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EAN : 9782882508997
450 pages
Noir sur blanc (08/02/2024)
3.8/5   5 notes
Résumé :
Être journaliste, c’est dire la vérité. Avec Mon pays bien-aimé, Elena Kostioutchenko documente son pays, tel qu’il est vécu par celles et ceux qu’il efface systématiquement, par exemple les filles de la campagne recrutées comme travailleuses du sexe, les personnes queer des provinces éloignées, les patientes et les médecins d’une maternité ukrainienne – et les journalistes, dont elle fait partie.

Cet ouvrage est le portrait singulier d’une nation, et... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (3) Ajouter une critique
Un grand merci à la Masse critique Babelio qui m'a permis de découvrir et connaître Elena Kostioutchenko : une jeune femme, journaliste indépendante russe qui force le respect et l'admiration, un courage et une force inébranlable.
Dans son livre: Russie, mon pays bien -aimé, Elena Kostioutchencko nous raconte qui elle est, son récit est émaillé d'articles qu'elle a réalisés pour le journal russe indépendant : Novaïa Gazeta.
Rien ne disposait cette jeune femme au journalisme, issue d'un milieu pauvre, elle aime son pays profondément . Sa vocation de journaliste se révèle alors qu'elle a 14 ans et qu'elle découvre grâce aux écrits d'Anna Politkovskaïa, assassinée en 2006, ses articles sur la guerre en Tchétchénie.
Elle décide alors de devenir journaliste dans le même journal : Novaïa Gazeta.
La lecture des articles de sa consoeur lui ouvre les yeux et elle mesure à quel point la propagande dans son pays est une arme ultra puissante.
Dans son récit, à travers ses reportages, elle n'a plus qu'une seule obsession : dire la vérité sur ce qui se passe en Russie et ceci même au prix fort de sa vie.
Elle s'attache avec beaucoup d'humilité et de conviction à nous documenter sur la façon dont sont traités ses compatriotes, particulièrement tous ceux qui gênent l'exercice du pouvoir de Poutine .Pour elle, il s'agit d'un pouvoir exercé par des fascistes.

Les homosexuels, les enfants handicapés abandonnés et maltraités dans des orphelinats, les prostituées, mais aussi toutes ces minorités ethniques du grand Nord comme les Nganassanes ou les Dolganes jugés comme des êtres inférieurs.

Elle dénonce aussi les désastres écologiques engendrés par le combinat de Norislsk et l'impunité qui demeure.
Russie, mon pays bien -aimé est une lecture essentielle pour qui s'intéresse à la Russie et veut comprendre ce qui s'y passe réellement.

Beaucoup d'admiration pour Elena Kostioutchencko , j'espère que son livre rencontrera beaucoup de lecteurs.
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Peu de temps avant de recevoir ce livre, je suis tombée sur une interview d'Elena Kostioutchenko. Pendant dix-sept ans, la journaliste russe a réalisé des reportages pour Novaïa Gazeta, principal journal indépendant en Russie, créé au début des années 1990. Impressionnée par son courage, j'avais envie d'en savoir plus sur son travail et je remercie l'équipe Babelio et les éditions Noir sur blanc de m'en avoir donné l'opportunité.

Au début du livre, une chronologie concise permet au lecteur d'avoir une vue d'ensemble sur le sujet et un cadre pour comprendre la suite. J'ai été véritablement emballée par le début du récit d'Elena Kostioutchenko. Son écriture est agréable et sensible lorsqu'elle partage avec le lecteur quelques-uns de ses souvenirs d'enfance. Née en 1987, elle a grandi dans une période de bouleversements marquée par l'effondrement du système soviétique. À travers son regard de petite fille, le président Eltsine apparaît comme « un méchant » responsable des malheurs de sa mère qui cumule plusieurs emplois puisque les salaires ne sont plus versés. Cette manière d'aborder la perception des informations à hauteur d'enfant m'a beaucoup plu.

Elena commence à travailler très jeune, elle récure des planchers. À quatorze ans, elle écrit dans un journal local. En découvrant des articles de Novaïa Gazeta, elle a une prise de conscience : « J'étais fière d'écrire sur des sujets d'adultes et je me considérais comme une journaliste. Puis, par hasard, j'ai acheté un numéro de Novaïa Gazeta. Je l'ai ouvert sur un article à propos de la Tchétchénie. On parlait d'un gamin qui interdisait à sa mère d'écouter des chansons russes à la radio. Parce que les militaires russes avaient emmené son père, puis avaient rendu son cadavre avec le nez coupé. Dans l'article il y avait les mots «nettoyage», «point de filtrage». Dans le village de Mesker-lourte les militaires ont tué trente-six personnes. Ils ont crucifié un homme (il a survécu), transpercé ses mains avec des clous. L'article était signé : Anna Politkovskaïa. Je suis allée à la bibliothèque de l'oblast et j'ai demande la collection des Novaïa Gazeta. Je voulais voir les articles d'Anna Politkovskaïa. Je les ai lus. Il me semblait que je commençais à avoir de la fièvre, je touchais mon front mais il était froid, humide, mort. J'ai compris que je ne savais rien de mon pays. Que le poste de télé m'avait menti. »

Devenue journaliste pour Novaïa Gazeta, Elena Kostioutchenko dresse un portrait de son pays en allant à la rencontre des habitants : des jeunes désoeuvrés de la Khovrinka (hôpital inachevé devenu un lieu de squat), des habitants sur la ligne de train Moscou-Saint-Petersbourg, des prostituées, des homosexuels, des Nganassanes... La journaliste parle aussi de Nornickel, des guerres ou de la stérilisation forcée de femmes dans des instituts accueillant des personnes ayant un « retard mental ».

Je dois dire que j'ai eu un peu de mal à me repérer dans le récit qui entremêle souvenirs personnels et témoignages issus de ses reportages. Cela m'a semblé un peu décousu par moments. le contexte dans lequel la journaliste a fait ses rencontres n'est pas toujours introduit et les sauts temporels m'ont un peu perturbée dans ma lecture. Je n'ai pas tout de suite compris les liens entre les différents chapitres. Je pense que si ce livre avait été construit de manière chronologique, j'aurais beaucoup aimé cette lecture. C'est cela dit un ouvrage très intéressant.

J'ai ressenti beaucoup d'émotions lorsqu'elle évoque ses collègues de Novaïa Gazeta : « Les photos d'Igor Domnikov, de Iouri Chtchekotchikhine, d'Anna Politkovskaïa, de Stanislav Markelov, d'Anastassia Babourova, de Natalia Estemirova sont accrochées au mur au-dessus de la table de réunion. Chaque fois qu'on y ajoutait un nouveau portrait, nous faisions en sorte qu'il n'y ait pas de place pour un autre. Quand on ne peut pas se protéger ni protéger les siens, on devient superstitieux. Mais les meurtres survenaient quand même, les visages en noir et blanc se rapprochaient, il y avait toujours de la place pour un visage de plus. » le journal est aujourd'hui interdit en Russie.
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Elena Kostioutchenko est née en Russie, en 1987, dans une famille pauvre. À 14 ans, elle devient journaliste et travaille pour Novaïa Gazeta, le principal journal indépendant de Russie. En 2011, elle affiche ouvertement son homosexualité, ce qui fait scandale dans le pays. Depuis 2022, le journal dans lequel la journaliste a fait plusieurs reportages sur la guerre en Ukraine est interdit en Russie. Afin d'informer les Russes et le monde sur la réalité de ce conflit et des abus perpétrés au sein de la nation, elle a décidé d'écrire ce livre.

Cet ouvrage se présente comme une dénonciation de l'exclusion que la Russie fait subir à ceux qu'elle considère à la marge. Que ce soit les homosexuels, les handicapés, les personnes âgées ou encore les travailleuses du sexe, ils sont tous abandonnés par leur pays. Les journalistes, quant à eux, sont les grands traîtres de la nation, des cibles dangereuses à abattre à la moindre incartade.

À travers son histoire, Elena Kostioutchenko nous montre les dérives d'une nation, les troubles et les malheurs que la Russie souhaite étouffer. Même si elle sait qu'après avoir écrit tout cela, elle ne pourra jamais retourner dans son pays, elle ne recule pas devant la vérité. Cette journaliste indépendante n'hésite pas à prendre la plume pour dénoncer les horreurs que commet Poutine, tout en gardant sa population dans l'ignorance.

Un récit choc, poignant et aberrant comme les exactions qui se perpétuent en Russie !
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Citations et extraits (7) Voir plus Ajouter une citation
Pour maman le meilleur pays était et reste l'Union soviétique. Elle y a vécu quarante-quatre ans, toute sa jeunesse. Mes voyages à l'étranger la laissent indifférente, elle ne demande ni photographies ni souvenirs. Elle dit : ça ne m'intéresse pas. Elle dit: tu n'as pas idée de ce que c´est, d'aller où tu veux et d'être partout chez toi. Elle a voyagé en Géorgie, en Ukraine, en Lettonie, en Estonie, en Lituanie, en Biélorussie - et tout ça, c'était un seul pays. Elle dit: je n'arrive pas à croire qu'aujourd'hui ce n'est plus comme ça.

Mais maman se souvient surtout de la Crimée. Depuis mon enfance, j'ai gardé ses récits en mémoire – une presqu'île féerique. La mer toute chaude, le ciel tout bleu, les falaises - certaines sont blanches. Les palais sont de vrais palais, tous différents. Les ruines de la ville grecque antique, les colonnes au milieu d'un désert. Aller en Crimée était le rêve de tout Soviétique. On en plaisantait, on disait que c'était la plage principale de l'URSS. Mais il ne s'agissait pas seulement de la plage, non ! Toute la péninsule était enchantée, presque irréelle.
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Elle (Anna Politkovskaïa) est arrivée à Novaïa Gazeta en 1999, elle avait 41 ans. La seconde guerre de Tchétchénie venait tout juste d'éclater. Anna a passé les sept ans qui ont suivi à faire des allers-retours en Tchétchénie. Cadavres de Tchétchènes, cadavres de soldats, tortures, viols, meurtres, ratissages, enterrements, exhumations, exécutions, arrestations – article après article, article après article. Elle en signait un dans chaque numéro et souvent même plusieurs. Elle n'a jamais refusé d'agir sous prétexte d'être journaliste. Au contraire. Elle a fait évacuer une maison de retraite oubliée dans Grozny sous les bombes : quatre-vingt-onze personnes âgées, hommes et femmes. Elle récupérait les effets personnels des soldats tués en Tchétchénie et les portait à leurs proches. Elle a négocié avec les terroristes qui s'étaient emparés d'un théâtre à Moscou et apporté de l'eau aux otages. Elle avait décollé pour Beslan afin de participer aux négociations là-bas aussi, mais elle a été empoisonnée à bord de l'avion.
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Il reste sept cents Nganassanes.
C'est le peuple le plus septentrional de notre continent. Ils n'ont jamais été nombreux. Mais il y a trente ans, ils étaient deux fois plus : mille trois cents. Ce sont les descendants d'un peuple premier qui chassait le renne sauvage du Grand Nord. Leur culture est vraiment très ancienne : les principales figures de leur panthéon ne sont pas des hommes-dieux, mais des « mères » : l'eau, la glace souterraine, le feu, la terre.

Au tout début du XVIIe siècle, les Russes les ont soumis au iassak, un « impôt » en fourrures. Pour ce faire, ils prenaient les plus estimés et respectés des leurs en otage et demandaient une rançon contre leur vie. Les Nganassanes n'étaient pas pressés de se soumettre aux Russes. Il ya eu des soulèvements. Mais ce petit peuple n'était pas de taille à résister. Leur plus grande révolte, en l666, s'est soldée par le meurtre de trente Russes, « hommes de service et chasseurs », et de quatre Toungouses. Les coupables furent pendus.

La sédentarisation a été imposée aux Nganassanes par décret gouvernemental. Le pouvoir soviétique a « sédentarisé » en masse et en tous lieux les tribus et les peuples dont «la civilisation nomade» était « par nature incompatible » avec l'idée de société communiste. Dans les années 1930, on leur a construit des zones d'habitation, des villages loin de leurs routes de transhumance, plus au sud, sur les terres d'un autre petit peuple, les Dolganes. Désormais, ces villages sont mixtes, moitié nganassanes, moitié dolganes. Les Russes, ici, restent les représentants du pouvoir de Moscou : le « maire», le policier, l'aide-soignant, le professeur. Les Nganassames habitent encore ces villages : Oust-Avam et Volotchanka. Ils vivent du poisson qu'ils pêchent et du renne qu'ils chassent. Mais il n'y a pas de poisson cette année, et il y a trois ans que les rennes sont partis pour d'autres terres.
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J'avais récemment pris conscience que j'étais lesbienne, j'étais tombée amoureuse, avait déclaré mon amour et avait été repoussée ; je pleurais et cherchais sur Google comment guérir de l'homosexualité. Apparemment, on ne pouvait pas.J'ai rassemblé mes forces et j'ai décidé de m'organiser en conséquence _ comme font les gens en fauteuil roulant, les sourds, les diabétiques, les malades du sida. Il fallait que j'apprenne à être lesbienne.
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J'étais fière d'écrire sur des sujets d'adultes et je me considérais comme une journaliste. Puis, par hasard, j'ai acheté un numéro de Novaïa Gazeta. Je l'ai ouvert sur un article à propos de la Tchétchénie. On parlait d'un gamin qui interdisait à sa mère d'écouter des chansons russes à la radio. Parce que les militaires russes avaient emmené son père, puis avaient rendu son cadavre avec le nez coupé. Dans l'article il y avait les mots «nettoyage», «point de filtrage». Dans le village de Mesker-lourte les militaires ont tué trente-six personnes. Ils ont crucifié un homme (il a survécu), transpercé ses mains avec des clous. L'article était signé : Anna Politkovskaïa. Je suis allée à la bibliothèque de l'oblast et j'ai demande la collection des Novaïa Gazeta. Je voulais voir les articles d'Anna Politkovskaïa. Je les ai lus. Il me semblait que je commençais à avoir de la fièvre, je touchais mon front mais il était froid, humide, mort. J'ai compris que je ne savais rien de mon pays. Que le poste de télé m'avait menti.
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