Décidément je ne me lasserai jamais de
Stephen King. Il parvient à maîtriser l'horreur, le fantastique et l'émouvant avec tant d'aisance que j'en suis chaque fois déroutée... Ici, il tente un tout nouveau genre délaissé depuis des années : celui du roman feuilleton ! Et c'est une vraie réussite.
La ligne verte nous est raconté par Paul Edgecombe, le gardien du bloc E alias le bloc des condamnés à mort qui ne tardent jamais à rejoindre la « Veuve Courant ». Paul est un héros extrêmement touchant et ce, dès le début du récit : on sent bien qu'il a un bel esprit, un jugement droit, enfin bref que c'est un bon gars. Paul nous retrace donc son histoire, son quotidien à la prison, et en particulier l'année 1932, une année qui a bouleversé sa vie. Celle où John Caffey est arrivé. John, ce grand nègre accusé du meurtre de deux jumelles, s'avère pourtant rester sage. Et des évènements surviennent. Et les révélations tombent.
Les livres se laissent avaler avec une facilité incroyable. J'avais les éditions originales, c'est-à-dire sous forme de roman-feuilleton et je me limitais à un épisode par jour même si c'était dur d'attendre. Je me demande comment les lecteurs avaient la patience de poireauter une semaine pour avoir la suite, et franchement
Stephen King devait avoir une pression terrible sur les épaules. Pourtant, quand on y pense, il l'a écrit vite ce roman, et c'est ça le plus prodigieux : qu'il ait réussi à produire une merveille pareille en l'espace de...6 semaines ? Tout est superbement lié, malgré le fait qu'il n'avait pas la moindre idée de la fin en entamant l'histoire – ou qu'il n'en avait qu'un bref aperçu. Mais il faut savoir que
la ligne verte, à la différence des incontournables du même auteur, est plutôt du genre réaliste, toutefois accentué par une touche de fantastique qui trouve sa place dans le récit. Pas d'inquiétude car le suspens est là, sans doute pas aussi marqué que dans les autres romans de King mais largement compensé par les anecdotes de Paul, notre narrateur. Les personnages sont attachants et curieusement j'ai aimé aussi Percy, ce rustre détestable, même s'il a fait des trucs atroces. Allez savoir pourquoi. Au final, on trouve à tout le monde quelque chose de positif, peut-être parce qu'on sait ce qui adviendra à chacun dans le futur.
J'ai aimé le contenu du livre, le contexte dans lequel l'histoire nous est racontée. Et puis le fait aussi qu'il y ait tant de profondeur par l'intermédiaire de quelqu'un qui se demande si on pourrait y trouver un quelconque message. Pourtant il y a bien un message, peut-être pas tout rose mais qui donne à réfléchir. On se dit qu'au fond, le monde est peuplé de gens bien, de gens mauvais et qu'il y règne une véritable injustice parce que ce ne sont pas toujours les mauvais qui sont punis. le pilier central, c'est John Caffey, mais là encore c'est très ouvert, surtout quand on se retrouve face au Paul du présent qui nous affiche une réalité poignante, dans sa petite résidence de vieux et puis qui dépérit lentement dans toute cette odeur de pisse et de futures macchabées. le dernier épisode m'a arrachée des frissons et quelques larmes qui n'ont pas débordé. C'était vachement beau. Quand on referme le livre, on a tout de même l'esprit léger et on se dit qu'il faudrait exploiter au maximum le plaisir de la vie parce que chaque chose a une fin. Si
Stephen King nous rappelle à quel point l'être humain est vulnérable, il nous livre là aussi une belle leçon d'humanité.