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3,69

sur 259 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Ce livre est le récit d'une histoire d'Amour entre Celestial et Roy, amour qui leur a été volé quand Roy a été injustement accusé de viol et jeté en prison. Encore jeunes mariés, ils ont vécu moins longtemps ensemble qu'éloignés. L'amour a ses limites et notamment, quand survient une séparation. Mais le deuil d'une histoire d'amour ne se fait pas de la même façon selon les individus et Roy, une fois sorti de prison, compte bien reprendre sa place dans la société mais aussi dans sa vie, dans son couple.

Roy et Celestial sont des afro-américains. C'est clairement spécifié dans la quatrième de couverture mais sans en faire un roman revendicatif, l'auteure Tayari Jones n'est pas sans rappeler le talent de la regrettée Toni Morrison. Avant de les différencier par leur couleur, Celestial et Roy sont avant tout des êtres humains, qui partagent des ambitions, des rêves comme tout un chacun. Mais vivre comme eux dans un état sudiste lorsque l'on a une autre couleur de peau que blanche, va malheureusement engendrer des différences, des formes lascives de racisme au quotidien.

Tayari Jones décortique les relations humaines et plus particulièrement celles de ce couple. Elle n'approfondit pas l'épisode du procès et de la problématique des erreurs judiciaires pour se concentrer sur la psychologie de ses personnages, leurs ressentis, leurs blessures. Cet évitement pourra en rebuter plus d'un mais je ne pense pas qu'elle ait voulu écrire sur le système judiciaire américain mais bien sur une société dont les dissemblances pullulent. Alors séparés par la prison, Celestial et Roy s'écrivent des lettres, souvent touchantes, sensibles et si sincères.

Ainsi, alors que Roy s'est trouvé au mauvais endroit au mauvais moment, la terre a continué de tourner, les sentiments d'être partagés ou non. L'écriture de Tayari Jones est tendre, ne rendant pas ses personnages parfaits mais dotés de défauts comme tout être quelconque. Cette histoire si réelle et captivante rend compte de l'American Dream qui n'est finalement destiné qu'à une certaine franche de la population dans un pays si riche de diversités pourtant. Intelligemment écrit, sans tomber dans le pathos, l'auteure sait faire comprendre ce racisme latent, pourtant ô combien dangereux.
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Celestial et Roy sont mariés depuis un an quand la foudre tombe sur eux sous l'aspect d'une erreur judiciaire qui condamne Roy à 12 ans de prison. Les débuts de la séparation sont racontés sous forme de lettre, ce qui m'a plu et accroché au sort de ce couple. Peu à peu elles nous dévoilent l'éloignement puis l'influence de personnes extérieur à leur couple..

Mais jusqu'où peut aller la patience et le sacrifice d'une épouse quand au bout d'un de mariage son époux est emprisonné ?  même un époux innocent. Quand Roy est libéré et que Celestial a refait sa vie, doit-elle retourner en arrière également ? 

A partir de cette erreur judiciaire, qui n'est pas exploitée, on suit, chacun à son tour les acteurs d'un trio amoureux. Si je pensais regretter l'absence de suivi de l'erreur judiciaire, j'ai apprécié que l'auteur se concentre sur la psychologie des personnages chacun tiraillés entre l'engagement du mariage ou de l'amitié et ses sentiments et ses ambitions.  C'est le dilemme d'une femme qui, éloignée de son époux, a développé des sentiments pour un ami d'enfance. D'ailleurs j'ai beaucoup apprécié d'avoir le portrait de cette femme qui réussit professionnellement et qui ne se sent pas coupable de penser à elle, à sa carrière, à ses désirs.

Autour de ce triangle amoureux gravitent les parents de chacun, ce qu'ils ont transmis à leurs enfants. Et entre le couple que forment Roy et Celestial, même au delà de toutes ces personnes le fantômes d'un enfant qu'ils n'ont pas eu.

Les débuts étaient prometteurs malgré la lenteur du récit qui ne m'a pas ennuyé mais je suis restée sur ma fin. J'aurais voulu en savoir plus sur la relation entre Celestial et Roy, entre Andre et Celestial, connaître les origines des amours. Mais je me suis accrochée à ce qui m'a paru être mis en avant : la force des sentiments de chacun des personnages, l'injustice ressenti par chacun innocent dans leur rôle d'accusé, de femme adultère ou d'amant également ami du mari se ressent dans les dialogues, les confrontations. On sent le déchirement de chacun, car il n'y a pas de coupable à part ce système judiciaire qui a condamné un homme sans lui permettre de se défendre, a détruit son entourage et l'a condamné également à repartir de zéro alors qu'il avait tout fait pour s'offrir une vie paisible.

Globalement une bonne lecture mais sans emballement général.

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Celestial et Roy, ils sont beaux, doués, jeunes mariés ; ils ont l'avenir devant eux.
Sauf qu'ils sont noirs et quand un viol a lieu dans le motel où ils dorment, Roy est le coupable idéal. Condamné rapidement à 15 ans de prison.
Débute alors une correspondance émouvante entre les jeunes époux, dans laquelle ils se dévoilent, se découvrent aussi...
Mais 15 ans c'est long. Celestial est une jeune artiste, créatrice de poupées réalistes, à qui l'avenir sourit.
Saura t'elle attendre Roy ? Que se passera t'il quand il sortira de prison, lui qu'elle sait innocent ?

L'auteur a articulé son roman autours de 3 temps forts :
« L'avant-prison » au cours duquel les personnages nous sont présentés, dans lequel déjà nous sommes ferrés, attachés à ces héros du quotidien…
« La période prison » au cours de laquelle le style du roman passe à un style épistolaire.
Et bien sûr « l'après prison » où l'on retrouve nos personnages qui se partagent à tour de rôle les chapitres.
3 temps, 3 styles et pourtant une grande fluidité. Un parti pris rare et pourtant qui a toute sa légitimité ici.
Les thèmes de l'amour, de l'amitié, de la famille, des différences sociales, … y sont abordés et font de ce roman un roman moderne que l'on ne peut, que l'on ne veut quitter.

Vous l'avez compris j'ai beaucoup aimé ce roman et vous le recommande, comme moi vous ne le fermerez qu'une fois terminé… (reçu vendredi, fini samedi soir).
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Celestial et Roy sont mariés depuis 18 mois maintenant. Une union pleine de la fougue des débuts.

Mais ils sont noirs dans un état du Sud des Etats-Unis.

Accusé à tort de viol, Roy est incarcéré.

L'attente commence pour celui dont la vie a été brisée en plein élan : adieu la carrière, adieu les projets de bébé, reste l'espoir de sortir et de retrouver sa femme, sa famille, sa vie.

Celestial est libre mais prisonnière également. Sa peine, immense, de voir son mari innocent derrière les barreaux. Sa colère face à cette injustice, aux visites, aux fouilles.

Sa culpabilité de continuer à vivre libre, d'avoir des projets, de se rapprocher d'Andre. Dre, l'ami depuis l'enfance, amoureux depuis toujours de Celestial.

C'est un récit à trois voix, dans lequel le mariage et l'amour sont interrogés.

Tayari Jones se concentre sur ce lien ténu qu'est l'amour ainsi que sur la vie conjugale.

La loyauté est-elle la vertu cardinale d'une vie maritale, peut-on s'interdire d'évoluer, d'être libre quand son époux est derrière les barreaux ?

Cependant, même si le racisme cause l'emprisonnement de Roy, l'arrière-plan sociétal n'apparaît qu'en filigrane.

Cela sera au final pour moi le principal reproche à faire à ce livre. Cette matière qui aurait mérité d'être tellement développée n'est qu'à peine évoquée.

C'est ce qui fait basculer ce roman non pas dans la catégorie « coup de coeur » mais dans celle des lectures agréables, ce qui n'est déjà pas si mal.
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Un couple afro américain dans le Sud des États Unis
Un mariage à qui sourit la vie,
Et en une nuit tout bascule.
Roy est incarcéré pour viol et enfermé pour 12 ans.
« Il n'est pas toujours bon d'être noir dans ce pays »

Par l'injustice d'une erreur judiciaire, Roy va tout perdre. le couple va tenter de préserver le peu qu'il a pu construire. Mais le temps est un facteur essentiel et cruel. Un amour peut-il toujours survivre à une séparation longue, où l'un continue de vivre quand l'autre fait du surplace? La difficulté de rester loyal n'est-elle pas le reflet d'un mariage qui avait peu d'avenir?

Un roman à trois voix (où s'invite un ami proche), des échanges pétris de douleur et d'émotions, et un décorticage du tumulte des sentiments. Un récit entrelacé qui offre de beaux passages pour évoquer l'amour, le vide de l'absence, Mais aussi la rancoeur, les reproches, le sens du devoir, les différences de perception des événements.

C'est une étude intelligente et pertinente de la fidélité, de la virilité, de l'indépendance des femmes, de la séparation et du temps qui passe.
Et en creux, une vision du système pénal américain qui fait frémir.
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°°° Rentrée littéraire 2019 # 12 °°°

Tayari Jones est une auteure américaine. Noire. Ses personnages, les mariés du titre, Roy et Celestial sont noirs, mais elle a choisi de ne pas leur faire porter leur couleur en étendard pour un propos universel – comme le suggère le titre.

« La race, c'est essentiel pour définir un individu d'un point de vue politique et social. Mais en même temps, c'est un critère vide, qui n'a pas davantage de sens que le sexe ou la couleur des yeux : la race ne dit rien de la personne que vous avez en face de vous. J'écris sur la communauté noire américaine mais je me sens très exactement comme un écrivain russe qui écrit sur les Russes : ce qui compte vraiment, c'est qu'ils sont des êtres humains, et que, partageant la même expérience humaine, le lecteur se sente lié à eux. »

Ces mots sont de la grande Toni Morrison. Nul doute que Tayari Jones se place ( modestement ) dans ses pas. Celestial et Roy sont traités comme des êtres humains au-delà de leur couleur de peau. Ce qui rend tout le propos du roman extrêmement subtil, surtout lorsqu'il s'agit de traiter du racisme et des discriminations qui frappent la communauté afro-américaine.

Roy est condamné à tort pour un viol. Il était juste au mauvais endroit, à la mauvaise heure, avec la mauvaise couleur de peau aux yeux d'un jury judiciaire qui n'avait pas la même. Plutôt que de s'attarder sur les procès qui le condamnent, Tayari Jones choisit de carrément les zapper dans un art de l'ellipse remarquable. Cela a déconcerté et déçu pas mal de lecteurs au vu des retours de lecture sur Babelio, pas moi.

Au contraire, elle préfère resserrer son action sur le vécu de Roy et Celestial, ainsi que les conséquences sur leur couple de très jeunes mariés. C'est à travers leur correspondance épistolaire qu'on découvre toute l'injustice du système judiciaro – carcéral américain. Cette plongée dans l'intimité du couple permet de comprendre sa colonne vertébrale et son délitement progressif. Ces lettres sont sans doute les moments les plus réussis, les plus forts du roman.

Car ce qui intéresse Tayari Jones, c'est avant tout de décortiquer les ressorts d'un couple dans la tourmente, quel que soit sa couleur de peau. Elle le fait avec une acuité folle et beaucoup de classe, explorant tous ses ressorts, les interrogeant avec intelligence ( loyauté, trahison, accomplissement personnel, sens du sacrifice, culpabilité, rapports de force ). Personne ne se trompe, ni Celestial, ni Roy, ni Andre ( le nouveau compagnon de Celestial ), tous sont blessés et tous se racontent dans ce roman choral à trois voix.

Et pourtant, ce ne sont pas des personnages particulièrement aimables, ils sont plein de défauts ce qui les rend très intéressants, complexes et profondément humains. C'est d'autant plus fort de parvenir à rendre leur histoire aussi déchirante. Mais le personnage qui m'a le plus saisie est le père de Roy. Il est magnifique dans sa dignité à soutenir et aimer plus que tout ce fils qui n'était même pas le sien au départ, ce fils qui a cru avec arrogance au rêve américain comme une revanche pour s'extraire de la pauvreté de sa famille et qui s'est fait broyé. Il est bouleversant lorsqu'il parle de son mariage américain à lui qui a tout surmonté, né à une époque où la ségrégation frappait encore. Concernant la thématique de la filiation, juste pas emballée par l'épisode fortuit de chez fortuit qui concerne le père biologique de Roy, pas nécessaire et pas à la hauteur de la subtilité du roman.

J'ai dévoré ce remarquable roman, complètement happée dès les premières pages par ce thriller de l'intime où se joue le devenir d'un couple dans ce qu'il a de plus banal et de plus singulier.


Lu dans le cadre du jury Grand Prix des Lectrices Elle 2020 ( n°2 )
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Qu'est-ce que ça représente d'être noir, afro-américain dans les états du Sud des Etats-Unis de nos jours? Certes, des lois ont aboli la ségrégation et sur le papier instauré une égalité incontestable. Il n'empêche, et les prisons en sont la preuve, que dans les faits, la couleur de la peau reste une circonstance aggravante dans toute situation litigieuse .

Roy se trouvait au mauvais endroit au mauvais moment, et lorsqu'une femme blanche l'accuse de viol, et cela malgré les témoignages de son épouse avec qui il séjournait dans le même hôtel que la plaignante , il écope de douze années de prison. Pour un jeune marié, la pilule st difficile à avaler.

Les années passent et pour Célestial, la jeune épouse, elles sont longues, et mettent à rude épreuve la stabilité du jeune couple.

L'incarcération modifie profondément les relations à l'entourage, et constitue un inducteur pour les confidences. Et de nombreux secrets de famille seront mis à jour au cours des séances de parloir. La prison est aussi le lieu de rencontres inattendues.

Le sujet est amer : racisme ambiant, fragilité des liens familiaux, et pourtant l'auteur n'hésite pas à utiliser un ton léger, et même humoristique, qui contribue largement à l'agrément de la lecture.

Ce roman, qu'Obama a qualifié de bouleversant, est en effet un excellent état des lieux de l'identité afro-américaine dans l'Amérique du Nord de nos jours, et prodigue de surcroît d'agréables heures de lecture.
Lien : https://kittylamouette.blogs..
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Merci à Babelio pour l'envoi de ce roman Masse Critique.

Un mariage américain nous conte l'histoire de Celestial et Roy mariés depuis 1 an et demi. Ils songent à avoir un bébé, tout leur sourit jusqu'au jour où Roy est accusé de viol et est condamné à 12 ans de prison. Comment faire survrir un mariage si récent dans de telles conditions. Tel est la question que se pose Tayari Jones.

J'ai énormément aimé la construction du récit. A chaque chapitre assez court d'ailleurs nous changeons de point de vue, un coup Roy, un coup Celestial, sans oublié André le meilleur ami de Celestial qui va devenir bien plus pendant la détention de Roy.
Cette construction dynamise le récit et d'avoir le point de vue de tous les personnages, implique le lecteur et m'a donné envie de choisir un camp.

D'un côté nous avons Roy emprisonné à tord alors qu'il avait la vie devant lui. Il survit à la prison, espère retrouver sa vie d'avant et sa femme à sa sortie... de l'autre Celestial qui a finalement passé plus de temps à attendre son mari que d'année de vie commune. Elle se rapproche d'André qui lui est présent et fou amoureux depuis des années. C'est une femme libre, indépendante qui veut avancer et qui peut être n'est pas faite pour le mariage.
J'ai trouvé le personnage de Celestial égoïste, je n'ai pas du tout aimé son comportement vis à vis de Roy. J'avais même parfois l'impression qu'elle minimisait la vie en prison et le calvaire qu'il avait vécu.
Un mariage américain est un roman très bien écrit qui nous questionne sur la vie de couple, le mariage mais il est aussi beaucoup question du rôle du père. Tous les personnages ont une relation particulière avec leur père. Et cela semble avoir un impact sur leur vision du mariage.
Tayari Jones, une auteure à suivre.
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👰🏾💍 Un mariage américain - Tayari Jones 💍👰🏾
Traduction : Karine Lalechère @editionsplon

Merci @babelio_ pour cette masse critique privilège.

Roy et Celestial sont mariés depuis 18 mois, ils vivent une relation intense et passionnée, passant de disputes en réconciliations. Roy est ambitieux, il vient d'une famille modeste et veut réussir, Celestial elle vient d'une famille aisée (son père a gagné beaucoup d'argent grâce à la vente d'un brevet) c'est une artiste, elle confectionne des poupées de chiffon. Lors d'une visite aux parents de Roy, le couple séjourne dans un hôtel lorsque la nuit la police débarque et accuse Roy du viol d'une femme blanche séjournant elle aussi à l'hôtel. Malgré le témoignage de Celestial affirmant que Roy était avec elle, ce dernier est condamné à 12 ans de prison. Il est donc incarcéré en Louisiane où vivent ses parents et Celestial repart chez eux à Atlanta en Géorgie. Elle va trouver du soutien et du réconfort auprès d'Andre son ami d'enfance, tandis que Roy va devoir affronter la vie carcérale en attendant que son avocat arrive à le faire sortir.

Ce roman le portait d'un couple noir de classe moyenne dans les états du sud, mais pas que... Il y est question de justice ou plutôt d'injustice où un noir peut être condamné sans preuves sur la parole d'une blanche. Il y est question du couple, où la loyauté est mise à rude épreuve par la distance, le décalage du quotidien. Il y est aussi question de la famille, de l'amitié, de l'amour et du devoir.
J'ai beaucoup aimé ce roman à trois voix, celles de Roy, de Celestial et d'Andre entrecoupé de leurs correspondances. Cette forme permet de comprendre les raisons d'agir de chaque personnages et d'éprouver de l'empathie pour eux, si bien qu'il est difficile de prendre parti pour l'un d'entre eux.
En partant de la petite cellule d'un couple, Tayari Jones dénonce les dysfonctionnements et les maux de la société américaine.
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Tout commence comme une romance acidulée et drôle. Celestial Davenport, enfance choyée dans les beaux quartiers d'Atlanta, a épousé Roy Hamilton, un petit gars de Louisiane qui s'est taillé une belle route vers le succès après de solides études universitaires. Même si Roy est toujours un peu intimidé par la réussite des Davenport, et Celestial mal à l'aise devant les remarques abruptes d'Olive, la mère de Roy, leur couple entrevoit l'avenir radieux qui s'offre à eux. le jeune femme va se consacrer à son art, la fabrication de poupées, et son mari va poursuivre sa carrière dans le monde des affaires en attendant de fonder sa propre entreprise. Installés dans la maison offerte par les parents de Celestial, ils envisagent après deux ans de mariage d'avoir un enfant. Mais tout dérape un soir de septembre, à Eloe, la petite ville où ils sont venus rendre visite aux Hamilton. Roy est accusé de viol par une cliente du motel où ils séjournaient. Bien qu'innocent, il est condamné à douze ans de prison car la justice du Sud est souvent expéditive à l'égard des Noirs.
Ce roman pourrait apparaître comme une dénonciation de la condition faite aux Afro-Américains aux États-Unis. Son intérêt est de dépasser l'approche victimaire pour disséquer au plus près les effets d'une décision injuste sur les protagonistes de l'histoire. Roy est victime d'une erreur judiciaire, du jour au lendemain son existence est bouleversée, ses espoirs de réussite ruinés, cependant l'auteur, plutôt que traiter de la réalité carcérale, choisit d'en montrer les conséquences sur un couple brutalement séparé. Comment réorganisent-ils leur vie ? Quelles voies s'offrent à eux pour maintenir les liens conjugaux ? Quelle est la part des non-dits, des silences, des attentes de chacun dans leurs tentatives pour sauver leur mariage ?
Tayari Jones nous montre avec beaucoup de justesse l'onde de choc qui se propage sur l'entourage. Très subtilement, elle analyse les réactions familiales. Les Hamilton ont la combativité des gens modestes, qui ont dû toujours lutter pour obtenir le peu qu'ils ont et gardent la tête haute en toute circonstance. L'amour qu'ils portent à leur fils est indéfectible et ils savent qu'il ne peut avoir trahi les valeurs qu'ils lui ont inculquées. Les Davenport abordent la situation rationnellement, s'appuient sur leur aisance matérielle pour financer les recours en justice de Roy, ont un ami avocat chargé de son dossier, aident leur fille à rebondir et installer sa boutique de poupées. À chacun sa manière d'agir pour protéger son enfant dans les épreuves qu'il traverse. Ce qui renvoie sans cesse à la question de la filiation : que signifie être le père ou la mère d'un enfant ?
Une autre question étend ses ramifications à travers tout le roman : quelle est la nature même du mariage ? Quel sens faut-il donner à la promesse d'être là pour le meilleur et pour le pire ? le mariage est-il la sanction de l'amour, ou l'institution qui donne au sentiment toute sa signification dans le temps ? Tayari Jones se garde bien de donner une réponse car les avis sont partagés, tant chez les Davenport que chez les Hamilton. Pour Andre, le soupirant de Celestial, l'amour est avant tout une question de loyauté envers soi et non de fidélité à l'autre.
La forme choisie par l'auteure nous permet d'échapper à une narration linéaire qui aurait pu s'engluer dans le sentimentalisme ou le démonstratif. Chacune à leur tour, les voix de Roy, Celestial et Andre s'élèvent, évoquent passé et présent, réfléchissent à l'avenir. C'est souvent poignant, parfois drôle et toujours juste. Ce formidable roman montre bien que la relève de Toni Morrison est assurée.
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