Pour moi, lire du King, c'est faire un bond spatio-temporel de quelques kilomètres et d'une grosse vingtaine d'années. Me voilà alors adolescente, sur mon lit superposé, le bouquin sur l'oreiller, et ma soeur en bas."Hey ! Tu fais quoi ?". Ou bien j'arrive sur un transat, en vacances, avec mon père à côté. "Viens à la piscine et lâche ton livre !". Voilà, lire du King, pour moi, c'est un peu tout ça. Une odeur de sel et d'enfance, de plage et de draps en flanelle. de dernières pages qui arrivent trop vite. de cauchemars. de nuits où les pieds n'osent pas se poser tant que les yeux n'ont pas tout inspecté. Et de cauchemars. Oui, encore. Chez moi, les cauchemars, je les prends par boîte de 12.
Aussi, quand
L'outsider est arrivé entre mes mains, je ne vous cache pas que j'étais fidèle à mes 15 ans, impatiente, curieuse, le tout saupoudré d'une pincée d'appréhension. Parce que ça faisait un moment que je n'avais pas mis les pieds en Kinguésie et je ne savais ni ce que j'allais y trouver, ni l'effet que cela aurait sur mes nuits.
Et c'est comme ça que je me suis préparée pour quelques heures de lecture, espérant quelques cadavres bien saignants. Ne manquait plus que les frites et la sauce béarnaise, mais je n'ai pas osé réclamer.
A peine le livre ouvert, me voilà nez à nez avec
le corps mort, violé et mutilé d'un adolescent. Heureusement, l'enquête est vite pliée puisque tous les témoignages concordent. Aucun doute, c'est le coach Terry. A moins que... mais... impossible. Des preuves irréfutables le placent également bien plus loin au moment du meurtre. Mais comment peut-on être à deux endroits en même temps ? Tsss... ne cherchez pas. Il n'y a que le King pour penser à ça. Et comme à son habitude, le maître tricote avec plusieurs pelotes dont sa préférée, celle de la réflexion critique sur la société, américaine bien sûr, mais pas que.
Est-ce que je vous en dis plus ? Non. Surtout pas. Mais alors, me direz-vous, qu'est-ce que je fais là ? Pas grand chose, soyons honnêtes. Mais tant que j'y suis, j'y reste, et j'en profite pour vous glisser subtilement à l'oreille que c'est du très bon King. 900 pages format poche, j'aurais pu m'épuiser. Mais non, pas une seule fois, au contraire.
Alors venez, montez à bord de ce pavé et envolez-vous pour Flint City. Vous y resterez de votre plein gré, le temps de l'enquête, mais en repartirez presque soulagés à la fin. Soulagés ? Oui, parce que les histoires du King, croyez-moi, on préfère tous qu'elles ne soient justement que des histoires, pour pouvoir les refermer sereinement à la fin, un demi sourire aux lèvres, en se disant "mais où va-t-il chercher tout ça ?". Où ? Peu importe, mais pas sous mon lit j'espère...