Peut-être l'avez-vous déjà lu. Peut-être ne le connaissez-vous pas encore. Ce doit être les conditions glaciaires, alors. Il ne peut y avoir d'autres raisons.
L'auteur nous raconte quelques mois d'un instituteur danois nouvellement débarqué à sa demande au Groenland : Martin surnommé Martini par les habitants du village arrive pour enseigner dans le petit hameau de Nunarqafik. En même temps que lui, revient au pays Jacob, jeune garçon ayant passé un an dans un collège danois, et qui aura du mal à renouer avec la vie groenlandaise. Martin est plein de bonnes intentions mais aussi d'idées toutes faites. Les habitants du hameau, le contact avec la nature et les conditions extrêmes du Grand Nord, et quelques évènements dramatiques vont se charger de le transformer profondément.
Dans une narration remplie d'anecdotes, sur un ton plutôt humoristique, l'auteur dénonce les effets pervers de la volonté du Danemark de faire évoluer le Groenland : cette colonie danoise où les habitants ne connaissent pas encore les « bienfaits » de la civilisation. le ton reste léger, et le message passe par la description de l'infinie joie de vivre des Groenlandais. Pour eux le rire est la valeur suprême, tout est propice à faire la fête, et les relations humaines priment sur le reste.
Un seul habitant du village va se laisser attirer par la modernité et le résultat sera tragique : le père de Jacob ou plutôt Jacunguak va trouver ce moyen, se faire embaucher dans une mine, pour essayer de redorer son prestige dans les yeux de son fils, qui fort d'une année au Danemark, considère la façon de vivre de ses parents comme archaïque. Il y perdra tout.
« C'est bizarre, quand, pendant toute une année, on a pris des douches et même des bains, qu'on s'est lavé les mains à l'eau courante, froide ou chaude, avec du carrelage partout autour de soi, et qu'on a tiré la chasse, et qu'on a même tiré une deuxième fois pour être bien sûr – C'est bizarre, en rentrant chez soi, où papa et maman sont en train de chier dans un seau dans un coin de la pièce, de trouver que ses parents sont des porcs ? Hein, professeur ? Est-ce que c'est si bizarre que ça ? »
Pour illustrer son propos sur ce qui sépare les deux peuples, l'auteur pointe des différences importantes dans la façon de s'exprimer, qui ne tiennent pas seulement à la langue, mais à une tournure d'esprit différente :
« Il s'y laissait souvent prendre- la langue, encore : quand on posait une question, les Groenlandais répondaient toujours avec logique. Quand Kristine demandait : « Ce ne sont pas des bêtises ? » et qu'il répondait « non », il niait que ce n'étaient pas des bêtises. En d'autres mots : il confirmait que ça l'était.
Si quelqu'un demande : « Tu ne viens pas ce soir ? » et qu'on a l'intention de dire « oui » à l'invitation, il faut répondre « non ».
À l'affirmation qu'on ne vient pas.
Martin voyait bien qu'au fond c'était profondément logique mais c'était un peu fatigant de devoir toujours se tenir sur ses gardes. »
Un livre très humain, où j'ai aimé cheminer au coté de Martini, découvrir avec lui une façon de vivre, de penser, de réfléchir différente. Un livre qui nous pousse aussi à nous poser des questions su la civilisation et ce travers si répandu de vouloir porter la bonne parole ailleurs. L'être humain doit apprendre à accepter que certains vivent différemment, pas moins bien, juste différemment.
Pour ceux qui ne l'ont pas lu, Imaqa signifie Peut-être.
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"Ca grinçait, et c'était rassurant."
Un livre que j'ai reçu à Noël 2012 et que j'ai lu très vite.
C'est un coup de coeur. L'écriture est à plusieurs niveaux et l'on peut rire, pleurer, compatir ou maudire suivant les moments.
On découvre le Groenland à travers les yeux de Martin. Instituteur qui a demandé sa mutation au Groenland, province Danoise. Dans les années 70, on est encore à une époque où il faut civiliser ces cultures. En parallèle un jeune garçon qui était parti vivre un an au Danemark rentre au pays.
Le choc est rude pour les deux. Les instructions sont de ne par parler la langue locale et de ne pas s'assimiler... Pour le jeune garçon le retour au pays n'est pas du tout ce qu'il espérait.
Le destin de ces deux personnages va se mêler, s'en mêler et suivre des trajectoires différentes. Je ne vous en dis pas plus pour ne pas vous gâcher la surprise.
C'est une découverte d'une culture martyrisée, d'un peuple décimé par l'alcool mais qui essaie de faire face. Ce sont les abus et les méfaits de certains blancs.. Cet homme qui vit avec une femme ne connaissant pas son nom.... Cet autre qui vend ses manuels scolaires sous prétexte de développement (surtout le sien!)
Bref c'est un livre très touchant. J'ai ri et pleuré. Que demander de plus...
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C'est encore toute émerveillée par cette lecture que je voudrais vous inviter à me suivre au Groenland. Cette aventure est truculente, édifiante aussi parfois, puisqu'elle nous plonge au sein d'une « colonie » danoise. Mais elle est surtout profondément humaine, et c'est ce que je retiendrai en fermant ce roman. Martin, instituteur qui a besoin de dépaysement et de se sentir plus utile, demande sa mutation dans un comptoir danois du Groenland. Afin de mieux communiquer avec la population, il envisage d'apprendre le groenlandais mais le Ministère l'en dissuade : Il y va pour civiliser cette « colonie » en apprenant le danois aux enfants, et pas pour les inciter à continuer à parler la leur. On reconnaît bien là notre impérialisme culturel… « Jeu blanc », « Le chemin de âmes », « Nirliit », « Imaqa », même combat inégal qui n'en finit pas : celui de l'homme blanc contre les populations autochtones traditionnelles, qui ont du mal à faire valoir qu'elles ont le droit d'exister, que leur mode de vie ancestral correspond à leur réalité climatique, et n'est pas pire que notre consumérisme à outrance qui mène à notre perte.
C'est ce que commence à entrevoir Martin qui, pas totalement endoctriné par son Ministère, s'attache à la population locale et s'éprend de leur communautarisme chaleureux. Dès lors, il va chercher à s'intégrer. Il se frotte aux us et coutumes avec une curiosité attachante ; il apprend à se nourrir de ce qu'il chasse ou pêche pour ne pas que son salaire de prof ne s'épuise dans l'unique supérette hors de prix ravitaillée quand le temps le permet ; il s'achète une meute de chiens et un traineau, pour se déplacer en l'absence totale de route - il devra encore apprendre à le conduire ; il se vêt des peaux de bêtes qu'il a tuées pour survivre, et dont rien ne sera gaspillé ; il tâche d'écouter plus que de parler, de tendre la main et non d'enfoncer, de comprendre, plutôt que d'imposer. Malgré tout cela, il se sentira parfois impuissant face aux désastres qu'a introduit sa « civilisation » dans cette contrée cotonneuse et gelée, tout de blanc emmitouflée. Tenter de comprendre et de résoudre l'alcoolisme de son bras droit local par exemple, lui tiendra particulièrement à coeur. Mais que peut faire ou dire un étranger qui ne soit pris pour un jugement dédaigneux ?
Et puis il y a Jacob, cet adolescent du cru revenu d'une année d'étude au Danemark et qui peine à retrouver ses points de repère : sa langue, le goût d'une nourriture non-transformée et la valeur de l'effort, d'un travail qui assure la survie concrète de la famille faute de lui apporter une richesse plus abstraite et moins utile ; Richesse qui permettrait pourtant d'aller acheter des raviolis en boîte pour ne pas manger cette viande de phoque cuit dans sa graisse rebutante ! Comment choisir entre deux cultures, quand la seconde oblige à renier nos racines et les êtres que l'on aime ? Pourquoi apprendre une autre culture, si c'est pour devoir l'oublier en revenant à la maison ? Pour avoir le choix de son avenir, nous souffle-t-on au Ministère, promouvant une civilisation qui nécessite la commande régulière de livres scolaires, de télévisions et autres motos inutilisables sans route ni électricité… Par ailleurs, au Danemark, on n'enfouit pas ses émotions dans la glace des icebergs : on les exprime à tout bout de champ, ce qui deviendra particulièrement intolérable et humiliant pour le père de Jacob, qui devra prendre des mesures pour endiguer les nouvelles manies de son fils prodigue… Ajoutez à cela un chanteur d'opérette qui débarque à l'improviste, des amitiés inattendues, des langues qui finalement s'entremêlent dans l'appel de corps incandescents brisant la glace, des âmes qui s'égarent, des fusils qui s'échauffent, des drames inévitables nés du choc des cultures et de la rigueur des caractères forgés dans ce rude climat.
Mais derrière ces paysages glacés à faire pâlir jusqu'aux esprits maléfiques des superstitions, il y a toute la chaleur humaine d'un peuple qui sait que rien d'autre ne peut réchauffer les coeurs et les corps. « Craindre les créatures surnaturelles n'est pas ridicule au Groenland, c'est une façon d'exprimer du respect - et de reconnaître que l'Homme n'est pas le maître de tout. » Ce que j'ai apprécié au fil des pages, c'est que malgré le ton enlevé du récit, la découverte de cette contrée saupoudrée de magie blanche « n'est pas pour les âmes impatientes, ce qui n'est d'ailleurs jamais le cas lors des partages authentiques ». Ici le « grand Psychologue » est le décor, « l'étincelante pureté du monde » ; l'ambiance, les paysages, la rigueur du climat qui purifie les âmes et les coeurs qui le veulent. C'est ce décorum unique qui sauvera certains personnages de la catastrophe à laquelle les mène l'impérialisme occidental contre lequel Martin lutte désormais, aidé de l'humour et la gaieté d'une population qui sait que sa survie en dépend, même quand la neige fait grise mine et que les humeurs sombres contrastent avec le paysage d'un blanc immaculé. Laisserons-nous un jour chaque peuple vivre en paix comme il l'entend…? Imaqa. Peut-être…
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Imaqa, c'est l'histoire de Martin, instituteur danois dans les années 70, qui à la recherche d'un peu de sens à sa vie et d'aventure, part enseigner au Groenland.
La plume de Flemming Jensen est rieuse et aborde avec finesse et humour la découverte et acclimatation à une nouvelle culture.
L'environnement est plutôt hostile à 500 kms au Nord du cercle polaire mais ça ne pèse pas beaucoup face à l'hospitalité et à l'état d'esprit simple et chaleureux des habitants d'Umanaq.
Ce n'est pas uniquement un roman léger car il aborde également de multiples thèmes sérieux. le choc de l'opposition entre le mode de vie traditionnel des pêcheurs du Grand Nord et la modernité du colonisateur danois, la violence, l'alcoolisme ou encore l'absurdité de la bureaucratie et surtout de certains de ses représentants.
À la fois grave et très humain, c'est une belle lecture que je vous recommande.
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livre merveilleux et desopilant...quelle philosophie et quelle immersion dans un autre monde..et toujours des surprises et des rires sans oublier un style digne de la grande littérature.Un roman rare que je preterai mais reprendrai pour le relire et m emerveiller encore.
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Belle découverte que ce roman danois.
Martin,instituteur danois, est nommé à sa demande dans un hameau du Groënland, à la recherche d'aventure et d'authenticité. Il va être confronté au choc des cultures et aux aberrations du système éducatif du pays colonisateur. Lui-même ne parle pas un mot de groënlandais.
Jakunguaq est un adolescent groënlandais revenant chez lui après une année scolaire passée au Danemark où il avait mis sa culture à distance.
Ce roman pose de nombreux problèmes liés à la colonisation, aux systèmes bureaucratiques bien loin des réalités de terrain. le tout traité avec un ton ironique qui prime sur tous les sujets. le rire est une règle au Groënland. On rit de tout et de son contraire. Nous suivons les difficultés de Martin pour s'adapter malgré toute sa bonne volonté.
Une lecture très agréable sur un sujet grave servi par une écriture plaisante.
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Très belle histoire d'un jeune instituteur Danois qui souhaite s'installer dans un comptoir du Groenland (une région autonome du royaume de Danemark).
Certaines scènes sont un peu trop loufoques à mon goût, mais j'ai beaucoup apprécié la narration du quotidien dans les villages éloignés.
Ce livre est bien écrit, les chapitres s'enchaînent bien sans qu'on trouve jamais le temps de s'ennuyer. J'ai gardé un souvenir attachant des personnages.
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Je me lance dans ce roman avec l'envie de découvrir une région peu connue:
Le Groenland ....
Je souhaite parfaire mes connaissances sur leurs habitudes, leurs us et coutumes, m'évader dans des paysages méconnus malheureusement très vite l'histoire s'éternise.... je trouve peu de détails dans la narration...
L'histoire est flou sans grand intérêt pour moi.
Les 440 pages m'ont parues très longues et peu intéressantes.
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Un livre beau, à la description cinématographique qui permet un court voyage sur les rives du Groenland. Dans la narration, on découvre de manière sarcastique, drôle et intelligente, l'Humain doté de ses bons et de ses mauvais côtés. Flemming Jensen nous partage une tranche de vie apaisante et attachante, mais aussi la fascinante rencontre de deux cultures que sur le papier tout oppose. Un plaisir à lire !
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