur, pour pouvoir continuer à vivre.
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Un vieux militant communiste, qui a exerce d'importantes responsabilités au sein du Parti, que les déconvenues successives ont rendu amer, cherche quelqu'un qui l'aiderait à classer ses archives. Une jeune étudiante, stagiaire en journalisme... va s'intéresser à l'engagement de cet homme. Va s'instaurer un dialogue entre deux générations éloignées... qui n'auraient jamais dû se rencontrer...
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Citations et extraits (9) Voir plus Ajouter une citation
...j'étais persuadé qu'on était en train de construire un monde nouveau, ce soleil levant de tout à l'heure, ou ces lendemains chantants que nous annoncions niaisement, et voilà que la première manifestation en était le spectacle de cette pauvre fille promenée toute nue, promenée non, poussée, trainée, exhibée, avec son crâne rasé ou ses bouts de cheveux taillés n'importe comment...Il fallait trouver cela très bien, parce qu'elle avait couché avec des soldats allemands...et beaucoup trouvaient cela très bien en effet...ils ricanaient, ils rigolaient autour d'elle en brandissant leurs mitraillettes...quand j'ai compris que ces hommes allaient devenir tout-puissants, je me suis dit que nous étions fichus...Mais ces hommes, c'étaient les nôtres, des amis, des copains...il y avait là quelque chose qui ne tournait pas, qui était complètement fou...depuis il y a eu tant de choses qui n'ont pas tourné et qui ont été complètement folles...mais c'était la grande fêlure...la première honte...
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- On leur demandait de "coopérer". Ce mot pudique voulait dire reconnaître toutes les calomnies qu'on leur imputait et qu'on leur demandait de prendre en charge, même si elles étaient inventées ou fabriquées de toutes pièces. Ceci dans l'intérêt du parti. De la classe ouvrière.
Le plus fort, c'était qu'ils marchaient. Ils reconnaissaient. Ils avouaient, ils finissaient par se convaincre eux-mêmes. Ils disaient que oui, en effet, c'était tout à fait sûr, ils étaient des espions, des traitres, des policiers, et mêmes des ANTICOMMUNISTES. Ça, il fallait le trouver !
Avérés et endurcis. On ne s'en était pas aperçu, parce qu'ils cachaient bien leur jeu. Mais c'était ainsi. Cela éclatait maintenant au grand jour.
- Mais c'était crédible ?
- On feignait la stupéfaction. Qui aurait dit ? Qui aurait cru ? La chose avait beau être énorme, on l'avalait. Il fallait coller à la raison dévoyée.Obéir à ses lois. Nous savions tous le faire. Perinde ac cadaver. Vous connaissez la formule des Jésuites. Nous avions une grande aptitude à cela.
Nous étions des cadavres de la raison.
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- Les photos, c'est très important. Ce sont les choses comme elles ont été vraiment. Les faits à l'état brut. Elles nous dispensent de commentaires, donc d'interprétations, donc d'erreurs. Sauf quand on les a truquées, comme dans certains pays. Elles ont en tout cas l'incomparable avantage d'être silencieuses. Et, avec les années, croyez-moi, j'ai appris les vertus du silence...
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- Voilà. C'est ce que je voulais retrouver. AVENIR RADIEUX !
Nous n'avions que ce mot à la bouche. Lui comme les autres, et pourtant il n'était pas communiste.
Il y a de quoi tellement pouffer de rire aujourd'hui qu'il faudrait écrire ces mots en grosses lettres, là, sur nos murs, et les encadrer.
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Si je dis religion, c'est qu'il est parfaitement clair que notre parti s'est organisé comme une église. et même comme une secte. Il y a le meilleur et le pire dans les églises. Le meilleur, c'est la défense de la foi. Le pire, c'est la foi aveugle et fanatisée. (....) J'ai dit que nous avons nos grands inquisiteurs, mais nous avons eu aussi nos grands prélats. Grands ? Oui, pourquoi pas ? Il y a une certaine grandeur dans cette dimension de l' Eglise. Là où il n'y a plus de grandeur du tout, c'est quand on descend dans la bigoterie. Nous avons eu aussi nos bigots. Nous les avons toujours. Ce sont ceux qui durent le plus, qui s'écrasent le plus. Imperméables à tout. Inusables.(p.91)
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