Rivages

J'ai découvert ce livre grâce à l'opération masse critique de Babelio, et je ne regrette pas de l'avoir lu.
Le début ne prend pas la forme d'une discussion mais plutôt d'une exposition de la situation qui nous entraînera tout au long de l'histoire - exposition collective avec des personnages articulés comme un choeur dont les réponses font écho au conte du personnage principal, et qui donnent immédiatement la dimension musicale que l'on retrouvera dans toute la pièce. Ce choix illustre un risque majeur : celui de n'avoir pas de réels personnages secondaires, qui ne bénéficient pas d'une caractérisation (ni dans leurs mots, ni dans leur façon de parler). Ici, il semble être en cohérence avec les intentions de l'auteur : exposer ce que l'on pourrait presque nommer un mode d'emploi, une ressource doublement didactique (dans les faits qui sont évoqués et expliqués clairement, mais aussi dans la pensée philosophique que l'on peut en tirer) ; en clair : un enseignement sur l'Histoire de l'esclavage et ses conséquences actuelles. le récit met en lumière plusieurs tiraillements : d'abord celui que l'on ressent entre origines et pays actuel, entre coupables et victimes, mais aussi celui de dynamiques générationnelles qui s'entrechoquent et peinent à se comprendre sur le traitement du passé.
Si cela peut parfois donner l'impression d'une récitation de cours (une manière de dénoncer l'apprentissage mécanique - donc pas assez humain - qui en est fait à l'école?), il en reste une précieuse réflexion sur L Histoire...en forme d'histoire.

Avoir pour nom de famille celui d'un petit village de Normandie quand on habite le Finistère voilà qui intrigue Charline. A la naissance de sa fille, une petite tache sur le dos du bébé l'incite à s'interroger sur ses origines. Malheureusement son grand-père ne lui donne aucune indication sinon la Martinique de ses propres parents.
La pièce est écrite pour être jouée en extérieur dans un paysage de bord de mer. Et je pense que ce n'est pas un élément anodin qui m'a manqué à la lecture.
La recherche de ses origines et l'histoire de l'esclavage constituent le corpus du texte et c'est intéressant.
Cela nous inviterait presque à nous pencher sur notre généalogie.

J'avais lu du même auteur "Blockhaus" qui avait été un véritable coup de coeur, c'est donc avec délectation que je me plongeais dans cette nouvelle pièce de théâtre.


Comme dans ma précédente lecture, il y est question de racines, de temps qui passe et des marques que L Histoire laisse sur notre propre histoire.

Quelques questions plus philosophiques alimentent cette pièce : pouvons nous nous construire sans connaître notre histoire ?
Le colonialisme a détruit des êtres humains et impacté durablement les générations suivantes : en anonymisant une partie de la population, les descendants des esclaves n'ont pas connaissance de leur passé, de leur généalogie et accès à leur histoire.


J'ai donc également beaucoup aimé cette pièce, cela me conforte dans l'idée qu'il faut que je lise les autres livres déjà parus de cet auteur.